Immagini della pagina
PDF
ePub

frappa les faussaires des peines de la Lex Cornelia; l'on exila en même temps l'accusateur complice, bien que sa prevarication ne fût pas encore prévue par la loi; et, pour en prévenir le retour, l'on inséra dans le sénatus-consulte de condamnation cette incrimination nouvelle (1). Le stratagème ainsi déjoué prouve que dès lors des sénateurs mêmes pouvaient être poursuivis devant le préfet.

Règne de Vitellius (a. 69 = 823). Sous Vitellius, la préfecture de Flavius Sabinus, le frère aîné de Vespasien, offre un nouvel exemple de cette compétence s'étendant jusque sur les personnes de rang sénatorial, et cette fois en matière politique. C'est au préfet que fut dénoncé Cornélius Dolabella pour avoir tenté de soulever la cohorte d'Ostie. Comme d'ailleurs le préfet hésitait, faute de preuves, Vitellius se défit de l'accusé par l'assassinat (2). C'est sous Sabinus aussi que, pour la première fois, l'histoire attribue formellement au praefectus urbi le commandement des cohortes urbaines (3). Règne de Domitien (a. a. 833-850 = 84-96). - Sous Domitien, l'importance de la préfecture s'accroît encore. Elle fut alors honorée par le grand jurisconsulte Pégasus (4). Elle avait désormais attiré à soi presque toute la juridiction criminelle. Juvénal dépeint Rutilius Gallicus à son tribunal, accablé, de l'aube à la nuit close, par l'interminable audition des crimes de Rome (5); et Stace, célébrant le même préfet (v. 84187), nous montre les lois effrayées par le tumulte du forum, qui se réfugient sous sa protection. Image poétique des conquêtes de la préfecture sur les préteurs et les quaestiones (6). Sans doute, préteurs et quaestiones retiennent encore leurs

(1) Tacite, Ann., XIV, 40 et 41: Ne apud praefectum urbis arguerentur. Le sénat put frapper Valérius Ponticus, parce qu'il pouvait condamner même en dehors de la loi (Willems, Dr. pub., p. 173). Le sénatus-consulte ainsi rendu est le s.-c. Turpilien; il frappa désormais la praevaricatio des peines de la calumnia; c'est l'assimilation des contraires, car, si la calumnia impute des crimes supposés, la prévaricatio en dissimule de véritables (D. Ad Sc. Turpilianum, XLVIII, 16; Cod. Just., Eod. tit., IX, 45. On trouverait plus tard bien d'autres exemples de faux testamentaires punis par le praefectus urbi, et notamment dans les écrits de Scaevola (L. 135, D., De verb. oblig., XLV, 1; L. 240, De lege Corn. de falsis, XLVIII, 1). Cf. Apulée, Apol., 2 et 3.

(2) Tacite, Hist., II, 63-64.

(3) Tacite, Hist., III, 64 : Illi proprium militem cohortium urbanarum. Cf. Stace, Silv., I, 4, 9; Dion, LII, 24. Ce commandement devait remonter beaucoup plus haut, et probablement jusque sous Auguste, créateur des cohortes urbaines. Les soldats que déjà sous Néron l'on mettait de garde au théâtre (l'un des lieux publics soumis à la surveillance du préfet), devaient appartenir aux cohortes de la ville (Tacite, Ann., IV, 5 ; XIII, 24-25).

(4) Pomponius, L. 2, § ult., D., De orig. juris., I, 1; Juvénal, IV, 76.

(5) Idem, XIII, 157-160. Cf. Stace, Silv., 1, 4, 43-44.

(6) Silvae. 1, 4, 10, fora turbida, où siégeaient les quaestiones.

vieilles attributions (1); mais déjà l'on fait un honneur au préfet de les respecter, de les ménager, comme par grâce, dans les conflits de compétence (2). On sent que ce glaive de la justice échappera bientôt aux mains du préteur.

Le même panégyriste témoigne de cette autorité plus qu'urbaine du préfet qui, comme on le sait, se prolongeait dans les premiers siècles sur l'Italie. L'éligibilité des décurions, jugée d'abord par les duumvirs (3), ressortissait encore sur appel au préfet de Rome. Stace le rappelle à son héros :

Urbes ubicumque togatae

Quae tua longinquis implorant jura querelis (4).

