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petit pied, donnant des consultations au préjudice des procureurs, et envahissaient le palais qu'ils traitaient en pays conquis. Dans les salles d'audience ils allaient jusqu'à usurper les bancs réservés au barreau, entrainaient les plaideurs à leur suite, les faisaient asseoir à leur côté, ou même les plaçaient dans le parquet, c'est-à-dire dans l'espace libre qui séparait la barre des sièges des juges. Il fallut une réglementation énergique pour faire disparaître ces abus. On dut décider qu'aucun clerc ne se placerait dans le barreau des avocats ni dans le parquet de l'audience, que ceux qui y seraient trouvés paieraient sur le champ 3 livres d'aumône applicables au pain des prisonniers; et, au défaut de paiement, seraient contraints par corps. »

Dans une ville qui devait son importance à l'administration judiciaire les avocats ne pouvaient manquer de tenir un rang important. Cette prépondérance du barreau se manifesta par le choix qui fut très souvent fait d'avocats pour remplir les fonctions administratives et surtout par les élections qui empruntaient aux circonstances une gravité exceptionnelle. Redon, avocat, figura à côté du conseiller Faydit et du lieutenant général de Chabrol sur la liste des commissaires chargés de la rédaction des cahiers; les avocats Redon et Verny furent nommés députés aux Etats généraux par le tiers état, avec le lieutenant général Dufraisse et le procureur du roi Tailhardat, en même temps que M. le lieutenant criminel de Chabrol était chargé de représenter la noblesse.

Après la disparition de la sénéchaussée, le barreau riomois ne cessa pas de fournir des hommes de mérite à la province et à l'Etat : M. Redon, le premier président de la Cour de Riom, avait longtemps plaidé à sa barre; l'illustre baron Grenier qui, après avoir participé activement à la rédaction du Code civil, fut successivement procureur général et premier président à Riom, avait été un de ses plus illustres avocats; l'autre Grenier, député aux Etats généraux, qui fut avec Gauthier de Biauzat et Huguet, le fondateur du Journal des Débats, et qui devint plus tard sous-préfet et receveur des finances, avait, lui aussi, fréquenté longtemps les audiences; lors de l'installation de la Cour impériale de Riom en 1811, sur la liste des nouveaux magistrats on trouvait de nombreux noms appartenant au barreau du vieux présidial et qui avaient figuré sur le tableau de l'ordre. Ces grandes intelligences s'étaient formées à l'école de la Sénéchaussée.

Joseph LEFORT,

avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation.

TRAVAUX

DES ACADÉMIES ET DES SOCIÉTÉS SAVANTES

CONGRÈS DES SOCIÉTÉS SAVANTES.

Le Congrès des sociétés savantes s'est tenu à la Sorbonne du 27 avril an 1er mai. Il y a été fait plusieurs communications susceptibles d'intéresser, à des titres divers, les jurisconsultes.

La section des sciences économiques a d'abord discuté la question des procédés de mobilisation de la propriété foncière, expérimentés ou proposés en France et à l'étranger. M. Challamel a lu un premier mémoire. La multiplication des valeurs mobilières a fait décliner la propriété foncière de son ancienne prééminence. En voulant la protéger, le code civil l'a, pour ainsi dire, garrottée; les lois fiscales l'ont surchargée d'impôts de toute nature. Depuis longtemps des tentatives ont été faites dans le sens du dégrèvement. Aujourd'hui on propose un système de monétisation de la propriété foncière qui aboutirait à la résurrection des assignats. Il faut, pour pallier ou guérir le mal, s'en prendre uniquement au code civil et aux lois fiscales. En ce qui touche l'aliénation des terres, deux systèmes, l'un français, l'autre germanique, sont en présence. Le premier se contente uniquement du consentement des parties, le second exige l'intervention de l'autorité publique il faut une inscription pour que la propriété foncière soit transmise. Le type de ce système existe dans la loi prussienne du 5 mai 1872. Elle dispose que les registres fonciers sont tenus par immeuble et non par noms de personnes. Le registre est aux mains d'un magistrat devant lequel les parties se présentent et déclarent qu'elles veulent aliéner. Le juge vérifie alors l'identité et la capacité des contractants. C'est en vertu de l'inscription faite par ordre de ce juge spécial que l'aliénation est opérée. Dans la même catégorie de législations il faut ranger l'Act Torrens de 1862, qui a été fait pour l'Australie du Sud, importé en Tunisie depuis l'établissement du protectorat, avec des modifications très profondes. Le système de la transcription paraît préférable : il exige une formalité spéciale venant se joindre au consentement opéré à l'égard des tiers. Mais la loi française a eu le tort de ne pas soumettre à la transcription toutes les aliénations et de ne pas prescrire la tenue des registres fonciers par

