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un des plus nobles représentants de la Renaissance au sein de l'Église, n'avait pas craint de démontrer en plein concile de Bâle la fausseté de la donation attaquée par Valla 1.

Cette thèse fut reprise par un chanoine catalan, camérier d'Alexandre VI. Cet écrivain montra la donation omise par tous les historiens autorisés: Eusèbe, Jérôme, Augustin, Ambroise, Basile, Jean Chrysostome, Ammien Marcellin, l'auteur de l'Histoire tripartite, Orose, Beda2.

Il se formait ainsi dans les hauts rangs de la hiérarchie une élite en communion intellectuelle avec l'esprit nouveau et capable de le servir, au moins de le patronner.

Telle est la situation qui se prépare et qui s'offrira sous Léon X. Il semble que la vieille discipline catholique puisse se transformer sans schisme, laissant finir de sa belle mort, sur un lit de respect, la superstition où elle se fonde et qu'atteint de toute part l'incrédulité. De son donjon de Steckelberg, Ulrich von Hutten dédie à Léon X une nouvelle édition du traité de Valla. Ce vaillant de l'épée et de la plume s'adresse au pape, homme de

1. Nicolas de Cusa, au concile de Bâle, déclara qu'il n'avait trouvé la donation de Constantin, ni dans des recueils authentiques, ni dans les histoires de ce temps. Voir dans le petit volume cité, contenant le texte latin du De falsa donatione, etc... Nicolai de Cusa, cardinalis tituli Sancti Petri ad Vincula, sententia de Donatione Constantini, quam scripsit ad concilium Basiliense, de concordantia catholica, lib. III, cap. II.

2. Vid. ibid..., R. P. D. Hieronymus Paul. Cathalanus, canonicus Barcinonensis, juris utriusque doctor, ac cubicularius Alexandri VI, pontificis maximi, vir fide dignissimus, in libello quem vocant Praticam cancellariæ apostolicæ sic scribit..., etc.

lettres, comme au promoteur de la véritable réforme, au défaut de laquelle, en haine d'abus invétérés, il servira Luther. Mais on sent bien à son langage qu'il n'est pas un mystique, un croyant étroit. Polémiste et soldat, ami des Muses libres, ennemi du froc, l'auteur des Epistolæ obscurorum virorum représente bien la foule qui vit avant tout dans la Réforme une brèche faite à l'autorité.

On entrevoit ainsi derrière le protestantisme en préparation tout un libre mouvement d'idées dévié depuis par le réveil théologique.

«Tibi vero gratissimum facere me confidam qui rejectum nuper et damnatum hac de re Vallæ libellum, veluti ex tenebris in lucem, ab interitu ad vitam revocem. Quin etiam ipsum tibi illum dedico, ut testatum sit quantum, te pontifice, renata libertate, verum dicere licuerit omnibus, verumque scribere. Quod etsi non dubitem quin valde tibi placeat : tamen, ubi hoc publico alio testimonio adprobatum abs te intellexero, dabo operam ut sæpe aliquid tale inveniam. Interea Christus optimus maximus sic bonum te, sic verum pontificem, nobis diu incolumem servet. Ex arce Steckelberg, calend. decemb. anno post millesimum et quingentesimum decimo septimo. >>

1517!... c'est l'année des indulgences. Luther pose ses premières thèses.

Quelles qu'eussent pu être les conséquences de la critique érudite maintenue entre les bornes du respect à la hiérarchie, elle n'en a pas moins atteint le but immédiat qu'elle se proposait. Les plus audacieux champions de la curie romaine n'osèrent plus invoquer les titres dont

Valla démontra la fausseté. Dès 1509, dans une discussion avec les envoyés de Venise, à propos du droit que cette république prétendait tenir de Clément VI de nommer à Ferrare le magistrat appelé vis-domino, Jules II défiait l'un de ces ambassadeurs, Jérôme Donato, de lui montrer l'original de cette concession. «Elle est, ré

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pondit celui-ci, au dos de la donation de Rome par >> Constantin au pape Sylvestre 1. »

1. Voy. GUICHARDIN, Hist. d'Italie, liv. VIII, ch. v, note, éd. du Panthéon littéraire.

FLORENCE.

CHAPITRE VII.

LES PRINCES DU COMPTOIR.

Florence, comme foyer de lumières et d'élégances sociales, atteignait tout son éclat à la fin du quinzième siècle. Mais, alors même, sa décadence politique s'accusait par l'oubli des libertés qui la firent si grande.

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il faut s'entendre. Il

Quand je dis Libertés, s'agit, non d'un système d'individuelles garanties protégeant l'indépendance de chacun, sa vie, sa fortune, le développement de ses activités, mais de la liberté au sens antique, de la part de chaque citoyen dans la souveraineté du corps social.

Ce n'est pas que, sous ce régime municipal, la situation d'un des membres de ces républiques d'Italie et de Flandre ne fût meilleure que celle d'un bourgeois du roi de France ou d'Angleterre. Le progrès de l'industrie et du commerce, à Florence comme à Bruges, à Pise comme à Gand, la fière attitude de ces républicains du Moyen-Age en face des princes et des seigneurs féodaux, les distingue essentiellement de notre tiers état à peine émancipé du servage. Trop souvent, toutefois, dans ces

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Communes, l'individu ou les minorités plient écrasés sous les majorités tyranniques proscrivant les partis vaincus, réglementant jusqu'à la minutie la vie privée, l'absorbant dans la vie publique au delà de ce qu'exige la garantie du bien-être de chacun. Il semble que ces sociétés ont une sorte de but mystique à atteindre, un idéal de gloire collective primant tout, qu'elles forment un être ayant son âme propre, sa vie, exclusive des vies particulières dont elle n'est que la somme et l'expression.

Les cités antiques étaient des castes fermées. Un patriciat, une plèbe: au-dessous, quelques prolétaires, quelques étrangers (métoques), et l'immense tourbe des esclaves. Par suite de cette organisation, qui, réservant aux citoyens oisifs, ou à peu près, les fonctions nobles de combattre et de gouverner, faisait d'eux seuls des personnes, des mains serviles exerçaient l'industrie. Simple organe de la production matérielle, l'esclave fut une chose. De là ce qu'on pourrait appeler le grand anonymat de l'histoire, ce silence dédaigneux sur ce qui constitue la vie même de l'humanité : l'industrie qui la nourrit, les puissances désormais souveraines de la production et du crédit, les labeurs, les souffrances, l'ascension lente et tourmentée de la masse vers les lumières et le bien-être. Tant que le seul, puis le principal moyen de s'enrichir est la conquête, l'organe industriel demeure subalterne, esclave ou méprisé. La possibilité d'accomplir par les bras d'innombrables servitudes des entreprises industrielles qui, pour être

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