Règne de Trajan (aa. 852-71 98-117). -Tant d'occupations avaient dû de bonne heure obliger le préfet, comme les autres grands fonctionnaires impériaux, à s'entourer d'un conseil de jurisconsultes. Pline le Jeune témoigne y avoir été appelé (adhibitus in consilium a praefecto urbis). Un consulaire, orateur en renom, ami du prince, ne dédaignait donc point, dès Trajan, de coopérer à la justice du préfet (5).

Est-ce à la même époque que la préfecture commença de diriger ses poursuites contre les chrétiens? On pourrait l'affirmer si tous les actes de saint Ignace d'Antioche étaient sûrement authentiques. On lit, en effet, dans la vie du saint, rédigée sur des actes grecs par Siméon Métaphraste, qu'Ignace, amené à Rome, comparut devant le préfet de la ville (6), et des actes latins racontent que Trajan aurait convoqué dans l'amphithéâtre le sénat et le préfet, trait de mœurs qui d'ailleurs n'a rien en soi d'inadmissible (7). Mais, à la différence des lettres de saint Ignace, du moins des sept premières, la sincérité de

(1) V. Juvénal lui-même, XIII, 2-4.

(2) Stace, loc. cit., V, 47, Reddere jura foro nec proturbare curules.

(3) Lex coloniae Genetirae (bronzes d'Ossuna), c. 5.

(1) Stace, loc. cit., 11-12. Mais sous Marc-Aurèle les juridici dépouillèrent le préfet de cette compétence. V. le curieux procès du concordiensis Volumnius Severus (Fronto, Ad amicos, II, 7).

(5) Epist., VI, 11; en l'a. 860 ou 861 106 ou 107; mais l'usage de ce conseil doit remonter bien plus haut.

(6) Bollandistes, 1er février, t. IV, p. 27.

(7) Bolland., loc. cit., p. 32. Ces actes latins ne qualifient pas le praefectus, mais la conférence avec les actes grecs et la diversité des fonctions à cette époque montrent qu'il s'agirait d'un praefectus urbi et non praetorio. Cependant les actes accueillis par Ruinart ne mentionnent aucun préfet. Sur l'amphithéâtre, v. Le Blant, Actes des martyrs, Mém. de l'Acad. des Inscript., t. XXX, p. 1161.

ces actes grecs est au moins douteuse, et les actes latins, probablement tirés des grecs, n'offrent pas plus de garanties (1). L'histoire ne saurait solidement s'appuyer sur un terrain si glissant. L'intervention du praefectus urbi paraîtrait pourtant assez vraisemblable. Trajan avait porté un rescrit célèbre contre les chrétiens (2). Quoi d'étonnant que le préfet urbain, depuis longtemps le principal magistrat de répression dans Rome, ait frappé dès lors les martyrs de la foi nouvelle (3) ?

Règne d'Hadrien (aa. 871-92 = 117-38). - Dans la juridiction civile, l'immixtion du préfet fut plus tardive et moins envahissante. Il semblerait pourtant que l'on en puisse retrouver l'origine avant la fin du règne d'Hadrien.

Il est vrai que Pomponius, écrivant sous cet empereur (4), quand il énumère les magistrats romains investis de la juridiction civile, après leur avoir assimilé les praefecti annonae et vigilum, comme extra ordinem utilitatis causa constituti, omet le praefectus urbi (5). Silence d'où l'on a conclu que le préfet n'avait encore sous Hadrien aucune compétence de ce genre (6). Il se peut pour les commencements du règne; mais Paul rapporte un rescrit de ce prince aux termes d'quel le préfet adiri etiam ab argentariis vel adversus eos... ei in pecuniarüs causis potest (7). Texte qui, dans sa généralité, paraît embrasser la juridiction civile aussi bien que la criminelle. Sont en effet pecuniariae causae, d'après le rescrit, toutes les actions nées de la banque, aussi bien celles de l'argentarius contre le client que celles du client contre l'argentarius; aussi bien, par conséquent, les condictiones nées au profit du banquier du mutuum, de la transcriptio, de la stipulation d'intérêts que les actions nées au profit du client du receptum (actio rec plilia) ou du paiement d'intérêts usuraires. Voilà donc bien toute une juridiction civile conférée, dès Hadrien, au praefectus urbi. Désormais il ne sera plus seulement le grand justicier de l'usure, mais encore l'arbitre ordinaire de tous les manieurs d'argent. La bonne

(1) Bolland., loc. cit., pp. 13 et 21, de La Berge, Etude sur Trajan, p. 207. (2) Pline le Jeune, Epist.. X, 98.

