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probable que la flotte du capitan-pacha, bien supérieure en nombre à l'escadre égyptienne, mais beaucoup moins habilement manœuvrée, eût éprouvé le même désastre que l'armée du feld-maréchal d'Anatolie.

Cette armée, sur laquelle Mahmoud avait fondé ses espérances pour punir la rébellion de Méhémet, étant anéantie, et la Porte ne voulant pas prêter franchement l'oreille aux propositions d'arrangement du vice-roi, il fallut faire des efforts inouïs pour opposer de nouvelles forces aux Égyptiens. Un firman impérial révoqua la nomination de Hussein-Pacha; le grand visir Reschid-Méhémet-Pacha, qui avait récemment terminé avec bonheur la guerre contre les révoltés de l'Albanie et de la Bosnie, lui succéda dans le commandement en chef des troupes. Reschid déploya une infatigable activité pour l'accomplissement des desseins dont il était chargé. Il travailla sans relâche à réorganiser l'armée turque, qui fut portée à 60 mille hommes. L'armée égyptienne n'atteignait pas ce chiffre; mais l'orgueil et la confiance que lui inspiraient ses triomphes, sa tactique et sa discipline, compensaient bien cette infériorité numérique. A cet avantage, on opposait l'expérience militaire et la valeur personnelle du grand visir, ses succès précédents, la beauté et la force de plusieurs corps de troupes déjà aguerris, de l'Albanie et de la Roumélie, et la Porte croyait pouvoir se promettre un résultat avantageux d'une seconde campagne. Cependant ceux qui se flattaient de cet espoir à Constantinople ne tenaient pas compte des dispositions de l'Anatolie, qui allait être le nouveau théâtre de la guerre, et dont les principaux habitants, partisans des janissaires, n'avaient cessé, depuis le commencement des réformes introduites par le sultan, d'être en résistance ouverte ou secrète contre la Porte. A Constantinople même, elle était parálysée dans tous ses mouvements par les divisions du divan. Beaucoup de membres de ce conseil étaient encore attachés à l'ancien système; ils regardaient tous les malheurs de l'empire comme une suite des innovations du grand-seigneur, et

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ils étaient d'opinion que les chrétiens se servaient de ce prince pour anéantir l'islamisme. A la vérité, Méhémet-Ali n'avait pas poussé moins loin que son suzerain le zèle des réformes; mais, soit qu'il eût ménagé avec plus d'habileté les préjugés religieux des musulmans, soit qu'il fût mieux servi du sort, il n'avait pas rencontré pármi eux les inimitiés qui assaillaient le sultan, et même il était venu à bout de leur persuader, par ses proclamations, que la cause de la religion était aussi la sienne. Enfin, ce qui portait au comble le mécontentement des sujets de Mahmoud, c'est que déjà il avait songé à demander des secours à l'Angleterre ou à la Russie contre les Arabes leurs coreligionnaires.

Dans cet état de choses, il n'est pas étonnant que la discorde et la démoralisation régnassent chez les généraux et les soldats de la Porte. Les troupes régulières et irrégulières se jalousaient mutuellement, et chaque parti souhaitait la défaite de l'autre. En un mot, jamais la crise inévitable qui menace l'empire ottoman depuis plusieurs années n'avait paru s prochaine.

Tout conspirait donc en faveur d'Ibrahim, à qui, dans l'espoir qu'il rétablirait les anciennes coutumes et vengerait le Coran outragé, différentes villes de la Cappadoce et de la Čaramanie avaient fait des promesses de coopération active Voilà probablement ce qui décría le général égyptien à seprendre ses opérations offesives, après une halte d'environ deux mois, qui avait se vi à consolider ses conquêtes et à reposer son armée, pour s'avancer dans l'Asie-Mineure, et donner ainsi la main x populations mécontentes. C'est alors que, interrogé » ur savoir jusqu'où il prétendait aller: « Jusqu'où je ser-compris en arabe, » avait-il répondu.

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Bientôt il franchit le Taurus, et vers le milieu de novembre occupa, sans brûler une amorce, la forte position de Koniah (l'ancienne Iconium). Reuff-Pacha, qu'un firman de la Porte avait nommé lieutenant du grand visir, pour cette campagne, s'éloigna de la ville quelques heures avant l'arrivée

des Égyptiens, et se retira, non sans abandonner une grande partie de ses magasins et de ses bagages, sur Akscher où Reschid concentrait ses forces.

Les Égyptiens furent tranquilles dans Koniah pendant un mois à peu près. Un détachement de huit cents hommes de leur cavalerie se trouvait posté à Sillé, village à une liene et demie sur la gauche. Le grand visir vint l'attaquer avec douze mille hommes de cavalerie et cinq canons, croyant n'avoir affaire qu'à ce faible détachement. Mais Ibrahim, ayant eu avis de la marche de l'ennemi, dirigea aussitôt sur Sillé une division de cavalerie et une d'infanterie qui taillèrent les Turcs en pièces. Les munitions, les canons, huit drapeaux et quinze cents hommes tombèrent au pouvoir des Egyptiens: la nuit venue, ils rentrèrent dans Koniah et y restèrent sur le qui vive jusqu'au 21 décembre, jour où ils apprirent que le grand visir s'avançait pour leur livrer bataille avec la dernière armée de Mahmoud.

