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que, de l'habituer à cette précision rigoureuse, presque mathématique, que les prudents affectionnaient et dans laquelle ils étaient passés maîtres. Ne cherchons donc, dans l'œuvre savante de M. Destrais, que ce que lui-même y a voulu mettre. Si nous nous plaçons an point de vue qui a été le sien, nous n'aurons guère que des éloges à lui adresser. Les caractères distinctifs de son livre sont la clarté, la méthode, l'érudition. Les cinq cents pages de ce volume représentent une somme considérable de lectures et de labeurs; les travaux des Allemands surtout ont été mis à contribution. Qu'on lise, par exemple, les neuf ou dix pages consacrées aux servitudes altius tollendi et altius non tollendi: on aura une idée assez exacte des principales qualités de l'auteur.

Le plan de l'ouvrage est simple: la première partie est consacrée à la propriété, sa nature, les manières de l'acquérir et celles de la perdre; dans la seconde, l'auteur traite des caractères généraux des servitudes, de leurs différentes espèces, de leur constitution et de leur acquisition, de leur extinction, et enfin des actions qui y sont relatives. Il mène toujours de front l'étude des servitudes prédiales et celle des servitudes personnelles.

Le livre de M. Destrais aura désormais sa place marquée à côté des ouvrages classiques de Pellat et de Molitor.

Henri DUMÉRIL,

Docteur en droit.

ETUDE SUR LES ATTRIBUTIONS FINANCIÈRES DES ÉTATS PROVINCIAUX ET EN PARTICULIER DES ÉTATS DE LANGUbdoc au dix-huITIÈME SIÈCLE, par M. Paul RIVES, docteur en droit, juge suppléant au tribunal civil de Muret. Paris, Ernest Thorin. 1 vol. in-8°.

Les Etats provinciaux, dont les attributions se réduisaient à voter l'impôt et à surveiller son emploi, ont joué au XVIIIe siècle un rôle important. A cette époque ils fonctionnaient à peu près normalement, en dépit d'obstacles suscités à tout instant par les personnages intéressés à leur ruine. L'étude de ces corps présente donc, pour l'histoire des institutions, un intérêt très manifeste. On ne saurait trop féliciter M. Rives d'avoir pris, pour sujet de sa thèse de doctorat en droit, l'histoire des Etats provinciaux du Languedoc qui ont procuré au pays une prospérité enviée et des franchises recherchées. Il convient d'autant plus de louer l'idée de M. Rives que la matière est presque neuve à part les savantes recherches de M. E. Roschach, dont les laborieuses investigations constituent le XIIIe volume de l'Histoire de Languedoc, digne appendice de l'ouvrage de dom Vic et

de dom Vaissète, et les mémoires insérés dans les recueils de l'Académie des sciences de Toulouse et de l'Académie de législation, dus, la plupart, à MM. Astre, Baudouin, Lapierre et Rossignol, le sujet abordé dans cet ouvrage n'avait jusqu'ici fait naître aucun travail de généralisation. Certainement, des points spéciaux avaient été traités avec une rare compétence et avaient donné lieu à d'intéressantes monographies; mais aucun ouvrage, ni au XVIIIe siècle, ni de nos jours, n'avait présenté un exposé systématique et synthétique des traits généraux, des principes qui avaient présidé à la formation de l'ancien droit administratif provincial.

L'ouvrage de M. Rives se compose de neuf chapitres. Il débute par des considérations sur les économistes et les théoriciens de l'impôt au XVIIIe siècle, l'organisation administrative et financière de la France au XVIIIe siècle, les pays d'Etat autres que le Languedoc, les tentatives de Turgot et de Necker à la suite du réveil de l'opinion publique sous Louis XVI; ces considérations sont un peu longues et ne se rattachent pas directement au sujet. L'auteur arrive ensuite à ce qui est, à proprement parler, sa matière: il indique l'origine des Etats de la province de Languedoc ; il expose leur constitution, leur réunion, leur fonctionnement, leur compétence, leur ordre et leur discipline. Passant aux ressources financières du Languedoc, il parle du vote, de l'assiette et de la répartition de l'impôt, des dettes et des emprunts, des rentes constituées; s'arrêtant aux juridictions dans leurs rapports avec les Etats, il fournit des détails sur le Conseil du roi, le Parlement et la Cour des aides, et il n'oublie pas de parler du gouverneur, de l'intendant et des subdélégués. Un chapitre final, dont, nous l'avouons, l'utilité est des plus contestables, traite des progrès accomplis depuis 1789 et de la réforme de l'impôt tant en France qu'à l'étranger.

