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VARIÉTÉS ET MÉLANGES

LE DIVORCE DANS L'ANCIENNE ROME (La Evoluzione storico-giuridica del divorzio in Roma da Romolo ad Augusto), par M. F. Picinelli. - Archivio giuridico, t. XXXIV, fasc. 5-6. On discute beaucoup entre érudits pour savoir si les Leges dites Regiæ sont de Romulus. Au point de vue de l'histoire des mœurs, il n'importe guère. L'essentiel est qu'elles nous renseignent sur les usages constants de la Rome primitive. Or, nous constatons qu'en matière de divorce elles sont très restrictives. En combinant les textes de Plutarque et de Denys d'Halicarnasse sur la question, on finit par en résumer ainsi les dispositions capitales. Le mari seul peut demander le divorce, et ce, pour des causes limitativement énumérées qui donnent lieu à la réunion d'un tribunal de famille, judicium domesticum. Les cas de divorce sont : l'adultère; le fait d'avoir bu du vin, ou simplement d'avoir dérobé au mari les clés de la cave, cella vinaria; enfin la pratique de la sorcellerie. Il faut, toutefois, remarquer ici que si la femme était notoirement coupable de maléfices, le mariage se dissolvait non par le divorce, mais par la peine capitale qu'elle encourait à titre de sorcière; c'est pourquoi Denys ne mentionne pas, à propos du divorce, l'art magique qui relevait trop directement du droit criminel. Lorsque le mari divorçait sans raison plausible, ses biens confisqués passaient pour moitié à l'épouse outragée, et pour moitié au trésor de Cérès.

Les motifs de cette sévérité sont probablement des plus positifs. Ce n'est pas l'idée religieuse qui a dû pousser surtout à confirmer autant que possible l'indissolubilité du mariage, car la religion s'est toujours montrée, à Rome, la très humble servante du pouvoir. Romulus devait avoir en vue la nécessité de soustraire son peuple à une vie de débauche et d'activer l'augmentation des naissances. L'individu avait alors une grande valeur à titre de soldat. C'est ainsi que les lois de Romulus et de Numa appellent parricide un meurtrier quelconque ; que, sous Tullus Hostilius, le père de trois jumeaux est sustenté aux frais de l'Etat jusqu'à leur puberté; qu'en l'an 351, les censeurs Camillus et Postumius frappent d'un impôt spécial, uxorium, les célibataires endurcis; que les censeurs eux-mêmes prêchent au peuple le mariage, en insistant sur la nécessité d'avoir des enfants. Cependant la loi n'admet pas le divorce pour cause de stérilité. D'abord, il serait

trop difficile, et trop délicat de la constater: «In jus vocanti matronam corpus ejus attigere non permiserunt, ut inviolata manus alienæ tactu stolæ relinqueretur. » Puis, elle n'en laisse pas moins subsister l'affection maritale. Ajoutons que la femme devenant par la manus la chose du mari, le divorce forcé eût été une atteinte au droit de propriété. Assurément, les Romains respectaient le mariage en lui-même, mais sans trop s'appuyer sur des considérations mystiques. Le mariage solennel (confarreatio) et le divorce correspondant (diffareatio) étaient plutôt des formalités justificatives de la caste patricienne que des cérémonies religieuses.

Peu à peu le concubinat s'étant glissé et répandu dans les mœurs, avec ses conséquences stériles, les lois décemvirales vinrent le régulariser en admettant l'usus au nombre des modes de mariage. Seulement, afin de ne point détourner de toute union régulière les femmes qui, tenant à leur personnalité, voulaient échapper à la manus, elles admirent l'interruption du trinoctium qui, répétée chaque année, malgré la continuité de la vie commune, créait un mariage libre à côté du mariage légitime. La trinoctium usurpatio n'était pas sans offrir quelque analogie avec le divorce, dont elle a dû favoriser grandement les progrès. Les causes qui expliquaient le trinoctium dans un cas devaient paraître, dans un autre, propres à justifier le divorce. La limitation des causes cessa donc; mais les nouveaux motifs de séparation devaient encore offrir une certaine gravité, et le judicium domesticum n'en devait être que plus nécessaire.

Le divorce qui a fait, à cette époque, le plus de bruit dans l'histoire, est celui de Sp. Carvilius Ruga, survenu en 520, 523 ou 527. La légende veut que ce fut le premier divorce qu'on eût vu jusqu'alors, et que les censeurs soient intervenus pour forcer le mari à répudier sa femme, à raison de sa stérilité, quoiqu'il l'aimât tendrement. La légende est fausse. Il est clair, d'abord, que les lois de Romulus, étant restrictives du divorce, supposent son existence dès la fondation de Rome, et la chronique qui nous a transmis l'aventure de la chaste Lucrèce nous montre aussi les princesses de sang royal et la jeunesse patricienne adonnées aux festins et à la débauche. Si les Annales maximi des pontifes n'avaient été brûlées par les Gaulois, lors de la prise de Rome, on aurait à retracer bien des tableaux de ce genre. Le fameux sénatus-consulte De Baccanalibus n'est, en somme, postérieur que d'environ quarante ans au divorce de Carvilius Ruga (568, A. R.), et témoigne du singulier état de la morale ambiante. Remarquons, en outre, que l'on connaît des divorces antérieurs à celui de Ruga. En 486, Publius Sofius avait renvoyé sa femme parce qu'elle avait assisté à des jeux funéraires. Quintus Antistius Vetus renvoie la sienne pour avoir parlé en public à une courtisane, et Sul

