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avait le teint blanc, les cheveux un peu longs par derrière et tombant sur le cou, ce qui était en lui un usage de famille. Son visage était beau, mais sujet à se couvrir subitement de boutons; ses yeux étaient fort grands, et, chose étonnante, ils voyaient aussi la nuit et dans les ténèbres, mais pendant peu de temps et quand il venait de dormir; après quoi sa vue s'obscurcissait peu à peu. Il marchait la tête immobile et baissée, d'un air chagrin, et le plus souvent en silence. Il ne disait mot à ceux qui l'entouraient; ou s'il leur parlait, ce qui était très-rare, c'était avec lenteur, et avec une certaine gesticulation des doigts, pleine d'afféterie. Ces habitudes désagréables et arrogantes avaient été remarquées par Auguste, qui essaya plus d'une fois de les excuser auprès du peuple et du sénat, « comme des défauts venant de la nature et non du caractère. Il jouit d'une santé à peu près inaltérable pendant presque tout le temps de son règne, quoique, depuis l'âge de trente ans, il la gouvernât à sa guise, sans l'aide ni le conseil d'aucun médecin.

LXIX. Il avait d'autant moins de zèle pour les dieux et la religion, qu'il s'était adonné à l'astrologie, et qu'il était persuadé que tout se conduit par le destin. Toutefois, il avait singu lièrement peur du tonnerre; et quand le ciel était orageux, il portait sur sa tête une couronne de laurier, l'opinion commune attribuant à cet arbuste la vertu d'écarter la foudre.

LXX. Il cultiva avec ardeur les lettres grecques et latines, et il choisit pour modèle, parmi les orateurs de Rome, Messala Corvinus, dont il avait admiré, tout jeune encore, la vieillesse laborieuse. Mais il obscurcissait son style à force

Colore erat candido, capillo pone occipitium summissiore, ut cervicem etiam obtegeret, quod gentile in illo videbatur facie honesta: in qua tamen crebri el subiti tumores, cum prægrandibus oculis, et qui, quod mirum esset, noctu etiam et in tenebris viderent, sed ad breve, et quum primum a somno patuissent; deinde rursum hebescebant. Incedebat cervice rigida et obstipa: adducto fere vultu, plerumque tacitus : nullo aut rarissimo etiam cum proximis sermone, eoque tardissimo, nec sine molli quadam digitorum gesticulatione. Quæ omnia ingrata, atque arrogantiæ plena, et animadvertit Augustus in eo, et excusare tentavit sæpe apud senatum ac populum, professus, << naturæ vitia esse, non animi. » Valetudine prosperrima usus est, tempore quidem principatus pæne toto prope illæsa; quamvis a tricesimo ætatis anno arbitratu eam suo rexerit, sine adjumento consilio ve medicorum.

LXIX. Circa deos ac religiones negligentior; quippe addictus mathematicæ, plenusque persuasionis, cuncta fato agi. Tonitrua tamen præter modum expavescebat : et turbatiore cælo nunquam non coronam lauream capite gestavit, quod fulmine afflari negetur id genus frondis.

LXX. Artes liberales utriusque generis studiosissime coluit. In oratione latina secutus est Corvinum Messalam, quem senem adolescens observaverat. Sed affectatione et

d'affectation et de formes bizarres : ce qu'il disait d'abondance valait quelquefois mieux que ce qu'il avait médité. Il composa un poëme lyrique, intitulé Plaintes sur la mort de L. César. Il écrivit aussi des poésies grecques, dans lesquelles il imita Euphorion, Rhianus et Parthénius, auteurs qui faisaient ses délices, et dont il fit placer les ouvrages et les portraits dans les bibliothèques publiques, parmi les plus illustres des écrivains anciens. Aussi vit-on la plupart des savants lui adresser à l'envi des commentaires sur ces poëtes. Il eut surtout pour l'histoire de la fable un goût qui allait jusqu'au ridicule et à l'absurdité. Ainsi, pour éprouver le savoir des grammairiens, dont il faisait, comme nous l'avons dit, sa société habituelle, il leur posait des questions du genre de celles-ci : « Quelle était la mère d'Hécube? Quel était le nom d'Achille, parmi les jeunes filles? Que chantaient ordinairement les Sirènes? Le jour qu'il entra dans le sénat pour la première fois après la mort d'Auguste, il crut, pour satisfaire à la fois à la piété filiale et à la religion, devoir imiter le sacrifice que Minos avait jadis offert après la mort de son fils, c'est-à-dire sacrifier avec le vin et l'encens, mais sans joueur de flûte.

