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Quel que soit le parti auquel on s'arrête sur ces lois Porcia, il est certain (et c'est pour nous le plus intéressant) que depuis les dernières lois Valeria, il n'y a pas d'exemple à Rome d'un citoyen mis à mort de l'ordre des consuls, au mépris de l'appel au peuple. Un pareil abus n'eut lieu que plus tard, et seulement dans les provinces, quand les gouverneurs, loin des yeux du peuple, leur juge et leur souverain, se crurent tout permis, et traitèrent les citoyens comme des provinciaux. Mais, à Rome, nous pouvons admettre, comme un fait constant, que depuis le ve siècle (et plus tôt peut-être), les consuls avaient perdu tout pouvoir sur la vie des citoyens; qu'à cet égard leur responsabilité était assez réelle, et la jalousie du peuple assez vive, pour que nul, quelque grand qu'il fût, n'osât porter atteinte à la souveraineté populaire.

C'est de cette suprême juridiction que nous allons traiter maintenant.

M. Porcius Caton, sur ce fondement que, suivant un passage de Festus (v Pro scapulis), Caton se vante d'avoir parlé en faveur de la liberté romaine. Si l'on adoptait cette opinion, on pourrait rattacher la disposition protectrice des citoyens romains à la loi Porcia, dont le plébiscite de Thermes fait mention, loi qui date à peu près de la même époque, et qui, s'occupant d'empêcher les exactions des magistrats provinciaux, pouvait bien aussi limiter leur arbitraire. Festus, Pro scapulis, cum dicit Cato, significat pro injuria verberum. Nam complures leges erant in cives rogatæ, quibus sanciebatur pœna verberum. His significat prohibuisse multos suos cives, in ea oratione quæ est contra M. Cœlium: Hostem percussi, sæpe incolumis abii. Præterea pro rep. pro scapulis, atque ærario multum R. P. profui. — Orelli Index Legum, v° Porcia lex.

CHAPITRE III.

Juridiction des Comices.

Ce fut, avons-nous dit, les lois Valeria qui, les premières, attribuèrent aux comices le suprême ressort en matière criminelle, et, par conséquent, constituèrent le peuple souverain dans la république, puisqu'il tenait à la fois les magistrats par la nomination et par la responsabilité.

Le suprême ressort, attribué au peuple, lui donna bientôt toute la juridiction criminelle, comme je l'ai indiqué plus haut (1), et la loi des XII Tables confirma cette conquête de la démocratie lorsqu'elle établit que le maximus comitiatus pourrait seul prononcer sur une accusation capitale.

Mais que doit-on entendre par ce maximus comitiatus, tribunal suprême de la république? Là commence la difficulté.

Les Romains eurent trois formes d'assemblées pour exercer leur souveraineté, tant par la nomination des magistrats et le vote des lois que par les jugements criminels, ce furent les comices-curies, les comices-centuries et les comices-tribus. Les premiers, contemporains des origines romaines, ne comprenaient que les patriciens; les seconds, imaginés par Servius Tullius, et saisis de la puissance lors de la révolution qui fit de Rome une république, comprenaient tous les citoyens, mais divisés en un certain nombre de classes, suivant la fortune, l'âge et le rang. Ces comices donnaient ainsi la prépondérance à la richesse, comme les comices-curies

(1) Sup. pag. 88.

donnaient à la naissance l'influence suprême. Les troisièmes, simples assemblées de la plèbe dans l'origine, devinrent plus tard communes à tous les citoyens. C'était une division locale, jusqu'à une époque dont la date nous est malheureusement inconnue, où l'organisation par centuries pénétra dans les tribus, ce qui fit qu'on ne vota plus par têtes, mais par classes dans chaque tribu.

Les comices-curies disparurent de la scène avant la chute de la puissance patricienne. Comme juridiction criminelle, le seul exemple qui nous en reste, c'est le jugement d'Horace (1); car, de prétendre avec Niebuhr que ce furent les patriciens réunis en comices-curies qui condamnèrent Sp. Cassius, et plus tard M. Manlius, c'est fonder une hypothèse sur un mot (2), ce qu'une saine critique ne peut admettre. D'ailleurs, en ce qui concerne le jugement de Manlius, Tite-Live dit formellement que la cause fut portée la première fois devant les comices-centuries (3), et il n'y a aucune raison de croire que le tribunal fut changé lorsque Manlius comparut de nouveau devant ses juges (4). Quant à Spurius Cassius, il est impossible de rien affirmer, puisque les anciens euxmêmes ne savaient rien d'exact sur ce jugement.

(1) Liv. 1, 26. Festus, v° Sororium Tigillum.

(2) Niebuhr prétend que concilium populi veut toujours dire les comices-curies. L'assertion est loin d'être justifiée, et ce n'est pas d'un écrivain tel que Tite-Live qu'on doit attendre une sévérité d'expressions qu'on pourrait tout au plus espérer d'un jurisconsulte tel que Cicéron ou Tacite. Niebuhr, Rom. Gesch. 11, p. 417, et son copiste Walter, Rechtsgesch., p. 82, 96. L'opinion de Niebuhr a été adoptée par Burckhardt, et défendue de façon assez spécieuse (Criminal Gerichtsbarkeit, p. 8). Rubino, p. 435 et ss., a fort bien réfuté Niebuhr.

(3) Liv. vi, 20.

