Magna loquor, sed magnifice mihi magna locuto Juravi quotiens rediturum ad limina nunquam! Spes facilem Nemesim spondet mihi, sed negat illa. Tibul., 11, 6, v. 9-28. CCLXXXVI Derniers souhaits de Lygdamus lorsqu'il vient d'être séparé de sa chère Néère. Ergo cum tenuem fuero mutatus in umbram, Voilà de grands mots; mais, après ces superbes paroles, une porte fermée abat toute ma jactance. Que de fois j'ai juré de ne jamais retourner à ce seuil! Et quand j'ai bien juré, mes pieds, malgré tout, d'eux seuls m'y ramènent Puissé-je, ô cruel Amour, voir en morceaux les flèches dont tu t'armes et tes torches éteintes! Tu tortures un malheureux, tu me réduis à faire des imprécations contre moi-même, à prononcer avec folie des paroles sacrilèges. Déjà j'eusse mis par la mort un terme à mes maux, mais la crédule Espérance réchauffe ma vie en me promettant toujours un lendemain meilleur. C'est l'Espérance qui entretient le laboureur, l'Espérance qui confie la semence aux sillons pour que la terre la rende avec de gros intérêts. C'est elle qui tend le piège à l'oiseau, qui tend la ligne au poisson avec l'appât subtilement caché par l'hameçon. L'Espérance console même l'esclave chargé de lourdes chaînes; les pieds du captif font résonner ses fers et cependant il chante en peinant. L'Espérance me promet Némésis indulgente, mais Némésis la dément. Ah! ne va pas, pour mon malheur ! beauté cruelle, triompher de cette déesse ! CCLXXXVI (Tom. II, p. 478.) Quand je ne serai plus qu'une ombre vaine et qu'une cendre noire recouvrira mes ossements blanchis, qu'au pied de mon bûcher Néère vienne, sa longue chevelure en désordre, et là, désolée, répande ses larmes. Qu'elle vienne accompagnée de sa mère chérie, partageant sa douleur : que l'une pleure un gendre et l'autre un époux. Qu'elles saluent mes mânes, adressent une prière à mon âme et baignent pieusement leurs mains dans une eaù pure; qu'elles recueillent dans leurs vêtements de deuil les seuls restes qu'aura laissés mon corps, mes os tout blancs; qu'après les avoir réunis, elles les arrosent d'abord d'un vin vieux et bientôt après d'un lait blanc comme la neige; Post hæc carbaseis humorem tollere velis, Et nostri memores lacrimæ fundantur eodem : << Lygdamus hic situs est: dolor huic et cura Neæræ, Conjugis ereptæ, causa perire fuit. » Tibul., Lygdamus, III, 2, v. 9-30. CCLXXXVII Lygdamus, très malade, écrit à ses amis. Vos tenet, Etruscis manat quæ fontibus unda, Dextera, nec cuiquam trita venena dedit; que dans des voiles de lin très fin elles les fassent sécher et les déposent une fois secs dans le marbre qui doit les abriter. Là, que les parfums de la riche Panchaïe, de l'Arabie Orientale et de la féconde Assyrie se mêlent aux larmes qu'elles donneront à ma mémoire. Voilà les honneurs que je désire pour mes restes. Mais qu'une inscription fasse connaître la cause déplorable de ma mort par ces deux vers gravés sur le fronton du monument : « Ici repose Lygdamus sa douleur et le désespoir de s'être vu enlever Néère, son épouse, ont causé son trépas ». CCLXXXVII (Tom. 11, p. 480.) Vous, amis, vous voilà aux bains d'Etrurie, ces bains dont il faut se garder pendant les ardeurs de la canicule, mais qui valent presque les eaux divines de Baïes aujourd'hui que la terre s'adoucit sous le souffle du printemps fleuri. Et moi j'entends Perséphone m'annoncer l'heure fatale. A ma jeunesse pure de tout crime fais grâce, ô déesse. Je n'ai jamais eu l'audacieuse pensée de dévoiler les mystères d'une auguste déesse interdits à tous les hommes; ma main n'a point mêlé dans une coupe des sucs homicides ni broyé du poison pour les présenter à quelqu'un ; je n'ai pas lancé sur un temple un incendie sacrilège et mon cœur n'est troublé par le remords d'aucun forfait. Jamais non plus, par suite d'une colère insensée, ma bouche n'a proféré d'impies blasphèmes contre les dieux contraires à mes désirs. Des cheveux blancs n'ont pas encore endommagé ma noire chevelure et pour moi n'est pas encore venue la vieillesse au dos courbé, à la marche pesante. Mes parents m'ont vu naître le jour où le destin frappa d'un seul coup deux consuls. Qui peut aimer dépouiller la vigne de raisins naissants et d'une main malfaisante arracher les fruits à peine formés? Épargnez-moi, dieux qui régnez sur les sombres rivages et Elysios olim liceat cognoscere campos, Et referam pueris tempora prisca senex. Tibul., Lygdamus, III, 5, v. 1-34. CCLXXXVIII L'auteur du panégyrique de Messala exalte le talent militaire de ce personnage. Jam te non alius belli tenet aptius artes; Aut quis equum celerem angusto compescere freno |