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féremment. Toutes les femmes, même celles dont l'honneur était perdu, furent indistinctement admises à sacrifier sur l'autel de la Pudicité, tant patricienne que plébéienne; si bien que cette pratique religieuse finit par tomber en complet oubli : « Vulgata dein religio a pollutis, nec matronis solum, « sed omnis ordinis feminis, postremo in oblivionem ve« nit.» (Ibid.).

La conséquence qui se déduit de ce trait d'histoire et de la réflexion finale de Tite-Live, c'est que vers le milieu du cinquième siècle de Rome, bien que les édiles eussent quelquefois à sévir contre des épouses coupables, les matrones se faisaient cependant encore assez généralement un devoir d'observer la fidélité conjugale, qu'elles y mettaient même une sorte d'émulation; mais que plus tard le culte de la déesse Pudicité ne fut plus de leur part qu'un acte d'hypocrite dévotion, dont elles s'affranchirent tout à fait dès l'instant où l'adultère eut jeté le masque et fut pour ainsi dire passé à l'état de règle.

C'est la confirmation de ce que j'ai dit avec les poëtes (1).

IV. De graves auteurs ont recherché ce que statuait la lé

(1) Pline le Naturaliste raconte, sur la foi d'un ancien auteur, que les Psylles, peuple de Libye, avaient reçu de la nature une odeur de corps dont les émanations étaient délétères pour les serpents, qu'elles faisaient tomber en pamoison; mais que les individus issus d'un commerce illégitime ne jouissaient pas du bénéfice de cette odeur; qu'aussi, afin de s'assurer de la fidélité de l'épouse qui les avait rendus pères, ils avaient coutume d'exposer leurs enfants aussitôt après leur naissance aux reptiles les plus venimeux, et que si ces animaux ne s'éloignaient pas, c'était la preuve que le nouveau-né avait du sang adultérin dans les veines : «< Psyllorum cor« pori ingenitum virus exitiale serpentibus, et cujus odore sopirent eas. « Mos vero genitos protinus objiciendi sævissimis earum, eoque genere pu«< dicitiam conjugum experiendi, non profugientibus adulterino sanguine << natos serpentibus. » (VII, 2.)

Si les Romains eussent été doués de ce virus congénial, et s'ils eussent pu vérifier la légitimité de leur descendance par le même procédé que celui dont les Psylles faisaient usage, il est probable qu'à l'époque du complet relâchement de leurs mœurs conjugales ils eussent trouvé du sang adultérin dans les veines de beaucoup de nouveau-nés. C'est peut-être ce que Pline a voulu faire entendre en rapportant cette fable.

gislation romaine au sujet des femmes prostituées. J'en ai déjà touché quelques mots en parlant de la juridiction des édiles. C'est ici le lieu de m'expliquer un peu plus amplement sur ce sujet, qui n'est pas sans intérêt au point de vue des mœurs de l'ancienne Rome.

Il est hors de doute que les Romains toléraient la prostitution, et que les hommes avaient toute liberté de fréquenter les lieux où elle s'exerçait. Plaute s'en explique dans ce passage du Curculio:

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Quin quod palam est venåle, si argentum est, emat.

(I, 1.)

Le sens de ce passage, déguisé sous une formule juridique, de même que beaucoup d'autres du même auteur, est que chacun a droit d'acheter les faveurs d'une femme publique, quand il a de quoi les payer.

C'est aussi ce que fait entendre Térence dans cet extrait de l'Eunuque :

Quis homo pro mocho unquam vidit in domo meretricia
Prehendi quemquam?.

(V, 4.)

On se rappelle le mot de Caton l'ancien, qui est rapporté par Horace, et que j'ai cité dans l'article de l'adultère. Il confirme pleinement l'induction qui se tire des textes qui précèdent, et montre qu'aux yeux du plus rigide des censeurs romains la fréquentation des maisons de prostitution n'était nullement répréhensible.

Par une conséquence naturelle de cette tolérance, les femmes qui n'étaient point en puissance de mari pouvaient impunément se prostituer, quand elles étaient sui juris, ou que le chef de la famille à laquelle elles appartenaient n'y faisait pas d'opposition. Seulement elles étaient tenues de déclarer à l'édile leur intention de se livrer à la prostitution. On trouvait qu'elles étaient assez punies par cette humiliante obligation. Ainsi le fait remarquer Tacite, à propos d'une

citoyenne de noble race qui s'était fait inscrire à l'édilité comme femme publique : « Vistilia, prætoria familia genita, << licentiam stupri apud ædiles vulgaverat, more inter veteres « recepto, qui satis pœnarum adversus impudicas in ipsa « professione flagitii credebant. » (Annal., II, 85.)

Il y avait d'ailleurs des peines sévères contre les femmes. qui se prostituaient sans avoir fait préalablement la déclaration qui leur était imposée. Sous la république, les édiles pouvaient les déférer à la justice du peuple, et les faire condamner à l'amende et même à l'exil. Tite-Live en cite des exemples dans son Histoire (liv. X et XXV).

