Immagini della pagina
PDF
ePub

Des hommes pleins de paffions vaincues, & vaincues par la Religion; des fcélérats convertis, &c. Qui ne connoît pas au contraire d'honnêtes gens devenus des fripons en devenant Incrédules? Tel domestique jufqu'alors fidéle, a volé fon maître pour lui avoir entendu dire ou à d'autres, en le fervant à table que l'Enfer n'épouvantoit que les fots.

[ocr errors]

» Nous differtons fur la Religion devant nos » gens, finon d'une façon très-impie, du moins fou>>vent fort légere, fur les fuperftitions populaires. >> Tout cela porte coup fur les mœurs. » (L'Ami des hommes, tom. II, page 167.)

Plus haut l'Auteur, parlant de nos anciens Militaires avoit dit :

[ocr errors]

>>Dans les Garnifons les Officiers plus portés ce>> pendant aux débauches d'éclat qu'ils ne le font au»jourd'hui, alloient à la Meffe au fortir de chez leur >> Commandant. Ces hommes inconféquens & quelque>> fois brutaux, ne fouffroient pas qu'on dit un mot »équivoque fur la Religion devant eux, & difoient »hautement qu'un homme fans Religion ne pouvoit >>être qu'un coquin.

[ocr errors]

Confervons-la donc précieusement dans nous mêmes & dans les autres cette Religion fi utile à la Société, confervons-la parmi les honnêtes gens. Je prends ce mot dans les deux fens que l'usage lui donne, pour la mieux conferver parmi les mal-honnêtes gens & parmi le peuple; & payons le tribut d'une jufte reconnoiffance à ceux qui, comme l'Auteur de l'Ami des hommes écrivent de maniere à la conferver parmi les hommes. C'est bien un fervice.

d'ami.

[ocr errors]

§. II.

Objections des Incrédules contre l'Enfer.

» Quel Dieu, quelle Religion, qui damne le plus >> grand nombre! Dieu ne pouvoit-il pas ne pas créer >>tant de coupables, ou prévenir leur infortune ? >> Etant bon comment ne l'a-t-il pas fait ? Ainfi il » feroit plus à fouhaiter qu'il n'y eût point de Dieu,

[ocr errors]

» que d'en admettre un qui paroît cruel. L'Athée eft » moins déraisonnable que le Chrétien. »

RÉPONSE. 1o. Cette objection eft commune à tous ceux des Déiftes, qui admettent un Dieu rémunérateur de la vertu, & vengeur du crime. 2°. La difficulté feroit la même dans le cas où il n'y auroit qu'un feul homme criminel & reprouvé. 3°. Quelle idée a-t-on de la bonté de Dieu ? exclut-elle fa fageffe & fa juftice? Si elle n'eft pas incompatible avec la punition de quelques coupables, pourquoi le feroitelle avec le châtiment de plufieurs, & même du grand nombre, s'il mérite punition? Si cette bonté punit plufieurs d'un fupplice éternel, il eft également mérité. Ainfi la difficulté ne tire point fa force ni du petit ni du grand nombre des coupables, ni de la durée des fupplices préparés, mais du péché, de fes malheurs, & d'une bonté en Dieu mal entendue, qui ne pourroit faire que du bien, même aux plus indignes; comme fi Dieu fût obligé d'empêcher l'homme d'abufer de fa liberté, en s'écartant de l'ordre. Mais cherchons quelle eft la fource du péché & de la damnation de l'homme, pour faire évanouir tant de blafphêmes.

PREMIER PRINCIPE. L'homme eft libre ; il peut choifir le bien ou le mal; le fentiment de la liberté eft joint à celui de l'existence. Les loix, les menaces les promeffes, les châtimens, les récompenfes divines & humaines fuppofent la liberté dans les hommes: liberté active & dépendante, qui eft toujours aidée & fortifiée par l'action ou le fecours de Dieu, qui, au lieu de nuire à cette liberté, lui laiffe tous fes droits.