Sans doute le volume de M. Rives n'est qu'un résumé des documents destinés, dans l'ancienne France, aux magistrats et aux administrateurs, notamment des renseignements contenus dans le Recueil des lois municipales et économiques de Languedoc, que le greffier des Etats Albisson fit paraître à Montpellier en 1782. Mais l'intérêt de la publication de M. Rives n'en est pas moins très réel, et, tout en déplorant le caractère un peu superficiel du travail, ainsi que la tendance de l'auteur à établir des rapprochements entre les institutions d'autrefois et celles de maintenant, la critique ne peut qu'applaudir à la récompense décernée à l'ouvrage par la Faculté de droit de Toulouse.

V. TRISSIER,

Avocat.

REVUE ÉTRANGÈRE

ANGLETERRE ET ÉTATS-UNIS

L'INDIVIDU CONTRE L'ÉTAT, par M. HERBERT-SPENCER, traduit de l'anglais par M. J. GERSCHEL Paris, Alcan. 1 vol. in-12 de 166 pages.

Le centenaire de 1789 promet de se célébrer dans des conditions bien curieuses. Tandis que la foule s'engoue de plus en plus des idées démocratiques, il se dessine, parmi les esprits supérieurs, un courant contraire où le dédain se mêle à la répulsion pour les gouvernements exclusivement populaires. Nous n'avons pas à rappeler les noms des philosophes français qui, dans ces derniers temps, ont plus ou moins accentué leur protestation contre les résultats de la politique ambiante. Il en va de même à l'étranger. Aujourd'hui M. Herbert Spencer vient ajouter son autorité à celle des Taine, des Vacherot, des Renan, des Franck, et autres esprits marquants, pour nier à la plèbe le pouvoir absolu qu'elle s'arroge; et, prochainement, nous aurons à signaler un nouveau livre, où sir Henry Maine se prononce non moins catégoriquement dans le même sens, si nous en jugeous par les fragments déjà parus de son œuvre.

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Voici plus de trente ans, que M. Herbert Spencer avait prévu l'évolution politique qui nous entraîne vers ce qu'il n'hésite pas à appeler l'esclavage futur (The coming Slavery). Et, sous ce titre, il vient de réunir quatre articles, publiés en 1884, dans la Contemporary Review, où il reprend et développe les motifs de son appréhension. Il s'attaque d'abord au nouveau Torysme (chap. I) qui enrôle dans ses rangs les libéraux d'autrefois. Jadis le conservateur tory était l'homme de la coopération forcée des activités sociales; le libéral whig pronait, à l'inverse, la coopération volontaire. Aujourd'hui les partis semblent avoir changé bannière. Cette transformation a ceci pour cause que, primitivement, chaque liberté conquise était un bien pour le peuple; d'où est venue insensiblement l'idée de considérer comme légitime tout ce qui a pour but le bien du peuple, même obtenu par voie autoritaire.

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Mais, par là, nous allons à l'esclavage futur (ch. II); car nos libertés se restreignent de plus en plus. Et peu importe que la restriction provienne du fait d'un despote unique ou d'une tyrannie à plusieurs têtes. A ce propos, l'auteur qui, dans le chapitre précédent, avait ré

capitulé les innombrables actes autoritaires promulgués sous les derniers ministères libéraux en Angleterre, montre comment la servitude générale doit fatalement couronner l'œuvre et aboutir à un despotisme sans précédent.

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C'est que les péchés des législateurs (ch. III), leur ignorance et leur légèreté d'esprit, les font s'embarquer à l'aveugle dans toutes les aventures, toujours pénétrés de la grande superstition politique > (ch. IV), c'est-à-dire du droit divin des Parlements. M. Herbert Spencer critique avec beaucoup de vigueur la thèse du pouvoir illimité des majorités, et défend énergiquement les droits naturels de l'individu contre l'ingérence envahissante de l'Etat.

