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monuments qui en subsistent. La plupart de ces notious nous ont été fournies par Diodore de Sicile, par Jules César, par Tite-Live, et surtout par Tacite; mais elles se sont spécialement appliquées aux Gaulois proprement dits, aux Germains, et aux Cisalpins. Les historiens de l'antiquité se sont beaucoup moins occupés des autres peuples celtiques; et il s'en faut d'ailleurs qu'ils nous aient laissé des documents complets et toujours exacts sur ceux dont ils ont eu plus d'occasions de nous parler. Toujours pouvons-nous maintenant attacher des idées un peu plus précises à ce qu'ils nous ont dit, à ce qu'ils nous diront encore de la nation gauloise.

Nous allons reprendre aujourd'hui les annales romaines, que nous avons laissées au 27 avril de l'an 221 avant notre ère. Les fonctions consulaires venaient d'être exercées par Cornélius Scipion Calvus et par Claudius Marcellus, dont Plutarque a écrit la vie. Ces deux magistrats avaient refusé de consentir à la pacification proposée par les Gaulois Insubriens; ou du moins la suspension d'armes, dont Plutarque fait mention, avait été fort courte. Trente mille Gésates, ainsi nommés à cause de l'espèce particulière de traits ou flèches, gasa, dont ils se servaient; ces Gésates, dis-je, sous la conduite de leur jeune roi Britomare ou Viridomare, étaient venus, des bords du Rhône ou de ceux du Rhin, renforcer les guerriers plus nombreux de l'Insubrie. Selon Polybe, les consuls prirent Acerres, délivrèrent Clastidium assiégée par les Gaulois, et s'emparèrent de Milan. Les Gésates repassèrent les Alpes; et les Romains achevèrent de subjuguer les Insubriens. Vous vous souvenez, Messieurs, que les récits de Plutarque et des

auteurs latins aboutissent, il est vrai, aux mêmes résultats, mais y joignent des circonstances plus merveil~ leuses, que Polybe a ignorées ou écartées, et surtout le récit d'un combat singulier où Marcellus tue Viridomare. Ces écrivains vous ont décrit le magnifique triomphe de Marcellus, qui offrit à Jupiter Férétrien les dépouilles opimes, ce qui n'était encore arrivé que deux fois. Scipion, le collègue de Marcellus, ne triompha point; mais il resta dans l'Insubrie en qualité de proconsul, et administra cette contrée, qui devenait alors, sous le nom de Gaule Cisalpine, une province de la république. Joyeux d'une si belle conquête, les Romains offrirent à leurs alliés, et particulièrement à Hiéron, roi de Syracuse, une partie du butin dont ils venaient de s'enrichir; et ils envoyèrent une coupe d'or massif au temple d'Apollon Pythien, à Delphes. En ce temps, Asdrubal périssait en Espagne, assassiné par un Gaulois; et le jeune Annibal prenait le commandement : c'est l'ouverture de ses fonctions publiques et de sa carrière si mémorable.

A Rome, les comices de centuries, présidés par Marcellus, avaient élu Marcus Minucius Rufus et Publius Cornélius Scipion Asina, qui prirent possession des faisceaux consulaires à la fin d'avril 221. La famille Cornélia vous est connue, Messieurs, par les magistrats. qu'elle a déjà fournis. Le surnom de Scipion, qui distingue l'une de ses branches, s'est aussi présenté plus d'une fois, et se reproduira plus souvent dans la suite de cette histoire. Il vient, dit-on, d'un Cornélius, qui avait servi de conducteur et de bâton de vieillesse à son père aveugle. Scipio veut dire un bâton sur lequel on s'appuie, et semble dérivé du mot grec zo, s'ap

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puyer. On explique l'autre surnom ou sobriquet Asina, que nous avons pareillement déjà rencontré, en disant qu'un autre Cornélius ayant acheté un fonds de terre ou fiancé une de ses filles, et devant garantir la somme stipulée, conduisit devant le préteur un âne ou une ânesse chargée d'argent monnayé, et dit : « Voilà mon répondant. » Ces origines sont énoncées par Macrobe: Non aliter dicti Scipiones nisi quod Cornelius, qui cognominem patrem luminibus carentem pro baculo regebat, Scipio cognominatus.... Asinæ cognomentum Corneliis datum est, quoniam princeps Cornelia gentis, empto fundo, seu filia data marito, quum sponsores ab eo solemniter poscerentur, asinam cum pecuniæ onere produxit in forum, quasi pro sponsoribus præsens pignus.

