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homme crapuleux, qui n'a pas achevé de cuver son vin edormi crapulam et exhala; voleur, faussaire, sacrilége.

Cicéron, qui a des fleurs pour tout le monde, en jette quelques-unes aux amis d'Antoine, oubliant qu'il en était et qu'il s'en faisait gloire : « Tes amis, lui dit-il, sont une vermine infecte que tu payes largement des biens de la République, pour l'apprendre à n'avoir pas le sens commun. Pourrait-il en être autrement? banqueroutier que tu es, pédéraste, prostitué public, misérable qui promènes la débauche en lilière par toute l'Italie, buveur de sang, ivrogne de la grosse espèce, qui, avec ta carrure de gladiateur, bus tant de vin aux noces d'Hippias que tu ne pus t'empêcher de vomir encore le lendemain, en présence du peuple assemblé! S'il t'était arrivé de pareilles vilenies dans ces orgies où tu fais de ton corps un tonneau, qui n'en rougirait pas ? Et au milieu d'une assemblée du peuple romain tu as vomi les morceaux de viande empuantis par l'odeur du vin, et tu en as rempli ta robe et tout le tribunal ! Ivrogne partout, n'avais-tu donc pas autre chose à faire à Narbonne qu'à vomir sur les tables de tes hôtes? Ivrogne éternel, qui, dès le matin, bois, joues et vomis, qui inonde les parquets de vin, qui en souilles les tables et les murs!

» Impie, forcené, ennemi des dieux, brute qui

n'as ni sens ni âme; frénétique, quand tu dis: Moi, le consul Antoine, c'est comme si tu disais : Moi consul, moi le plus infâme des hommes: car es-tu autre chose? quid enim est aliud Antonius? Boutefeu, lâche, instigateur de cruautés, qui marches soutenu d'un côté par un chef de spadassins et de l'autre par un chef de buveurs !... Valet, menteur, impudent, cynique, qui harangues le peuple tout nu: nudus concionatus; fou à lier: tu non constringendus? Polisson, homme détestable, digne de tous les supplices! »

Vous avez, Madame, pour le fond et pour la forme, un échantillon de la seconde Philippique. Pour le fond, c'est la glorification immodérée de Cicéron par lui-même, la confession générale d'Antoine, et, avant tout, l'apologie retentissante de l'assassinat politique. Pour la forme, c'est le langage de la halle et le vocabulaire complet des injures les plus grossières. Rappelez-vous maintenant la définition de l'orateur : Vir bonus dicendi peritus. Cicéron est-il l'un et l'autre? Malgré les doutes qui pourraient vous venir, vous tiendrez pour certain que « la seconde Philippique est une pièce d'éloquence qui n'eut jamais d'égale, et que la postérité a regardée comme un ouvrage divin. » Certainement elle aurait mérité toutes les louanges qu'on lui a données, si elle n'avait causé la mort de son auteur.

C'est là un article de foi classique; point de salut littéraire pour vous si vous ne le croyez pas. L'oracle émane des plus respectables maîtres de la jeunesse, les pères de la Compagnie de Jésus'.

« Continuons d'enseigner comme ont enseigné nos pères tout ce qu'ils ont fait est bien fait; il n'y a rien à changer; blâmer leur enseignement, c'est injurier l'Église. »

Agréez, etc.

1 Histoire romaine par les PP. Catrou, Rouillé, Rothe, etc., t. XVII, p. 470.

DIX-HUITIÈME LETTRE.

Cicéron homme d'État.

en philosophie.

Il est en politique ce qu'il est en morale et Esclave de l'ambition et de la vanité, il flotte

Ménage César, calomnie Crassus.

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entre fous les partis. Veut assassiner César et Pompée. Se laisse duper par César. - Dit du mal de tout le monde, excepté de lui-même. Il se fait de nombreux ennemis. Faible dans l'adversité. Histoire de Philascus..

devient l'instrument de Pompée.

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Dupe

de César et de son ambition. — Irrésolu, il donne des gages à Pompée et à César. - Inconstance et palinodie continuelles. Dupé par Octave. Il est méprisé de tous les partis, et assassiné.

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MADAME,

Rome, 44 février.

CICERON HOMME D'ÉTAT. -« A l'école de Cicéron tous les hommes d'État! » s'écrient les maîtres de la jeunesse.« On ne peut comparer à Cicéron aucun des hommes qui se sont mêlés de gouvernement, »> répètent les élèves. Vous avez lu ces éloges dans une de mes lettres précédentes, et vous me demandez ce qu'il faut en penser.

Nous l'avons vu en fait de croyances, Cicéron philosophe réduit tout à des conjectures, à des vraisemblances, au maximum à des probabilités. Cicéron philosophe passe dans Cicéron moraliste on le re

:

trouve dans Cicéron homme d'État. Comment pour rait-il en être autrement? Tout homme qui fait profession de n'avoir sur rien aucune croyance arrêtée prendra nécessairement pour guide de sa vie les circonstances. Son étude sera d'en tirer le meilleur parti possible, dans l'intérêt de sa fortune et de sa passion favorite. Homme d'entre deux, il n'aura jamais de résolution préconçue. Avant de faire un pas, il regardera à droite, il regardera à gauche; il interrogera, à son point de vue personnel, les chances des partis, ira de l'un à l'autre, les flattera et les blâmera tour à tour, finira par se faire mésestimer de tous et par tomber dans des impasses, d'où il ne saura comment sortir. Appliqués à Cicéron homme d'État, ces principes sont-ils justes? Interrogeons l'histoire.

Le dieu de César, disait Cicéron, c'est le pouvoir il n'en connaît pas d'autre. Le dieu de Cicéron, pouvait répondre César, c'est aussi le pouvoir: il n'en connaît pas d'autre. La différence est que César marche au pouvoir les armes à la main et en écrasant ses rivaux ; tandis que Cicéron veut y parvenir par la tribune aux harangues et en caressant tous les partis. L'orgueil et la force sont le caractère de César, la vanité et la faiblesse celui de Cicéron. César croit à son épée, Cicéron à sa parole; César a foi à sa fortune, Cicéron à celle d'autrui; César s'im

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