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litique que l'on fait jouer avec tant d'art; c'est un événement extraordinaire, unique dans son genre, c'est la vie d'une simple bergère dont le vertu et le courage obtiennent un résultat (le couronnement à Reims), contre lequel auraient sans doute échoué tous les plus célèbres guerriers de l'époque réunis. Mais il faut dire aussi que le consciencieux artiste n'a pas négligé dans son tableau le reflet de ce rayon céleste qui éclaire toute cette scène plus inconcevable encore qu'admirable; et il l'a rendu à merveille avec les couleurs du temps. Puis, il arrive avec non moins d'art au dénoûment fatal, aux flammes de cet affreux bûcher, que la malheureuse Jeanne eût évité si elle n'eût pas outrepassé sa mission, ou si elle eût eu affaire à des gens moins passionnés, moins vindicatifs et moins féroces par fanatisme.

Gloire donc et expression réitérée de gratitude à notre jeune, bon et savant ami, qui m'a procuré une de ces lectures les plus curieuses et pour le fond et pour la forme, qui m'aient intéressé depuis longtemps. J'y ai pris d'autant plus de plaisir que l'histoire de Jeanne a toujours été pour moi un sujet de prédilection; je me rappelle que jadis j'ai fait une bibliographie de tous les onvrages publiés sur cette béroïne (pour et contre), sur sa trop tardive rehabilitation; sur sa famille, les Du Lys, etc., etc. Je chercherai ce morceau dans mes vieux fatras, j'en ferai faire une jolie copie in 8°, et je la joindrai à l'exemplaire que je tiens de la libéralité de mes bons amis, (père et fils); cet exemplaire en vaudra bien un autre.

G. PEIGNOT.

Mon bien bon ami,

AU MÊME.

Dijon, 1er décembre 1840.

Je m'empresse de vous envoyer les renseignements que vous me demandez par votre aimable lettre du 29 novembre dernier, tant sur la prétendue imprimerie de Marmagne.que sur les imprimeries de Dijon, Voici ce que j'ai pu découvrir à cet égard.

D'abord je n'ai jamais entendu parler d'imprimerie à Marmagne, petit village à 3 lieues 1/2 de Semur et à 14 lieues de Dijon. Il est bien vrai que le dictionnaire géographique de M. Briand de Verze fait mention de cette imprimerie; mais je suis persuadé que c'est une erreur, Marmagne n'ayant que 281 habitants. S'il eût eu une imprimerie, je ne l'aurais pas ignoré quand j'étais inspecteur de l'imprimerie et de la librairie; et dès lors comment aurait pu se for

mer un établissement de cette nature dans un petit trou habité par quelques paysans ignorants, qui sans doute n'ont jamais entendu parler de presse? Je crois donc pouvoir assurer que l'imprimerie de Marmagne est un conte. S'il en était autrement, je l'aurais su par le receveur particulier des finances de Semur, mon intime ami.

Quant aux imprimeries de Dijon, c'est différent. Il n'y a pas six imprimeurs, comme vous le dites, mais seulement cinq, savoir:

1° M. Frantin, qui a six presses dont deux en fer et quatre en bois. Les deux en fer sont ordinairement occupées.

20 M. Simmonot-Carion, qui possède trois presses en fer et une en bois. Deux sont ordinairement occupées. (Un journal politique et littéraire paraissant tous les deux jours s'imprime à cette imprimerie.)

3o M. Douillier, imprimeur, ayant de plus lithographie, fonderie de caractères, stéréotypie, possède cinq presses en fer et une en bois pour les épreuves. Mais de ces cinq presses, deux à trois sont ordinairement occupées. (Le journal intitulé le Courrier de la Côte-d'Or, paraissant tous les deux jours, s'imprime chez M. Douillier.) Cet imprimeur avait essayé de faire une presse mécanique; mais cela n'a pas eu de suite; et il n'en existe aucune de cette espèce à Dijon.

40 Madame veuve Brugnot possède trois presses en fer et une en bois pour les épreuves. Deux seulement sont occupées. (On imprime chez cette dame le journal intitulé le Spectateur qui paraît tous les deux jours.)

5o Madame veuve Noellat1; elle n'a qu'une presse en fer et une en bois. Elle fait peu de chose. (On imprime chez elle une petite feuille d'affiches.)

