Immagini della pagina
PDF
ePub
[ocr errors]

comme un monftre qui démoliroit les Villes, arracheroit les arbres, tariroit les fontaines, éclipferoit les Aftres. Que la raifon apprécie ces funeftes fuccès qui dépouillent l'homme de ces lumieres, de ces droits, de ces espérances, de la nature même de fon ame, en la confondant avec une vile pouffiere, & qu'on la compare à une Religion qui l'éleve jufqu'à Dieu. Un homme raisonnable fera-t-il furpris des progrès d'une Secte obfcure qui ne se répand que par le vice & la deftruction? La Religion, comme une feconde création, forme un monde ? l'Irréligion le réplonge dans le cahos. Ainfi tous les gens fenfés le regardent comme une mode dangereufe qui ne dure pas plus que les Pantins & les coëffures à la Ramponeau. Déjà on commence à rougir de l'épithète de Philofophe. Cette qualification eft devenue une injure; & dès qu'on a honte du mot, on en aura bientôt de la chofe.

CIEL.

On ne nie l'existence du Ciel, que parce qu'on craint L'Enfer.

M. de V. nie qu'il y ait un Paradis, parce qu'il n'en connoît pas la place; & de ce que les anciens ont eu des idées fauffes fur le Ciel, il conclut qu'il n'y a point de lieu où l'Etre fuprême ait établi fon féjour & où il récompenfe fes Serviteurs. Il prétend que les Juifs fe repréfentoient le Ciel comme une voute de criftal. Mais fur quoi s'appuye-t-il? Nous l'ignorons. Estce parce que le Ciel eft appellé firmament dans les Ecritures? Mais ce mot firmamentum ne fignifie autre chose qu'un grand espace qui a quelque folidité. Dans ce fens on a pu appeller les nuages raffemblés firmament ; & Moyfe a pu dire que Dieu ouvrit les éclufes de ce firmament. Il écrivoit pour des gens fimples & non pour des Phyficiens. Il vouloit leur 'expliquer l'effet de la toute-puiffance ou des vengeances du très-Haut, & non les idées philofophiques d'un Anglois ou d'un Allemand.

G

!

Le grand Dogme de la Religion Chrétienne & même de toute Religion, mais auffi le Dogme incommode, génant, effrayant, c'eft une autre vie, des peines futures; & c'eft pour cela fur-tout, qu'on le rejette, qu'on en doute, qu'on veut en douter. Mais qu'on y prenne garde; il y a une autre vie s'il y a un Dieu, & il n'y a point de Dieu s'il n'y a point une autre vie. Ces deux Dogmes font néceffairement liés; & qui reconnoît ou rejette l'un, doit reconnoître ou rejetter F'autre. Cependant veut-on rejetter l'existence de Dieu ? veut-on être Athée ? Non fans doute. Qu'on ne foit donc pas Matérialifte; qu'on ne nie pas l'immatérialité & l'immortalité de l'ame, fi on ne veut tomber dans l'Athéïsme.

Je vois tous les jours des Incrédules peu inftruits, nier une autre vie, avouer même qu'ils font Matérialiftes, & s'offenfer fi on leur dit qu'ils font des Athées. Ils le font pourtant fans le favoir & fans le vouloir; mais s'ils ont de l'efprit & de la droiture, on peut fe fervir de leur horreur pour l'Athéifme, pour les détromper du Matérialisme, leur faire reconnoître une autre vie, & les amener enfuite aux autres articles de La Foi Chrétienne.

Pour voir toutes les conféquences philofophiques de F'opinion de la matérialité de l'ame, il faut de la Philofophie; mais pour en fentir les conféquences morales, le fimple bon fens fuffit.

Tout le pernicieux de l'Athéifme eft dans l'opinion de la mortalité de l'ame, & dès-lors tour l'odieux.

