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La fable, ou plutôt la poésie, a fait de la justice une déesse en deux personnes :

L'une, sous le nom de Thémis, fille du Ciel et de la Terre,

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l'autre, sous le nom d'Astrée, ou la Vierge, fille de Jupiter et de Thémis.

Selon Phèdre, Prométhée avait essayé d'en composer une troisième, sous le nom de Veritas :

Creta subtili Veritatem fecerat,

Ut jura posset inter homines reddere.

(Appendix, II.)

Mais il ne paraît pas que cette création du fils de Japet ait subsisté plus longtemps que l'homme formé de limon

MOEURS JURID. ET JUDIC. - T. III.

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terrestre, qu'il avait animé du feu céleste, dérobé par lui dans l'Olympe.

Dans le dernier état de la mythologie, on ne connaissait plus guère comme personnification de la justice que la vierge Astrée, qui avait succédé à sa mère.

Le poëte grec Aratus, qui eut l'honneur d'être traduit en vers latins non-seulement par Cicéron et par Avienus, mais aussi par Germanicus César, raconte, dans ses Phénomènes, que tant que dura l'âge d'or Astrée demeura sur la terre et gouverna les humains:

Hæc manet in sanctis, dum gens manet aurea, terris.

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Dans cet heureux temps, tout le monde étant innocent, Astrée n'avait que fort peu de chose à faire pour accomplir sa tâche; car, ainsi que le remarque judicieusement Ovide, rien ne devait être plus aisé que de rendre la justice à des justes:

Nullus erat justis reddere jura labor.

(Fast., I.)

Il n'en fut plus ainsi après le siècle d'or; la discorde étant survenue dans les siècles suivants, Astrée prit en haine les humains, et s'éloigna des lieux où ils formaient des sociétés :

Oculos fugiens exosa sequentum,

Linquebat cœtus hominum.

(AVIEN., Arat.)

Elle s'était retirée sur de hautes montagnes; et parfois

encore en descendait, pour venir en aide aux mortels, qui sollicitaient sa présence dans les cités qu'ils avaient construites :

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Mais, après avoir reconnu toute l'étendue du mal qui se produisait en son absence, et combien les générations nouvelles étaient déchues de la pureté originelle des générations primitives, elle déclara aux hommes qu'elle ne daignerait plus se montrer au milieu d'eux, et les abandonna définitivement, en s'envolant au ciel :

Sed simul ac magnas hominum venisset ad urbes,
Improba terrificis sic ulta est crimina verbis :
<< Non ego me dignor posthac monstrare videndam,
Degener o primæ proles nunc altera prolis,
Degeneres iterum iterumque habitura nepotes. >>

(CIC., Arat.)

Hæc effata super montes abit alite cursu,
Adtonitos linquens populos, graviora paventes.

(GERMANICUS, Arat.)

Une fois au ciel, elle n'en revint plus; car elle fut changée en constellation et ne conserva plus que le nom de Virgo ou, suivant Manile, celui d'Érigone:

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Du reste, elle ne s'enfuit de la terre que progressivement et après s'être assurée qu'il ne s'y trouvait plus aucune contrée dans laquelle elle pût régner sans partage. De toutes les divinités, elle fut la dernière à la quitter, et ce fut chez les hommes des champs qu'elle fit, en se retirant, ses derniers pas:

Paulatim deinde ad superos Astræa recéssit.

(Juv., 6.)

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Si je me suis permis de faire sur la justice cette courte leçon de mythologie, c'est que, marchant avec les poëtes, il est bien difficile de ne pas entrer quelque peu dans le champ des allégories.

Après tout, quelque fabuleuses qu'elles fussent, ces traditions poétiques avaient pourtant une haute signification, qu'il est peut-être à propos de faire remarquer ici.

En déifiant la justice, elles témoignaient de la sublimité de sa mission.

En la montrant fuyant les hommes une fois réunis en société, malgré leurs efforts pour la retenir, n'apparaissant plus parmi eux que par intervalles, et sur leur invocation, et les abandonnant complétement, alors que l'injustice et la violence avaient usurpé sa place, elles faisaient entendre que sans elle il n'y a que désordre dans le monde. A ce point de vue la fable est presque de l'histoire, et Virgile y ajoutait un trait de vérité de plus en notant, dans ses Géorgiques, que le dernier asile de la déesse avait été la campagne, lorsque la campagne était encore à l'abri de la contagion des villes.

Mais rapprochons-nous davantage de la réalité.

§ II.

Institution de la magistrature

Origine historique de la justice distributive.

et des tribunaux.

Les poëtes philosophes, ceux qui recherchaient l'origine des choses ailleurs que dans la fable, donnaient à la justice le même berceau qu'à la loi.

Lucrèce les faisait naître l'une et l'autre à l'époque où

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