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CCLXI

(Tom. II, p. 276.)

O toi qui es née comme moi sous le consulat de Manlius, soit que tu portes en ton sein les plaintes ou les ris, les querelles et les folles amours, ou bien, respectable amphore, le facile sommeil ; quelque effet que doive produire l'excellent Massique mis sous ta garde, tu mérites qu'on te produise en un jour de fête; descends donc, Corvinus l'ordonne, et verse-nous ta vieille et douce liqueur.

Ne crois pas que, tout imbu qu'il est des entretiens de Socrate, Corvinus te témoigne un dédain farouche: on dit que le vieux Caton lui-même réchauffa plus d'une fois dans le vin sa vertu.

Tu fais une douce violence au génie qui ne s'ouvre pas facilement; tu dévoiles grâce au dieu joyeux du vin les soucis et les secrètes pensées des sages; tu rends l'espoir aux âmes inquiètes; tu donnes des forces et du courage au pauvre qui, avec toi, ne craint plus ni la puissance redoutable des rois, ni les armes des soldats.

Bacchus, et avec lui Vénus, si elle nous favorise de sa présence, et les Grâces qui marchent toujours ensemble, et le vif éclat des flambeaux te feront durer jusqu'à l'heure où Phébus revient chasser les astres de la nuit.

CCLXII

(Tom. II, p. 273.)

Descendant des rois d'Etrurie, Mécène, depuis longtemps déjà je voudrais t'offrir chez moi une pleine amphore de

(2) Les vins étaient conservés, non pas, comme chez nous, dans des caves, mais, au contraire, dans le haut des maisons. Cf. Colum., De re rust., 1, 6, 20.

1

Jamdudum apud me est. Eripe te moræ,
Ne semper udum Tibur et Æsulæ1
Declive contempleris arvum et
Telegoni juga parricidæ.

Fastidiosam desere copiam et
Molem propinquam nubibus arduis;

Omitte mirari beatæ

Fumum et opes strepitumque Romæ.

Plerumque gratæ divitibus vices.
Mundæque parvo sub lare pauperum
Cenæ sine aulæis et ostro

Sollicitam explicuere frontem.

Jam clarus occultum Andromeda pater
Ostendit ignem, jam Procyon furit,
Et stella vesani Leonis,

Sole dies referente siccos;

Jam pastor umbras cum grege languido
Rivumque fessus quærit et horridi
Dumeta Silvani; caretque

Ripa vagis taciturna ventis.

Tu, civitatem quis deceat status,
Curas, et Urbi sollicitus times,
Quid Seres et regnata Cyro
Bactra parent, Tanaisque discors.

Prudens futuri temporis exitum
Caliginosa nocte premit Deus,

Ridetque, si mortalis ultra

Fas trepidat. Quod adest, memento

Componere æquus; cetera fluminis
Ritu feruntur, nunc medio alveo
Cum pace delabentis Etruscum
In mare, nunc lapides adesos

(1) Var.: Eulæ.

vieux vin avec les fleurs des rosiers et le parfum tiré pour tes cheveux du gland d'Arabie.

Que rien ne te retienne : c'est assez contempler le frais Tibur, les coteaux d'Asula et les hauteurs qu'occupa le parricide Télégon. Laisse-là pour un moment ton opulence et ses ennuis, ce palais qui s'élève jusqu'aux nues, laisse le spectacle de la grandeur de Rome avec sa fumée, son luxe et son bruit.

Parfois le changement plaît aux riches, et, sous l'humble toit du pauvre, sans dais fastueux, sans lits de pourpre, un dîner bien simple servi proprement a déridé plus d'un front chargé de soucis.

Déjà le père d'Andromède montre l'éclat longtemps caché de ses feux; déjà Procyon et le Lion furieux font sentir leur violence en même temps que le soleil ramène les jours de sécheresse. Déjà le berger, avec son troupeau languissant, recherche fatigué l'ombrage, les ruisseaux, les buissons du sauvage Sylvain, et sur la rive silencieuse plus de vent qui promène son souffle.

