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repentante de ses fautes fait le devoir le plus nécessaire de la justice chrétienne. Ce qui nous oblige de confesser humblement, avec saint Augustin, que notre justice en cette vie « consiste plutôt dans la rémission des péchés que dans la perfection des vertus,

Sur le mérite des œuvres, l'Église catholique enseigne que « la vie éternelle doit être proposée aux enfants de Dieu, et comme une grâce qui leur est miséricordieusement promise par le moyen de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et comme une récompense qui est fidèlement rendue à leurs bonnes œuvres et à leurs mérites, en vertu de cette promesse1. » Ce sont les propres termes du concile de Trente. Mais, de peur que l'orgueil humain ne soit flatté par l'opinion d'un mérite présomptueux, ce même concile enseigne que tout le prix et la valeur des œuvres chrétiennes provient de la grâce sanctifiante, qui nous est donnée gratuitement au nom de Jésus-Christ, et que c'est un effet de l'influence continuelle de ce divin chef sur ses membres.

Véritablement les préceptes, les exhortations, les promesses, les menaces et les reproches de l'Evangile font assez voir qu'il faut que nous opérions notre salut par le mouvement de nos volontés avec la grâce de Dieu qui nous aide : mais c'est un premier principe, que le libre arbitre ne peut rien faire qui conduise à la félicité éternelle, qu'autant qu'il est mû et élevé par le Saint-Esprit,

Ainsi, l'Eglise sachant que c'est ce divin Esprit qui fait en nous, par sa grâce, tout ce que nous faisons de bien; elle doit croire que les bonnes œuvres des fidèles sont très-agréables à Dieu, et de grande considération devant lui: et c'est justement qu'elle se sert du mot de << mérite » avec toute l'antiquité chrétienne, principalement pour signifier la valeur, le prix et la dignité de ces œuvres que nous faisons par la grâce. Mais comme toute leur sainteté vient de Dieu qui les fait en nous, la même Église a reçu dans le concile de Trente, comme doctrine de foi catholique, cette parole de saint Augustin, que « Dieu couronne ses dons en couronnant le mérite de ses serviteurs. >>

Nous prions ceux qui aiment la vérité et la paix de vouloir bien lire ici un peu au long les paroles de ce concile, afin qu'ils se désabusent une fois des mauvaises impressions qu'on leur donne de notre doctrine. << Encore que nous voyions, disent les Pères de ce concile, que les saintes Lettres estiment tant les bonnes œuvres, que Jésus-Christ nous promet lui-même qu'un verre d'eau froide donné à un pauvre ne sera pas privé de sa récompense; et que l'apôtre témoigne qu'un moment de peine légère, soufferte en ce monde, produira un poids éternel de gloire toutefois à Dieu ne plaise que le chrétien se fie et se glorifie en lui-même, et non en Notre-Seigneur, dont la bonté est si grande envers tous les hommes, qu'il veut que les dons qu'il leur fait soient leurs mérites. »

Cette doctrine est répandue dans tout ce concile, qui enseigne, dans une autre session 3, que « nous, qui ne pouvons rien de nous-mêmes, pouvons tout avec celui qui nous fortifie, en telle sorte que l'homme

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n'a rien dont il se puisse glorifier, » ou pourquoi il se puisse confier en lui-même; << mais que toute sa confiance et toute sa gloire est en Jésus-Christ, en qui nous vivons, en qui nous méritons, en qui nous satisfaisons, faisant de dignes fruits de pénitence, qui tirent leur force de lui, par lui sont offerts au Père, et en lui sont acceptés par le Père. » C'est pourquoi nous demandons tout, nous espérons tout, nous rendons grâces de tout par Notre-Seigneur Jésus-Christ. Nous confessons hautement que nous ne sommes agréables à Dieu qu'en lui et par lui; et nous ne comprenons pas qu'on puisse nous attribuer une autre pensée. Nous mettons tellement en lui seul toute l'espérance de notre salut, que nous disons tous les jours à Dieu ces paroles dans le sacrifice: Daignez, ô Dieu, accorder à nous pécheurs, vos serviteurs, qui espérons en la multitude de vos miséricordes, quelque part et société avec vos bienheureux apôtres et martyrs,... au nombre desquels nous vous prions de vouloir nous recevoir, ne regardant pas au mérite, mais nous pardonnant par grâce au nom de Jésus-Christ Notre-Seigneur. »