On a dit dans quelques livres, qu'à ne confulter que Ta raifon, la queftion de la fpiritualité de l'ame étoit problématique; mais on n'a ofé le dire de la queftion de l'existence de Dieu. Par exemple, il faut convenir que quoique M. de V. ait quelquefois attaqué la Providence, il parle fouvent & très-bien de l'existence de Dieu; mais en même-tems, que d'infinuations, pour ne rien dire de plus, contre la fpiritualité & l'immortalité de l'ame! Or, je le répéte,à quoi ferviroit la croyance d'un Dieu, auteur du monde, fans celle d'un Dieu rémunérateur de la vertu & vengeur du crime? Elle n'auroit aucune influence fur les mœurs; elle ne feroit ni un aiguillon, ni un frein.

Si la plupart des Incrédules ne croient pas,

c'eft

qu'ils ne veulent pas croire ; & ils ne le veulent pas, ] afin de vivre fans remords dans le vice ou dans le crime. Ceux d'entr'eux qui ont de l'efprit & de la bonne foi en conviennent, non, à la vérité, pour eux-mêmes, mais pour le plus grand nombre des autres Incrédules. Or, en l'avouant pour les autres, ils l'avouent pour eux-mêmes; & dans le fond, ils croient & ont même toujours cru comme la plupart de ceux qui fe convertiffent en conviennent.

Ils font des efforts pour croire, difent quelquefois les Incrédules des Chrétiens qui paroiffent les plus perfuadés; & moi je dis du plus grand nombre de ces Incrédules: Ils font des efforts pour ne pas croire.

Les Impies qui croient à la mort, croyoient déjà en fanté. Voici fur cela un morceau admirable de M. Maffillon.

» Répondez à toutes les difficultés de quelqu'un qui » se vante d'être incrédule; réduisez-le à n'avoir plus >> rien à vous répliquer; il ne fe rend pas encore, & » pour cela vous ne l'avez pas encore gagné. Il fe ren» ferme en lui-même comme s'il avoit encore des raifons plus accablantes qu'il ne daigne pas dire. Il tient »bon & oppofe un air mystérieux & décidé à toutes » les preuves qu'il ne peut renverfer. Alors vous avez pitié de fa fureur & de fon entêtement. Vous vous » trompez; ne foyez touché que de fa mauvaise foi;

car qu'une maladie mortelle le frappe au fortir de » là; courez à fon lit, vous trouverez ce prétendu in» crédule convaincu, il n'eft plus queftion de doutes. »Les jugemens de Dieu qu'il faifoit femblant de ne pas » croire, le pénétrent de la plus vive frayeur. Le Mi» niftre de JESUS-CHRIST appellé, n'a pas befoin d'en»trer en conteftation pour le détromper de fon impiété. » L'incrédule mourant prévient là-deffus fon minif» tere; l'incrédule mourant avoue le faux & la mau» vaife foi de fes blafphêmes paffés, & en fait une répa»ration publique. Il ne demande que des confolations. » Cette crainte qui le pénétre, ne vient que de la foi » qu'il avoit déjà. La maladie ne lui a pas donné de » nouvelles lumieres, mais elle a touché fon cœur. « (Sermon des doutes fur la Religion, Tome 3. p. 357.) Ecoutons à préfent Bayle, dans fon article Bion, marque E. Voici comme il s'explique fur les Incrédules.

Re

[ocr errors]

» Prefque tous ceux qui vivent dans l'Irréligion ne font » que douter, ils ne parviennent pas à la certitude; fe » voyant donc dans le lit d'infirmité où l'Irréligion ne » leur eft plus d'aucun ufage, ils prennent le parti le » plus fûr, celui qui promet une félicité éternelle en cas » qu'il foit vrai, & qui ne fait courir alors aucun rif» que en cas qu'il soit faux. «

C'eft par vanité qu'on fait l'efprit fort, & c'eft par vanité qu'il faudroit ne le point faire, dans la crainte de fe démentir un jour & de faire l'efprit foible. Plus d'un Incrédule s'eft démenti plus d'une fois en fa vie; M. de V., par exemple : & ceux qui le connoiffent bien, croient qu'il fe déterminera encore, malgré le courage qu'il affecte dans fes nouvelles Brochures. Ils le lui ont prédit. On fait l'Epigramme d'un de fes admirateurs, très-connu lui-même par fon incrédulité. Elle finit par ces deux vers:

Et je vois mon devot V.
Naziller chez les Capucins.