Toi cependant tu t'occupes des intérêts de l'empire et, l'esprit en travail, tu t'inquiètes pour Rome de ce que méditent et les Sères, et les Bactriens, sur qui régna Cyrus, et les peuples toujours en guerre des bords du Tanaïs.

La divinité prudente a caché sous d'épaisses ténèbres les événements de l'avenir et elle se rit du mortel dont l'esprit s'agite pour percer cette nuit insondable.

Contente-toi de gouverner le présent avec sagesse : le reste, dans son cours, est comme un fleuve, qui tantôt, sans sortir de ses rives, porte paisiblement ses eaux dans la mer d'Etrurie, et tantôt roule tout à la fois les pierres qu'il a usées, les troncs d'arbres déracinés, les troupeaux, les maisons, avec un fracas que ne laissent point de répéter et les montagnes et les forêts voisines, quand un affreux déluge change ses ondes paisibles en vagues irritées.

(2) Les hauteurs de Tusculum, ville fondée, disait-on, par Télégonus, fils d'Ulysse et de Circé.

Stirpesque raptas et pecus et domos
Volventis una, non sine montium
Clamore vicinæque sylvæ,

Cum fera diluvies quietos

Inritat amnes. Ille potens sui
Lætusque deget, cui licet in diem
Dixisse: << Vixi1». Cras vel atra
Nube polum Pater occupato
Vel sole puro; non tamen inritum,
Quodcumque retro est, efficiet neque
Diffinget infectumque reddet,
Quod fugiens semel hora vexit2.
Hor., Carm., III, 29, v. 1 48.

CCLXIII

A Melpomène3.

Exegi monumentum ære perennius,
Regalique situ pyramidum altius,

Quod non imber edax, non Aquilo inpotens
Possit diruere aut innumerabilis

Annorum series, et fuga temporum.
Non omnis moriar, multaque pars mei
Vitabit Libitinam : usque ego postera
Crescam laude recens, dum Capitolium
Scandet cum tacita virgine pontifex.
Dicar, qua violens obstrepit Aufidus,
Et qua pauper aquæ Daunus agrestium
Regnavit populorum, ex humili potens,
Princeps Æolium carmen ad Italos
Deduxisse modos. Sume superbiam

(1) Les uns ferment les guillemets après vixi; les autres, six vers plus loin, après vexit.

(2) Les deux strophes suivantes sont citées tom. II, p. 50.

a

(3) Ce titre Ad Melpomenen » est remplacé dans certaines éditions par cet autre « Ad se ipsum, de opere suo.

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A lui-même, sur son œuvre.»

Celui-là seul vit maître de lui et vraiment heureux qui, à la fin de chaque jour, peut dire : « J'ai vécu ». Demain, que Jupiter à son gré répande sur le ciel ou les nuages les plus noirs ou la plus pure lumière du soleil, il ne pourra pas faire que le passé n'ait pas été, modifier ou supprimer ce qu'une fois l'heure en fuyant a emporté.

CCLXIII
(Tom. 11, p. 284.)

Je l'ai achevé ce monument plus durable que l'airain, dont l'élévation dépasse celle des royales pyramides, et que ne pourront détruire la pluie qui rongé, le fougueux Aquilon, la suite innombrable des années, la fuite du temps. Je ne mourrai pas tout entier, et la plus grande partie de moi-même échappera à la déesse des funérailles : toujours jeune de gloire, je grandirai dans la postérité, tant que montera au Capitole avec la vestale silencieuse le pontife romain. On dira que, né aux lieux où retentit l'impétueux Aufide, au pays aride où Daunus régna sur des peuples agrestes, illustrant mon humble origine, j'ai, le premier, fait passer les chants éoliens dans la poésie de l'Italie. Enorgueillis-toi de ton ouvrage et viens de tes pro

(4) Déesse des funérailles; par métonymie pour dire « la mort ».

(5) Epithète qui s'applique au pays aride de Daunus. Cf. Ov., Métam., XIV, 510: lapygis arida Dauni Arva. » (6) Var.: regnator.

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