exercitu Catilinam persequi maturet, Cicero urbi præsidio sit. Ea tempestate mihi imperium populi Romani multo maxume miserabile visum est. Cui quum ad occasum ab ortu solis omnia domita armis parerent; domi otium atque divitiæ, quæ prima mortales putant, affluerent; fuere tamen cives, qui seque remque publicam obstinatis animis perditum irent. Namque, duobus senati decretis, ex tanta multitudine neque præmio inductus conjurationem patefecerat, neque ex castris Catilinæ quisquam omnium discesserat: tanta vis morbi, uti tabes, plerosque civium animos invaserat! XXXVII. Neque solum illis aliena mens erat, qui conscii conjurationis fuerant; sed omnino cuncta plebes, novarum rerum studio, Catilinæ incepta probabat. Id adeo more suo videbatur facere nam semper in civitate, quis opes nullæ sunt, bonis invident, malos extollunt; vetera odere, nova exoptant; odio suarum rerum, mutari omnia student; turba toute hâte avec une armée à la poursuite de Catilina; Cicéron, de veiller à la sûreté de la ville. Cette époque m'a toujours paru de beaucoup la plus triste de toutes dans les annales de la puissance romaine. C'est en effet quand tout, de l'orient à l'occident, obéissait à ses armes victorieuses, quand à l'intérieur on regorgeait de loisirs et de richesses, ces biens placés au premier rang par les mortels, qu'il se trouva pourtant des citoyens assez pervers pour courir opiniâtrément à leur propre perte et à celle de la République. Car, nonobstant deux décrets du sénat, l'appât de la récompense promise n'avait pas amené une seule révélation de la part d'une si grande multitude, et pas un homme n'avait quitté le camp de Catilina : tant la violence du mal, comme une lèpre hideuse, avait envahi les cœurs de la plupart des citoyens! XXXVII. Et non-seulement les dispositions étaient hostiles chez ceux qui avaient trempé dans la conjuration; mais en général toute la populace, avide de changements, approuvait les desseins de Catilina. En cela, du reste, elle demeurait fidèle à ses errements ordinaires: car, dans tout État, ceux qui n'ont point de ressources portent envie aux honnêtes gens, exaltent les méchants, maudissent les vieilles institutions, en désirent de nouvelles; en haine de leur propre situation, appellent de tous leurs vœux un bouleversement universel; maturet persequi Catilinam, Cicero sit præsidio urbi. Imperium populi Romani visum est mihi ea tempestate multo maxume miserabile. Cui quum omnia parerent domita armis ab ortu ad occasum solis; mortales putant prima, seque remque publicam. duobus decretis senati, neque quisquam omnium ex tanta multitudine inductus præmio pa efecerat conjurationem, neque discesserat ex castris Catilinæ : tanta vis morbi invaserat, uti tabes, plerosque animos civium ! XXXVII. Neque solum mens aliena erat illis qui fuerant conscii conjurationis ; sed omnino cuncta plebes, studio rerum novarum, probabat incepta Catilinæ. Id adeo videbatur facere suo more : nam semper in civitate, quis nullæ opes sunt invident bonis, extollunt malos; odere vetera, exoptant nova; odio suarum rerum, student omnia mutari ; a paru à moi à cette époque de beaucoup le plus digne-de-pitié. du levant au couchant du soleil; les mortels estiment les premiers de tous, affluaient à l'intérieur; des citoyens furent pourtant, qui allassent perdre avec des esprits obstinés et eux-mêmes et la chose publique. Car, avec (malgré) deux décrets du sénat, sur une si-grande multitude si-grande la violence du mal dans-le-secret de la conjuration; toute la populace, par amour d'un ordre-de-choses nouveau, goûtait les projets de Catilina. Or cela elle semblait le faire à sa façon-ordinaire : car toujours dans un État, ceux à qui nulles ressources ne sont portent-envie aux bons, exaltent les méchants; haïssent les vieilles institutions, atque seditionibus sine cura aluntur, quoniam egestas facile habetur sine damno. Sed urbana plebes, ea vero præceps ierat multis de causis. Primum omnium, qui ubique probro atque petulantia maxume præstabant; item alii, per dedecora patrimoniis amissis; postremo omnes quos flagitium aut facinus domo expulerat: ii Romam, sicuti in sentinam', confluxerant. Deinde multi memores Sullanæ victoriæ, quod ex gregariis militibus alios senatores videbant, alios ita divites, uti regio victu atque cultu ætatem agerent, sibi quisque, si in armis forent, ex victoria talia sperabant. Præterea juventus, quæ in agris manuum mercede inopiam toleraverat, privatis atque publicis largitionibus excita, urbanum otium ingrato labori prætulerant. Eos atque alios omnes malum publicum alebat. Quo minus mirandum homines egentes, malis moribus, maxuma spe, reipublicæ juxta ac sibi consuluisse. Præterea quorum, 2 se repaissent sans inquiétude de troubles et de séditions, parce qu'il est aisé à l'indigence de se tirer d'affaire sans rien perdre. Mais c'était surtout le bas peuple de la ville qui