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Jésus-Christ offrent à Dieu leurs prières pour les hommes; qu'il est bon et utile de les invoquer d'une manière suppliante, et de recourir à leur aide et à leur secours, pour impétrer de Dieu ses bienfaits, par son Fils Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui seul est notre Sauveur et notre Rédempteur'. » Ensuite le concile condamne ceux qui enseignent une doctrine contraire. On voit donc qu'invoquer les saints, suivant la pensée de ce concile, c'est recourir à leurs prières, pour obtenir les bienfaits de Dieu par Jésus-Christ. En effet, nous n'obtenens que par Jésus-Christ et en son nom, ce que nous obtenons par l'entremise des saints; puisque les saints eux-mêmes ne prient que par Jésus-Christ, et ne sont exaucés qu'en son nom. Telle est la foi de l'Eglise, que le concile de Trente a clairement expliquée en peu de paroles. Après quoi nous ne concevons pas qu'on puisse nous objecter que nous nous éloignons de Jésus-Christ, quand nous prions ses membres, qui sont aussi les nôtres; ses enfants qui sont nos frères, et ses saints qui sont nos prémices, de prier avec nous et pour nous notre commun Maître, au nom de notre commun Médiateur.

Le même concile explique clairement et en peu de mots, quel est l'esprit de l'Église lorsqu'elle offre à Dieu le saint sacrifice pour honorer la mémoire des saints. Cet honneur, que nous leur rendons dans l'action du sacrifice, consiste à les nommer comme de fidèles serviteurs de Dieu dans les prières que nous lui faisons, à lui rendre grâces des victoires qu'ils ont remportées, et à le prier humblement qu'il se laisse fléchir en notre faveur par leurs intercessions. Saint Augustin avoit dit, il y a déjà douze cents ans, qu'il ne falloit pas croire qu'on offrît le sacrifice aux saints martyrs 2, encore que, selon l'usage pratitiqué dès ce temps-là par l'Eglise universelle, on offrît ce sacrifice sur leurs saints corps, et à leurs mémoires, c'est-à-dire, devant les lieux où se conservoient leurs précieuses reliques. Ce même Père avoit ajouté qu'on faisoit mémoire des martyrs à la sainte table, dans la célébration du sacrifice, « non afin de prier pour eux, comme on fait pour les autres morts; mais plutôt afin qu'ils priassent pour nous 3. » Je rapporte le sentiment de ce saint évêque, parce que le concile de Trente se sert presque de ses mêmes paroles, pour enseigner aux fidèles que << l'Eglise n'offre pas aux saints ce sacrifice, mais qu'elle l'offre à Dieu seul, qui les a couronnés; qu'aussi le prêtre ne s'adresse pas à saint Pierre ou à saint Paul, pour leur dire : Je vous offre ce sacrifice; mais que, rendant grâces à Dieu de leurs victoires, il demande leur assistance, afin que ceux dont nous faisons mémoire sur la terre daignent prier pour nous dans le ciel. » C'est ainsi que nous honorons les saints, pour obtenir par leur entremise les grâces de Dieu; et la principale de ces grâces, que nous espérons obtenir, est celle de les imiter; à quoi nous sommes excités par la considération de leurs exem

1. Sess. xxv, dec. De invoc., etc.

2. De Civit. Dei, 1. VIII, c. XXVII, tom. VII, col. 217 et seq.

3. Tract. LXXXIV in Joan., n. 1, t. III, part. 2, col. 709, serm. xvii De verb. Apost., nunc serm. CLIX, t. V, col. 765,

Conc. Trid., sess. XXII, c. 3.

ples admirables, et par l'honneur que nous rendons devant Dieu à leur mémoire bienheureuse.

Ceux qui considéreront la doctrine que nous avons proposée, seront bligés de nous avouer, que, comme nous n'êtons à Dieu aucune des perfections qui sont propres à son essence infinie, nous n'attribuons aux créatures aucune de ces qualités, ou de ces opérations qui ne peuvent convenir qu'à Dieu; ce qui nous distingue si fort des idolâtres, qu'on ne peut comprendre pourquoi on nous en donne le titre.