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LXXI. Quoiqu'il parlât avec facilité la langue grecque, il ne s'en servait pas dans toutes les occasions. Il s'en abstenait surtout dans le sénat; et même y ayant un jour employé le mot monopole, il demanda pardon pour cette expression, d'origine étrangère. Un autre jour, comme on lisait devant lui un décret des sénateurs où se trouvait le mot grec qui signifle incrustations en or, il fut d'avis que l'on changeât ce terme étranger, et qu'on le remplaçât par une

morositate nimia obscurabat stilum ut aliquanto ex tempore, quam a cura, præstantior haberetur. Composuit et carmen lyricum, cujus est titulus, Conquæstio de L. Cœsaris morte. Fecit et græca poemata, imitatus Euphorionem, et Rhianum, et Parthenium: quibus poetis admodum delectatus, scripta eorum et imagines publicis bibliothecis inter veteres et præcipuos auctores dedicavit : et ob hoc plerique eruditorum certatim ad eum multa de his ediderunt. Maxime tamen curavit notitiam historiæ fabularis usque ad ineptias atque derisum. Nam et grammaticos, quod genus hominum præcipue, ut diximus, appetebat, ejusmodi fere quæstionibus experiebatur: « Quæ mater Hecuba: Quod Achilli nomen inter virgines fuisset : Quid Sirenes cantare sint solita?» Et quo primum die, post excessum Augusti, curiam intravit; quasi pietati simul ac religioni satisfacturus, Minois exemplo, thure quidem ac vino, verum sine tibicine, supplicavit, ut ille olim in morte filii.

LXXI. Sermone græco, quamquam alias promptus et facilis, non tamen usquequaque usus est; abstinuitque maxime in senatu, adeo quidem, ut monopolium nominaturus, prius veniam postularit, quod sibi verbo peregrino utendum esset. Atque etiam in quodam decreto patrum, quum tuổλnua recitaretur, commutandam cen

chait à interroger son pouls, le fit rester, le pria de se rasseoir, et prolongea le souper. Il ne s'abstint même pas, ce jour-là, de l'usage où il était de se tenir debout, après le repas, au milieu de la salle à manger, avec un licteur à côté de lui, pour recevoir les adieux de tous les convives et leur faire les siens.

expression latine; ou, s'il n'y en avait pas, que | l'on eût recours à une périphrase. Il défendit à un soldat, à qui l'on demandait en grec son témoignage, de répondre autrement qu'en latin. LXXII. Pendant tout le temps de sa retraite, il n'essaya que deux fois de rentrer dans Rome. La première, il vint, sur une trirème, jusqu'aux jardins voisins de la Naumachie; des sol- LXXIII. Cependant ayant lu dans les actes dats postés sur les deux rives du Tibre avaient du sénat « que l'on avait renvoyé absous, sans ordre d'écarter tous ceux qui viendraient au-de-même les entendre,» plusieurs accusés contre vant de lui. La seconde, il s'avança par la voie Appienne jusqu'à sept milles de Rome; mais il ne fit qu'en regarder les murs, et retourna sur ses pas. Un prodige l'avait effrayé cette fois-là; car, au premier voyage, on ne sait pas bien quelle fut la cause de son retour. Il avait un serpent, de l'espèce des dragons, qu'il élevait pour son plaisir et qu'il nourrissait de sa main : il le trouva mangé par des fourmis; et un augure l'avertit alors de redouter les forces de la multitude. Il revint donc à la hâte en Campanie, et tomba malade à Asture; puis, se sentant un peu mieux, il poursuivit jusqu'à Circéies. Là, pour ne donner aucun soupçon de sa maladie, il assista à des jeux militaires, et même il lança desjavelots contre un sanglier lâché dans l'arène. Mais ces efforts lui donnèrent un point de côté; l'air le saisit comme il avait chaud, et il retomba dangereusement malade. Cependant il se soutint encore quelque temps; et s'étant fait porter jusqu'à Misène, il ne retrancha rien de son genre de vie ordinaire, pas même les festins ni ses autres plaisirs; soit intempérance, soit dissimulation. Un jour que, sortant de table et au moment de le quitter, le médecin Chariclès lui avait pris la main pour la baiser, Tibère, pensant qu'il cher