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L'Église ne persuadera-t-elle jamais à ses enfants qui sont devenus ses adversaires, ni par l'explication de sa foi, ni par les décisions de ses conciles, ni par les prières de son sacrifice, qu'elle croit n'avoir de vie, et qu'elle n'a d'espérance qu'en Jésus-Christ seul? Cette espérance est si forte, qu'elle fait sentir aux enfants de Dieu, qui marchent fidèlement dans ses voies, « une paix qui surpasse toute intelligence, » selon ce que dit l'apôtre 1. Mais encore que cette espérance soit plus forte que les promesses et les menaces du monde, et qu'elle suffise pour calmer le trouble de nos consciences; elle n'y éteint pas tout à fait la crainte, parce que si nous sommes assurés que Dieu ne nous abandonne jamais de lui-même, nous ne sommes jamais certains que nous ne le perdrons pas par notre faute, en rejetant ses inspirations. Il lui a plu de tempérer, par cette crainte salutaire, la confiance qu'il inspire à ses enfants; parce que, comme dit saint Augustin, «telle est notre infirmité dans ce lieu de tentations et de périls, qu'une pleine sécurité produiroit en nous le relâchement et l'orgueil; au lieu que cette crainte, qui, selon le précepte de l'apôtre 2, nous a fait opérer notre salut avec tremblement, » nous rend vigilants, et fait que nous nous attachons, avec une humble dépendance, à celui « qui opère en nous, par sa grâce, le vouloir et le faire suivant son bon plaisir, » comme dit le même saint Paul 3,

Voilà ce qu'il y a de plus nécessaire dans la doctrine de la justification; et nos adversaires seroient fort déraisonnables, s'ils ne confessoient que cette doctrine suffit pour apprendre aux chrétiens qu'ils doivent rapporter à Dieu par Jésus-Christ toute la gloire de leur salut.

Si les ministres après cela se jettent sur des questions de subtilité, il est bon de les avertir qu'il n'est plus temps désormais qu'ils se rendent si difficiles envers nous, après les choses qu'ils ont accordées aux luthériens et à leurs propres frères sur le sujet de la prédestination et

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de la grâce. Cela doit leur avoir appris à se réduire, dans cette matière, ce qui est absolument nécessaire pour établir les fondements de la piété chrétienne.

Que s'ils peuvent une fois se résoudre à se renfermer dans ces limites, ils seront bientôt satisfaits; et ils cesseront de nous objecter que nous anéantissons la grâce de Dieu, en attribuant tout à nos bonnes œuvres; puisque nous leur avons montré en termes si clairs, dans le concile de Trente, ces trois points si décisifs en cette matière: « Que nos péchés nous sont pardonnés par une pure miséricorde, à cause de Jésus-Christ; que nous devons à une libéralité gratuite la justice qui est en nous par le Saint-Esprit; et que toutes les bonnes œuvres que nous faisons sont autant de dons de la grâce. D

Aussi faut-il avouer que les doctes de leur parti ne contestent plus tant sur cette matière qu'ils faisoient au commencement; et il y en a peu qui ne nous confessent qu'il ne falloit pas se séparer pour ce point. Mais si cette importante difficulté de la justification, de laquelle leurs premiers auteurs ont fait leur fort, n'est plus maintenant considérée comme capitale par les personnes les mieux sensées qu'ils aient entre eux; on leur laisse à penser ce qu'il faut juger de leur séparation, et ce qu'il faudroit espérer pour la paix, s'ils se mettoient au-dessus de la préoccupation, et s'ils quittoient l'esprit de dispute.

Il faut encore expliquer de quelle sorte nous croyons pouvoir satisfaire à Dieu par sa grâce, afin de ne laisser aucun doute sur cette matière.

