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D'ESPAGNE.

INTRODUCTION.

CHAPITRE PREMIER.

COUP D'OEIL SUR LA CONFIGURATION PHYSIQUE DE L'ESPAGNE.

Par quelque côté qu'on aborde la Péninsule hispa~ nique, il faut monter pour y pénétrer, monter souvent, monter beaucoup, et rarement descendre. Il semble que l'on gravisse quelque gigantesque escalier, où l'on trouve de temps à autre de vastes plateaux (paramos), en guise de palliers, pour se reposer, et où, quand on s'est reposé, on recommence à monter encore. L'Espagne ne saurait mieux se comparer qu'à une immense pyramide coupée par la moitié, et dont les larges assises, s'élevant l'une au dessus de l'autre,

vous conduisent, par degrés, jusqu'aux plateaux du centre. Une fois arrivés dans ces steppes désolées de la Manche et des deux Castilles, vous êtes tout étonnés de voir s'élever à peine de quelques centaines de toises au dessus du niveau du sol des pics isolés ou des chaînes (sierras) qui en comptent près de 1000 au dessus du niveau de la mer 1; mais c'est qu'aussi ce sol que vous foulez aux pieds, plaine en apparence, et montagne en réalité, est lui-même à la hauteur moyenne de 3 à 400 toises au dessus de ce même niveau ;

2

↑ Somo-Sierra, le point culminant du chemin qui traverse le Guadarrama, n'est élevé au-dessus de Madrid que de 433 toises: aussi la température de Madrid, situé par le 40o degré de latitude, mais à 340 toises au dessus du niveau de la mer, n'est-elle que de 12 degrés Réaumur, tandis que celle de Naples, situé un peu plus au nord, est de 18 degrés.

2 Nous extrayons d'une notice de M. A. de Humboldt sur la configuration du sol et le climat de l'Espagne le tableau suivant des différentes hauteurs d'une série de points principaux dans la direction du sud-est au nord-ouest, ou de Valence à la Corogne :

Alginete, entre Valence et le rio Xucar,
Moxente,

65 toises.

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Quel est, ajoute l'auteur, le souverain en Europe dont les châteaux (l'Escu

c'est que, sous la latitude brûlante de la Calabre et de l'Asie mineure, l'olivier, souvent même la vigne, ne peuvent résister à l'âpre bise qui balaie, l'hiver, ces plaines glacées, malgré le soleil africain qui les dévore pendant neuf mois. A Madrid, dit le proverbe du pays, Trois mois d'hiver, neuf mois d'enfer; et c'est bien l'enfer, en effet, que ces neuf longs mois d'été, dans des plaines calcinées, où une fine poussière de granit, sans cesse répandue dans l'air par cette brise insensible, qui n'éteint pas une chandelle et qui tue un homme, pénètre dans les poumons et fatigue les poitrines les plus robustes. L'hiver même, il pleut rarement à Madrid; pendant deux mois souvent, pas un nuage n'obscurcit cet horizon toujours bleu, tandis que la bise aiguë du Guadarrama souffle incessamment sur un sol durci, et change en glaçons peu d'eau qui l'arrose.

le

L'été, rarement trouve-t-on un abri dans ces longues plaines qui s'étendent presque sans interruption du pied des Pyrénées à celui de la sierra Morena. Le paysan espagnol laisse dépérir, quand il ne les détruit pas, les belles forêts qui tapissaient naguère toutes les pentes de ses montagnes. Dans les plaines, un préjugé national, qui, à coup sûr, ne lui vient pas des Arabes, lui fait arracher les arbres, qui, selon lui, «corrompent l'air quand ils sont nombreux, et, quand ils sont isolés, attirent les oiseaux, qui dévorent les moissons ». De loin en loin, cependant, au milieu du désert, que traverse avec la rapidité de l'éclair le

rial et la Granja) soient situés à 541 et 640 toises de hauteur? On remarquera dans ce tableau qu'une fois parvenu dans l'intérieur, la plus faible hauteur que l'on rencontre est 217 toises, tandis que le pic de Mulahacen dans la sierra Nevada s'élève à l'énorme hauteur de 1824 toises (10,944 pieds), et le pic de Veleta à un peu moins de 1800 toises (10,800 pieds).

