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& à la fortune des joueurs; confidérations effentielles fans doute à faire, mais qui demanderoient prefqu'autant de régles que de cas particuliers. C'eft d'après ces confidérations qu'on a effayé de réfoudre dans le To. V. des Mém. de Petersbourg, la question propofée ci-dessus Art. II. Les vûes qu'on propose sur cela, font fines & ingénieuses. Mais il y avoit peut-être d'autres réfléxions plus fimples à faire fur cette question, plus relatives à la question prise en elle-même, & plus indépendantes de l'état des joueurs; & ce font, ce me femble, celles que nous avons faites au commencement de ce Mémoire, & qui ont fait naître nos autres doutes fur le calcul des probabilités. Ces doutes m'ont paru dignes d'être propofés aux Mathématiciens Philofophes. J'ai tout lieu de croire qu'ils en feront frappés comme moi, s'ils les examinent fans prévention.

Fin du dixiéme Mémoire.

Opufc. Math. Tome II.

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ONZIÉME MÉMOIRE

Sur l'application du Calcul des Probabilités à l'inoculation de la petite Vérole (a).

ON a tant écrit depuis quelques années

pour & contre l'inoculation, & principalement en fa faveur, que le Public doit être aujourd'hui plus que fuffifamment inftruit fur ce fujet, & par conféquent fatigué d'avance de tout ce qu'on pourroit ajouter encore, pour éclaircir ou pour embrouiller la question. J'ai donc tout lieu de craindre que ce Mémoire n'ennuye déja par fon feul titre ceux qui me font l'honneur de m'entendre. Je me propose au moins de ne pas les ennuyer long-tems; & pour leur tenir parole, j'entre promptement en matiere.

Cet écrit aura deux objets: 1°. de prouver que dans les calculs qu'on a faits jusqu'à préfent en faveur de l'inoculation, on n'a point encore, ce me femble, envisagé la question fous fon véritable point de vûe: 2°. que la

(a) Ce Mémoire a été lû à l'Affemblée publique de l'Académie Royale: des Sciences, le 12 Novembre 1760.

difficulté, & peut-être l'impoffibilité de réduire au calcul les avantages de l'inoculation, n'eft point une raifon pour la profcrire.

On n'inocule gueres avant l'âge de quatre ans ; depuis cet âge jufqu'au terme ordinaire de la vie, la petite Vérole naturelle détruit, felon les Inoculateurs, environ la feptiéme partie du genre humain (A); au contraire, felon eux, l'inoculation enleve à peine une victime fur trois cens (B). Je ne prétends point leur contester ces faits, & je ne m'arrête qu'à la conféquence qu'ils en tirent; donc, difent-ils, le risque de mourir de la petite Vérole naturelle est à celui de mourir de la petite Vérole inoculée, comme 300 à 7, c'est-à-dire, 40 à 50 fois plus grand.

Cette conféquence, ainfi présentée, peut être attaquée avec quelqu'apparence de droit par les adverfaires de l'inoculation. Car en fuppofant, diront-ils, que le nombre de ceux qui périffent de la petite Vérole, soit 40 ou 50 fois plus grand que le nombre de ceux qui meurent de l'inoculation, s'enfuit-il que les deux rifques foient entr'eux dans le même rapport? La nature de l'un & de l'autre est bien différente. Quelque petit qu'on veuille fuppofer le rifque de mourir de l'inoculation, celui qui se fait inoculer se soumet à ce risque dans le court espace de quinze jours, dans celui d'un mois tout

(A) Voyez les Remarques à la fin de ce Mémoire. (B) Voyez les Remarques à la fin de ce Mémoire.

au plus au contraire le rifque de mourir de la petite Vérole naturelle, fe répand fur tout le tems de la vie, & en devient d'autant plus petit pour chaque année & pour chaque mois. Si l'on veut faire, continueront-ils, un parallèle éxact des deux rifques, il faut que les tems foient égaux; il faut comparer le rifque de mourir de l'inoculation, non pas vaguement & en général au rifque de mourir de la petite Vérole naturelle dans tout le cours de la vie, mais au danger qu'on court de mourir de cette maladie pendant le même-tems où l'on s'expose à mourir de l'inoculation, c'est à-dire, dans l'espace de quinze jours ou d'un mois.

Il faut avouer que fi on admettoit cette maniere de comparer les deux rifques, elle donneroit beaucoup d'avantage aux adverfaires de l'inoculation. En effet, on ne peut raisonnablement supposer (car on feroit démenti les faits) que par la petite Vérole emporte par mois (année commune) la trois centiéme partie du genre humain; donc le nombre des victimes que la petite Vérole naturelle feroit périr en un mois, eft beaucoup moindre que le nombre de celles qui feroient sacrifiées à l'inoculation. Donc on court moins de rifque de mourir en un mois de la petite Vérole naturelle qu'on attend, que de la petite Vérole qu'on fe donne. Or ne peut-on pas, diront les adversaires de l'inoculation, faire à chaque mois un raifonnement femblable? Donc, ajouteront-ils, dans tout le cours de la vie, on ne pourra parvenir à aucun mois où l'inoculation foit réellement moins

à craindre que la petite Vérole naturelle ; par conféquent on fera toujours plus fage d'attendre la petite Vérole que de fe la donner (C).

Cet argument, qui n'a point encore été propofé, que je fache, d'une maniere auffi frappante, a quelque chofe de fpécieux. Cependant fi le calcul des Inoculateurs eft défectueux en ce qu'on y compare deux rifques dont la durée eft différente, celui des adverfaires de l'inoculation pêche auffi par le même côté, quoiqu'à la vérité fous un autre point de vûe. Celui qui fe fait inoculer, court, fi l'on veut, veut, plus de risque de mourir de la petite Vérole dans le mois, que s'il attendoit cette maladie; mais le mois étant paffé, le rifque une fois couru s'éteint, & l'inoculé en est délivré; celui au contraire qui attend la petite Vérole, court, fi l'on veut, pour chaque mois un moindre rifque que l'inoculé; mais le mois fini, le rifque fe renouvelle, & peut même devenir de jour en jour plus grand, au moins jufqu'à un certain âge.

Ainfi, pour favoir ce qu'on gagne ou ce qu'on rifque à fe faire inoculer, il ne fuffit pas d'avoir égard au danger que l'on court en un mois de mourir de la petite Vérole naturelle; il faut ajouter à ce danger celui que l'on court de mourir de la même maladie dans les mois fuivans, jufqu'à la fin de la vie..

C'est ici que la difficulté du calcul commence à fe faire fentir. Non-feulement on n'a point encore d'ob

(C) Voyez les Remarques à la fin de ce Mémoire.

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