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Voilà à quoi se réduit dans la pratique cette classification des chevaliers romains sous l'Empire que l'on est allé chercher si loin. Les jeunes gens d'origine sénatoriale sont, comme je l'avais déjà dit, plutôt au-dessus de l'ordre équestre qu'au dedans de cet ordre; voilà pourquoi les auteurs les mentionnent à part et les inscriptions ne leur accordent point le titre de chevaliers equo publico qui ne leur a jamais appartenu.

Cette explication n'est-elle pas plus satisfaisante que celle que M. Mommsen a voulu tirer d'une règle qui, ainsi que je l'ai démontré, n'existe point, puisque ni les principes juventutis, ni les seviri n'y sont soumis?

Ceci va nous permettre d'expliquer une inscription qui a un peu embarrassé M. Mommsen, car elle est tout à fait en opposition avec le principe dont je viens de parler (1):

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L. Fulvio C. fil(io) Popin(iatribu) Aburnio Valenti pontifici praefecto urbi feriarum Latinarum facto ab imp(eratore) Hadriano Augusto, ii c(on)s(ul), iiiviro a(ere) a(rgenti) a(uro) f(lando) f(eriundo), quaest(ori) Augusti, tribuno plebis designato candidato Aug(usti), equo publico, c(larissimus) i(uvenis). D(ecreto) D(ecurionum).

On voit que ce personnage Fulvius Aburnius Valens, un

(1) C. J. L. VI, 1421. La dernière ligne doit se lire decreto decurionum, clarissimo iuveni. Ces derniers mots paraissent avoir été ajoutés après

coup.

jurisconsulte dont les écrits ont été insérés au Digeste, bien qu'étant entré dans la carrière sénatoriale et tribun désigné n'en prend pas moins le titre equo publico, c'est-à-dire le titre de simple chevalier. Au lieu d'y voir une méprise des auteurs ignorants de ce monument honorifique, cette mention nous paraît toute naturelle et conforme à nos explications.

On sait en effet que les fils de sénateurs n'étaient pas les seuls qui arrivassent aux magistratures sénatoriales. Les jeunes gens d'origine équestre possédant le cens sénatorial y parvenaient aussi, soit après avoir reçu le laticlave, soit au moyen de l'allectio ou nomination au Sénat par décret de l'Empereur. Jusqu'à la réception du laticlave, ou jusqu'à l'allectio, ces personnages étaient évidemment dans les rangs des simples chevaliers equo publico. Rien de plus naturel dès lors que de voir figurer ce titre dans leurs inscriptions, tandis qu'on ne le trouve jamais quand il s'agit de personnes d'origine sénatoriale.

Mais pourquoi cette mention n'est-elle pas plus fréquente dans les inscriptions relatives aux personnages de rang équestre devenus sénateurs ? C'est parce que, devenus sénateurs, ils étaient bientôt nommés sévirs (1), et l'on conçoit fort bien qu'ayant obtenu ce titre, ils n'aient point conservé celui d'equo publico qui rappelait leur origine. Mais jusqu'au moment où ils devenaient sévirs, la règle rigoureuse (quoique violée souvent) du cursus honorum devait exiger la mention du titre de chevalier pour bien marquer les divers degrés parcourus. Telle est précisément la situation d'Abur

nius.

On ne saurait donc reprocher aux décurions de la cité qui lui a élevé ce monument d'avoir commis une inexactitude. Ils n'ont eu qu'un tort, c'est de rappeler, contrairement à l'usage, l'origine équestre d'un sénateur. On paraît s'en être

(1) Wilm. 1169: L. Aemilio L. f. Pap. Arcano trib. milit. allecto in amplissimum ordinem ab. imp. Caesare Hadriano Aug. IIIIII vir equitum romanor. De même des allecti inter quaestorios ont été ensuite nommés sévirs. C. J. L. VI, 1530, Orell., 2242.

aperçu plus tard et c'est pourquoi on a ajouté après coup les lettres c. i. pour montrer que ce personnage n'était plus un simple chevalier comme pouvait le faire supposer les mots equo publico, mais bien un membre de l'ordre sénatorial.

Enfin, je ferai remarquer que pour les allecti d'origine équestre, leur qualité de simples chevaliers est implicitement contenue dans les emplois de cet ordre qu'ils ont remplis (1).

