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PRESIDENCE DE M. SAUZET.

Séance du Jeudi 29 Janvier 1846.

Le procès-verbal de la séance du 28 est lu et adopté. M. le Président donne lecture de la lettre suivante :

`a M. le Président,

Paris, le 26 janvier 1846.

« Un évènement douloureux vient de me frapper dans mes affections les plus chères; des devoirs sacrés me rappellent chez moi. Je viens vous prier d'avoir la bonté de demander à la Chambre un congé.

"Agréez, M. le Président, etc.

« Signé : Louis de STAPLANDE,
« Député du Nord. »

La Chambre accorde un congé.

Un congé est également accordé à M. Martin (de l'Isère).

L'ordre du jour appelle la suite de la délibération sur le projet d'Adresse.

On reprend la discussion du quatrième paragraphe.

UN MEMBRE fait remarquer que, s'il convient d'agrandir la discussion à l'origine du débat, l'on doit s'attacher à la restreindre quand on approche du vote. Il lui semble que M. le Ministre de l'instruction publique a réservé la question la plus importante, celle de savoir si une loi sera ou ne sera pas présentée.

L'orateur voudrait qu'on s'expliquât à ce sujet.

Il n'hésite pas, quant à lui, à approuver l'ordonnance rendue; il la croit bonne et légale, et il reconnaît, en même temps, qu'il y avait dans l'organisation de l'ancien conseil royal des abus auxquels il était urgent de remédier. Le Ministre a bien fait de trancher la question, d'avoir exécuté ce que ses prédécesseurs n'avaient osé entreprendre.

La légalité de l'ordonnance ne paraît pas à l'orateur contestable; l'ordonnance a effectivement replacé les choses dans l'état où les avait mises le décret impérial. L'orateur croit pouvoir ajouter que cette mesure a excité dans l'Université une satisfaction peu équivoque. Des lettres de remerciement ont été adressées au Ministre. C'est qu'effectivement le conseil royal avait abusé de son autorité; c'est qu'en matière philosophique, particulièrement, les hommes qui ne professaient pas la doctrine officielle avaient été frappés d'une sorte d'ostracisme. A cet égard, l'orateur revient sur les faits qui ont été déjà exposés par l'un des préopinants. Il ajoute qu'une illégalité flagrante a été commise par le conseil royal; qu'au lieu de professeurs suppléants, on a, au mépris de la loi, introduit à la Sorbonne trois professeurs adjoints.

L'orateur, en terminant, insiste sur la nécessité d'une loi: derrière une ordonnance qu'il répute bonne, il craindrait de trouver des intentions et des résultats qui n'auraient pas le même caractère. Il ne faut pas que le Ministre puisse profiter de la puissance qu'il a attirée à lui, pour livrer l'enseignement aux congrégations qui, depuis quelques années, s'efforcent de l'envahir.

M. LE MINISTRe de l'instruction publique répond :

« Je n'ai pas procédé par une loi, parce que je ne l'ai pas dû, parce que je ne le pouvais pas.

« Je ne l'ai pas dû, parce que, s'il est un point qui me paraisse être sorti incontesté jusqu'à présent de la discussion qui a eu lieu dans les deux enceintes, c'est que l'ordonnance qui a modifié les deux ordonnances, qui est rentrée dans la loi constitutive de l'Université, est régulière et légale.

« Je ne pouvais pas procéder autrement, par une raison que la Chambre va comprendre à l'instant même. Le jour où l'on présente une loi aux Chambres, elle n'est pas votée; elle ne l'est pas toujours dans la session même qui a vu s'ouvrir le débat, et je demande quelle eût été la situation respective du Ministre et du conseil royal de l'Université pendant tout le temps qui se serait écoulé depuis le moment où la question aurait été posée devant les Chambres, jusqu'à celui où elle aurait été résolue par une loi. La loi est possible aujourd'hui, la loi est facile aujourd'hui; car tout le monde la demande, y compris ceux qui auraient été le plus surpris de voir la question posée au sein des Chambres.

"Maintenant, Messieurs, y a-t-il lieu à procéder immédiatement à une loi? J'attendrai, pour entrer dans les détails de cette question, que les divers éléments dont elle se compose aient été distingués à cette tribune. Parle-t-on d'une loi générale sur les matières comprises dans l'art. 69 de la charte constitutionnelle? parle-t-on d'une loi particulière sur l'enseignement public, sur l'instruction publique, en ce qui touche les établissements qui relèvent directement de l'Etat? parle-t-on d'ane loi particulière sur le conseil royal de l'Université?