suit vocem, et pro peregrina nostratem requirendam, ant, si non reperiretur, vel pluribus, et per ambitum verborum, rem enunciandam. Militem quoque græce¡ testimonium interrogatum, nisi latine respondere vetuit.

LXXII. Bis omnino toto secessus tempore, Romam redire conatus, semel triremi usque ad proximos Naumachiæ bortos subvectus est, disposita statione per ripas Tiberis, quæ obviam prodeuntes summoveret; iterum Appia usque ad septimum lapidem, sed prospectis modo, nec aditis Urbis moenibus, rediit; primo, incertum, qua de causa; postea, ostento territus. Erat ei in oblectamentis serpens draro, quem ex consuetudine manu sua cibaturus, quum consumtum a formicis invenisset, monitus est, ut vim multitudinis caveret. Rediens ergo propere Campaniam, Asturæ in languorem incidit: quo paulum levatus Circeios pertendit. Ac ne quam suspicionem infirmitatis darel, castrensibus ludis non tantum interfuit, sed etiam missum in arenam aprum jaculis desuper petiit: statimque latere convulso, et, ut exæstuarat, afflatus aura, viorem recidit morbum. Sustentavit tamen aliquamdiu, quamvis Misenum usque devectus nihil ex ordine quotaliano prætermitteret, ne convivia quidem ac ceteras voluptates, partim intemperantia, partim dissimulatione. Nam Chariclem medicum, quod commeatu abfuturus, e

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lesquels il s'était borné à écrire qu'ils étaient nommés par un dénonciateur, il pensa en fremissant qu'on méprisait son autorité; et il voulut regagner Caprée, de quelque manière que ce fût, n'osant rien entreprendre qu'à l'abri de ses rochers. Mais, retenu par les vents contraires et par les progrès de la maladie, il s'arrêta dans une maison de campagne de Lucullus, et il y mourut dans la soixante-dix-huitième année de son âge et la vingt-troisième de son règne, le dix-sept des calendes d'avril (1), sous le consulat de Cn. Acerronius Proculus et de C. Pontius Nigrinus. Il y en a qui croient que Caligula lui avait donné un poison lent; d'autres, qu'on lui refusa à manger, dans un moment où la fièvre l'avait quitté; d'autres enfin, qu'on l'étouffa sous un matelas, parce que, revenu à lui-même, il réclamait son anneau, qu'on lui avait enlevé pendant sa défaillance. Sénèque a écrit que, sentant sa fin approcher, il avait ôté son anneau, comme pour le donner à quelqu'un; qu'après l'avoir tenu quelques instants, il l'avait remis à son doigt et était demeuré longtemps immobile, la main gauche fortement serrée; que tout à coup il avait appelé ses esclaves, et que, personne ne lui ayant

(1) Le seize mars,

convivio egrediens, manum sibi osculandi causa apprehendisset, existimans tentatas ab eo venas, remanere ac recumbere hortatus est, cœnamque protraxit. Nec absti nuit consuetudine, quin tunc quoque instans in medio triclinio, adstante lictore, singulos valere dicentes appellaret.