Et quand messieurs de la religion prétendue réformée nous objectent qu'en adressant nos prières aux saints, et en les honorant comme présents par toute la terre, nous leur attribuons une espèce d'immensité, ou du moins la connoissance du secret des cœurs, qu'il paroît néanmoins que Dieu se réserve, par tant de témoignages de l'Ecriture; ils ne considèrent pas assez notre doctrine. Car enfin, sans examiner quel fondement on peut avoir d'attribuer aux saints, jusqu'à certain degré, la connoissance des choses qui se passent parmi nous, ou même de nos secrètes pensées; il est manifeste que ce n'est point élever la

ature au-dessus de sa condition, que de dire qu'elle a quelque conmvissälite de en noses par la lumière que Dieu lui en communique, L'exemple des prophètes le justifie clairement, Dieu n'ayant pas même dédaigné de leur découvrir les choses futures, quoiqu'elles semblent bien plus particulièrement réservées à sa connoissance.

Au reste, jamais aucun catholique n'a pensé que les saints connussent par eux-mêmes nos besoins, ni même les désirs pour lesquels nous leur faisons de secrètes prières. L'Eglise se contente d'enseigner, avec toute l'antiquité, que ces prières sont très-profitables à ceux qui les font, soit que les saints les apprennent par le ministère et le commerce des anges, qui, suivant le témoignage de l'Écriture, savent ce qui se passe parmi nous, étant établis par ordre de Dieu esprits administrateurs , pour concourir à l'œuvre de notre salut; soit que Dieu même leur fasse connoître nos désirs par une révélation particulière; soit enfin qu'il leur en découvre le secret dans son essence infinie, où toute vérité est comprise. Ainsi l'Église n'a rien décidé sur les différents moyens dont il plaft à Dieu de se servir pour cela,

Mais quels que soient ces moyens, toujours est-il véritable qu'elle n'attribue à la créature aucune des perfections divines, comme faisoient les idolâtres; puisqu'elle ne permet de reconnoître, dans les plus grands saints, aucun degré d'excellence qui ne vienne de Dieu, ni aucune considération devant ses yeux que par leurs vertus, ni aucune vertu qui ne soit un don de sa grâce, ni aucune connoissance des choses humaines que celle qu'il leur communique, ni aucun pouvoir de nous assister que par leurs prières, ni enfin aucune félicité que par une soumission et une conformité parfaites à la volonté divine.

Il est donc vrai qu'en examinant les sentiments intérieurs que nous avons des saints, on ne trouvera pas que nous les élevions au-dessus de la condition des créatures; et de là on doit juger de quelle nature est l'honneur que nous leur rendons au dehors, le culte extérieur étant établi pour témoigner les sentiments intérieurs de l'âme.

Mais comme cet honneur, que l'Eglise rend aux saints, paroft principalement devant leurs images et devant leurs saintes reliques, il est à propos d'expliquer ce qu'elle en croit.

Pour les images, le concile de Trente défend expressément d'y croire aucune divinité ou vertu pour laquelle on les doive révérer, de leur demander aucune grâce, et d'y attacher sa confiance; » et veut que tout l'honneur se rapporte aux originaux qu'elles représentent'. » Toutes ces paroles du concile sont autant de caractères qui servent à nous faire distinguer des idolâtres; puisque, bien loin de croire comme eux que quelque divinité habite dans les images, nous ne leur attribuons aucune vertu, que celle d'exciter en nous le souvenir des originaux.

C'est sur cela qu'est fondé l'honneur qu'on rend aux images. On ne peut nier, par exemple, que celle de Jésus-Christ crucifié, lorsque nous la regardons, n'excite plus vivement en nous le souvenir de «celui qui nous a aimés jusqu'à se livrer pour nous à la mort2. » Tant que l'image présente à nos yeux fait durer un si précieux souvenir dans notre âme, nous sommes portés à témoigner, par quelques marques extérieures, jusques où va notre reconnoissance; et nous faisons voir, en nous humiliant en présence de l'image, quelle est notre soumisзion pour son divin original. Ainsi, à parler précisément, et selon le style ecclésiastique, quand nous rendons honneur à l'image d'un apôtre ou d'un martyr, notre intention n'est pas tant d'honorer l'image, que d'honorer l'apôtre ou le martyr, en présence de l'image. » C'est ainsi que parle le Pontifical romain3; et le concile de Trente exprime la même chose, lorsqu'il dit', « que l'honneur que nous rendons aux images se rapporte tellement aux originaux, que par le moyen des images que nous baisons, et devant lesquelles nous nous mettons à genoux, nous adorons Jésus-Christ, et honorons les saints dont elles sont la ressemblance. »