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Ce n'est pas ici le lieu de discuter à fond les théories de l'auteur. Il nous a semblé, et c'est le seul point sur lequel nous ayons à émettre une critique, que M. Spencer a trop de foi dans l'étude de la Sociologie. Un Parlement de sociologues sera toujours convaincu d'incompétence dans les questions purement techniques, et devra, comme tous les Parlements, se résigner à voter au hasard des connaissances acquises par un débat superficiel. De plus, M. Herbert Spencer raille tour à tour la routine et l'esprit d'innovation; mais nous ne saurions affirmer qu'il réussisse à nous montrer la route qui passe par le justemilieu. Son troisième chapitre est donc, selon nous, celui qui soulève les objections les plus sérieuses. Mais l'ensemble de la thèse, solidement construite, nous paraît inattaquable. Le grand nom de l'auteur lui assurera l'attention qu'elle mérite, quitte à le brouiller avec les démocrates obstinés, et avec bon nombre de libéraux. ›

Nous regrettons que le traducteur n'ait pas cru devoir ajouter çà et là les quelques notes indispensables à la lecture de l'ouvrage. Faute de connaître, par exemple, les dispositions de l'ancienne et de la nouvelle loi des pauvres la page 30 est à peu près incompréhensible. L'anglais est une langue facile à lire; l'utilité des traductions est précisément de mettre à la portée du lecteur étranger les éléments nécessaires pour pénétrer les institutions anglaises que leur originalité éloigne de nous, bien plus que si elles se dissimulaient derrière le voile d'une langue absolument exotique.

RENÉ DE KÉRALLAIN,
Docteur en droit.

LE DROIT ANGLAIS, par M. A. PAvIIT, solicitor, licencié en droit de la Faculté de Paris. Paris, A. Chevalier-Marescq. 1 vol. in-8 de 235 pages.

Depuis que le commerce et l'industrie ont pris une grande exten

sion et créé des relations internationales suivies, il n'est plus permis aux praticiens français d'ignorer les lois étrangères. Cependant en dehors des travaux un peu spéciaux, par leur caractère philosophique, de la Société de législation comparée, il est rare de voir paraître en notre langue un ouvrage satisfaisant sur le droit anglais, tant on craint de se perdre dans ce dédale où il semble qu'un Anglais seul puisse nous introduire. La vieille Angleterre a gardé ses vieilles lois et elle n'en est pas moins arrivée à un point de liberté sans pareil dans le monde, qui restera probablement inconnu aux nations versatiles, toujours prêtes à changer d'institutions sous prétexte de progrès. L'inconvénient du système anglais est d'avoir réduit, peutêtre outre mesure, le nombre des personnes qui ont une connaissance réelle de la législation.

On sait, en effet, que chez nos voisins d'outre-mer, le droit est en quelque sorte une science hiératique dont seuls les juges et les barristers ont le secret. Vous étonnez beaucoup un Anglais qui n'appartient pas toujours à la caste des hommes de loi si vous l'interrogez sur sa propre législation, et, neuf fois sur dix, il vous répond qu'il n'en a aucune idée. Il était donc très désirable de voir publier un livre qui nous donnât satisfaction à cet égard, en nous faisant connaître, au moins sommairement, les lois anglaises. A la difficulté de percer le mystère dont s'entourent les avocats s'ajoutaient les difficultés d'une langue spéciale, l'absence de toute codification et la nécessité de faire des recherches dans des lois classées par règne, sans distinction d'objet. On sent combien est grand l'obstacle pour des gens habitués à nos lois codifiées et à nos excellents recueils contenant l'historique et l'état présent de notre jurisprudence. Cette lacune vient d'être comblée par un solicitor anglais, licencié en droit de la Faculté de Paris, M. A. Pavitt, qui, dans un petit volume, a catalogué le droit anglais. Ce livre a toute l'utilité d'un questionnaire net et précis, dans lequel on peut en confiance chercher les renseignements dont on a besoin. Il nous introduit dans le sanctuaire et nous sert de cicerone obligeant. Sa méthode est claire, et, en le suivant, on ne craint pas de s'égarer. Dans le chapitre premier, il reconnaît quatre sources du droit : 4° la coutume; 2° la féodalité; 3° les décisions des juges; 4o les lois expresses.

Les lois expresses se divisent: 4° en lois d'intérêt général; 2o en lois d'intérêt particulier ou local. Les lois d'intérêt général seules trouvent place dans son livre.

Le chapitre II traite des principes du droit. D'abord les personnes, ensuite les biens, leurs diverses modifications, les moyens d'acquérir la propriété, les contrats et quasi-contrats, les obligations résultant d'un préjudice et se résolvant en dommages-intérêts. L'auteur nous

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