LXXIII. Interim, quum in actis senatus legisset, « dimissos ac ne auditos quidem quosdam reos,» de quibus strictim, et nihil aliud, quam nominatos ab indice, scripserat; pro contemto se habitum fremens, repetere Ca. preas quoquo modo destinavit, non temere quicquam, nisi ex tuto ausurus. Sed et tempestatibus, et ingravescente vi morbi retentus, paullo post obiit in villa Lucullana, octavo et septuagesimo ætatis anno, tertio et vicesimo imperii, septimo decimo kalendas aprilis, Cn. Acerronio Proculo, C. Pontio Nigrino, consulibus. Sunt, qui putent, venenum ei a Caio datum lentum atque tabificum. Alii, in remissione fortuitæ febris cibum desideranti negatum : nonnulli, pulvinum injectum, quum extractum sibi deficienti anulum mox resipiscens requisisset. Seneca eum scribit, intellecta defectione, exemtum anulum, quasi alicui traditurum, parumper tenuisse : dein rursus aptasse digito et, compressa sinistra manu, jacuisse diu immobilem: subito vocatis ministris, ac nemine respondente, consurre;

répondu, il s'était levé précipitamment; mais | dixième jour; or, quelques malheureux devaient

que, les forces venant à lui manquer, il était tombé mort auprès de son lit.

LXXIV. Au dernier anniversaire de sa naissance, il vit en songe Apollon Téménite, dont il avait fait venir de Syracuse l'immense et admirable statue, pour la placer dans la bibliothèque d'un nouveau temple, et qui lui déclara « que ce ne serait pas lui qui la consacrerait. »> Peu de jours avant sa mort, un tremblement de terre fit tomber, à Caprée, la tour du phare. A Misène, des cendres chaudes et des charbons qu'on avait apportés pour échauffer la salle à manger, s'étant éteints et refroidis, se rallumèrent tout à coup sur le soir, et brûlèrent jusque bien avant dans la nuit. LXXV. A la première nouvelle de sa mort la joie fut telle dans Rome, que tout le monde courait dans les rues, les uns criant: «Tibère dans le Tibre!» les autres conjurant « la Terre et les dieux Månes de n'accorder de place à son ombre que parmi les impies; » d'autres enfin menaçant son cadavre du croc et des Gémonies. Au souvenir de ses anciennes barbaries se joignait le ressentiment d'une atrocité récente. Un sénatus-consulte avait statué que le supplice des condamnés serait toujours différé jusqu'au

xisse, nec procul a lectulo, deficientibus viribus, concidisse. LXXIV. Supremo natali suo Apollinem Temenitem, et amplitudinis et artis eximiæ, advectum Syracusis, ut in bibliotheca templi novi poneretur, viderat per quietem affirmantem sibi, « Non posse se ab ipso dedicari. » Et ante paucos, quam obiret, dies turris Phari terræ motu Capreis concidit. Ac Miseni cinis e favilla et carbonibus, ad calfaciendum triclinium illatis, exstinctus et jam diu frigidus exarsit repente prima vespera, atque in multam noctem pertinaciter luxit.

LXXV. Morte ejus ita lætatus est populus, ut ad primum nuncium discurrentes, pars, «Tiberium in Tiberim, » clamitarent; pars « Terram matrem deosque Manes orarent, ne mortuo sedem ullam, nisi inter impios, darent: >> alii uncum et Gemonias cadaveri minarentur, exacerbati super memoriam pristinæ crudelitatis etiam recenti atrocitate. Nam quum senatusconsulto cautum esset, ut pœna damnatorum in decimum semper diem differretur, forte

être exécutés précisément le jour où l'on apprit la mort de Tibère, et ils imploraient la pitié publique. Mais comme il n'y avait personne à qui l'on pût s'adresser, Caïus étant encore absent, leurs gardiens, craignant de rien faire contre la règle, les étranglèrent, et les jetèrent aux Gémonies. La haine s'en accrut contre le tyran, dont la barbarie se faisait encore sentir après sa mort. Quand on enleva son corps de Misène, la plupart des habitants crièrent « qu'il fallait aller le brûler ignominieusement dans l'amphithéâtre d'Atella; mais des soldats le portèrent à Rome, et l'y brûlèrent avec les cérémonies ordinaires.

