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tant et favorable qui les fait révérer en les faisant connaître : faites luire dans mon âme ces rayons vifs et pénétrans de votre grâce qui, perçant les sombres nuages de la foi, forment ces convictions secrètes et intérieures qui font crier une âme avec le prophète : ô Seigneur! vos témoignages ne sont que trop croyables. (Ps. 92, 5.) Faites briller à mes yeux cette colonne de feu qui conduisait les Israélites dans le désert; cette trace de lumière qui guide les âmes prédestinées parmi les ténèbres mystérieuses qui la couvrent dans les sentiers de la vérité : Deduc me in via æterná. (Ps. 138, 24.) Si vous faites cette prière avec confiance, les moindres voiles de l'incrédulité tomberont de vos yeux; et quand votre foi sera solidement affermie, vous serez fidèles à vous acquitter de vos obligations, comme saint Dominique à remplir les devoirs de sa mission extraordinaire.

SECONDE PARTIE.

Une science profonde pour défendre la pureté de la doctrine contre les erreurs de l'esprit, et une éloquence évangélique pour combattre les vices et les passions du cœur, voilà les deux talens que réunit saint Dominique, ce ministre extraordinaire. C'est un docteur et un prédicateur qui confond l'hérésie dans les conférences par la force de ses raisonnemens; qui la combat dans ses écrits par la solidité

de sa doctrine; qui la foudroie dans les chaires par le zèle de ses prédications; il déclare à l'erreur une double guerre dans laquelle il triomphe de la fausseté de ses maximes, et de la rébellion de ses partisans; il emploie à sa destruction le glaive à deux tranchans de la parole divine, et l'épée redoutable que le Seigneur a mise à la main des rois, pour abattre toute puissance illégitime qui s'élève contre leur autorité sacrée. Semblable à ces vaillans Israélites qui rebâtirent le temple sous la conduite d'Esdras, pendant qu'il réparait les ruines de la maison du Seigneur d'une main, il combattait de l'autre les peuples qui osaient l'interrompre dans le cours d'un si saint ouvrage; et après que sa langue avait fait retentir les oracles de la vérité dans les temples, il attachait à leurs voûtes les dépouilles de ses ennemis.

Que ne puis-je ici, Messieurs, avec ces vives couleurs de l'éloquence chrétienne, vous décrire un des plus beaux traits dont la vie de ce grand saint soit enrichie! je vous ferais voir d'un côté les excès horribles de l'hérésie albigeoise, retraçant cette triste et touchante image de la profanation du temple, que le Saint-Esprit nous fait au livre des Machabées (1 Mach. 1, 57); les vases sacrés abandonnés au pillage; les sacrifices interrompus; les murailles souillées d'abominations; les prêtres immolés au lieu de victimes; les plus

saintes cérémonies abolies; les superstitions d'un culte sacrilége et exécrable placées sur les ailes des chérubins du sanctuaire; les vierges sacrées livrées en proie aux animaux immondes; des horreurs que la nuit des temps n'a pu couvrir de ses ténèbres, commises en présence du Dieu de la pureté, et à la face des anges épouvantés; toute la beauté de l'épouse de Jésus-Christ défigurée par les attentats de ceux qui la couvraient d'opprobres, lorsqu'ils prétendaient lui rendre la gloire; spectacle affreux qui retraçait dans l'Église une Babylone assise avec un appareil magnifique, dans la chaire de l'impiété, qui d'une main présentait la coupe empoisonnée de ses erreurs et de ses fornications, et de l'autre tenait un glaive menaçant pour forcer ceux qui refusaient d'en boire. Dominique, soutenu d'une bulle du souverain pontife, prêche une sainte croisade contre cette secte impie; il marche avec une petite troupe de chevaliers et de soldats chrétiens, contre une armée de plus de cent mille hommes hérétiques qui avaient établi dans le Languedoc le siége de leur rébellion, et le théâtre de leur violence. Je vois leurs nombreux bataillons dispersés par

la fuite, ou tombés dans les chaînes, ou immolés par le fer aux approches de notre saint conquérant; une vaste campagne inondée de leur sang, et couverte de leurs morts, offre un digne sacrifice au Dieu des

armées. O Seigneur! comment est-ce qu'un seul homme en a pu vaincre mille, et qu'une poignée de soldats a pu mettre en fuite des escadrons comparables en nombre au sable de la mer, comme parle l'Écriture, si ce n'est parce que vous combattiez invisiblement pour ceux qui défendaient votre querelle. Un autre Moïse levait les bras au Ciel dans la personne de Dominique, pendant qu'un autre Josué poursuivait la défaite des Amalécites dans la personne du pieux et vaillant comte de Monfort. Il me semble voir dans ce crucifix, dans ce rosaire, et dans cette bulle de croisade que Dominique porte à la main, quelque chose de cet appareil mystérieux qui fit tomber autrefois les remparts de la superbe Jéricho. (Jos. 6.) C'est avec ces armes où la force de la main du Très-Haut était attachée, que notre saint renversa l'autel sacrilége que Baal avait élevé contre JésusChrist; ce fut par cette journée mémorable que le ciel autorisa la sainte et vénérable dévotion du Rosaire, sous les étendards duquel cette guerre religieuse fut entreprise et terminée.