Rome était en paix avec ses voisins, au moment de l'installation de ces deux nouveaux consuls; mais une guerre nouvelle éclata presque aussitôt dans l'Istrie. Nous avons déjà vu, Messieurs, les commencements de la guerre illyrienne; et, à cette occasion, je vous ai offert un tableau géographique de l'ancienne Illyrie ou Illyricum. L'Istrie, Histria, était une sorte de détachement ou de prolongement de l'Illyrie sur la côte orientale de la mer Adriatique, et non loin du fond de ce grand golfe, entre le petit golfe de Tergestum, aujourd'hui Trieste, et les îles Absyrtides. Une ville qui a pris le nom de Capo d'Istria s'appelait Ægida. Parentium se reconnaît dans Parenzo. La principale cité istrienne était Pola, qui a tout à fait conservé son nom. A l'Istrie confinait le pays des Carni, ou la Carniole : là se trouvaient, au pied des Alpes carniques, Emona et Nau portus, qui sont maintenant Laybach et le haut Lay

bach. Il n'est pas exact de dire que l'Istrie et l'ancienne Japydie se correspondent cela n'est vrai que de certains territoires particuliers de ces contrées. Justin veut que les Istriens soient originaires de la Colchide : il raconte qu'Æétès, père de Médée, fit courir après sa fille, enlevée par les Argonautes, des émissaires qui, s'étant rendus au Pont-Euxin, remontèrent le Danube, et transportèrent leurs vaisseaux à travers les montagnes. jusqu'aux rivages de la mer Adriatique. Parvenus inutilement à ce terme, et perdant tout espoir d'accomplir leur mission, ils résolurent de ne plus retourner dans leur patrie, de peur d'y être maltraités par le roi, et s'établirent sur ces rivages, auxquels ils donnèrent le nom d'Istrie, emprunté de celui de l'Ister ou du Danube, sur lequel ils avaient fait une grande partie de leur voyage. Mais la plupart des géographes pensent qu'il y avait un tout autre Ister qui se jetait dans le golfe de Venise. La difficulté est de reconnaître ce fleuve parmi ceux qui ont là leur embouchure ou leur cours jusqu'ici il n'a été proposé aucune solution assez plausible de ce problème, en sorte qu'on ne sait réellement pas pourquoi la contrée que nous envisageons en ce moment a été appelée Istrie.

Quoi qu'il en soit, les Istriens voyant leurs voisins, Illyriens et Gaulois, subjugués par Rome, redoutent le même sort pour eux-mêmes. Effrayés du voisinage d'un tel joug, ils invitent ceux qui l'ont subi à le secouer; en attendant, ils arment en course, et osent prendre des vaisseaux de la république dominatrice. Le sénat s'en indigne; ou plutôt il se réjouit de trouver cette occasion de réunir l'Istrie, comme l'Illyrie, aux domaines du peuple romain. Les consuls mettent leurs deux ar

mées en campagne : ils vont camper sur les bords de ce fleuve Ister, dont nous ne pouvons plus assigner la position, mais qui ne saurait être confondu avec le Danube. Les détails de cette campagne ne nous ont pas été transmis. Orose dit qu'elle coûta beaucoup de sang aux vaincus et aux vainqueurs; mais elle se termina par l'assujettissement de l'Istrie, dont tous les habitants, de gré ou de force, reconnurent les Romains pour maîtres. Une lacune dans les Tables Capitolines, et le silence des historiens, nous laissent incertains si les consuls ont reçu l'honneur du triomphe; mais il reste des médailles ou deniers d'argent où la Victoire conduit un char triomphal, près duquel est inscrit le nom de Publius Scipion Asina. Vinandus Pighius, qui a examiné soigneusement l'une de ces pièces, en affirme l'authenticité; Goltzius et Vaillant l'ont insérée dans leurs recueils. A l'égard de l'autre consul, Minucius Rufus, nous n'avons point de semblable monument à citer. L'histoire de ce consulat est ainsi très-défectueuse.

On commençait à prévoir les conséquences de la mort d'Asdrubal. Annibal n'offrait point, à beaucoup près, les mêmes garanties de l'observation fidèle des traités. On le savait pénétré des implacables ressentiments de son père Amilcar, et impatient de venger Carthage des revers qu'elle avait essuyés à la fin de la première guerre punique. Revenu en Espagne trois ans avant la mort d'Asdrubal, il y avait commandé la cavalerie, pris part à plusieurs expéditions, et obtenu, par sa bravoure et par son affabilité, l'affection de tous les soldats. Il se sentait soutenu à Carthage par la faction Barcine, qui venait de lui faire décerner le commandement général, malgré les vives réclamations du parti d'Hannon. Quel

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