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LXXVI. Il avait fait son testament deux ans avant sa mort : il en existait deux exemplaires, l'un de sa main, l'autre de celle d'un affranchi; mais tous deux parfaitement semblables, et signés des noms les plus obscurs. Il instituait héritiers, par portions égales, ses petits-fils Caius et Tibère, (qui l'étaient, le premier par Germanicus, le second par Drusus) et il les substituait l'un à l'autre. Il laissait aussi des legs à beaucoup de personnes, entre autres aux Vestales, à tous les soldats, au peuple romain, et aux inspecteurs des quartiers.

accidit, ut quorundam supplicii dies is esset, quo nunciatum de Tiberio erat. Hos implorantes hominum fidem, quia, absente adhuc Caio, nemo exstabat, qui adiri interpellarique posset, custodes, ne quid adversus constitutum facerent, strangulaverunt, abjeceruntque in Gemonias. Crevit igitur invidia, quasi etiam post mortem tyranni sævitia permanente. Corpus ut moveri a Miseno cœpit, conclamantibus plerisque, « Atellam potius deferendum, et in amphitheatro semiustulandum, >> Romam per milites deportatum est, crematumque publico funere.

LXXVI. Testamentum duplex ante biennium fecerat : alterum sua, alterum liberti manu, sed eodem exemplo ; obsignaveratque etiam humillimorum signis. Eo testamento heredes æquis partibus reliquit, Caium ex Germa nico, et Tiberium ex Druso, nepotes; substituitque invicem. Dedit et legata plerisque inter quos virginibus Vestalibus, sed et militibus universis, plebique romanæ viritim, atque etiam separatim vicorum magistris.

CAIUS CALIGULA.

SOMMAIRE.

I. Exploits et mort de Germanicus, père de Caligula. II. I périt victime de la haine de Tibère et de Pison. -III. Son portrait. Ses vertus, ses talents. Sa modération. IV. Sa popularité. — V. Douleur universelle causée par sa mort. VI. Marques de deuil à Rome. VII. Mariage et enfants de Germanicus. VIII. Opinions diverses sur le lieu où naquit Caligula. — IX. Il inspire une grande affection aux soldats. - X. Sa jeunesse. Sa dissimulation.- XI. Ses inclinations basses et cruelles. XII. Il est soupçonné d'avoir fait périr Tibère. - XIII. Tous les vœux l'appellent à l'empire.

XV. Honneurs XVI. II augmente

· XVII. Ses con.

- XIV. Il est proclamé empereur. qu'il affecte de rendre à sa famille. par tous les moyens sa popularité. sulats. Ses largesses au peuple. XVIII. Ses specta. cles. XIX. I jette un pont sur le golfe de Baies. -XX. Ses spectacles dans les provinces, où il fonde aussi des concours. — XXI. Ses constructions. Ses projets. XXII. Son orgueil. Il se fait dieu. XXIII. Ses attentats contre sa famille. XXIV. Son commerce cri minel avec ses sœurs. XXV. Ses adultères. — XXVI. Ses meurtres. Son mépris pour tous les ordres de l'État. XXVII. XXXV. Ses cruautés. — XXXVI. Ses débauches.-XXXVII. Ses profusions.- XXXVIII. Ses exactions. - XXXIX. Ses vols dans les ventes publiques. XL. Il lève de nouveaux impôts. XLL