Voilà, mon cher ami, tout ce que je savais à peu près sur les imprimeurs de Dijon, et tout ce que j'ai vérifié aujourd'hui d'après votre lettre. Quand je me suis servi de l'expression presses occupées, j'ai voulu dire presses montées; car il s'en faut beaucoup, surtout dans ce moment, qu'elles soient continuellement occupées. On fait peu imprimer; cette partie est en souffrance à Dijon, comme ailleurs. Tant qu'on accordera des brevets à la barbouille et bien au delà des besoins de chaque localité, il est naturel que tout languisse. Je soutiens que trois imprimeries et tout au plus quatre, suffiraient à Dijon; avec trois on vivra; avec quatre ou vivotera, avec cinq on végète et on végètera. Sans les quatre feuilles ou journaux qui s'impriment ici, vaille que vaille, la détresse de certaines presses serait bien plus sensible.

Au reste vous en savez mille fois plus que moi sur les causes de la gêne de la typographie. J'espère bien que vos ÉTUDES, élaborées avec l'énergie et la dialectique que je vous connais, contribueront à éclai

rer le gouvernement et à hâter le remède. Tout le monde gémit sur les inondations qui ont ravagé le midi depuis un mois, et personne ne songe aux inondations de la presse qui ravagent la France depuis dix ans. Cela viendra sans doute, mais c'est à vous qu'il appartient de donner l'impulsion.

Adieu, mon cher ami, pardonnez à ce griffonnage jeté à la hâte sur le papier; vous désiriez que je vous répondisse promptement, c'est ce que je me suis empressé de faire, en courant aux renseignements sitôt après la réception de votre lettre. Mon diable de Prédicatoriana, qui en est à la septième feuille de l'impression, me donne une besogne infernale, car je suis obligé de refaire presque en entier le manuscrit qui gisait dans mes cartons depuis près de 30 ans.

Ne m'oubliez pas, je vous prie, près de notre aimable lauréat, que je serais bien flatté d'accompagner au tombeau de Virgile, du moins en feuilles. Il paraît qu'il a autant de goût pour Justinien et Tribonien que j'en avais à son âge; et si, comme moi, à sa troisième cause, il jette non pas son bounet carré mais sa toque, en plein parquet, ne vous en effrayez pas; il s'élèvera haut, de quelque côté qu'il dirige son vol.

Mes tendres respects à madame Crapelet. Pour vous, je vous embrasse de toute l'étreinte de mon cœur et de mes bras, comme le meilleur de mes bons, sincères et fidèles amis.

G. PEIGNOT.

P. S.—Si je n'avais pas répondu complétement à ce que vous désiriez sur les imprimeries de Dijon, mandez-le-moi, et je tâcherai de répondre exactement à votre nouvelle demande. Je vous remercie de l'envoi que vous m'annoncez de cette partie intéressante de votre grand travail; je l'attends avec impatience. Ce sera un mets très-friand pour mes goûts particuliers.

LETTRES ET ENTRETIENS SUR L'ÉDUCATION DES FILLES, PAR MADAME DE MAINTENON, recueillis et publiés pour la première fois par M. TH. Lavallée. Paris, 1861, 2 vol. in-12. 7 n

A défaut de monuments originaux, notre époque abonde en études critiques et en réhabilitations historiques. Parmi celles-ci, nulle n'a mieux réussi que celle de madame de Maintenon entreprise par M. Th. Lavallée. Plein de séve et de richesses naturelles, doué en même temps d'un esprit d'observation admirable, le célèbre profes

1 Son mari s'est coupé le cou avec un rasoir, il y a deux à trois ans, tant la typographie lui souriait et lui rapportait d'avantages.

seur de Saint-Cyr, après avoir enterré Ancillon en publiant son Histoire des Français, s'est tourné du côté de La Beaumelle et a détruit ligne par ligne les productions romanesques de l'écrivain protestant. Occupé depuis quinze ans à rassembler tous les documents relatifs à madame de Maintenon, M. Lavallée, pour nous aider à attendre sa Correspondance générale, qui n'aura pas moins de dix à douze volumes, vient de publier une nouvelle édition de tout ce qu'elle a écrit soit sur l'éducation des demoiselles de Saint-Cyr, soit pour former les religieuses qui étaient chargées de cette éducation. Cette publication, d'une grande importance dogmatique, littéraire et spirituelle, nous montre madame de Maintenon dans sa vie privée, sa vie ordinaire et réelle, dans le secret et l'intimité de sa pensée, dans ses véritables affections et ses goûts, dans tout l'éclat et la plénitude de ses facultés. « C'est dans cette correspondance avec ses chères filles de Saint-Cyr qu'elle se révèle entièrement, comme écrivain, comme penseur, comme moraliste de premier ordre, et qu'on peut hardiment la mettre à côté de Bossuet, de La Bruyère et de madame de Sévigné; c'est là enfin que le problème de cette femme, tant discutée, tant calomniée, se trouve résolu, et qu'il est démontré que madame de Maintenon a été moins un personnage politique gouvernant l'État et Louis XIV, qu'une femme occupée uniquement du salut du roi, et qui s'était donné pour mission l'éducation de Saint-Cyr, mission où elle montre une telle supériorité d'esprit, une telle connaissance du cœur humain, un bon sens si exquis, tant de grâce et tant de sagesse, qu'on peut la dire l'institutrice la plus parfaite qui ait jamais existé. D

