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Mais il sera puni de m'avoir dédaignée.
Parcequ'il est aimable, il fait le petit dieu,
Il ne veut s'adresser qu'aux filles de bon lieu.
Je ne mérite pas l'honneur de ses caresses:
Vraiment c'est pour son nez, il lui faut des maîtresses;
Je ne suis que servante : et qu'est-il que valet?
Si son visage est beau, le mien n'est pas trop laid:

Il se dit riche et noble, et cela me fait rire;

Si loin de son pays, qui n'en peut autant dire?
Qu'il le soit, nous verrons ce soir, si je le tiens,
Danser sous le cotret sa noblesse et ses biens.

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Elle en est méprisée, et cherche à se venger.

ALCANDRE.

Ne craignez point: l'amour la fera bien changer.

FIN DU SECOND ACTE.

ACTE TROISIÈME.

SCÈNE I.

GÉRONTE, ISABELLE.

GÉRONTE.

Apaisez vos soupirs, et tarissez vos larmes ;
Contre ma volonté ce sont de foibles armes :
Mon cœur, quoique sensible à toutes vos douleurs,
Écoute la raison, et néglige vos pleurs.

Je sais ce qu'il vous faut beaucoup mieux que vous-même'.
Vous dédaignez Adraste à cause que je l'aime;

Et, parcequ'il me plaît d'en faire votre époux,
Votre orgueil n'y voit rien qui soit digne de vous.
Quoi! manque-t-il de bien, de cœur, ou de noblesse?
En est-ce le visage ou l'esprit qui vous blesse?

VAR. Je connois votre bien beaucoup mieux que vous-même,
Orgueilleuse ; il vous faut, je pense, un diadème!

Et ce jeune baron, avecque tout son bien,

Passe encore chez vous pour un homme de rien!

Que lui manque après tout? Bien fait de corps et d'ame,
Noble, courageux, riche, adroit, et plein de flamme,
Il vous fait trop d'honneur.

ISABELLE.

Je sais qu'il est parfait,
Et reconnois fort mal les honneurs qu'il me fait.

Il vous fait trop d'honneur.

ISABELLE.

Je sais qu'il est parfait,

Et que je réponds mal à l'honneur qu'il me fait;
Mais si votre bonté me permet en ma cause,
Pour me justifier, de dire quelque chose,
Par un secret instinct, que je ne puis nommer,
J'en fais beaucoup d'état, et ne le puis aimer.
Souvent je ne sais quoi que le ciel nous inspire'
Souléve tout le coeur contre ce qu'on desire,
Et ne nous laisse pas en état d'obéir

Quand on choisit pour nous ce qu'il nous fait haïr.
Il attache ici-bas avec des sympathies

Les ames que son ordre a là-haut assorties :
On n'en sauroit unir sans ses avis secrets;

Et cette chaîne manque où manquent ses décrets.
Aller contre les lois de cette providence,

C'est le prendre à partie, et blâmer sa prudence,
L'attaquer en rebelle, et s'exposer aux coups
Des plus âpres malheurs qui suivent son courroux.
GÉRONTE.

Insolente; est-ce ainsi que l'on se justifie??
Quel maître vous apprend cette philosophie?
Vous en savez beaucoup; mais tout votre savoir

VAR. De certains mouvements que le ciel nous inspire,

Nous font, aux yeux d'autrui, souvent choisir le pire;
C'est lui qui, d'un regard, fait naître en notre cœur
L'estime ou le mépris, l'amour ou la rigueur.

Les ames que son choix a là-haut assorties.

2 VAR. Impudente! est-ce ainsi que l'on se justitie?

Ne m'empêchera pas d'user de mon pouvoir.

Si le ciel pour mon choix vous donne tant de haine,
Vous a-t-il mise en feu pour ce grand capitaine?
Ce guerrier valeureux vous tient-il dans ses fers?
Et vous a-t-il domptée avec tout l'univers?
Ce fanfaron doit-il relever ma famille?

ISABELLE.

Eh! de grace, monsieur, traitez mieux votre fille!

GÉRONTE.

Quel sujet donc vous porte à me désobéir?

ISABELLE.

Mon heur et mon repos, que je ne puis trahir.
Ce que vous appelez un heureux hyménée
N'est pour moi qu'un enfer, si j'y suis condamnée.

GÉRONTE.

Ah! qu'il en est encor de mieux faites que Vous Qui se voudroient bien voir dans un enfer si doux! Après tout, je le veux; cédez à ma puissance.

ISABELLE.

Faites un autre essai de mon obéissance.

GÉRONTE.

Ne me répliquez plus quand j'ai dit: Je le veux. Rentrez; c'est désormais trop contesté nous deux.

SCÈNE II.

GÉRONTE.

Qu'à présent la jeunesse a d'étranges manies!

Les règles du devoir lui sont des tyrannies;

Et les droits les plus saints deviennent impuissants

Contre cette fierté qui l'attache à son sens 1.
Telle est l'humeur du sexe; il aime à contredire,
Rejette obstinément le joug de notre empire,
Ne suit que son caprice en ses affections,
Et n'est jamais d'accord de nos élections.
N'espère pas pourtant, aveugle et sans cervelle,
Que ma prudence cède à ton esprit rebelle.
Mais ce fou viendra-t-il toujours m'embarrasser?
Par force ou par adresse il me le faut chasser.

SCÈNE III.

GÉRONTE, MATAMORE, CLINDOR.

MATAMORE, à Clindor.

Ne doit-on pas avoir pitié de ma fortune 2?
Le grand-visir encor de nouveau m'importune;
Le Tartare, d'ailleurs, m'appelle à son secours;
Narsingue et Calicut m'en pressent tous les jours;
Si je ne les refuse, il me faut mettre en quatre.

CLINDOR.

Pour moi, je suis d'avis que vous les laissiez battre.
Vous emploieriez trop mal vos invincibles coups
Si, pour en servir un, vous faisiez trois jaloux.

MATAMORE.

Tu dis bien, c'est assez de telles courtoisies;

VAR. A l'empêcher de courre après son propre sens.
Mais c'est l'amour du sexe; il aime à contredire,
Pour secouer, s'il peut, le joug de notre empire.

2 VAR. N'auras-tu point enfin pitié de ma fortune?

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