Les catholiques enseignent, d'un commun accord, que le seul JésusChrist, Dieu et homme tout ensemble, étoit capable, par la dignité infinie de sa personne, d'offrir à Dieu une satisfaction suffisante pour nos péchés. Mais ayant satisfait surabondamment, il a pu nous appliquer cette satisfaction infinie en deux manières: ou bien en nous donnant une entière abolition, sans réserver aucune peine; ou bien en commuant une plus grande peine en une moindre, c'est-à-dire la peize éternelle en des peines temporelles. Comme cette première façon est la plus entière et la plus conforme à sa bonté, il en use d'abord dans le baptême mais nous croyons qu'il se sert de la seconde dans la rémission qu'il accorde aux baptisés qui retombent dans le péché, y étant forcé en quelque manière par l'ingratitude de ceux qui ont abusé de ses premiers dons; de sorte qu'ils ont à souffrir quelque peine temporelle, bien que la peine éternelle leur soit remise.

Il ne faut pas conclure de là que Jésus-Christ n'ait pas entièrement satisfait pour nous; mais au contraire, qu'ayant acquis sur nous un droit absolu, par le prix infini qu'il a donné pour notre salut, il nous accorde le pardon, à telle condition, sous telle loi, et avec telle réserve qu'il lui plaît.

Nous serions injurieux et ingrats envers le Sauveur, si nous osions lui disputer l'infinité de son mérite, sous prétexte qu'en nous pardonnant le péché d'Adam, il ne nous décharge pas en même temps de toutes ses suites, nous laissant encore assujettis à la mort et à tant d'infirmités corporelles et spirituelles que ce péché nous a causées. Il

suffit que Jésus-Christ ait payé une fois le prix par lequel nous serong an jour entièrement délivrés de tous les maux qui nous accablent; c'est à nous à recevoir avec humilité et avec actions de grâces chaque partie de son bienfait, en considérant le progrès avec lequel il lui plaît d'avancer notre délivrance, selon l'ordre que sa sagesse a établi pour notre bien, et pour une plus claire manifestation de sa bonté et de sa justice.

Par une semblable raison, nous ne devons pas trouver étrange si celui, qui nous a montré une si grande facilité dans le baptême, se rend plus difficile envers nous, après que nous en avons violé les saintes promesses. Il est juste, et même il est salutaire pour nous, que Dieu, en nous remettant le péché avec la peine éternelle que nous avions méritée, exige de nous quelque peine temporelle pour nous retenir dans le devoir; de peur que, sortant trop promptement des liens de la justice, nous ne nous abandonnions à une téméraire confiance, abusant de la facilité du pardon.

C'est donc pour satisfaire à cette obligation que nous sommes assujettis à quelques œuvres pénibles, que nous devons accomplir en esprit d'humilité et de pénitence; et c'est la nécessité de ces œuvres satisfactoires, qui a obligé l'Église ancienne à imposer aux pénitents les peines qu'on appelle canoniques.

Quand donc elle impose aux pécheurs des œuvres pénibles et laborieuses, et qu'ils les subissent avec humilité, cela s'appelle « satisfaction; et lorsque ayant égard, ou à la ferveur des pénitents, ou à d'autres bonnes œuvres qu'elle leur prescrit, elle relâche quelque chose de la peine qui leur est due, cela s'appelle « indulgence. »

Le concile de Trente ne propose autre chose à croire sur le sujet des indulgences, sinon que « la puissance de les accorder a été donnée à l'Église par Jésus-Christ, et que l'usage en est salutaire; » à quoi ce concile ajoute ་་ qu'il doit être retenu, avec modération toutefois, de peur que la discipline ecclésiastique ne soit énervée par une excessive facilité : ce qui montre que la manière de dispenser les indulgences regarde la discipline.