Les deux volumes, que nous ne saurions assez recommander à nos lecteurs, contiennent des Lettres, des Entretiens, des Instructions, tracées en un langage doux, juste, naturellement éloquent et court, c'est Saint-Simon qui le reconnaît, et on sait qu'il ne peut être soupçonné d'indulgence pour l'héroïne de M. Lavallée.

Dans une pièce intitulée: Esprit de l'institut des filles de SaintLouis, madame de Maintenon, les engageant à vivre le plus frugalement possible sur les revenus de la maison, leur dit : « Le roi, votre fondateur, a ôté ces biens au peuple de son royaume, ou à l'Église qui les possédoit : il a donc pris ces grands biens sur des peuples pauvres et chargés, et sur l'Église, qui tient en dépôt le patrimoine des pauvres et le prix des péchés des hommes, pour une œuvre sainte. Comment des filles qui ont fait vœu de pauvreté oseront-elles dissiper ce bien consacré pour contenter leurs fantaisies, et pour se rapprocher du luxe du siècle ? »

Cette phrase, glissée là, à ce qu'il paraît, par l'auteur de Télémaque,

fut mise sous les yeux de Louis XIV et approuvée par lui. Ce détail ne nous indiquerait-il pas que, si naguère on traitait les princes avec plus de cérémonie qu'aujourd'hui, en revanche, on ne craignait pas de leur rappeler davantage la vérité ?

Ailleurs, madame de Maintenon, enseignant qu'il n'y a rien qu'on n'ait quelquefois besoin de savoir, nous fait de Louvois un portrait inédit. « Il savoit, dit-elle, toutes sortes de métiers; il avoit les doigts prodigieusement gros, à peu près comme deux de mes pouces, et avec cela il démontoit une montre avec une adresse admirable, quoiqu'il n'y ait rien de si délicat. Il étoit cordonnier, maçon, jardinier. Un jour que je dévidois de la soie plate sur deux cartes ou carrés faits d'une jolie façon, il étoit auprès du roi, dans ma chambre, et mouroit d'envie de voir comment ce que je tenois étoit fait. Le roi s'en aperçut, et me le dit tout bas; je le lui montrai, il défit la soie, examina la carte, et raccommoda tout fort adroitement. »>

Il faut lire surtout la charmante leçon d'histoire que fit madame de Maintenon à la classe bleue, en 1717, à l'âge de 82 ans; mais ce que nous en avons cité suffit peut-être pour constater que ce n'est pas seulement aux demoiselles ou aux mères de famille que s'adresse le nouvel ouvrage de M. Th. Lavallée: dans quelque situation qu'on se trouve, on en tournera les pages sans effort et, s'il vous tombe des mains, ce sera plutôt par un mouvement de surprise que par lassitude.

Augustin GALITZIN.

LA SEINE INFÉRIEURE AU TEMPS DES ROMAINS, par M. l'abbé COCHET, inspecteur des monuments historiques de la Seine-Inférieure. 4 » Dans le n° 108 du Bulletin (15 juin), en faisant connaître la SeineInférieure au temps des Gaulois, nous émettions le vœu d'avoir la suite de ce consciencieux travail. Notre appel a été entendu, comme le prouve le titre de la brochure qui n'est, nous le croyons, qu'un chapitre d'une grande histoire. Les textes sont moins rares que pour la période précédente, néanmoins il reste encore bien des lacunes, des points à éclaircir. Profitant de la connaissance approfondie qu'il a du pays, M. l'abbé Cochet a cherché à les relier entre eux; nous ne prétendons pas qu'il ait entièrement déchiré le voile qui couvre ces temps déjà si loin de nous, il apporte ses autorités, à tous le droit de les contrôler, à de plus savants celui de les mieux interpréter, si faire se peut, nous savons que l'auteur ne s'en formalisera nullement. Une carte archéologique, un plan de Rouen restitué par les soins de M. de Caumont, cet autre infatigable explorateur de la Normandie, le plan de villas découvertes par l'auteur ajoutent à l'intérêt du texte qu'il complète.

L'abbé Valentin DUFOUR.

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