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Il établit un mauvais lieu dans le palais. Ses profits au jeu. XLII. Sa passion pour l'argent. XLIII. Son expédition en Germanie. - XLIV. Ses exploits.-XLV. Ses supercheries pour faire croire à sa bravoure et à des victoires.-XLVI. Ses immenses préparatifs de guerre, pour ramasser des coquillages. XLVII. Son triomphe. XLVIII. Ses desseins contre les légions révoltées après la mort d'Auguste. - XLIX. Ses menaces contre le sénat. Il se contente de l'ovation. Crimes qu'il méditait. - L. Son portrait. Ses infirmités. Ses insomnies.-LI. Ses fanfaronnades et ses lâchetés. -LII. Sa manière de s'habiller. — LIII. Son genre d'éloquence.- LIV. Sa passion pour le chant, la danse, les courses de chars et les combats de gladiateurs. - LV. Ses préfé

rences et ses antipathies dans les jeux du cirque. Ses folies pour le cheval Incitatus. - LVI. Conspirations formées contre lui. LVII. Présages de sa mort. - LVIII. Il est tué par Chéréa et d'autres conjurés. - LIX. Ses funérailles. Son exhumation. Mort de Césonie et de sa fille. nouvelle de sa mort. Le sénat songe à rétablir la liberté.

-

LX. Incrédulité générale à la

1. Germanicus, père de C. César et fils de Drusus et de la plus jeune Antonia, fut adopté par Tibère, son oncle paternel. Il exerça la questure cinq ans avant l'âge exigé par les lois, et le consulat immédiatement après. Envoyé en Germanie pour y prendre le commandement de l'armée, il contint, avec autant d'énergie que de fidélité, toutes les légions, qui, à la première nouvelle de la mort d'Auguste, refusaient obstinément de reconnaître Tibère pour empereur, et lui déféraient à lui-même le gouvernement de l'État. Il vainquit ensuite l'ennemi, et revint triompher à Rome. On le créa consul pour la seconde fois; mais, avant que d'entrer en charge, il fut, pour ainsi dire, chassé de Rome par Tibère, qui l'envoya pacifier l'Orient. Après avoir vaincu le roi d'Arménie, et réduit la Cappadoce en province romaine, il mourut à Antioche, à l'âge de trente-quatre ans, d'une maladie de langueur, qui donna lieu à des soupçons d'em

CAIUS CALIGULA.

I. Gormanicus, C. Cæsaris pater, Drusi et minoris Antoniæ filius, a Tiberio patruo adoptatus, quæsturam quinquennio ante, quam per leges liceret, et post eam consulatum stalim gessit: missusque ad exercitum in Germaniam, excessu Augusti nunciato, legiones universas, imperatorem Tiberium pertinacissime recusantes, et sibi summam reipublicæ deferentes, incertum, constantia an pietate majore, compescuit; atque, hoste mox devicto, triumphavit. Consul deinde iterum creatus, ac prius quam honorem iniret, ad componendum Orientis statum expul Eus, quum Armeniæ regem devicisset, Cappadociam in provinciæ formam redegisset, annum ætatis agens quartum et tricesimum diutino morbo Antiochiæ obiit, non sine veneni suspicione. Nam præter livores, qui toto corpore erant, et spumas, quæ per os fluebant, cremati quoque for inter ossa incorruptum repertum est: cujus ea natura existimatur, ut tinctum veneno igne confici nequeat.

poisonnement. En effet, outre les taches livides qu'il avait sur tout le corps, et l'écume qui lui sortait de la bouche, on remarqua, lorsqu'il fut brûlé, que son cœur était resté intact; or, l'on croit communément que le coeur imprégné de poison résiste à l'action du feu.

II. On attribua sa mort à la haine secrète de Tibère, et à l'active complicité de Cn. Pison. Ce Pison, investi, vers le même temps, du gouvernement de la Syrie, se croyait, disait-il, obligé, par une impérieuse nécessité, d'être l'ennemi du père ou du fils. Il ne cessa de faire endu. rer à Germanicus, même pendant sa maladie, les plus sanglants outrages, par ses discours et par sa conduite. Aussi, à son retour à Rome, pensa-t-il être mis en pièces par le peuple; et il fut condamné à mort par le sénat.