avait donné tête baissée dans le mal, et cela par plusieurs motifs : d'abord tout ce qu'il y avait en Italie de plus taré et de plus turbulent, tous ceux qui avaient perdu leur patrimoine par des voies honteuses, tous ceux que la débauche ou le crime avait chassés de leurs foyers, avaient afflué à Rome comme dans une sentine; ensuite plusieurs qui se rappelaient la vietoire de Sylla, et voyaient de simples soldats devenus les uns sénateurs, les autres tellement riches qu'ils coulaient leurs jours dans une abondance et dans un luxe vraiment royal, se flattaient, en prenant les armes, de retirer de la victoire, chacun pour soi, les mêmes avantages;.puis encore cette jeunesse qui, dans les champs, avait vécu pauvre du salaire de ses bras, attirée par les largesses privées et publiques, s'était accoutumée à préférer l'oisiveté de la ville à un travail ingrat. Tous ces gens-là et bien d'autres ne vivaient que par les calamités publiques: faut-il donc s'étonner que des hommes dénués, corrompus, enivrés des plus brillantes espérances, traitassent la République aussi mal qu'eux-mêmes? Ce n'est pas tout ceux qui, à la aluntur sine cura turba atque seditionibus, quoniam egestas habetur facile sine damno. Sed plebes urbana, ea vero de multis causis ierat præceps. probro atque petulantia; quos flagitium aut facinus expulerat domo: ii confluxerant Romam sicuti in sentinam. Deinde multi se repaissent sans souci se maintient aisément sans pertes. en opprobre et en turbulence; leurs patrimoines ayant été perdus qu'une honte ou un crime avait chassés de leur foyer natal : ceux-là avaient affiué à Rome comme dans un égout. Ensuite beaucoup memores victoriæ Sullanæ, qui se rappelaient la victoire de-Sylla, quod videbant alios senatores ex gregariis militibus, alios ita divites, uti agerent ætatem victu atque cultu regio, sperabant quisque sibi talia ex victoria, si forent in armis. Præterea juventus, quæ toleraverat inopiam in agris mercede manuum, excita largitionibus privatis atque publicis, prætulerant otium urbanum labori ingrato. comme ils voyaient les uns devenus sénateurs de simples soldats, d'autres tellement riches, qu'ils passaient leur vie avec nourriture et train royal, espéraient chacun pour soi pareils avantages de la victoire, s'ils étaient en armes. En outre la jeunesse, qui avait soutenu sa pauvreté par le salaire de ses bras, le repos de-la-ville à un travail ingrat. Malum publicum alebat eos Le mal public nourrissait ceux-là atque omnes alios. Quo minus mirandum homines egentes, malis moribus, maxuma spe, consuluisse juxta reipublicæ ac sibi. et tous les autres. D'autant moins étonnant est-il des hommes dénués, de mauvaises mœurs, d'immense espoir, avoir avisé également mal pour la chose-publique et pour eux. victoria Sullæ, parentes proscripti, bona erepta, jus libertatis imminutum erat, haud sane alio animo belli eventum exspectabant. Ad hoc, quicumque aliarum atque senati partium erant conturbari rempublicam quam minus valere ipsi malebant : id adeo malum multos post annos in civitatem reverterat ! XXXVIII. Nam postquam Cn. Pompeio et M. Crasso consulibus tribunitia potestas restituta est, homines adolescentes summam potestatem nacti, quibus ætas animusque ferox erat, cœpere, senatum criminando, plebem exagitare; dein, largiundo atque pollicitando, magis incendere, ita ipsi clari potentesque fieri. Contra eos summa ope nitebatur pleraque nobilitas, senati specie, pro sua magnitudine. Namque, uti paucis verum absolvam, per illa tempora quicumque rempublicam agitavere, honestis nominibus, alii, sicuti populi jura defenderent, pars, suite de la victoire de Sylla, avaient vu leurs pères proscrits, leurs biens ravis, leurs droits de citoyens libres en partie supprimés, attendaient dans des dispositions parfaitement semblables l'événement de la guerre. Tous ceux enfin qui n'étaient pas du parti du sénat aimaient mieux assister au bouleversement de l'État que de rester eux-mêmes en dehors du pouvoir : tant, après de longues années, ce fléau de l'envie avait reparu avec violence dans la cité! XXXVIII. C'est que du jour où, sous le consulat de Pompée et de M. Crassus, le tribunat eut été rétabli dans toutes ses prérogatives, des hommes encore jeunes, revêtus de cet immense pouvoir et emportés par la fougue de l'âge et de la passion, se mirent, par leurs invectives contre le sénat, à exciter le peuple de nouveau; puis, à force de largesses et de promesses, ils l'enflammèrent davantage, et se firent ainsi eux-mêmes célèbres et puissants. Ils trouvaient une vive résistance chez la plupart des nobles, qui, sous prétexte de défendre le sénat, travaillaient à leur propre grandeur; car, pour dire toute la vérité en peu de mots, tous ceux qui dans ces temps agitèrent la République, voilant leurs desseins sous des prétextes honorables, et simulant les uns la défense des droits du peuple, les autres |