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nom d'immeuble. La mobilisation de la propriété foncière ne peut être adoptée qu'avec ces perfectionnements préalables. La mobilisation résultera du régime bypothécaire. M. Flach a présenté quelques observations la loi prussienne laisse au juge conservateur le choix entre les feuillets réels et les feuillets personnels; on ne saurait admettre en France les feuillets réels; il faudrait seulement que le cadastre renvoyât aux feuillets personnels; la simplicité de l'expropriation est une condition essentielle du crédit foncier; la réduction des impôts qui pèsent sur la propriété fonctière est une question indépendante. M. Massigli s'est déclaré partisan du statu quo: la législation actuelle lui paraît la plus sage. M. Brants, examine le principe de la mobilisation : Toute mobilisation n'est pas bonne. Au point de vue juridique, mobiliser, c'est commercialiser. Une parole a été dite en Belgique à cet égard: « Pour agir avec utilité, attendons le moment où l'envahissement se produira. On convient de la nécessité du crédit rural; le meilleur crédit rural est celui que le propriétaire accorde au fermier. On l'a bien vu en Belgique. En 1844, on a fait une loi sur le prêt agricole. Le résultat a été un prêt de 400,000 fr. en deux années. On s'est réjoui de l'échec de la loi. Peut-être en soi le crédit rural pourrait-il être développé au moyen de l'association mutuelle et de la solidarité. Quant à la mobilisation, il n'y faut point songer. M. Gide a déclaré qu'il y avait ici une confusion que l'Act Torrens a eu pour but de faciliter la transmission de la propriété foncière, et que la facilité du prêt hypothécaire est une question distincte. M. Sanguet a fait remarquer que le crédit foncier a beaucoup nui à la petite propriété. Avant la création de cet établissement, qui fut mis par la loi-décret de 1852 en possession d'un privilège hypothécaire, le petit propriétaire trouvait à emprunter. Aujourd'hui, il n'en est plus de même tous les capitaux sont versés au Crédit foncier, qui opère un drainage d'argent sur les campagnes au profit des villes. L'Act Torrens n'est pas applicable tant que le cadastre ne sera pas parfait. L'achèvement du cadastre coûtera 300 millions. On recule devant cette dépense. M. Ameline de la Briselaine a répondu qu'on s'égare un peu en se jetant dans la question du cadastre. Le système de la loi de messidor an III était déplorable. L'Act Torrens est excellent, mais il est tel en Australie. En France, on doit se borner à demander la simplification du régime hypothécaire. Cette réforme est d'autant plus urgente que le crédit agricole mobilier est irréalisable. La procédure d'ordre est infiniment trop compliquée. M. Sanguet a opposé que toute réforme hypothécaire doit être précédée de l'établissement de l'état civil de la propriété foncière. M. Flach a fait valoir que les lois allemandes sont allées très loin dans cette voie. Une majorité des deux tiers suffit pour réunir toutes

les propriétés de la commune, qui sont ensuite réparties. Après ces opérations on pourrait introduire l'Act Torrens. Mais un tel système paraît impraticable en France. M. Challamel a résumé la discussion : il a demandé l'extension de la transcription de tous actes attributifs ou déclaratifs de propriété entre-vifs ou par suite de décès; il a réclamé la simplification du régime hypothécaire, et, dans ce but, la suppression de l'hypothèque judiciaire, la publicité et la spécialité de toutes hypothèques légales. Cela rendrait les ordres plus courts et moins compliqués. M. Joret-Desclozières a lu un mémoire sur la question de l'Historique de la législation ayant eu pour but de conserver les forêts sous l'ancien régime et de nos jours, et des mesures à prendre pour prévenir ces défrichements et les exploitations abusives des bois et forêts des particuliers. »