III. Germanicus possédait, on le sait, tous les avantages du corps et toutes les qualités de l'âme, à un degré où personne ne les eut jamais : une valeur et une beauté singulières; une grande supériorité d'éloquence et de savoir dans les deux langues; une admirable bonté d'âme, et, avec une rare envie de plaire et d'être aimé, de merveilleux talents pour y réussir. Le seul défaut qui déparât sa beauté était d'avoir les jambes un peu grêles; mais il le corrigea par l'habitude de monter à cheval après ses repas. Il attaqua corps à corps et tua de sa main nombre d'ennemis. Il plaida des causes, même après son triomphe. Entre autres monuments de ses études, il nous a laissé des comédies grecques. Il était également affable dans la vie publique et dans la vie privée. Il entrait sans licteurs dans les villes libres et alliées de Rome. Voyait-il quelque part le tombeau d'un grand homme, il y offrait des sacrifices à ses månes. Voulant réunir dans un même sépulcre les ossements, depuis longtemps dispersés, des soldats égorgés dans la défaite de

11. Obiit autem, ut opinio fuit, fraude Tiberii, ministerio et opera Cn. Pisonis: qui sub idem tempus Syriæ præpositus, nec dissimulans, offendendum sibi aut patrem, aut filium, quasi plane ita necesse esset, etiam ægrum Germanicum gravissimis verborum ac rerum acerbitatibus, nullo adhibito modo, affecit: propter quæ, ut Romnam rediit, pæne discerptus a populo, a senatu capitis damnatus est.

III. Omnes Germanico corporis animique virtutes, et quantas nemini cuiquam, contigisse, satis constat : for. mam et fortitudinem egregiam, ingenium in utroque eloquentiæ doctrinæque genere præcellens, benevolentiam singularem, conciliandæque hominum gratiæ, ac promerendi amoris mirum et efficax studium. Formæ minus congruebat gracilitas crurum, sed ea quoque paulatim repleta, assidua equi vectatione post cibum: Hostem cominus sæpe percussit. Oravit causas etiam triumphalis; atque inter cetera studiorum monumenta reliquit et comedias græcas. Domi forisque civilis: libera ac fœderata oppida sine lictoribus adibat. Sicubi clarorum viroruin se

Varus, il les recueillit de sa main et les y porta lui-même. Il n'opposait à ses détracteurs, quelles que fussent la cause et la violence de leur inimitié, que la douceur et la modération. Pison avait cassé ses décrets, et maltraité ses clients; il ne lui témoigna enfin de ressentiment que quand il le vit employer aussi contre lui les maléfices et d'odieuses pratiques de religion. Et alors même il se contenta de renoncer publiquement à son amitié, selon l'ancienne coutume, et de confier aux siens sa vengeance, s'il lui arrivait malheur.

IV. Il recueillit le plus beau fruit de tant de vertus, et inspira une telle estime, un tel amour à ses proches, qu'Auguste (sans parler des autres) balança longtemps s'il ne le choisirait pas pour son successeur, et le fit adopter par Tibère. Il jouissait aussi à un tel point de la faveur populaire, que, selon le témoignage de la plupart des auteurs, la foule immense qui, à son arrivée ou à son départ, se précipitait à sa rencontre ou à sa suite, lui fit courir plus d'une fois risque de la vie. Quand il revint de Germanie, après y avoir apaisé les séditions, toutes les cohortes prétoriennes allèrent au-devant de lui, quoique cet ordre n'eût été donné qu'à deux d'entre elles; et les habitants, de tout sexe, de tout âge, de toute condition, se répandirent sur sa route jusqu'à vingt milles de Rome.

V. Mais des témoignages d'affection plus grands encore et plus énergiques éclatèrent à sa mort et longtemps après. Le jour où il cessa de vivre, on lança des pierres contre les temples, on renversa les statues des dieux; quelques ci

pulcra cognosceret, inferias Manibus dabat. Casorum clade Variana veteres ac dispersas reliquias uno tumulo humaturus, colligere sua manu, et comportare primus aggressus est. Obtrectatoribus etiam, qualescunque et quantacunque de causa nactus esset, lenis adeo et innoxius, ut Pisoni, decreta sua rescindenti, clientelas divexanti, non prius succensere in animum induxerit, quam veneficiis quoque et devotionibus impugnari se comperisset ac ne tunc quidem ultra progressus, quam ut et amicitiam ei more majorum renunciaret, mandaretque domesticis ultionem, si quid sibi accideret.