Vers six heures du matin l'ennemi n'était plus qu'à deux lieues de distance. A l'instant toutes les troupes égyptiennes sortirent de la ville. Elles furent rangées sur deux lignes, et pour que la droite et la gauche s'appuyassent réciproquement, chaque régiment forma le carré. La garde fut mise en réserve et présentait une troisième ligne. On flanqua, chacune des ailes avec de Partillerie et de la cevalerie.

A huit heures les deux partis furent en présence. Le grand visir engagea l'action par une déchange de toute son artillerie. Les Egyptiens ripostèrent avec vigueur et l'on se tirailla ainsi pendant quelque temps, après quoi Ibraim fit exécuter une charge de cavalerie qui enfonça le flanc gauche des Turcs. Leur attaque à l'autre extrémité de l'armée égyptienne vait pas élé reçue avec moins d'intrépidité; le feu vif et bien nour des Arabes obligea les Turcs de plier et de s'enfuir en désordre. Ce fut alors que le grand visir, à la tête de sa meilleure division, essaya de rétablir le combat, en se jetant avec impétuosité sur le 4me régiment de la garde égyptienne; mais

cette division fut promptement culbutée. L'intrépide Reschid, au lieu de suivre sa colonne en déroute, revint à la charge avec un autre corps de troupes fraîches, qu'il vit encore une fois anéantir sous les coups acharnés des Égyptiens. Blessé lui-même, soit désespoir, soit qu'il se fût égaré, seul, et le sabre à la main, il se précipita dans les rangs ennemis et fut fait prisonnier. Plusieurs autres pachas eurent le même sort.

La lutte avait duré jusqu'à six heures du soir : le carnage était affreux. On a porté à 30 mille le nombre des hommes mis hors de combat de part et d'autre. La neige, qui recouvrait la terre, était jonchée de cadavres et détrempée de sang. La nuit, qui vint empêcher les Arabes de poursuivre les débris de l'armée turque et de la prendre tout entière, fit qu'ils durent se contenter de 3,000 prisonniers, de quarante-quatre pièces de canon et de toutes les provisions militaires.

La dispersion de l'armée impériale était complète, et le 'sultan ne pouvait plus trouver dans ses propres ressources un obstacle sérieux pour empêcher l'heureux et habile Ibrahim d'arriver à Coustantinople. Or, telle était la disposition des esprits dans cette capitale, que si le vainqueur de Koniah s'y présentait, tout faisait prévoir une révolution qui coûterait au sultan le trône et la vie. Dans cette situation `désespérée, il ne pouvait que recourir à l'assistance des infidèles. Déjà il s'était adressé à l'Angleterre, qui lui avait refusé son appui, et ce fut la plus vieille ennemie de l'empire ottoman, la puissance que Mahmoud était en droit de regarder comme la première cause de ses malheurs par la guerre 'qu'elle lui avait faite en 1828 et en 1829, ce furent les Russes, en un mot, qui vinrent le protéger par une intervention ́armée, dans Constantinople, avec autant de zèle et d'empres sement que s'il se fût agi de leur propre territoire,

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CHAPITRE V.

GRÈCE. Ouverture d'une assemblée nationale à Argos.-Scission entre les députés.-Lutte sanglante dans les rues d'Argos.-Le parti de l'opposition s'établit à Mégare.- Protocole de la conférence de Londres qui reconnaît le comte A. Capo-d'Istria comme président. l'opposition.

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Progrès de Le gouvernement du comte Capo d'Istria est renversé. Nomination d'un nouveau gouvernement provisoire.-Continuation des troubles. Traité de Londres qui nomme le prince Othon de Bavière roi de la Grèce. Traité conclu à Constantinople qui fixe la ligne d'Arta Volo pour frontière de la Grèce. Ouverture d'un nouveau congrès. Ses travaux. Il est dissous par une insurrection militaire. Anarchie générale. - Impatience de voir arriver le prince Othon.

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L'élévation du comte Augustin Capo-d'Istria à la présidence du gouvernement provisoire par le sénat, vers la fin de l'année dernière, fut suivie de la convocation d'une assemblée nationale qui ne servit, en mettant les partis en présence de plus près, qu'à faire éclater dans toute leur violence les profondes dissensions de la Grèce.

Les députés de l'Archipel, appartenant à l'opposition libérale, s'étaient réunis au nombre de 45 à Hydra, où ils cherchèrent à s'entendre sur toutes les difficultés avec le gouvernement provisoire avant l'ouverture du congrès. Cette tentative de rapprochement ne réussit point, le gouvernement ne vouJant pas accorder l'amnistie générale que demandait l'opposition pour tous les événemens antérieurs, et il fit bloquer Hydra par des vaisseaux russes, afin d'empêcher les députés qui s'y trouvaient de se rendre à Argos] où le congrès devait s'ouvrir le 10 décembre. Les autres députés de l'opposition présens à Argos, en grande partie Rouméliotes, ayant insisté sans succès pour que leurs collègues d'Hydra fussent admis, la scission fut complète dès le premier jour entre les deux partis, et chacun procéda de son côté à l'ouverture de la session. Le congrès du

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