(3) Peu importent ici les controverses sur la date du martyre de saint Ignace a. 86! (= 107), d'après Ruinart, Acta sincera, p. 696, ou 869 (= 115) d'après Malala (Chron., XI).

(4) Pomponius, L. 2, 8 47, D., De orig. juris (1, 2), optimus princeps et non divus.

(5) Ibid., §§ 14, 33, 34. Il ne parle que du praefectus feriarum latinarum.

(6) Mommsen, t. II, 2me p., p. 1019, n. 6; il a pourtant cité le rescrit d'Hadrien à la note précédente.

(7) L. 21, D., De of. praef. urb. (I, 12). Ou Pomponius a négligé le rescrit ou le rescrit est postérieur à la publication de Pomponius.

police du marché des capitaux importe à la tranquillité publique (1). P.-E. VIGNEAUX,

Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux.

(A suivre.)

(1) Peut-être s'étonnera-t-on de voir, en pleine époque classique, le préfet partager avec le préteur une telle compétence. Il semble bien difficile pourtant de trouver un autre sens à ce rescrit que malheureusement les meilleurs interprètes, Cujas (v. Albanensis, Prompt. Cujaci, p. 8, col. 3), Schulting (Notae ad Pand., t. I, p. 177), Glück (Ausführl. erlaüterung der Pand., t. II, p. 598), Mommsen (loc. cit.), etc., ont négligé d'élucider. Duaren (t. I, p. 32), semble hésiter devant cette juridiction; il la restreindrait au cas de fraude. Mais déjà précisément le préfet était par ailleurs (L. 1, § 9. D., De off. praef. urbi, I, 12), chargé de réprimer les fraudes des argentarii. Il faut donc, comme le remarque à bon droit Faber (Rationalia, t. I, p. 70), accorder au rescrit une autre portée: il faut reconnaître la compétence du préfet pour toutes causes pécuniaires entre clients et banquiers V. en ce sens, Padeletti, Storia del diritto romano, p. 576).

VARIÉTÉS ET MÉLANGES

LA RESPONSABILITÉ DES JUGES ET DES MAGISTRATS (La responsabilidad de de los jueces y magistrados), par M. D. Eduardo Alonso y Colmenares (Revista general de legislacion, décembre 1885). La justice est un pouvoir indépendant dans l'Etat; le principe de l'inamovibilité assure cette indépendance. A côté de ce principe se place celui de la responsabilité, proclamé par les lois espagnoles depuis les Wisigoths jusqu'à nos jours. La peine du talion a même été édictée contre le juge qui aurait sciemment condamné un innocent.

excuse.

criminelle,

La responsabilité des juges est criminelle et civile quand ils enfreignent les lois relatives à leurs fonctions dans les cas prévus expressément par la loi répressive; civile, quand ils causent un dommage appréciable par une négligence ou une ignorance sans Le droit à l'action publique, au criminel, est ouvert dès que les faits délictueux sont connus, quelles que soient d'ailleurs les décisions auxquelles ils sont connexes, qu'elles soient ou non susceptibles d'être modifiées ou annulées. L'action civile, au contraire, destinée à la réparation d'un dommage, exige, pour être intentée, l'irrévocabilité de la décision dommageable; sinon, le préjudice disparaît avec celle-ci. Le principe de la responsabilité s'étend jusqu'au tribunal suprême, obligé de respecter la loi, quoiqu'il n'y ait contre ses arrêts aucune voie de recours. Ce principe n'est pas non plus entamé par la suppression des preuves légales et la libre appréciation laissée au juge de la valeur des preuves; cette liberté ne l'affranchit pas de toute règle. La responsabilité des magistrats n'est pas établie seulement dans l'intérêt du public en général; elle l'est dans l'intérêt même des juges, dont elle augmente le prestige et le bon renom. - C'est le tribunal supérieur qui prononcera sur la responsabilité des membres du tribunal inférieur; quant au tribunal suprême, doit être juge en ce qui concerne ses propres membres. Il faut, d'ailleurs, veiller à ce que ce principe salutaire ne compromette pas l'indépendance et la dignité de la magistrature, en délimitant exactement les cas de responsabilité et en entourant l'exercice de l'action de formes rigoureuses.

il

DU RECOURS EN RESPONSABILITÉ CONTRE LES JUGES ET LES MAGISTRATS (Del recurso de responsabilidad contra jueces y magistrados), par José Maria

« IndietroContinua »