La section a abordé la discussion de la question relative aux conditions d'exécution qui peuvent justifier le rang que la transportation occupe dans l'échelle des peines. Le rapporteur, M. James-Nattan, a insisté sur la nécessité d'une réforme complète du code pénal. Il faut non seulement punir, mais encore prévenir le crime, améliorer le condamné et édicter des mesures de patronage. Le rapporteur a examiné à ce point de vue la transportation que condamnent la plupart des criminalistes. Quels sont les résultats qu'on en a tirés? Par quelle peine conviendrait-il de la remplacer? On ne manquait pas, certes, de motifs pour la suppression des bagnes; il y avait là un mode d'exécution déplorable de la peine des travaux forcés. Dès 1821 on parla de remplacer les bagnes par la transportation; on crut, en 1854, avoir fait un grand progrès par cette réforme. On choisit successivement la Guyane et la Nouvelle-Calédonie comme lieux d'exécution de la transportation. Un ancien sous-directeur à la Nouvelle-Calédonie a constaté l'état présent des choses personne n'a contredit ses assertions sur le pillage, l'indiscipline, le dévergondage. On a reconnu que la nourriture du transporté est meilleure et plus abondante que celle du soldat, que les condamnés passent les nuits entières à jouer, qu'il dépend d'eux de ne rien faire, alors que, suivant les lois, ils devraient être employés aux plus durs travaux. Où est la sanction de la loi ? On a oublié de construire des cachots à l'ile Nou. Là ou il y en a, les condamnés s'y font mettre pour ne pas travailler; les cellules étant étroites et obscures, on ne saurait y placer des établis. Les condamnés sont justiciables des tribunaux militaires; mais que signifient des condamnations à quarante ans de travaux forcés contre des individus condamnés antérieurement aux travaux forcés à perpétuité ? La peine capitale elle-même n'est plus un épouvantail; on sait qu'on ne l'exécute pas. Ce n'est pas tout on fournit aux condamnés des instruments de musique; on leur donne même des femmes, d'abomi

nables gredines qui, à en croire la statistique officielle, se transforment subitement en modèles de vertu et de dévouement. La peine doit réunir trois conditions, l'intimidation d'une part, la gradation et l'amendement l'autre. La transportation ne répond à aucune de ces conditions. On a vu des individus commettre de nouveaux crimes pour obtenir et mériter la transportation. La situation actuelle est un scandale et une iniquité. La peine idéale est l'emprisonnement cellulaire. Mais l'admission générale de cette peine n'est guère possible. Essayons donc de tirer de la transportation le meilleur parti possible. Le bagne a de grands dangers, soit en France, soit aux colonies. Ecartons-le. L'emprisonnement en commun produit une promiscuité très nuisible et facilite les révoltes. Quant au système irlandais (l'emprisonnement progressif), il n'est pas de nature à être appliqué aux condamnés du second degré. L'emprisonnement cellulaire, sagement conduit, est le meilleur mode d'exécution, si on le combine avec l'instruction, la religion et le travail. Il provoque alors le remords. Toutefois il ne peut remplacer absolument la transportation; il exigerait de grosses dépenses. Donc, maintenons la transportation, mais à titre de récompense, après un emprisonnement cellulaire de durée variable. M. Nattan donne ses conclusions sous forme d'article de loi; il insiste enfin sur l'effet heureux qui peut être produit sur l'esprit du condamné par l'instituteur, par le prêtre, par la perspective de la transportation qui lui assurera une liberté partielle. M. Petit a approuvé l'idée de l'emprisonnement cellulaire en vue d'obtenir l'amendement du condamné; mais il a protesté contre le tableau qui présente la transportation comme le paradis des criminels. La transportation est restée intimidante pour la majorité des prévenus; en fait, c'est aux travaux des transportés que nous devons les routes et les ports de nos colonies. M. Desportes a défendu les conclusions du rapporteur. Il a affirmé que ç'a été un mot d'ordre pendant quelque temps, dans les prisons, de mériter la Nouvelle. Il a fallu édicter une loi pour mettre un terme aux assassinats commis dans les maisons centrales. On ne saurait le nier : il est certain que la transportation est désirée par beaucoup de scélérats. Ce que le rapporteur propose, c'est le projet auquel M. Michaux, aujourd'hui sénateur, alors haut fonctionnaire de notre administration pénitentiaire, s'est rallié au congrès de Stockholm. M. Tranchant a approuvé l'idée de l'emprisonnement cellulaire préalable; il y a dans ce système des conditions moralisatrices excellentes ; il croit que M. Petit se trompe en affirmant que l'opinion publique n'est pas favorable à cette réforme. La question d'argent seule est ici l'obstacle.

La section d'histoire a entendu des communications de MM. Durieux, Séré-Depoint, Guibert, Veuclin sur l'origine et l'organisation des

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