(4) Cic. De Rep. 11, 35. Liv. 11, 41. - Denys, vii, 77, 78.

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Dio Cass. Fr. Vat. 19.

Certaines relations le font condamner par le peuple (1), ce qui n'appuie ni ne détruit l'hypothèse de Niebuhr; une autre version le fait juger par un tribunal de famille (2). Le doute en pareil cas vaut mieux que la plus séduisante hypothèse.

Les comices-curies écartés, restent donc les comicescenturies et les comices-tribus. Cicéron nous dit en termes exprès que les centuries étaient le comitatus maximus dont parlent les lois sacrées et la loi des XII Tables (3); et nous ne pouvons avoir la prétention de mieux connaître la constitution romaine qu'un homme qui avait fait une étude toute particulière de ces antiquités (4). Les exemples cités, au contraire, de

(1) Cic. De Rep. 11, 35. — Liv. 11, Dio Cass. Fr. Vat. 19.

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(2) Val. Max. v, 8, 2. - Plin. H. N. xxxiv, 4. ·

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Florus, 1, 26.

(3) Cic. De Legib. 11, 44. Tum leges præclarissimæ de XII Tabulis translatæ duæ, quarum altera privilegia tollit ; altera de capite civis rogari nisi maximo comitiatu vetat. Et nondum natis seditiosis tribunis plebis, ne cogitatis quidem, admirandum tantum majores in posterum providisse. In privos homines leges ferri noluerunt, id est enim privilegium, quo quid est injustius? Cum legis hæc vis sit, ut sit scitum et jussum in omnes. Ferri de singulis nisi centuriatis comitiis noluerunt; descriptus enim populus censu, ordinibus, ætatibus plus adhibet ad suffragium consilii, quam fusi in tribus convocatus. 45. Quo verius in causa nostra (Cicéron avait été jugé par les comices-tribus) vir magno ingenio summaque prudentia, L. Cotta dicebat, nihil omnino actum esse de nobis; præter enim quam quod comitia illa essent armis gesta servilibus, præterea neque tributa capitis comitia rata esse posse, neque ulla privilegii, quocirca nihil nobis opus esse lege, de quibus nihil omnino actum esset legibus. Ibid., Pro Sextio, 65, 73. Plaut. Pseudol. iv, 3, sc. 7; v, 134.- Liv. xxvi, 3;

XLIII, 16.

(4) L'opinion de Cicéron a été adoptée comme la plus probable par la plupart des écrivains modernes. Sigonius, De Judic., 1, 5.— Ferratius, Epist. 11, 9. - Burckhardt, p. 11. Elle a été attaquée par Danz, Geschichte der Roem. Rechts (Leipsig, 1840), p. 41. Geib, p. 35.-Gottling, p. 316. — Peter, Epochen, p. 36, a suivi une opinion mitoyenne. Il suppose que ce fut seulement après l'expulsion des décemvirs, et par un accord entre les patriciens et

condamnations capitales prononcées par les comicestribus avant comme après la loi des XII Tables, telles que le jugement de Coriolan, d'Appius Claudius, de Caso Quinctius, le procès fait aux décemvirs, et celui que les tribuns intentèrent au consul Postumius Pyrgensis (1) ont le grand tort de ne donner aucune preuve précise, de nature à combattre l'autorité imposante de Cicéron. Caso Quinctius, si l'on en croit Cicéron, fut jugé par les comices-centuries (2); et quant aux condamnations de Coriolan (3) et d'Appius(4), prononcées, il est vrai, par les comicestribus, elles furent considérées comme une violation flagrante de la constitution, ce qui donne un poids nouveau aux assertions du grand orateur. Bien d'autres textes viennent appuyer Cicéron, parmi lesquels je me contenterai de citer la procédure suivie par les tribuns contre le préteur Fulvius qui avait perdu son armée en Apulie; elle nous montre clairement la limite du pouvoir des deux assemblées. Fulvius est deux fois cité devant les tribus par les tribuns qui veulent obtenir une condamnation pécuniaire; mais le peuple exigeant une punition plus exemplaire, les tribuns abandonnent la première accusation, et demandent au préteur d'indiquer jour devant les comi

les plébéiens, que les comices-centuries devinrent le seul tribunal appelé à prononcer dans les causes capitales.

(1) Liv. xxv, 4.

(2) Cic. pro Domo ad Pont. 86. 58; x1, 46.

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(3) Liv. 11, 35. Plut. Coriolan. c. 17-20.- Denys, vir, 59. Oi δὲ δήμαρχοι συνεκάλουν τὸ πλῆθος ἐπὶ τὴν φυλέτιν ἐκκλησίαν, καὶ τότε πρῶτον ἐγένετο Ρωμαίοις ἐκκλησία κατ' ἄνδρα ψηφηφόρος, ή φυλετική. Πολλὰ δ ̓ ἐναντιουμένων τῶν πατρικίων, ἵνα μὴ τοῦτο γένηται, καὶ τὴν λοχῖτιν ἀξιούντων συναγειν ἐκκλησίαν, ὥςπερ αὐτοῖς πάτριον ἦν.

(4) Denys, vi, 6, fait dire à Appius qu'on l'a cité devant un tribunal incompetent : Δικαστήριόν τε οὐχ ὅπερ ἦν πάτριον ἀπέδων κάν μοι, τὴν λοχίτιν καλέσαντες ἐκκλησίαν.

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