- Telle était la composition et l'organisation de l'ordre équestre. J'ajoute que cet ordo pas plus que celui des libertini ou des tribuni aerarii ou des sénateurs n'avait en aucune façon une constitution autonome, comme celle dont jouissaient les collegia. S'il est question dans les auteurs de décisions prises par l'ordre équestre, cela doit s'entendre de vœux exprimés par les chevaliers réunis régulièrement pour telle ou telle cérémonie et non d'un décret valablement rendu par une corporation. Nous verrons bientôt qu'à la différence des collegia le corps des chevaliers ne choisit point ses membres, pas plus les equites que les sévirs ou le prince de la jeunesse. Ce choix est réservé à l'empereur succédant ici aux anciens censeurs de la période républicaine.

§ 4. - Des honneurs et des fonctions attribués aux chevaliers.

Il me paraît indispensable d'indiquer au moins sommairement le rôle dévolu aux chevaliers romains dans la période de l'Empire.

(1) Wilm. 1190: M. Statius Priscus avant de passer dans l'ordre sénatorial a été præfectus cohortis, procurator vigesimae hereditatium, charges qui supposent qu'il est equo publico. On remarquera que, comme Aburnius, il n'a pas été sévir. 1140: C. Cassius qui s'est élevé jusqu'à la préture et à la charge de legatus pro praetore de Sardaigne a débuté par la préfecture d'une cohorte, ce qui marque son origine équestre. Comme les précédents, il n'a pas été sévir.

En premier lieu, ils se distinguent du reste du peuple (plebs dans le sens nouveau de cette expression) par des marques extérieures : l'anneau d'or et l'angusticlave (1). A cet égard il est impossible de trouver dans les auteurs le moindre vestige d'une différence entre les deux prétendues classes de chevaliers, les simples equites et les equites equo publico. Il faut en dire autant du privilège qui leur a été accordé de siéger au théâtre et au cirque aux premiers rangs (2).

Deux fois par an, à la transvectio (15 juillet) et à la fête des Lupercales (15 février), ils sont appelés à figurer dans un brillant cortège, ornés de la trabée (3). En outre ils paraissent dans d'autres céremonies exceptionnelles, telles que les funé railles des empereurs et des princes de la famille impériale (4).

Mais ce n'est point simplement un corps de parade. Les chevaliers, sous l'Empire, ont été appelés à un rôle bien plus considérable. S'ils ne sont plus, comme sous la République, une institution politique et militaire, en revanche, c'est l'administration presque tout entière de l'Empire qui va leur échoir en partage. En effet les attributions nouvelles, si nombreuses, qui appartiennent au chef de l'État, ne pouvant être exercées personnellement par lui, c'est parmi les chevaliers qu'il recrutera ses auxiliaires : les procurateurs financiers, les chefs de l'administration centrale, les gouverneurs des provinces procuratoriennes, etc., en un mot tous les employés de cette nouvelle carrière, la carrière équestre, que j'ai étudiée ailleurs (5).

(1) Plin. 33, 1. Ovide, Trist. 4, 10, 35. Dion Cassius, 38, 14; 56, 31, etc., vita Alex. Sev. 27.

(2) Plut. Cic. 13, Dion Cass. 60, 7. Suét. Claud. 21. Nér. 11. Dom. 8. Martial, passim.

(3) Val. Max. 2, 2, 9: Equestris vero ordinis juventus omnibus annis bis urbem spectaculo sui submagnis auctoribus celebrabat die Luperealium et equitum probatione. Exemple: honneurs accordés à Drusus, fils de Tibère, à ces deux dates; C. J. L. VI, 912. D'après le calendrier de Philocalus, il semble qu'il y avait encore une fête du même genre au 29 mai, jour ainsi désigné : Honor et virtus. Cf. Dion Cassius, 54, 18 et le commentaire de M. Mommsen. (4) Tac. Ann., 2, 83; 3, 71. Dion, 55, 2; 56, 42; 58, 2, etc.

(5) Inst. polit. I., p. 292 et II, p. 205 et s.

En même temps, ils conservent les fonctions de judices dans les procès privés et même pendant deux siècles dans les affaires criminelles (1). Le nombre de ces jurés augmente considérablement, par suite de l'extension, dans tout l'Empire, du nombre des citoyens romains; au lieu de trois décuries, il y en aura désormais cinq. Dans les rangs des judices, il n'y aura plus que des chevaliers.

On voit donc que les attributions des chevaliers romains se sont beaucoup multipliées dans cette période; on s'explique bien dès lors que leur nombre se soit si considérablement

accru.

(1) Inst. polit. II, 474.

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