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les moins estimées (1), On ne saurait affirmer, en termes plus clairs, l'inégalité des tribus. Voyons si tel est bien le résultat qui se dégage du tableau que nous venons de dresser.

Nous ferons remarquer tout d'abord combien nos renseignements sont incomplets.

Pour les municipes, M. Beloch constate lui-même les graves lacunes de sa liste, et quant aux colonies, il suffit de jeter les yeux sur notre premier tableau (p. 10) pour voir qu'il nous manque la tribu de treize colonies sur trente-quatre. C'est donc ici, plus qu'ailleurs, un devoir étroit que de ne conclure qu'avec la plus grande circonspection. Comment, dès lors, serait-il permis d'affirmer, dans notre hypothèse, que les municipes et colonies sont répartis dans la minorité des tribus, lorsque, d'après des résultats si incomplets, on attribue à chaque catégorie de ces communes quatorze ou quinze tribus, c'est-à-dire deux ou trois de moins qu'il n'en faut pour faire la majorité ?

Mais il y a plus: cette manière de compter est inadmissible. A notre avis, il faut faire le total des tribus assignées aux colonies et municipes, non pas séparément, mais ensemble. Cette distinction ne se comprendrait que si l'on pouvait prouver que ces deux sortes de communes ont été traitées différemment au point de vue de la tribu. Mais nous avons démontré le contraire au chapitre précédent et notre tableau ne fait que confirmer cette opinion. Il nous apprend, en effet, que les colonies et municipes sont inscrits dans les mêmes huit ou neuf tribus dont voici les noms: Claudia, Cornelia, Falerina, Oufentina, Pomptina, Stellatina, Terentina, Velina. Les colons et les municipes sont des cives novi, ainsi que nous l'avons démontré ; il n'est donc pas surprenant qu'ils aient été traités de la même façon et qu'on les ait placés dans les mêmes tribus.

Pour savoir dans quelles tribus sont répartis ces cives novi, il faut donc additionner les tribus des deux listes, ce qui nous donne vingt et une ou vingt-deux tribus. Avec les lacunes que (1) P. 24.

nous avons signalées, je crois que l'on peut sans grande témérité affirmer que les novi cives ont été répartis entre les trente et une tribus rurales, et qu'aucune portion de celles-ci n'a éte exclusivement réservée aux cives veteres. Il suffit, pour s'en convaincre, de parcourir les noms des tribus qui ne figurent pas dans notre liste comme ayant reçu des novi cives, colons ou municipes. Les voici: Arniensis, Lemonia, Menenia, Pupinia, Romilia, Sabatina, Voltinia, Voturia. On voit qu'il y en avait six d'anciennes et deux de nouvelles. Si on avait voulu favoriser les cives veteres, on leur aurait évidemment réservé les tribus les plus anciennes qui étaient d'ailleurs tout indiquées les dix-sept premières portant le nom de gentes patriciennes (1).

Les hommes d'État romains auraient pu avoir la pensée de renfermer les novi cives dans la minorité des tribus, s'ils avaient pu redouter qu'ils eussent la majorité. Mais ce danger n'existait pas, car on sait que la création des colonies et l'incorporation des municipes ne se sont pas opérées d'un seul coup, mais à la longue, dans une période de plusieurs siècles; de telle sorte que, lorsque les derniers cives novi sont entrés dans la cité, il y avait longtemps que leurs prédécesseurs étaient confondus avec les anciens citoyens (1).

Cette préoccupation à l'égard des novi cives n'est venue aux Romains qu'à une seule époque de leur histoire, au moment où il a fallu répartir, dans les tribus, les italiques qui avaient reçu le droit de cité à la suite de la guerre sociale. Il s'agissait, en effet, ici, d'un accroissement sans précédent. On en jugera par ces chiffres:

En 639, le recensement accuse 394.336 citoyens romains, 473.000 en 668, et 900.000 en 684, après l'adjonction complète des novi cives (2).

Répartir également dans toutes les tribus ces citoyens plus nombreux que les anciens, ces alliés, qui la veille encore

(1) Sauf la Clustumina.

(2) Borghesi, Euvres, 4, p. 9, avec la note de Mommsen; de Boor, Fasti censorii (Berlin, 1873), p. 22-26.

faisaient échec aux armées romaines, c'était leur donner la majorité dans les assemblées tributes et par conséquent remettre le gouvernement de Rome entre leurs mains. Comment allait-on sortir de ce pas difficile? On hésita quelque temps et finalement on s'arrêta à une mesure fort sage. On distingua entre les socii fidèles et ennemis; à l'égard des premiers on suivit l'ancienne politique et l'on en adopta une nouvelle à l'égard des derniers. Les travaux de MM. Beloch et Kubitschek nous montrent les socii de la première catégorie dans les trente et une tribus rurales et ceux de la seconde dans huit seulement : Arniensis, Clustumina, Fabia, Falerina, Galeria, Pomptina, Sergia, Voltinia (1).

Cette fois, il est bien prouvé que les Romains, en vertu d'un plan arrêté d'avance, ont relégué les novi cives dans la minorité des tribus; mais cela n'est arrivé qu'une seule fois, parce que jamais auparavant ils n'avaient été placés dans la même situation.