« Je n'aborde pas ces quetions, je les indique. Je fais seulement remarquer à la Chambre que je me suis préoccupé de la question avant la Chambre elle-même. Il y a quelques mois déjà que j'ai organisé au ministère de l'instruction publique une Commission, que j'ai composée, ce qui m'a été reproché, de chefs de bureaux, de chefs de divisions du ministère de l'instruction publique, précisément parce que je voulais qu'elle marchât promptement et sûrement, qu'elle fût composée d'hommes connaissant bien toutes les matières sur lesquelles ils avaient à délibérer, toutes les lois qu'il s'agissait de composer, de confronter, de mettre en présence, pour savoir quelle est aujourd'hui la pratique et quel doit être demain le droit.

*

« Cette Commission a rencontré à l'instant même une difficulté. Quelle était la constitution régulière du conseil royal de l'instruction publique? où était la vérité entre le décret et les ordonnances? Cette question a été posée au Ministre, et les travaux de la Commission ont été un moment suspendus jusqu'au jour où l'ordonnance royale l'a résolue.

Les travaux sont repris ; ils arriveront promptement à un terme. Je n'ai pas à dire quelles seront les conséquences de ce travail, puisqu'il n'est pas terminé ; j'avais seulement à dire à la Chambre que cette question d'une légistation régulière et complète a préoccupé le Ministre avant de se produire à la tribune. »>

UN MEMBRE dit qu'un mouvement involontaire l'a porté hier à interrompre le discours du Ministre; il n'a pu mattriser un sentiment de surprise en voyant qu'après tout ce qui s'était passé, M. le Ministre pût se persuader que tout le monde était de son avis. Il a été avec M. le Ministre de l'instruction publique membre de la Commission d'enseignement. Dans cette Commission, les idées du Ministre actuel ont été chaleureusement combattues; elles ne prévalurent pas, et ce fut l'orateur que la majorité de la Commission chargea de soutenir devant la Chambre des idées contraires.

En 1839, ces mêmes idées du Ministre actuel furent combattues dans le conseil, même par deux membres du Cabinet qui avaient précédemment dirigé le Ministère de l'instruction publique. M. le Ministre n'est point fondé à dire qu'il n'a point trouvé de contradicteurs parmi ses devanciers. Le dernier Ministre de l'instruction publique a énergiquement combattu l'opinion et les actes de son successeur. Et, en admettant que tous les autres Ministres aient gardé le silence dont on se prévaut, il y a quelque chose de plus significatif que le silence, c'est la conduite. Or, sur neuf Ministres qui ont dirigé ce département depuis 1830, il n'en est qu'un seul qui se soit constitué l'adversaire du conseil royal.

Abordant ensuite le fond même de la question, l'orateur déclare qu'il est le partisan sincère des institutions de la

Révolution et de l'Empire, mais qu'il les veut modifiées par le temps, appropriées aux besoins et aux idées de notre époque. Lui aussi il admire Napoléon; mais il croit qu'il y a un législateur supérieur à Napoléon, et que ce législateur est le temps. Toutes les fois que les institutions qui constituent l'unité française ont été attaquées, il a volé à leur secours, parce que, à ses yeux, l'unité n'est pas seulement la gloire, elle est la force de notre pays.

L'orateur n'apportera point dans ce débat les sentiments d'un homme de parti; il n'est point mû par un intérêt d'opposition; il a été poussé à la tribune par un sentiment profond et vrai; il ne lui est pas possible de dissimuler le sentiment pénible que lui ont fait éprouver les derniers acles de M. le Ministre de l'instruction publique. Il croit que l'ordonnance du 7 décembre a porté à l'Université un coup des plus sensibles, l'un de ces coups qui, par cela même qu'ils sont frappés à la tête, ont presque toujours une si dangereuse influence. Il lui semble qu'à force d'admiration pour le décret de 1808, M. le Ministre de l'instruction publique est tombé dans l'égarement de la passion, et qu'il a fini par ne pas bien comprendre le sens même du décret. Comment s'imaginer que Napoléon, lorsqu'il a voulu créer l'enseignement, ait pu se reposer de ce soin sur une simple administration! Sa pensée a été de constituer un corps, et c'est à ce corps que l'on vient aujourd'hui substituer des bureaux.

La constitution de l'Université réside dans la loi du 10 mai 1806. Avant cette époque, Napoléon s'était saisi de tous les établissements d'instruction publique, et les avait placés dans le ressort d'une direction du Ministère de l'intérieur, à la tête de laquelle se trouvait l'illustre Fourcroy. En 1806, au retour d'Austerlitz, il voulut constituer un corps, et ce qu'il voulait, il le fit. Il demanda à la loi les deux principes essentiels de l'Université, en se réservant la liberté d'organiser le reste au moyen de décrets. La loi du 10 mai 1806 déclara qu'il serait formé, sous le nom d'Université, un corps exclusivement chargé de l'instruction, et que les membres du corps enseignant contracteraient des obligations spéciales, civiles et temporaires. Lorsque cette loi fut faite. Napoléon régla lui-même les détails d'organisation: il em1. Procès-verbaux.

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