Enfin, on peut connoître en quel esprit l'Église honore les images, par l'honneur qu'elle rend à la croix et au livre de l'Évangile. Tout le monde voit bien que devant la croix elle adore celui « qui a porté nos crimes sur le bois 5; et que si ses enfants inclinent la tête devant le livre de l'Évangile, s'ils se lèvent par honneur quand on le porte devant eux, et s'ils le baisent avec respect, tout cet honneur se termine à la vérité éternelle qui nous y est proposée.

Il faut être peu équitable pour appeler idolâtrie ce mouvement religieux qui nous fait découvrir et baisser la tête devant l'image de la croix, en mémoire de celui qui a été crucifié pour l'amour de nous; et ce seroit être trop aveugle que de ne pas apercevoir l'extrême différence qu'il y a entre ceux qui se confioient aux idoles, par l'opinion qu'ils avoient que quelque divinité ou quelque vertu y étoit, pour ainsi dire, attachée; et ceux qui déclarent, comme nous, qu'ils ne se veu

1. Conc. Trid., sess. xxv, decr. De invoc., etc. - 2. Gal. II, 20.
3. Pont. Rom., De ben. imag. -4. Sess. XXV, decr. De invoc., etc.
5. Pet. II, 24.

lent servir des images que pour élever leur esprit au ciel, afin d'y honorer Jésus-Christ ou les saints, et dans les saints Dieu même, qui est F'auteur de toute sanctification et de toute grâce.

On doit entendre de la même sorte l'honneur que nous rendons aux reliques, à l'exemple des premiers siècles de l'Église; et si nos adversaires considéroient que nous regardons les corps des saints comme ayant été les victimes de Dieu par le martyre ou par la pénitence, ils ne croiroient pas que l'honneur que nous leur rendons, par ce motif, pût se détacher de celui que nous rendons à Dieu même.

Nous pouvons dire, en général, que s'ils vouloient bien comprendre de quelle sorte l'affection que nous avons pour quelqu'un s'étend, sans se diviser, à ses enfants, à ses amis, et ensuite par divers degrés à ce qui le représente, à ce qui reste de lui, à tout ce qui en renouvelle la mémoire; s'ils concevoient que l'honneur a un semblable progrès, puisque l'honneur, en effet, n'est autre chose qu'un amour mêlé de crainte et de respect; enfin, s'ils considéroient que tout le culte extérieur de l'Église catholique a sa source en Dieu même, et qu'il y retourne; ils ne croiroient jamais que ce culte, que lui seul anime, pût exciter sa jalousie : ils verroient, au contraire, que și Dieu, tout jaloux qu'il est de l'amour des hommes, ne nous regarde pas comme si nous nous partagions entre lui et la créature, quand nous aimons notre prochain pour l'amour de lui; ce même Dieu, quoique jaloux du respect des fidèles, ne les regarde pas comme s'ils partageoient le culte qu'ils ne doivent qu'à lui seul, quand ils honorent, par le respect qu'ils ont pour lui, ceux qu'il a honorés lui-même.

Il est vrai néanmoins que, comme les marques sensibles de révérence ne sont pas toutes absolument nécessaires, l'Eglise, sans rien altérer dans la doctrine, a pu étendre plus ou moins ces pratiques extérieures, suivant la diversité des temps, des lieux et des occurrences, ne désirant pas que ses enfants soient servilement assujettis aux choses visibles, mais seulement qu'ils soient excités, et comme avertis par leur moyen de se tourner à Dieu, pour lui offrir en esprit et en vérité le service raisonnable qu'il attend de ses créatures.