De plus, on obligeait ces femmes à prendre un vêtement particulier, différent de celui des femmes honnêtes, parce que, suivant Suétone (Tiber., XXXV), elles perdaient par leur infâme profession les droits et la dignité de matrone, « jure ac dignitate matronali erant exsolutæ ». Ce vêtement, appelé toga, n'était autre que celui qu'on imposait également aux épouses condamnées pour adultère. J'ai noté plusieurs textes de Juvénal et de Martial dans lesquels il en est fait mention, au sujet de ces dernières. En voici un autre d'Horace qui s'applique particulièrement aux prostituées de profession :

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Comme il arriva un temps où des femmes du grand monde se livraient à la prostitution, on en dut venir, et ceci peut donner une idée de la démoralisation de l'époque, à faire défense à celles dont le père ou le mari avait été chevalier romain d'exercer ce honteux métier. Ce fut sous Tibère qu'intervint le sénatusconsulte qui portait cette prohibition: «Ne « quæstum corpore faceret cujus pater aut maritus eques <«< romanus fuisset. » (Tac., Annal., I, 85.)

Assez ordinairement c'étaient les femmes adultères qui se faisaient inscrire ainsi comme prostituées sur les registres des édiles, et cela en vue de se soustraire à l'application des

peines édictées par la loi Julia. Plusieurs de celles-là n'en furent pas moins exilées par Tibère, au dire de Suétone.

Du reste, la prostitution ne cessa pas d'être tolérée à Rome. Il se rencontra un prince, l'empereur Tacite, qui, suivant Vopiscus (Tac., XI), la chassa de la ville; mais elle ne tarda pas à y rentrer, et s'y maintint aussi longtemps que dura l'empire romain.

Voies de fait.

Coups et blessures.
mation.

Injures.

Diffa

Le droit romain donnait la commune qualification d'injuria aux voies de fait plus ou moins graves contre les personnes, aux injures et à la diffamation par paroles ou par écrit. << Injuria, dit l'Auctor ad Herennium (IV, 14), est contumelia, « quæ aut pulsatione corpus, aut convicio aures, aut turpi«tudine vitam cujusquam violat. »

La loi des Douze Tables distinguait ainsi qu'il suit ces divers actes délictueux :

1o Les violences graves, celles qui avaient pour résultat la rupture d'un membre;

2o Les coups qui avaient endommagé le visage ou la mâchoire d'une personne de condition libre;

3o La diffamation par paroles ou par écrit;

4o Les injures ou les voies de fait légères.

C'est à la première catégorie seulement, aux violences suivies de la fracture d'un membre, que la loi des Douze Tables appliquait la peine du talion : «Si membra rupsit, << ni cum eo pacit, talio esto. »

Pour les blessures faites au visage, avec bris de dents, par exemple, la peine était de trois cents esclaves à fournir et de cent cinquante as: « qui os ex genetali fudit libero, << CCC servo, CL æris pœnæ sunto. » L'interprétation que je viens de faire de cet article fort obscur est-elle exacte? Je ne voudrais pas le garantir; mais c'est ainsi qu'elle est donpar des érudits, qui se sont tirés de la difficulté en mettant le mot genuino à la place du mot genetali.

née

La diffamation par paroles proférées publiquement, ou par écrit, entraînait la peine de la fustigation : « Si qui pipulo <«< centasit, carmenve condidit, quod infamiam faxit flagi<< tiumve alteri, fuste ferito. >>

Suivant les interprètes de ce troisième article, les mots, si qui pipulo centasit veulent dire : « Si quelqu'un profère << publiquement une injure contre autrui. » Ils ont d'ailleurs été traduits de la sorte par l'édit d'un préteur, qui s'y connaissait mieux que nous.

Enfin les injures et les voies de fait légères étaient punies d'une amende de 25 as au profit de la partie lésée : « Si qui «< injuriam alteri faxit, XXV æris pœnæ sunto. >>

Je ne transcris ces articles de la loi des Douze Tables que pour mémoire et à titre de monument curieux de législation primitive. On n'ignore pas en effet qu'ils ne tardèrent pas à tomber en désuétude; les uns, parce que les pénalités qu'ils édictaient étaient ou inexécutables ou excessives; les autres, parce que ces peines étaient devenues insuffi

santes.

Mais les distinctions qu'ils établissaient subsistèrent, et les différentes espèces d'injuriæ, personales ou reales, leves ou atroces, conservèrent pendant longtemps leur caractère de délit purement privé, en ce sens qu'ils ne donnaient lieu qu'à une action civile au profit de la partie lésée, et n'étaient justiciables que des judicia privata. Seulement toutes les pénalités furent ramenées par les préteurs à de simples dommages-intérêts, pour lesquels ils donnaient aux plaignants l'actio æstimatoria. C'était le juge qui réglait le taux de cette réparation pécuniaire, suivant la gravité de l'offense.

Les préteurs du reste ne se bornèrent pas à ces changements; ils firent rentrer aussi dans le domaine de l'actio injuriarum plusieurs autres variétés de voies de fait ou d'injures, qui avaient peut-être été également prévues par la loi des Douze Tables, mais à l'égard desquelles ses dispositions, s'il en existait, nous sont inconnues.

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