:

DEUXIEME PRINCIPE. L'homme feul eft l'auteur du mal moral, qu'il choifit par préférence; lui feul s'écarte de la régle prefcrite. Dieu ne peut empêcher fon choix, qu'en lui ôtant la liberté. Or, il ne le veut pas dans l'ordre qu'il a établi le Créateur n'eft obligé à rien. Le devoir de la créature libre & fecourue, eft de fe conformer aux volontés connues de fon Dieu. S'il y réfifte, l'homme feul eft refponfable de cet abus. Dieu le permet; mais il ne le fait pas. Tout ce que Dieu fait eft réel; l'injuftice & la malice ne font qu'un défaut, dont le cœur humain feul eft la fource. Je fais que Dieu

par un miracle de fa puiffance pourroit empêcher le crime; mais eft-il obligé de faire tout ce qu'il peut ? Que l'homme ne fe plaigne que de lui-même, s'il abufe de fa liberté, s'il ferme les yeux à la lumiere s'il s'étourdit contre les cris de fa conscience, s'il s'abandonne à fes paffions: Dieu, en permettant ce défordre, fait en tirer le bien & fa gloire, mais il le défend & il l'empêche autant qu'il doit.

SECONDE OBJECTION. » Un pere qui pourroit pré» venir le mauvais usage qu'il voit que fes enfans fe>>ront de fes biens, feroit-il bon s'il ne l'empêchoit >> pas ? «<<

:

RÉPONSE. Non mais il y a bien de la différence. La bonté finie & créée est néceffairement dépendante; elle doit toujours fe conformer à la volonté & à la gloire de Dieu. Un pere doit empêcher tout ce qui eft contraire à cette fin. D'ailleurs un pere eft obligé d'aimer fes enfans comme lui-même; il ne doit pas fouffrir en eux ce qu'il ne peut faire lui-même. Il est responsable à Dieu de lui & des fiens; mais la bonté de Dieu eft indépendante. Elle ne fe communique au dehors, qu'autant qu'elle veut & comme elle veut. La cenfurer , parce qu'elle fe répand avec mesure, ce feroit auffi attaquer fa puiffance, que fi on la blâmoit de ce qu'elle produit des ouvrages finis & limités.

[ocr errors]

TROISIEME OBJECTION. » Un Dieu jufte peut-il fe >> mesurer avec fa créature, en l'accablant de toutes » fes vengeances pendant toute fon éternité pour une » faute d'un inftant?

RÉPONSE. Ici rien n'eft contraire à fa juftice; & tout la juftifie. Qui ne veut pas aimer Dieu, mérite d'être exclu de fa poffeffion, tandis qu'il ne l'aimera pas: or, le pécheur mort ne l'aimera jamais. Il aura méprifé l'ordre, en fe livrant aux créatures; il fera donc laiffé à fon défordre. Ses plaifirs feront changés en douleurs, & fa confcience en bourreau. Plus l'homme eft petit, plus fa rébellion eft énorme. Il eft foible, mais il étoit libre & fecouru. Dieu eft bon, mais il doit venger fa bonté outragée jufqu'à la fin. Il eft jufte, il récompenfe en Dieu éternel, pourquoi ne puniroit-il pas de même ? Une ame immortelle doit toujours être ce qu'elle a choifi d'être en

fortant du tems; & qui pourroit la changer? Les Elus ne fe pervertiront pas au Ciel; les Damnés fe convertiront-ils aux Enfers ? Un Dieu éternel & immuable, ne changera ni leur fort ni les décrets.

ESPRITS. FORT S.

La vanité eft la fource de leurs Ecrits. LEs Esprits-Forts, dit M. le Chevalier d'Arc, font com

me les gens yvres, qui veulent toujours faire boire ceux qui font de fens froid.