IV. Quarum virtutum fructum uberrimum tulit, sic probatus et dilectus a suis, ut Augustus (omitto enim necessitudines reliquas), diu cunctatus, an sibi successorem destinaret, adoptandum Tiberio dederit: sic vulgo favorabilis, ut plurimi tradant, quoties aliquo adveniret, vel sicunde discederet, præ turba occurrentium prosequentiunive nonnunquam eum discrimen vitæ adisse: e Germania vero, post compressam seditionem, revertenti, prætorianas cohortes universas prodisse obviam, quamvis pronunciatum esset, ut duæ tantummodo exirent; populi autem romani sexum, ætatem, ordinem omnem usque ad vicesimum lapidem effudisse se.

V. Tamen longe majora et firmiora de eo judicia in morte ac post mortem exstitere. Quo defunctus est die,

toyens jetèrent dans la rue leurs dieux Lares, ou exposèrent leurs enfants nouvellement nés. On dit même que les barbares, alors en guerre contre nous ou entre eux, consentirent, comme dans un deuil universel, à une suspension d'armes; que quelques princes, en signe d'une profonde douleur, se coupèrent la barbe, et firent raser la tête de leurs femmes; enfin que le roi des rois (1) s'abstint de la chasse et n'admit point les grands à sa table; ce qui, chez les Parthes, équivaut à la clôture des tribunaux parmi

nous.

VI. A Rome, la population, consternée, éperdue, à la première nouvelle de sa maladie, attendait avec anxiété d'autres courriers. Tout à coup, vers le soir, le bruit se répandit, on ne sait comment, que Germanicus était rétabli. Alors on court de toutes parts au Capitole avec des flambeaux et des victimes: on brise, ou peu s'en faut, les portes du temple, dans l'impatience d'offrir aux dieux des actions de grâces. Tibère endormi est réveillé par les cris de joie du dehors, et par des voix qui chantaient : « Rome est sauvée, la patrie est sauvée, Germanicus est sauvé! » Mais lorsque sa mort fut devenue certaine, aucune consola tion, aucun édit ne put mettre de bornes à la douleur publique : elle dura même pendant les fêtes du mois de décembre (2). Les abominations des temps qui suivirent ajoutèrent encore à sa gloire et au regret de sa perte, tout le monde étant persuadé, avec raison, que le respect et la crainte où il tenait Tibère servaient de frein à sa cruauté, qui, en effet, ne tarda pas à éclater.

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lapidata sunt templa, subversæ deum aræ, Lares a quibusdam familiares in publicum abjecti, partus conjugum expositi. Quin et barbaros ferunt, quibus intestinum, quibusque adversus nos bellum esset, velut in domestico communique morore, consensisse ad inducias: regulos quosdam barbam posuisse, et uxorum capita rasisse, ac indicium maximi luctus regum etiam regem et exercitatione venandi, et convictu megistanum abstinuisse, quod apud Parthos justitii instar est.

VI. Romæ quidem, quum ad primam famam valetudinis attonita et moesta civitas sequentes nuncios opperiretur, et repente jam vesperi incertis auctoribus convaluisse tandem percrebruisset, passim cum luminibus et victimis in Capitolium concursum est, ac pæne revulsæ templi fores, ne quid gestientes vota reddere morarentur. Expergefactus e somno Tiberius est gratulantium vocibus, atque undique concinentium, « Salva Roma, salva patria, salvus est Germanicus! » Sed ut demum, fato functum, palam factum est, non solatiis ullis, non edictis inhiberi luctus publicus potuit, duravitque etiam per festos de cembris mensis dies. Auxit gloriam desideriumque defuncti etiam atrocitas insequentium temporum, cunctis nec te mere opinantibus, reverentia ejus ac metu repressam Tiberii sævitiam, quæ mox eruperit.

VII. Habuit in matrimonio Agrippinam, M. Agrippa

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