bruyant attelage de douze mules qui traîne une diligence espagnole, vous voyez apparaître quelque frais oasis de verdure, qu'alimente un ruisseau égaré dans la plaine. Les clochers des douze à quinze couvents qui se pressent dans la moindre petite ville d'Espagne percent à travers le feuillage comme les dômes et les minarets des mosquées qu'ils ont remplacés, et les riches moissons de Castille, ondoyant à travers la plaine, revêtent, au moins pour quelques mois, la triste nudité du sol.

Quittez maintenant ces plateaux froids et incultes ; parcourez, du cap de Creuz, dernière pointe des Pyrénées orientales, à l'einbouchure du Duero, cette zône étroite de terrain qui va de la mer aux montagnes, et les récits des poètes sur la fabuleuse Hespérie vous reviennent à la pensée. La poésie même est ici au dessous de la réalité. Sur ce riant littoral, qu'on ne peut comparer qu'à la fertile lisière qui s'étend au nord de l'Afrique, depuis l'Atlas jusqu'à la mer, la flore méridionale étale son luxe de végétation : l'olivier, que vous trouvez long-temps avant Figuiè– res, au pied même des Pyrénées, vous conduit jusqu'à l'oranger, qui entoure de ses berceaux toutes les blanches bourgades du littoral catalan. En approchant de Valence, les végétaux de l'Afrique, avec leurs raquettes hérissées d'épines ou leurs feuilles dressées comme des fers de lance, tapissent la rive unie où vous voyagez, la mer d'un côté, la huerta (le jardin) de l'autre, et le ciel bleu sur vos têtes. A Elche, quelques lieues plus loin que Valence, commencent les palmiers, plantés non par tiges isolées, mais par forêts entières. La contrée prend une physionomie de plus en plus africaine. Les Arabes sem

blent ne l'avoir quittée que d'hier, et y avoir laissé leur industrie horticole, leurs roues garnies de poteries pour élever les eaux, et leurs canaux pour les répandre, et jusqu'aux plis flottants de leurs robes qu'on retrouve dans le jupon ouvert du paysan valencien. Enfin vous arrivez à cette heureuse Andalousie, pays auquel la nature a prodigué tous ses dons, et où l'on ne reprochera certes pas à l'homme de ne pas savoir en jouir. Cette fois, c'est bien en Afrique que nous sommes. Si la Catalogne, située vis-à-vis de l'Italie, rappelle la corniche de Gênes et les côtes montueuses de Sarzane et de Lerici; si Valence ressemble à la Sicile, c'est-à-dire à la transition de l'Italie à l'Afrique, l'Andalousie est l'Afrique toute pure. Derrière cet énorme rempart de la sierra Nevada, et de ses neiges éternelles, croissent à l'abri des vents du nord tous les végétaux des tropiques, le bananier, le cotonnier, la canne à sucre, le dattier, natif de l'Atlas, et dont la datte ne mûrit sur aucun autre point de l'Europe. Les agavés et les nopals forment les enclos des fermes, et du sein de leurs impénétrables massifs vous voyez se balancer en l'air les sveltes tiges des palmiers, qui indiquent le chemin au voyageur à travers la plaine poudreuse, comme les poteaux qui lui tracent la route sur les neiges du Guadarrama.

Au physique comme au moral, l'Espagne est un composé de contrastes, et ne semble former un tout que par juxtaposition. Le caractère des habitants de chaque province diffère autant que leur aspect physique ou que leur végétation. Rien ne ressemble moins au grave et indolent Castillan que l'Andalous fanfaron et léger, qu'on appelle à bon droit le Gascon de l'Espagne. Sous les mêmes conditions physiques de

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