Tel eft en effet le fanatifme des Efprits-forts, non des fimples incrédules, mais de ceux qui fe font gloire de leur incrédulité, des impies dogmatifans; car c'est cette vanité audacieufe, qui leur a fait donner par ironie, comme le remarque la Bruyere, le nom d'Efprits-forts. Ils cherchent à infpirer leur prétendue force aux efprits foibles. On a dit que c'étoit une grande partie pour fe fortifier eux-mêmes, en les acquérant. Quoi qu'il en foit de leur motif, cette acquifition peu honorable eft de plus dangereufe. Ces efprits foibles font affez fouvent de mauvais cœurs, & ils avoient befoin du frein qu'on leur ôte.

Ils n'auroient jamais eu l'efprit de deviner certains principes; ils ont celui de tirer certaines conféquences & quelquefois contre ceux-mêmes qui leur ont fourni ces principes.

Depuis quelques années, il a paru un homme d'un efprit original, & d'une conduite, d'une maniere de vivre plus originale encore & plus finguliere. En lui l'homme eft encore plus différent des autres hommes, que l'écrivain ne l'eft des autres écrivains. On a soupçonné un caractére fi extraordinaire d'être non pas faux, mais factice ; & en effet, ce font deux chofes très différentes. M. R. de G. a donc réellement ce caractére, avec lequel il fe montre; mais il l'a plutôt parce qu'il fe l'eft fait, que parce que la nature le lui a donné. Elle lui en a fans doute donné le germe; & peut-être a-t-il travaillé d'abord à le corriger, à le dompter, frappé de l'impreffion qu'une pa

[ocr errors]

reille fingularité feroit dans le monde. Mais à la fin, laffé de combattre, il fe fera pleinement livré à fon naturel, & y aura même ajouté. Se trouvant bien tel qu'il eft, & d'autres le trouvant bien auffi, il aura voulu l'être encore plus ; & comme on dit, il fe fera un peu aidé lui-même.

Celui dont nous venons d'ébaucher le portrait, & dans lequel nous eftimons bien fincérement à plufieurs égards, & l'homme & l'Auteur, a foutenu, comme tout le monde fait, des paradoxes dangereux. Il eft vraisemblable qu'il raifonna ainfi en commençant d'écrire fur cent perfonnes qui liront mon ouvrage, quelques-unes l'applaudiront, & quelques autres le réfuteront, au lieu qu'en me taifant , je reftercis ignoré de toutes. Voilà le vrai motif des Incrédules qui, après s'être échauffés l'imagination dans le cabinet, prêchent publiquement leur Doctrine.

[ocr errors]

La plupart des efprits-forts n'ont travaillé que pour acquérir de la gloire, & quelques autres feulement pour faire du bruit. Le bruit joint, tantôt à la gloire, tantôt à la honte, hâte, étend & augmente toujours l'une & l'autre. Delà il eft arrivé que plufieurs de ceuxmêmes qui ont écrit pour acquérir de la gloire, ont voulu encore faire du bruit. Dans cette vue à d'excellentes chofes ils en ont mêlé d'autres mauvaises mais très fingulieres, & quelquefois fingulieres jufqu'au ridicule; mais qui par cela même n'en étoient que plus propres à infpirer de la curiofité & de l'empreffement pour leurs ouvrages. La vanité eft finguliere dans ces rufes; & fon petit manege, dût-il être apperçu, elle l'employeroit encore, pourvu qu'il la menât à son but. Le vain dit quelquefois comme l'avare: Populus me fibilat, at mihi plaudo, dum &c.

Les Incrédules qui ont écrit par vanité, ont pris des détours plaifans pour fatisfaire leur orgueilleufe manie; ils fe font fouvent contredits eux-mêmes. C'étoit le cas de leur dire: ou vous me trompiez autrefois, ou vous me trompez maintenant; mais ils fe font trèspeu embarraffés des réflexions qu'on pourroit faire. Ils vouloient répandre le nom du Charlatan & vendre fa drogue, & peu leur importoit par quel moyen. Quelquefois les coriphées de la fecte ont fait femblant de fe combattre mutuellement : autre rufe affez fem

« IndietroContinua »