Aussi Dominique en rendit-il un hommage éclatant à Marie, lorsqu'il lui adressa pour la première fois cette louange que l'Église a répétée si souvent à sa gloire : Cunctas hæreses sola interemisti. Éloge d'autant plus juste et plus véritable, que l'hérésie albigeoise était un amnas

monstrueux de toutes les erreurs détruites dans une seule.

Après que Dominique eut chassé l'hérésie des lieux qu'elle occupait, il l'attaqua de toutes ses forces dans les âmes où elle avait établi son siége; et il n'eût pas été content d'avoir désarmé des rebelles, s'il n'eût convaincu des obstinés. Quels vœux ardens ne fit-il pas au Ciel pour leur conversion? combien de fois son zèle le fit-il tomber en déiaillance, ou entrer dans une sainte indignation à la vue des malheureux apostats de la foi, qui abandonnaient la source d'eau vive pour aller puiser dans des citernes entr'ouvertes et corrompues? qui pourrait raconter ses conférences, ses prédications, ses voyages et ses miracles? Rappelez dans vos esprits celui que fit Élie en présence du peuple d'Israël, lorsqu'il leur dit: Jusques à quand balancerez-vous entre deux voies? Si Baal est la divinité que vous devez adorer, brisez les autels du Dieu d'Israël; mais si le Seigneur est le vrai Dieu, renversez les autels de Baal. Et pour nous éclaircir de la vérité, convenons que le Dieu qui fera descendre le feu du ciel sur le sacrifice qui lui sera offert, sera le véritable. Vous savez, chrétiens, les circonstances de cet événement célèbre... Considérez ce miracle renouvelé dans ce qui se passa entre les docteurs albigeois et saint Dominique, lorsqu'après une convention approchante, le livre qui conte

nait les dogmes de cette secte, livré aux flammes, fut en un moment consumé, pendant que celui que saint Dominique avait composé contre cette erreur, jeté trois fois dans un bûcher ardent, bien loin d'en recevoir aucune atteinte, ne put même être noirci par la fumée.

Mais le zèle de Dominique ne se borna pas à la conversion des hérétiques: il s'étendit sur tous les pécheurs. Comme il brûlait d'un amour ardent pour JésusChrist, il était plein d'une compassion charitable pour les misères de son Église, accompagnée d'une sainte colère contre les ennemis de Dieu et de son peuple. Nous lisons dans l'histoire de sa vie, qu'on ne lui entendit jamais prononcer une parole qui ne tendît à glorifier Dieu et à lui gagner des âmes. Il était, comme Jean-Baptiste, un flambeau ardent et lumineux: lucerna ardens et lucens ; lumineux, pour éclairer l'esprit; ardent, pour échauffer la volonté. Ses discours étaient remplis d'une onction et d'une force secrète, à laquelle on ne pouvait résister. Quand il parlait aux peuples, son visage paraissait tout rayonnant des lumières de la science et du feu de la charité, dont son âme était pleine; et saint Vincent nous assure qu'on l'aurait plutôt pris pour un ange que pour un homme. Voulez-vous apprendre un effet merveilleux de la grâce particulière qu'il avait reçue, pour ramener les pécheurs les

plus obstinés? Il tombe entre les mains de quelques scélérats et d'une troupe de voleurs noircis de mille crimes énormes qui, dans les forêts et dans les montagnes où ils étaient retirés semblaient y avoir pris la cruauté des lions et des tigres; mais ce divin prédicateur les prêcha si efficacement, que ces cœurs de fer s'amollirent: il fit sortir, aussi-bien que Moïse, de ces rochers insensibles, des larmes de contrition; et soutenu par la grâce de celui qui convertit le bon larron sur la croix, il leur fit détester la vie monstrueuse qu'ils menaient, pour en embrasser une pénitente.