Se faire Capucin, feroit bien plus fort que de mourir, comme feu M. de Maupertuis, dans les bras de deux Capucins. Cependant M. de V. en a beaucoup plaifanté. Tant mieux, c'eft la preuve qu'il a cru la converfion fincere. Il a dit que M. de Maupertuis étoit mort comme un fot; il auroit bien mieux aimé dire qu'il étoit mort comme un fourbe. Mais il eft tems qu'il penfe à fa fin, au-lieu de plaifanter fur la mort des autres ; aulieu de dire qu'il n'y a point de Ciel. Comment peut-il le favoir? Quoi, parce que chaque planete eft entourée de fon athmosphère, il ne peut pas y avoir un espace fupérieur à toutes les planetes où l'Etre des êtres reçoit les hommages des Juftes, dont il récompenfe la vertu ? Un tel blafphême eft révoltant; & on ne détruiroit pas le Ciel, fi notre confcience ne nous difoit que nous avons mérité l'Enfer.

CIRCONCISION.

Les Juifs tenoient-ils cette Cérémonie des Egyptiens? M. de V. fidéle copiste des Anglois, a fuivi l'opinion

du Chevalier Marsham, au fujet de la Circoncifion. Cet Ecrivain prétend après Hérodote, que cette cérémonie avoit été premiérement établie chez les Egyptiens, & que les Ifraélites la tenoient d'eux; mais comme l'hiftoire de Moyfe doit être préférée à celle des Historiens profanes; il eft indubitable que c'eft Dieu qui a établi la Circoncifion, Abraham eft le premier qui la pratiqua après l'ordre exprès qu'il en avoit reçu de Dieu. ( Voyez le chap. 17. de la Genefe) Lorfque Moyfe reçut la Loi fur la montagne de Sinaï, il eut ordre d'y inférer ce Commandement : L'Enfant mâle fera circoncis huit jours après fa naiffance. ( Levitique, chap. 12. y. 3.) C'étoit une marque qui diftinguoit les enfans d'Abraham des autres Peuples qu'ils appelloient incirconcis par mépris, & qui n'avoient point part à l'alliance que Dieu fit avec ce Patriarche & fa postérité.

Il eft faux d'ailleurs que l'obligation de circoncire fût une Loi chez les Egyptiens. Il n'y avoit qu'un certain nombre de leurs Prêtres & de gens de lettres qui fe foumiffent à cette pratique. St. Clément d'Alexandrie raconte à la vérité que Pithagore étant venu en Egypte fut obligé de fe faire circoncire pour avoir commerce avec les Prêtres de ce pays-là, & pour entrer dans la connoiffance de leurs myfteres; mais ce fait paroît fort incertain. Abraham, qui avoit voyagé & fait quelque féjour en Egypte, en étoit forti fans être circoncis; il ne tira donc point cette pratique des Egyptiens. Il est beaucoup plus vraisemblable que les Egyptiens ont reçu la circoncifion des enfans de Jacob & de leurs defcendans, qui demeurerent long-tems en Egypte. Artapan, cité par Eufebe, affure que ce fut Moyfe qui la communiqua aux Prêtres d'Egypte & aux Ethiopiens; mais il y a bien de l'apparence que quelques Egyptiens avoient imité en cela les Ifraélites avant Moyfe.

Les Juifs étant fortis de l'Egypte ne firent point cir

« IndietroContinua »