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plus extravagant, ou de douter que le Meffie ait été promis, felon l'opinion des Athées, ou de croire qu'il foit encore à venir felon l'opinion des Juifs.

3o. Rien n'eft plus contraire à la raifon que de prétendre détruire une autorité divine établie fur des preuves fi convainquantes, en ne lui oppofant que de vaines conjectures de l'efprit humain. Les hommes mêmes du monde ne raifonnent pas de cette forte. Ils croient que dans les chofes de fait, ce feroit être déraisonnable que de ne fe rendre pas à l'autorité, quand elle eft bien établie. Il y a, par exemple, des diftin&tions très-confidérables entre les familles. Il y en a de grandes & d'illuftres, dont l'antiquité eft prouvée par de titres non fufpects & par le témoignage des hiftoires, que l'on croit fort affurées. Que l'on dife à un Montmorenci que l'on ne croit pas que fa maifon foit plus illuftre que celle d'un Financier, &. qu'il ne fauroit produire aucune preuve qui convainque ceux qui en voudroient douter. Il s'offenfera avec raifon de ces objections frivoles. On n'oppofe point, dira -ft-il, des raifonnemens en l'air à l'autorité des faits, à des titres & des histoires dont l'autorité n'eft point combattue. Ce raisonnement eft fi certain, que fi un homme vouloit s'oppofer opiniâtrement à ce qui eft ainfi établi par une autorité indubitable, il s'enfuivroit la chofe du monde la plus abfurde. On pourroit dire avec raison dans deux cens ans, que tous ceux qui vivent aujourd'hui ne vivent point; que tous ceux qui écrivent n'écrivent point; & que tout ce qui fe paffe aujourd'hui de plus grand & de plus remarquable dans le monde, n'eft qu'une fable, puifque dans deux cens ans on ne faura rien de ce qui fe fait aujourd'hui, que ce qui fe pourra lire dans les hiftoires.

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Les Incrédules eux-mêmes ou prétendus efpritsforts mépriferoient les premiers un homme qui débiteroit de fang froid qu'il n'y a jamais eu de Céfar, ou d'Alexandre, d'Homere ou de Virgile & qui rejetteroit tout ce que l'hiftoire nous apprend des premiers, de même que tous les Ecrits qu'on attribue aux derniers. Cependant ils fe croient des hommes judicieux, en traitant de fables, ou du moins en regardant comme fort incertains, les faits qui con

cernent Moyfe & JESUS-CHRIST. Mais on défie ces efprits préfomptueux, qui croient avoir plus de lumieres que le refte des hommes, de nous faire voir dans l'antiquité quelques faits mieux prouvé que ceux de Moyfe & de JESUS-CHRIST. Ainfi puifqu'il n'y en a point de mieux prouvés, on a droit de leur demander pourquoi ils croient les uns & qu'ils ne croient pas les autres ? La chofe n'eft pas de peu d'importance; l'alternative eft ici terrible.

croire les faits de l'hiftoire profane, ou de rejetter ceux qui ferve de fondement à la Religion véritable. Il n'importe nullement à qui que ce foit de favoir s'il y a eu un homme appellé Céfar & un autre appellé Alexandre, & s'ils ont fait telles ou telles actions. Mais notre bonheur ou notre malheur étant attachés à la connoiffance des vérités connues dans les faintes Ecritures, rien n'eft plus important que de favoir fi on y doit ajouter foi. Si l'Evangile eft véritable il s'enfuit que JESUS-CHRIST eft venu au monde, qu'il a fait des miracles, qu'il eft ressuscité, qu'il eft par conféquent Dieu & que ce qu'il a dit eft certain & doit être regardé comme la parole de Dieu même. Ainfi fi les Incrédules n'ont pas la foi, ils doivent examiner férieufement les faits fur lefquels elle est établie ; & s'ils font cet examen avec fincérité, ils croiront bientôt.

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§. II.

Penfées diverfes fur la Foi & fur les vices oppofés, par le

Pere Bourdaloue.

I.

On eft fi zélé pour l'intégrité des mœurs; quand le fera-t-on pour l'intégrité de la Foi ? On fe recrie avec tant de chaleur contre de prétendus relâchements dans la maniere de vivre; quand s'élévera-t-on avec la même force contre d'affreux égaremens dans la maniere de croire ?

Où en fommes-nous

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I I.

& où eft cette Foi des premiers fiécles, cette Foi qui a converti tout le mon

de? Alors des Athées devenoient Chrétiens; main? tenant des Chrétiens deviennent Athées.

III.

Bizarrerie de notre fiécle, foit à l'égard de la difcipline eccléfiaftique, foit à l'égard de la doctrine! Jamais tant de zèle en apparence pour l'antiquité, & jamais tant de nouveautés !

