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Notre longue étude sur Cicéron m'oblige d'être court sur les autres saints de la belle antiquité. Je me bornerai à vous indiquer leurs principaux titres à votre vénération et à la confiance des mères de famille. Des mains de Cicéron, vos enfants tombent dans celles d'Horace. « Nul auteur, dit-on dans la république des lettres, n'a blâmé avec plus de force toutes les passions déréglées; nul n'a excité à la vertu avec autant de véhémence; nul n'a détourné du vice avec plus de fermeté '. »

Horace, qui n'entend pas raillerie, s'empresse de répondre : « Je suis un pourceau du troupeau d'Épicure, Epicuri de grege porcus; je suis un frondeur, un impie, un sceptique, parcus deorum cultor et

1 Dictionnaire de Moreri; et M. Louis Moreri était prêtre et docteur en théologie!

infrequens; je chante surtout quatre choses : le vin, les femmes, les garçons, Auguste et Mécène dont je suis l'égal par mes mœurs et le vil flatteur par mes vers, bien que partisan de Brutus, que j'ai lâchement abandonné, relicta non bene parmula. »

Horace est ce qu'il dit: buveur, libertin, pédéraste, tellement esclave des plus abominables passions qu'il ne peut travailler sans en avoir l'image sous les yeux: Ad res venereas intemperatior traditur; nam speculato cubiculo scorta dicitur habuisse disposita, ut, quocumque respexisset, ibi ei imago coitus referretur. Le cynisme d'un grand nombre de ses poésies arrive au point de faire rougir Voltaire luimême, l'auteur de la Pucelle!

Après Horace, c'est Salluste, qui préside à l'éducation de la jeunesse chrétienne. Or, Salluste est un valet de César, un adultère public qui se fait rouer de coups par Milon, un libertin tellement scandaleux qu'il se fait chasser du Sénat, un concussionnaire qui écorche l'Afrique, qui vient dévorer à Rome dans le luxe et la débauche le sang et les sueurs de cette malheureuse province, et qui consacre les instants dérobés à ses honteux plaisirs à déclamer contre les vices de son temps.

Viennent ensuite Plaute et Térence. Pour rassurer votre sollicitude, écoutez l'éloge de ces deux esti1 Suet., Vit. Horat.

mables pédagogues de vos enfants : « Qu'on s'arrête à la manière de peindre les mœurs, de réunir tous les moyens de rendre les hommes meilleurs, et de développer habilement ce que la morale et la philosophie ont de plus pur: on sera forcé de convenir du mérite réel de Plaute. » Ainsi parle M. Levée, professeur de rhétorique. Il est l'écho d'un prêtre du dix-septième siècle, M. de Marolles, abbé de Villeloin et traducteur de Plaute. « Si cette traduction, dit-il, fait concevoir autant d'estime des comédies de Plaute que j'en ai conçu par leur lecture agréable avant que j'eusse entrepris ce labeur, je n'y aurai pas mal réussi 2. >>

Eh bien, Plaute lui-même avoue que sa comédie des Captifs est la seule de ses pièces qui ne soit pas immorale, neque spurci dici insunt versus immemora biles. « En effet, dit la Harpe, dans Plaute ce sont toujours de jeunes courtisanes, des vieillards ou des vieilles femmes qui les vendent, des amoureux qui se servent de valets fripons 3. » Acteurs et actrices, courtisanes et proxénètes tiennent un langage, se permettent des bouffonneries et, comme dit un auteur, des luxures de style qui ne s'entendent que dans les mauvais lieux. Au dévergondage des mœurs se joint le dévergondage de la pensée. L'Am

1 Trad. de Plaute, 1820, préface, p. 42.2 Ibid., préface, p. 1.3 Cours de littérature, etc.

phitryon est une longue moquerie de Jupiter et des dieux. Jupiter comédien et adultère; une femme en mal d'enfant sur la scène, Alcmena parturit : voilà le fond de la pièce. Dans l'Asinaire, vous voyez un jeune homme qui se ruine pour une courtisane, et qui se résigne à la partager pour la posséder encore; un vieillard, mari imbécile et père corrupteur, qui se rend complice des iniquités de son fils pour partager honteusement ses plaisirs clandestins; des esclaves qui volent; une courtisane émérite qui trafique des appas de sa fille.

Sauf les broderies, même fond dans les Deux Bacchis, la Marmite, le Marchand, la Cassette, le Charançon, Stichus, le Fanfaron et les autres. Reste l'Épidique « La faveur acquise à cette pièce, dit naïvement un des panégyristes de Plaute, servirait à prouver que les Romains ne regardaient pas le théâtre comme une école de morale. Ici la vieillesse est bafouée, la majesté paternelle est ridiculisée; le libertinage ne reçoit d'autre punition que de ne réussir qu'à demi; le mensonge et la friponnerie triomphent'. » Ajoutez, Madame, que Plaute, fut comme Molière, auteur et acteur, puis entrepreneur de spectacle, puis commerçant ruiné, puis garçon meunier, et vous aurez une idée du noble précepteur qu'en

1 Trad. de Plaute, 1834.

sa personne l'éducation classique donne à vos enfants.

Térence n'est pas moins estimable. Esclave africain, jouet des infâmes amours de son maître, puis du vertueux Lélius, puis du chaste Scipion, puis d'autres nobles Romains, Térence a laissé, pour former le goût de la jeunesse chrétienne, six comédies dignes de ses mœurs et de celles de ses patrons. La plus connue et peut-être la plus mauvaise, l'Andrienne, s'explique encore dans les colléges'. Bossuet écrit que son royal élève se divertissait beaucoup à la lecture de Térence; et Ovide place Térence dans sa Bibliothèque de séduction! O grand évêque de Meaux !

Ce qu'il y a de certain, c'est que Térence enivrait d'amour impudique la jeunesse romaine. « Térence vous fait prendre intérêt non-seulement aux amoureux, mais aussi à leurs amours. Presque tous ses personnages sont bons; les courtisanes ellesmêmes, excepté une seule, ont des sentiments généreux, estimables, délicats. Aussi les jeunes gens sortaient de ces spectacles l'esprit fasciné, tout émus d'une effervescence dangereuse et abusés par des

1 Cum multis nobilibus familiariter vixit, sed maxime cum Scipione Africano et C. Lælio, quibus etiam corporis gratia conciliatus existimatur. Porcius suspicionem de consuetudine per hæc faciat dum lasciviam nobilium et fucosas laudes petit, dum se amari ab hisce credit, etc. Suet., Vit. Terent.

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