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Renart se trouve ici dans la situation d'esprit qui lui est attribuée au début de la nouvelle aventure qui, au milieu de la branche 30, commence avec le vs. 24887, où on le trouve

Toz plains de joie et de léesce.

Nous avons observé que cette joie n'a pas de motif après la grande peur qu'il vient de ressentir: en plaçant ce nouvel épisode après celui qui se termine par la satisfaction qu'éprouve Renart du malheur de Primaut, tout est pour le mieux.

Seulement il faudra tenir compte des petits changements que l'arrangeur a cru devoir faire pour combler la lacune. La branche 10 se termine ainsi:

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,,Je me sui bien de toi vengiez,
Diex le set que moult en sui liez."
Atant s'envet delivrement

Et let Primaut el tornoiant,

Qui moult grant paines i soufri :
Le pié illeques li rompi.

Et dant Renart li forsenez

S'en est tot maintenant tornez,

Et si s'en est tornez arière

En Malpertuis, en sa tesnière.

y est reçu avec joie par Hermeline, à laquelle il raconte ses hauts faits, et qui est heureuse

Qant son baron a recovré.

Le début de la branche n'a pas dit que Renart quittait sa tanière. On y lit qu'un prêtre perd une boîte pleine d'hosties, et

Renart qui cele part corut

Trove la boiste.

Si d'un côté cette entrée en matière n'est pas un vrai début, si elle doit faire naître la pensée que nous avons devant nous une partie détachée d'un poëme plus complet, elle prouve aussi que la fin de

la branche n'a pas de raison d'être. Il n'a pas été question d'Hermeline perdant son mari: il est donc mal à propos de dire qu'elle l'a » recovré.”

Toute cette rentrée dans Maupertuis devra donc être retranchée.

Quant à la partie de la 30 branche qui doit s'adapter à la 10o, je pense qu'on m'accordera que ce n'est pas abuser de la critique que d'en retrancher les deux premiers vers, qui forment une transition inaccoutumée dans le poëme, et qui sont bien plats:

Dès or vos dirai de Renart

Qui chevauche tot un essart.

Enfin voici comment je pense qu'il faut rétablir le texte dans son intégrité:

vs. 4832.

vs. 24889.

,,Je me sui bien de toi vengiez,
Diex le set que moult en sui liez."
Atant s'en vet delivrement

Et let Primaut el tornoiant,

Qui moult grant paines i souffri :
Le pié illeques li rompi.

Et dant Renart li forsenez
S'en est tot maintenant tornez 1)
Toz plains de joie et de léesce.

Devers un grant chesne s'adresce,
Qui moult estoit haut et branchu:
Amont regarda etc.

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Mais quelque surprenant que soit le résultat obtenu jusqu'ici, tout n'est pas dit. Il faut encore démontrer que l'identité du style, du langage, du système rhythmique, des idées surtout, permet à la branche

1) J'ai hésité un moment s'il fallait conserver les deux vers suivants :

Et si s'en est torné arière

En Malpertuis en sa tesnière;

mais la répétition du mot torné, réminiscence du vers précédent, démontre assez que l'œuvre de l'arrangeur commence là.

9-10 de prendre sa place parmi les aventures du conte de Pierre de Saint-Cloud, c'est-à-dire dans la branche 11-30, dont nous avons aussi à démontrer que, sous ces rapports, les diverses parties appartiennent à la même œuvre d'un même poëte.

X.

Rien n'est moins difficile à prouver. Voici les particularités communes aux trois parties.

Dans toutes trois, même manière.

L'auteur se

réclame d'une histoire dans laquelle il a puisé.

Br. 11, vs. 4938:

Que si li livres nos dit voir,
Où je trove l'estoire escrite.

Vs. 5753:

Que se l'estoire ne nos ment.

Br. 9-10, vs. 3260:

Si con nos trovons en l'estoire.

Br. 30, vs. 27778:

Einsi con l'escriture dist.

Vs. 26409:

Si con nos lisons.

Partout les animaux parlent et agissent en hommes. Renart y est supposé vêtu, car dans les trois parties il est souvent question de son giron. P. e. br. 11, vs. 5932:

Lors garde entor lui, si cort prendre
Des motes tot plain son giron.

Br. 9-10, vs. 3342:

Et Renart a pris son giron....

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L'auteur aime à introduire dans son récit des hommes qui sont toujours victimes des animaux qui les attaquent et qui leur mordent, tantôt la main, le plus souvent les »naches". Notre ébauche d'analyse en fournit, dans les trois parties, plusieurs exemples qu'il sera superflu de reproduire.

Dans tout le poëme nous sommes en pleines mœurs féodales. Nous avons déjà remarqué que, sous ce rapport, les branches 11 et 30 se ressemblent: voici quelques passages qui prouvent la conformité en ce point de la branche 9-10. Il y est p. e. question de la cour du roi.

Lorsque Primaut s'est grisé, vs. 3188,

Noble cuide estre le lion,

Et Renart soit de sa mesnie.

Souvent aussi on trouve des allusions au tribunal du roi. Vs. 3554:

Jà ne m'estovra clamor fere
Devant dant Noble le lion
Por ce que m'a fait traïson.

Vs. 4664 et 4720:

Je m'en irai clamer au roi.

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