On peut voir, par cette doctrine, avec combien de vérité j'ai dit qu'une grande partie de nos controverses s'évanouiroit par la seule intelligence des termes, si on traitoit ces matières avec charité et si nos adversaires considéroient paisiblement les explications précédentes, qui comprennent la doctrine expresse du concile de Trente, ils cesseroient de nous objecter que nous blessons la médiation de Jésus、 Christ, et que nous invoquons les saints, ou que nous adorons les images d'une manière qui n'est propre qu'à Dieu. Il est vrai que comme, en un certain sens, l'adoration, l'invocation, et le nom de médiateur ne convient qu'à Dieu et à Jésus-Christ, il est aisé d'abuser de ces termes, pour rendre notre doctrine odieuse. Mais si on les réduit de bonne foi au sens que nous leur avons donné, ces objections perdront toute leur force; et s'il reste à messieurs de la religion prétendue réformée quelques autres difficultés moins importantes, la sincérité les obligera d'avouer qu'ils sont satisfaits sur le principal sujet de leurs plaintes

Au reste, il n'y a rien de plus injuste, que d'objecter à l'Eglise qu'elle fait consister toute la piété dans cette dévotion aux saints; puisque, comme nous l'avons déjà remarqué, le concile de Trente se con< tente d'enseigner aux fidèles que cette pratique leur est « bonne et utile1,» sans rien dire davantage. Ainsi l'esprit de l'Église est de condamner ceux qui rejettent cette pratique par mépris ou par erreur. Elle doit les condamner, parce qu'elle ne doit pas souffrir que les pratiques salutaires soient méprisées, ni qu'une doctrine que l'antiquité a autorisée soit condamnée par les nouveaux docteurs.

La matière de la justification fera paroître encore dans un plus grand jour, combien de difficultés peuvent être terminées par une simple exposition de nos sentiments.

Ceux qui savent tant soit peu l'histoire de la réformation prétendue, n'ignorent pas que ceux, qui en ont été les premiers auteurs, ont proposé cet article à tout le monde comme le principal de tous, et comme le fondement le plus essentiel de leur rupture, si bien que c'est celui qu'il est le plus nécessaire de bien entendre.

Nous croyons premièrement que « nos péchés nous sont remis gratuitement par la miséricorde divine, cause de Jésus-Christ 2 » Ce sont les propres termes du concile de Trente, qui ajoute 3 que «< nous sommes dits justifiés gratuitement, parce que aucune de ces choses qui précèdent la justification, soit la foi, soit les œuvres,

riter cette grâce. »

ne peut mé

Comme l'Écriture nous explique la rémission des péchés, tantôt en disant que Dieu les couvre, et tantôt en disant qu'il les ôte, et qu'il les efface, par la grâce du Saint-Esprit, qui nous fait de nouvelles créatures; nous croyons qu'il faut joindre ensemble ces expressions, pour former l'idée parfaite de la justification du pécheur. C'est pourquoi nous croyons que nos péchés non-seulement sont couverts, mais qu'ils sont entièrement effacés par le sang de Jésus-Christ, et par la grâce qui nous régénère; ce qui, loin d'obscurcir ou de diminuer l'idée qu'on doit avoir du mérite de ce sang, l'augmente au contraire, et la relève.

Ainsi la justice de Jésus-Christ est non-seulement imputée, mais actuellement communiquée à ses fidèles par l'opération du Saint-Esprit, en sorte que non-seulement ils sont réputés, mais faits justes par sa grâce.

Si la justice qui est en nous n'étoit justice qu'aux yeux des hommes, ce ne seroit pas l'ouvrage du Saint-Esprit : elle est donc justice même devant Dieu, puisque c'est Dieu même qui la fait en nous, en répandant la charité dans nos cœurs.

Toutefois il n'est que trop certain que « la chair convoite contre l'esprit, et l'esprit contre la chair", » et que « nous manquons tous en beaucoup de choses 6. >> Ainsi, quoique notre justice soit véritable par l'infusion de la charité, elle n'est point justice parfaite à cause du combat de la convoitise; si bien que le continuel gémissement d'une âme

1. Sess. xxv. décr. De invoc., etc. Ibid., c. 8. 4. Tit. III, 5, 6, 7.

2. Conc. Trid., sess. VI, c. 9.
5. Gal. v. 17. 6. Jac. III, 2.

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