Immagini della pagina
PDF
ePub

manda la première traduction de l'Iliade. Parmi les humanistes, Poggio Bracciolini, Georges de Trébizonde, Giovanni Manetti, François Filelfe, Laurent Valla, Thomas de Sarzane parut exercer le premier, avec le souverain pontificat de l'Église, la grande prêtrise des lettres, de l'érudition et de la tolérance. Les pensées de Marc-Aurèle étaient un de ses livres de chevet.

Malgré ses efforts pour armer l'Europe à la défense de l'Orient chrétien, Constantinople succomba sous son règne. Caractère d'une trempe égale, esprit du même ordre, mais d'un tour plus ingénieux et plus vif, Æneas Sylvius, sous le nom de Pie II, va tenter à son tour d'arracher au Turc, avec la cité de Constantin, l'empire délétère du croissant sur les contrées qui furent la source et auraient dû demeurer le poste avancé de notre civilisation.

[blocks in formation]

Quatorze ans après le concile de Florence, le 29 mai 1453, Mahomet II chevauchait à travers Constantinople. Escorté de timariots, entouré de pachas et de visirs, il parut dans l'Hippodrome, frappant de sa masse de fer le trépied delphique aux trois serpents. Trophée de Byzance chrétienne arraché à la Grèce polythéiste, au milieu des cadavres et des statues brisées jonchant le sol, l'Apollon, colosse de Phidias, semblait sourire, impassible comme l'idéal, aux fortunes diverses des empires et des cultes à Sainte-Sophie des mains iconoclastes lacéraient sur les murs les images de l'Homme-Dieu, son vainqueur aujourd'hui vaincu.

Deux religions parurent ainsi frappées par le coup qui abattit les derniers restes de l'empire oriental.

La seconde Rome était tombée, délaissée par les Latins, sauf une poignée de Vénitiens et de Génois. Vainement le héros de cette époque, le grand duc de Bourgogne, Philippe le Bon, avait juré par les dames et le faisan de sauver Constantinople assiégée. En vain, nonce ou légat, Æneas Sylvius négocia laborieusement

la ligue sainte à travers l'Allemagne, la Hongrie, la Bohême. Nous avons dans sa correspondance le narré plein de vie de sa diplomatique odyssée. Tout cet effort se brisa contre l'égoïsme des rois, occupés à greffer la centralisation despotique sur l'arbre féodal ébranché.

Eneas Sylvius échoua à raviver l'ancien esprit de la fédération catholique. A une œuvre impossible, diplomate papal, puis secrétaire de l'empereur, il usa son influence; Souverain-Pontife (1458), il dévoua sans fruit son autorité.

[ocr errors]

L'assemblée de Mantoue, par lui convoquée en 1460, réunit Thomas Paléologue, frère du dernier empereur byzantin, Constantin Dragosès, et qui, sous le titre de despote, maintenait dans le Péloponèse un dernier lambeau d'empire, les envoyés de l'empereur Frédéric, ceux de Chypre, de Rhodes, de Lesbos, d'Albanie, d'Épire, de Bosnie, d'Illyrie, de Raguse, de Ferdinand Ier de Sicile et de son rival, René d'Anjou, de Gênes, de Milan, de Modène, de Bohême, de Hongrie, de Pologne, de Savoie, des ducs de Bourgogne et de Bretagne, des rois de Portugal et de Castille, et les quatre ambassadeurs du roi de France l'archevêque de Tours, l'évêque de Paris, le théologien Thomas de Courcelles, et le bailli de Rouen.

Sous les déclamations d'un zèle d'apparat affiché par les envoyés des grands monarques, les passions égoïstes de ceux-ci se dissimulent mal. Frédéric III ne prête à la croisade qu'un apathique concours. Louis XI proteste

de son dévouement à la chrétienté, mais, tout à l'absolutisme qu'il fonde, le royal et prosaïque niveleur des seigneurs ne pouvait aborder, même en pensée, une aventure devant laquelle reculait son beau cousin de Bourgogne, épris des pompes chevaleresques, bien qu'au fond très-calculateur.

Le Moyen-Age agonise. L'effort essayé par Pie Il n'est qu'une sorte de gageure désespérée contre l'esprit du siècle, une de ces tentatives que le respect humain commande et dont le promoteur lui-même s'impose l'illusion comme un devoir. Prêt à céder, faute d'une foi suffisante, aux difficultés que son enthousiasme a l'air de braver, le pape, qui prêche une croisade dans un âge positif et tout tourné aux politiques purement nationales, va mourir à temps pour sa gloire. Il gardera dans l'histoire l'honneur d'une initiative qu'il n'eût probablement pas soutenue.

Esprit actif, élégant, plein de souplesse et de finesse, type du clerc politique de ce temps, tout saturé du mythe et de l'histoire classiques, sans que cette érudition nuise à sa notion des hommes contemporains, Eneas Sylvius donne la mesure des convictions des meilleurs du clergé à cette époque. Le paganisme s'impose à leur pensée, au moins par leur rhétorique affolée des formes antiques; le christianisme est, aussi bien qu'une attache de leur conscience, un intérêt de leur position.

Le 15 octobre 1405 naissait à Corsignano, dans l'État de Sienne, l'enfant qui fut Pie II.

Le jeune Æneas Sylvius appartenait à l'une de ces familles de bannis, épaves des révolutions, rejetées sur toutes rives par les tempêtes politiques. Ainsi Dante promena ses fières rancunes dans les cités d'Italie et jusque sur les bords de la Seine.

Les Piccolomini étaient nobles siennois. Il ne paraît pas, d'ailleurs, que la proscription qu'ils subirent comme tels se soit étendue à leur fortune. Car, l'historien Platina le remarque, Æneas, qui fit ses premières études à Corsignano, y « vivait avec autant d'austérité > et d'économie que s'il eût été contraint par l'indigence » à remplir tous les devoirs d'un office rustique ». Il montra dès l'enfance les dispositions les plus heureuses et le plus grand zèle à apprendre. A dix-huit ans, malgré l'exil de ses parents, il put étudier à Sienne, d'abord les lettres profanes, puis le droit civil, qu'il quitta bientôt pour la théologie.

Cette nouvelle étude fut d'ailleurs tempérée par le culte des muses antiques et les emplois, autant politiques que religieux, que le jeune clerc occupa successivement au milieu d'une vie de voyages et d'aventures.

Abri des esprits laborieux et délicats, des tempéraments timides que réclamaient loin des conflits du siècle l'étude et la contemplation, l'Église attirait par d'autres mobiles les hommes doués du génie politique.

A cet égard, elle fut une grande école, moins encore par les emprunts que les pouvoirs laïques firent à son personnel que par l'exemple de sa diplomatie, de son

« IndietroContinua »