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Le jufte profite de tout & tourne tout à bien : mais; au contraire; il n'y a rien que l'impie ne profane & dont il n'abufe. La Religion Chrétienne établit dans la fociété humaine, & dans la vie civile un ordre admirable. Elle tient chacun dans le devoir, elle regle toutes les conditions, & y entretient une parfaite fubordination. Elle apprend aux petits à respecter les grands, & à leur rendre l'obéiffance qui leur eft. due; & elle apprend aux grands à ne point méprifer les petits & ne point les opprimer; mais à les foutenir à les aider à les conduire avec modération, avec prudence, avec équité. Elle réprime les méchans par la crainte des châtimens éternels & elle anime les bons par l'efpérance d'une gloire fans mefure & fans fin. De forte que banniffant ainfi tous les vices, fraudes, injuftices, violences, colères, animofités, vengeances, médifances, impudicités, débauches; & engageant à la pratique de toutes les vertus, de la charité, de l'humilité, de la pénitence, de la mortification des fens, d'un défintéreffement parfait, d'une fidélité inviolable, d'une juftice inaltérable & des autres; il n'eft rien de plus falutaire pour le bien public, ni rien de plus propre à maintenir par-tout la paix, l'union, le commerce, l'arrangement le plus merveilleux.

De-là quelle conféquence tire le jufte? Dans une Religion qui ordonne fi bien toutes chofes, il découvre la fageffe de Dieu, & il reconnoît que c'eft l'ouvrage d'une providence fupérieure ; mais par le plus groffier aveuglement & l'abus le plus étrange,

l'impie forme un raifonnement tout oppofé: & parce que cette Religion eft fi utile à tous les états de la vie, & qu'elle eft feule capable d'en faire le bonheur; il prétend que c'eft une invention de la politique des hommes. N'eft-ce pas là prendre plaifir à s'aveugler, & vouloir s'égayer de gaieté de cœur ? Hé quoi afin que la Religion ait le caractère & la marque de la vraie Religion, faudra-t-il que ce foit une loi qui mette le trouble dans le monde, qui en renverfe toute l'économie ?

V.

Cette diverfité de Religions qu'il y a dans le monde eft un fujet de fcandale pour l'Incrédule. A quoi s'en tenir, dit-il ? L'un croit d'une façon, l'autre d'une autre. Là-deffus il fe détermine à les rejetter toutes & à ne rien croire. On pourroit, ce me femble, lui faire voir que ce qui le confirme dans fon incrédulité, c'eft juftement ce qui devroit l'engager à en fortir, & à prendre pour cela tous les foins néceffaires. Car s'il raifonnoit bien, il feroit les réflexions fuivantes : que ce grand nombre de Religions, quoique fauffés, eft une preuve qu'il y en a une vraie; que cette idée générale de Religion gravée dans l'efprit de tous les peuples, & répandue par toute la terre; eft trop univerfelle, pour être une idée chimérique ; que fi c'étoit une pure imagination, tous les hommes d'un confentement fi unanime ne feroient pas convenus à fe la former de même qu'ils ne fe font, par exemple, jamais imaginé qu'ils ne devoient point mourir ; que c'est donc comme un des ces premiers principes qui font imprimés dans le fond de notre ame & qui portent avec eux leur évidente & inconteftable vérité.

Delà il iroit plus avant; & perfuadé de la vérité d'une Religion en général, il chercheroit où elle eft, cette vraie Religion. Il examineroit, il confulteroit il écouteroit ce qu'on auroit à lui dire; alors dans le choix qu'il fe propoferoit de faire entre toutes les Religions, il ne feroit pas difficile de lui montrer l'excellence, la fupériorité de la Religion

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Chrétienne, & les caracteres vifibles de divinité qui la diftinguent. Mais il ne veut point entrer dans toutes ces recherches ; & d'abord il prend fon parti, de vivre fans Religion au milieu de tant de Religions. Eft-ce là agir fagement? Soyez éternellement béni, Seigneur, de la miféricorde qu'il vous a plu exercer envers moi. Ce qui fcandalife l'incrédule & ce qui l'éloigne de vous, c'eft ce qui m'y attache inviolablement & par la plus vive reconnoiffance. Je confidére cette multitude innombrable de peuples plongés dans les ténébres de l'infidélité, & adonnés à des cultes fuperftitieux. Plus il y en a, plus je fens la grace de ma vocation à l'Evangile & à notre fainte Loi. C'est une diftinction que je ne puis affez eftimer, & dont je ne Tuis redevable qu'à un amour spécial de votre part. Le Seigneur n'en a pas ainfi ufé à l'égard de toutes les nations; il ne leur a pas découvert, comme à moi, fes admirables Myfteres. (PL, 147.)

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V I..

Il est bien glorieux à la Religion Chrétienne, que tout ce qu'il y a de libertins qui l'attaquent, foient des gens corrompus dans le cœur & déréglés dans leurs mœurs, Tandis qu'ils ont vécu dans l'ordre, fans attachements criminels, fans habitudes vicieuses, fans débauches, ils n'avoient point de peine à fe foumettre au joug de la Foi, il la respectoient, ils la profeffoient, tout ce qu'elle leur proposoit leur paroiffoit raifonnable & croyable. Quand ontils changé de fentiment? C'eft lorfqu'ils ont changé de vie & de conduite. Leurs paffions fe font allumées, leurs fens fe font rendus maîtres de leur raifon, leurs aveugles & honteufes convoitifes les ont plongés en toute forte de défordres; & alors cette même Foi où ils avoient été élevés, a perdu dans leur efprit toute créance. Il ont commencé à la contredire & à la combattre. Or, encore une fois, voila fa gioire de n'avoir peur ennemis que des hommes ainti dérangés, paffionnés, efclaves de leur chair, idolâtres de leur fortune, & de ne pouvoir s'accommoder avec eux. Car voilà l'évident

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