Ceux qui sortent de cette vie avec la grâce et la charité, mais toutefois redevables encore des peines que la justice divine a réservées, les souffrent en l'autre vie. C'est ce qui a obligé toute l'antiquité chrétienue à offrir des prières, des aumônes et des sacrifices pour les fidèles qui sont décédés en la paix et en la communion de l'Eglise, avec une foi certaine qu'ils peuvent être aidés par ces moyens. C'est ce que le conle de Trente nous propose à croire touchant les âmes détenues dans le purgatoire 2, sans déterminer en quoi consistent leurs peines, ni beaucoup d'autres choses semblables, sur lesquelles ce saint concile demande une grande retenue, blâmant ceux qui débitent ce qui est incertain et suspect.

Telle est la sainte et innocente doctrine de l'Église catholique touchant les satisfactions, dont on a voulu lui faire un si grand crime.

1. Contin., sess. XXV, décr. De indulg.

2. Sess. xxv, decr. De Purgat.

Si, après cette explication, messieurs de la religion prétendue réformée nous objectent que nous faisons tort à la satisfaction de JésusChrist, il faudra qu'ils aient oublié que nous leur avons dit que le Sauveur a payé le prix entier de notre rachat; que rien ne manque à ce prix, puisqu'il est infini, et que ces réserves de peines, dont nous avons parlé, ne proviennent d'aucun défaut de ce payement, mais d'un certain ordre qu'il a établi pour nous retenir par de justes appréhensions et par une discipline salutaire.

Que s'ils nous opposent encore que nous croyons pouvoir satisfaire par nous-mêmes à quelque partie de la peine qui est due à nos péchés, nous pourrons dire avec confiance que le contraire paroft par les maximes que nous avons établies. Elles font voir clairement que tout notre salut n'est qu'une œuvre de miséricorde et de grâce; que ce que nous faisons par la grâce de Dieu n'est pas moins à lui que ce qu'il fait tout seul par sa volonté absolue; et qu'enfin ce que nous lui donnons ne lui appartient pas moins que ce qu'il nous donne. A quoi il faut ajouter que ce que nous appelons satisfaction, après toute l'Eglise ancienne, n'est, après tout, qu'une application de la satisfaction de Jésus-Christ.

Cette même considération doit apaiser ceux qui s'offensent, quand nous disons que Dieu a tellement agréable la charité fraternelle, et la communion de ses saints, que souvent même il reçoit les satisfactions que nous lui offrons les uns pour les autres. Il semble que ces messieurs ne conçoivent pas combien tout ce que nous sommes est à Dieu; ni combien tous les égards que sa bonté lui fait avoir pour les fidèles, qui sont les membres de Jésus-Christ, se rapportent nécessairement à ce divin Chef. Mais certes, ceux qui ont lu et qui ont considéré que Dieu même inspire à ses serviteurs le désir de s'affliger dans le jeûne, dans le sac et dans la cendre, non-seulement pour leurs péchés, mais pour les péchés de tout le peuple; ne s'étonneront pas si nous disons que, touché du plaisir qu'il a de gratifier ses amis, il accepte miséricordieusement l'humble sacrifice de leurs mortifications volontaires, en diminution des châtiments qu'il préparoit à son peuple : ce qui montre que, satisfait par les uns, il veut bien s'adoucir envers les autres, honorant par ce moyen son Fils Jésus-Christ dans la communion de ses membres, et dans la sainte société de son corps mystique.

L'ordre de la doctrine demande que nous parlions maintenant des sacrements, par lesquels les mérites de Jésus-Christ nous sont appliqués. Comme les disputes que nous avons en cet endroit, si nous en exceptons celle de l'eucharistie, ne sont pas les plus échauffées, nous éclaircirons d'abord, en peu de paroles, les principales difficultés qu'on nous fait touchant les autres sacrements, réservant pour la fin celle de l'eucharistie qui est la plus importante de toutes.

Les sacrements de la nouvelle alliance ne sont pas seulement des signes sacrés qui nous représentent la grâce, ní des sceaux qui nous la confirment; mais des instruments du Saint-Esprit, qui servent à nous l'appliquer, et qui nous la confèrent en vertu des paroles qui se prononcent, et de l'action qui se fait sur nous au dehors,

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