Quelle était donc la règle suivie avant la guerre Marsique, relativement à l'inscription des novi cives dans les tribus? Tirait-on la tribu au sort comme cela s'est fait pour les huit tribus des socii appartenant à la catégorie des hostes? Il est difficile de le croire car d'après les tableaux dressés par MM. Beloch et Kubitschek, la colonie ou le municipe est ordinairement assigné à la tribu voisine et nous ne pouvons admettre que le hasard ait été assez intelligent pour amener ce résultat.

Mais, à cette règle, il y a eu un certain nombre d'exceptions. Nous rappellerons notamment que les municipes de Formies et de Fundi ont été assignés à la tribu Aemilia, celui d'Arpinum à la Cornelia; que les colonies de Minturnes et de Sinuesse ont été inscrites dans la Terentina et non dans la Fale

(1) Beloch croit que ces huit tribus ont été désignées par le sort. On y trouve en effet la dernière (Arniensis) et la seconde (Voltinia) dans l'ordo tribuum. S'il en est ainsi, et cette hypothèse n'a rien d'invraisemblable, cela prouve que l'équilibre entre les tribus a été définitivement rompu à cette époque,

rina ou dans l'Oufentina qui étaient beaucoup plus voisines. Ces résultats ne peuvent s'expliquer ni avec le système de MM. Beloch et Kubitschek, ni avec celui du tirage au sort. Il faut donc trouver autre chose.

Voici quelle est notre manière de voir :

Nous avons plus haut émis celte conjecture, que toutes les tribus rurales étaient composées d'une façon analogue, qu'elles étaient sensiblement égales entre elles. Ni les auteurs, ni les monuments ne nous révèlent la moindre trace de distinction entre les dix-sept premières tribus et les quatorze autres ; d'autre part celte égalité du nombre des tribules se justifie et par l'égalité des charges militaires et par l'égalité des droits politiques des tribus. Dès lors, ne sommes-nous pas fondés à croire que l'unique préoccupation du gouvernement romain, quand il se trouvait en présence de nouveaux citoyens à inscrire dans les tribus, était de ne point rompre l'équilibre qui existait auparavant entre elles?

Si cette manière de voir est, comme j'en ai la conviction, conforme à la vérité, il nous sera facile de comprendre et d'expliquer la méthode suivie par les Romains dans la répartition des novi cives entre les tribus.

Cette méthode était des plus simples. Le magistrat romain chargé du recensement commençait, lorsqu'il avait à classer de nouveaux citoyens, par étudier la liste des tribus. Étaientelles toutes au complet, c'est-à-dire à peu près égales, et le nombre des nouveaux citoyens était-il considérable, il décidait alors la création d'une nouvelle tribu destinée à les recevoir. Dans le cas contraire, il les inscrivait dans la tribu la moins peuplée.

On comprend ainsi pourquoi la colonie, le municipe, sont assignés tantôt à une tribu récente, tantôt à une tribu ancienne. On comprend encore mieux pourquoi telle ou telle cité n'est pas inscrite dans une tribu voisine, mais dans une tribu éloignée. Ainsi de Formies, Fundi, Arpinum, assignées à des tribus anciennes, c'est-à-dire placées tout près de Rome. Tel est encore le cas de Sinuesse et de Minturnes

attribuées à la Terentina et non à l'Oufentina ou à la Falerina beaucoup plus rapprochées d'elles. L'explication est dans les dates suivantes: Minturnes et Sinuesse ont été fondées en 458, la tribu Terentina en 455; l'Oufentina et la Falerina créées en 426 étaient probablement au complet et voilà pourquoi on a réservé nos deux colonies pour la nouvelle tribu.

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Les résultats auxquels nous sommes arrivés, vont peut-être nous permettre d'apporter un peu de lumière sur un point resté éncore fort obscur: je veux parler de la forme territoriale, de la configuration de la tribu.

On dit communément que la tribu est un district fermé (1). On entend par là, je suppose, que toutes les portions du territoire qui forment la tribu sont contigües, sans solution de continuité. Malheureusement, cette opinion ne s'appuie sur aucun texte et, d'autre part, tous les faits recueillis jusqu'à présent n'ont pu conduire aucun des savants qui les ont étudiés à reconstituer, dans toute son étendue et avec ses limites précises, une seule des trente et une tribus rurales (2).

On est parvenu, à grand peine, à indiquer le siège de quelques-unes d'entre elles, des quatorze plus récentes surtout et encore quelques-unes de ces solutions sont-elles contestées. Ce n'est donc pas certainement dans ces documents qu'on a découvert le caractère continu de la tribu. Non, on y est parvenu par le raisonnement. On a dit: la tribu est une circonscription administrative et l'on en a conclu que son territoire était tout d'un tenant (3). Après 513, les tribus auraient

(1) Kubitschek, p. 74; Beloch, p. 28.

(2) Voy. R. de La Blanchère, Terracine, Paris, 1884, p. 193 et s.

(3) Kubitschek (p.24), en tire mème cette conséquence, que les colonies ne faisaien tpartie jusque vers la fin du Ve siècle d'aucune tribu. L'exemple d'Os

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