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DICEOPOLIS.

Cette fête-ci n'est point consacrée à ce dieu de

la médecine.

LAMACHUS.

Enfans, soulevez, soulevez-moi la jambe! Hélas! mes amis, soutenez-moi.

DICEOPOLIS, aux courtisannes,

Allons, mes belles amies! avec vos mains blanches, rendez-moi aussi quelque service 1.

LAMACHUS.

Ce coup que je me suis donné à la tête, me cause des vertiges et m'obscurcit la vue.

DICEOPOLIS

Pour moi, je veux me coucher. J'éprouve une tension affreuse, et j'ai besoin de quelque repos 2.

LAMACHUS.

Qu'on me porte chez Pittalus, pour me livrer aux mains de la médecine.

DICEOPOLIS.

Qu'on me porte chez les juges. Où est le chef du banquet? Qu'on me donne l'outre.

E voi pigliatemi ambedue il mezzo de la caviglia, o dile

tissime.

2

Quia tintigine rumpor et in tenebris futuere gestio.

LAMACHUS.

Cette cruelle lance est profondément engagée

dans ma plaie.

DICEOPOLIS.

Voyez comme ce conge est vide? Fanfare! vic

toire !

LE CHOEUR.

Fanfare! victoire! ô vieillard, vous avez raison de triompher.

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Mais, j'ai même vidé un vase tout plein de vin pur, et sans prendre haleine.

LE CHOEUR.

Fanfare! victoire! ô vaillant buveur! allez, l'outre est à vous.

DICEOPOLIS

Suivez-moi donc en répétant: Fanfare! vic

toire!

LE CHOEUR.

Soit, nous vous suivons. Fanfare! victoire! et nous vous célébrerons vous et le prix que vous venez de remporter.

3 Týv‹à¤, mot de l'invention d'Archiloque pour exprimer l'imitation des sons de la cithare. Voyez le scholiaste de Pindare, et Eras. Schmid sur le commencement de la neuvième olym

EXAMEN

DES ACHARNIENS.

J'AI déjà eu l'occasion de remarquer, d'après *M. l'abbé Vatry, que les poëtes de la vieille comédie ne prirent point leurs sujets dans la vie ordinaire des hommes, et qu'ils cherchèrent à surprendre leurs spectateurs par la nouveauté et par la bizarrerie de leurs fictions. Les Acharniens viennent singulièrement à l'appui de cette proposition. Aristophane y suppose qu'un simple bourgeois fait seul un traité particulier avec les ennemis, qui mettent tout à feu et à sang, et qui ravagent toutes les campagnes. Il suppose, en outre, qu'en vertu de ce traité, ce bourgeois jouit de tous les avantages du commerce, vit dans l'abondance de toutes choses, et n'est uniquement occupé que de plaisirs et de festins, tandis que ses concitoyens sont en proie à toutes les horreurs de la guerre et réduits aux privations de tous les genres. Voilà certainement une fiction très-absurde en elle-même : on conviendra cependant que l'invraisemblance de cette supposition ne

nuit nullement au plaisir que peut causer la pièce, et à l'intérêt qu'elle inspire. Il ne s'agit dans cette comédie que de faire contraster les avantages de la paix avec les malheurs de la guerre. Ce but une fois bien connu, bien déterminé, et tout s'y rapportant, peu importe, à bien des égards, que la supposition qui amène les détails nécessaires pour parvenir à cette fin, soit vraisemblable ou non. Il y a mieux; c'est que plus il est invraisemblable qu'un seul particulier soit en paix, tandis que tous ses compatriotes sont en guerre, plus le contraste des avantages de la paix est frappant, quand un seul en jouit, en profite, les goûte et les fait valoir au milieu d'une foule de parens, d'amis et de concitoyens acharnés à ne respirer que meurtre et carnage, et à vouloir se venger de voisins inquiétans. C'est précisément ce qui donne lieu aux situations et aux scènes comiques dont cette pièce est remplie. Le poëte s'est d'ailleurs astreint aux trois unités de temps, de lieu et d'action.

Rien de plus simple que l'action des Acharniens; et le dialogue y est si naturel, les scènes y sont si bien liées les unes aux autres, les événemens y viennent si heureusement les uns à cause des autres, et jamais les uns après les autres, que l'action de cette pièce, quoiqu'on n'ait à y démêler aucune intrigue, a tout le mou

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vement nécessaire pour intéresser depuis le commencement jusqu'à la fin, pour faire desirer, dès les premières scènes, de voir l'issue des vues pacifiques de Dicæopolis combattues par l'intérêt de quelques particuliers, et par l'acharnement de tout un peuple. Le grand art d'Aristophane, est de savoir intéresser dans les sujets les plus simples, les plus dénués d'accessoires : voilà ce qui a dû lui concilier l'approbation des Athéniens, et les disposer favorablement pour tout ce qui viendrait d'un poëte qui, dans une des premières pièces de son début, montrait un talent aussi fécond et d'aussi grandes ressources.

Car enfin, il parvient dans les Acharniens à faire sentir les avantages de la paix sur la guerre, et å soutenir, pendant plus d'une heure, l'attention des spectateurs sur ce même sujet, sans en sortir, et sans y mêler aucun incident étranger, et néanmoins sans cesser d'amuser, d'intéresser, d'attacher et de piquer la curiosité par une gradation sensible, et dont l'on sent les progrès à mesure que les scènes se développent et que l'on approche du dénouement. C'est à ce terme, où aboutit toute action, où tout intérêt cesse, que le plaisir causé par cette comédie est parfait : parce qu'alors on y voit les personnages dans des situations tout-à-fait différentes de celles où ils s'étaient trouvés d'abord au commencement de l'ac

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