Son zèle trop resserré dans l'étendue d'un royaume, lui fait parcourir l'Espagne, la France, I'Italie; et porté par le souffle du Saint-Esprit, comme une nuée mystérieuse dans plusieurs climats différens, il y répandit de toute part, comme les apôtres, la rosée précieuse et salutaire du sang de Jésus-Christ, par l'abondance des grâces dont sa prédication fut accompagnée. Il sortait de cette nuée enflammée des éclairs qui brillaient quand il expliquait les vérités; des tonnerres qui épouvantaient, quand il faisait retentir les menaces de l'Évangile aux oreilles des peuples; des foudres qui brisaient et qui écrasaient, lorsqu'il frappait de malédiction et d'anathème les pécheurs endurcis; des pluies qui arrosaient et qui fertilisaient, lorsqu'après avoir étonné les auditeurs, il

les faisait fondre en larmes. Il refusa plusieurs fois la dignité d'évêque, pour en faire la fonction par tout l'univers. Mais son zèle agit premièrement sur lui-même, avant de travailler pour le prochain; disciple fidèle de Jésus-Christ, qui commença de faire avant d'enseigner. Il châtiait son corps et le réduisait en servitude, de peur qu'après avoir prêché les autres, il ne devînt lui-même réprouvé. Son lit ordinaire était le marche-pied de l'autel, il interrompait trois fois son sommeil par de sanglantes disciplines; son vêtement, sa nourriture, son logement, tout respirait en lui la morțification évangélique, et il pouvait dire aussi bien que Jean-Baptiste, Jean-Baptiste, qu'il n'était qu'une voix, puisque tout parlait en lui et que tout y prêchait la pénitence.

C'est dans ce genre de prédication que nous devons tous nous exercer. Il n'y a que les réprouvés qui disent avec Caïn, qu'ils ne sont point chargés de la garde et de la conduite de leurs frères. Mais tous les véritables chrétiens sont instruits de cette obligation essentielle, marquée dans l'Ecclésiastique : (Eccli. 17, 12.) Unicuique mandavit Deus de proximo suo. Chacun, à sa manière, est chargé du salut de son prochain. Dieu a ses prédicateurs; mais le monde et le démon ont les leurs : car peut-on appeler autrement ces personnes toutes dévouées à répandre dans les autres les maxi

mes de l'impiété et du vice? Ces libertins dont la bouche est comme un sépulcre ouvert, qui exhale en tous lieux une odeur de mort, de corruption et de scandale: ces femmes mondaines qui sont comme des amorces publiques propres à nourrir la concupiscence des yeux sensuels et adultères... Un jour viendra où Dieu vous demandera ces âmes, le prix de ses sueurs et de son sang, que vous lui avez arrachées des mains; et, après avoir été les instrumens ordinaires du démon pour damner les hommes, vous deviendrez les compagnes éternelles des supplices particuliers qu'il souffrira pour ce détestable emploi... Saint Dominique aurait cru ses travaux bien récompensés, disait-il, s'il avait pu gagner une âme à Jésus-Christ; et il y aura dans l'enfer des pécheurs qui en auront entraîné des milliers avec eux, par la contagion de leur mauvais exemple. Ah! si vous n'êtes pas touchés de compassion pour vos frères, ayez du moins pitié de votre âme ; miserere animæ tuæ. Je ne dis pas de l'âme d'un hométan, d'un infidèle, mais de l'âme de vos enfans, de vos domestiques.

ma

Il n'appartient qu'à Dominique et aux ministres envoyés extraordinairement comme lui, d'embrasser toutes les nations dans l'étendue de leur zèle. Ce grand saint avait toujours présente à l'esprit cette vision dans laquelle l'apôtre saint Paul vit

un homme de Macédoine, qui lui tendant les bras, lui adressait ces paroles touchantes. (Act. 16, 9.) Transiens in Macedoniam, adjuva nos. Il croyait à toute heure entendre des voix plaintives, qui, de toutes les parties du monde, lui disaient: Venez à notre secours, venez nous éclairer dans ces terres sauvages où il ne paraît presque plus aucune trace de la première prédication de l'Évangile... Mais voyant qu'il ne pouvait pas sub. venir lui seul à tous les besoins différens de l'Église, et que la mort interromprait nécessairement le cours de ses travaux, il a trouvé le secret de se multiplier et de s'éterniser, en instituant un ordre dont les religieux sont consacrés à ce divin emploi, que leur glorieux patriarche exerça toute sa vie. Ce n'est pas par une bienséance qui pourrait tenir quelque chose des maximes du siècle, que dans de semblables solennités l'on passe ordinairement des louanges du fondateur à celle des enfans; mais c'est parce que que Jésus-Christ nous apprend que l'on ne peut bien juger d'un arbre que par ses fruits, et que ce serait couvrir d'un voile le plus bel endroit du tableau de Dominique, que de taire ce que l'Église doit à son ordre.

Vous le savez, chrétiens, combien cet ordre religieux remplit dignement les obligations attachées au glorieux surnom qui le distingue parmi les autres. Je ne touche point aujourd'hui aux

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