picius Gallus divorce pour avoir rencontré son épouse tête nue dans le Forum. Le divorce de Carvilius Ruga aura donc fait scandale, parce que jusqu'alors personne n'avait invoqué un semblable prétexte, et que l'opinion publique, qui avait déjà pour organe des écrivains et des auteurs comiques, commençait à s'éveiller. D'ailleurs, au dire de Valère Maxime, les censeurs, loin d'imposer cette séparation, la blâmèrent, suivant les attributions que la loi leur conférait.

A partir de cette époque, les divorces vont se multipliant. On se soustrait à la formalité du judicium domesticum. Les auteurs comiques, Ennius, Afranius, nous montrent un beau-père répudiant son gendre sans le consentement de sa fille, ou pesant sur la volonté de celle-ci pour la contraindre à divorcer. Les femmes pouvaient alors quitter leur mari en l'accusant d'excès immoraux. Du vivant de Plaute (568), le judicium domesticum est remplacé par un judicium de moribus. La société intervient, et charge un juge d'apprécier les causes de divorce. Si la séparation a lieu par consentement mutuel, les époux n'encourent aucune peine. Si le mari est en faute, il restitue la dot; si le divorce est imputable à la femme, le mari garde la dot en tout ou en partie, suivant que l'épouse est coupable d'inconduite ou d'un simple caprice. Ainsi opère le judicium de moribus quí survit jusqu'à Justinien.

Les jurisconsultes romains se sont fait du mariage consortium omnis vitæ une idée pure et élevée, et Paul le déclarait en principe indissoluble, parce que l'intérêt public doit primer les convenances privées. Mais le mariage libre a continuellement influencé, à son détriment, le mariage légitime. Marcus Caton cède sa femme à son ami Hortensius, pour la reprendre à la mort de celui-ci. Sylla prend successivement cinq femmes; Pompée, César divorcent plusieurs fois; Cicéron répudie Terentia pour épouser une femme riche et payer ses dettes. Les Gracques eurent beau promettre (620-633) 250 jugera par fils légitime, le mariage, atteint au vif par la corruption des mœurs, devait décliner sans cesse jusqu'à l'avènement d'Auguste.

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R. K.

LA PROPRIÉTÉ FONCIÈRE DANS L'INDE PRÉSIDENCE DU BENGALE (The Land Laws of India. I. The Bengal Presidency; The Permanent Settlement and its Evils), par M. V.-H. Rattigan. Law Magazine, novembre 1885. L'une des grandes erreurs de la politique, comme le montre surabondamment l'expérience de l'administration coloniale, est la prétention d'appliquer, en toute circonstance, des principes généraux et des théories préconçues. Les premiers administrateurs de l'Inde n'avaient pas su voir que, suivant les districts, telle ou telle institution était encore dans l'enfance, ou avait déjà dépassé l'âge de la maturité pour entrer

dans son déclin. C'est ainsi qu'en voulant uniformiser le régime des terres, ils aboutirent à des résultats regrettables. On peut le voir facilement en étudiant la propriété foncière dans la présidence du Bengale,

On ne sait rien de positif sur l'organisation administrative de la propriété foncière sous les brahmanes. Le code de Manou nous présente bien le chef de l'Etat comme le « maître suzerain du sol,» recevant, à ce titre, une part des produits agricoles, qui varie du quart au douzième, suivant que la récolte est mauvaise ou productive. Une hiérarchie de fonctionnaires, seigneurs d'un, de dix, de cent, de mille villages, s'occupe de percevoir cet impôt. Mais il est impossible de dire dans quelle mesure ce tableau répondait à une réalité quelconque. Ce qui est certain, c'est que les communautés de village continuaient d'exister, et que leur chef, l'ancien du village, traitait en leur nom avec les gouvernements de fait qui pouvaient se succéder. Bien qu'elles eussent perdu de bonne heure quelques-uns des caractères distinctifs d'une petite république autonome, il était impossible de les traiter autrement que comme un tout organisé. L'empereur Akbar en fit l'épreuve, et dut renoncer à imposer les individus séparément. Son organisation (settlement) de 1582 fut basée sur une sorte de cadastre qui s'appuyait sur le village comme unité. L'habitude se prit ensuite d'unir plusieurs villages en une zémindarie, pour faciliter la collecte de l'impôt. Le système fonctionna très excelleinment et très équitablement jusqu'au jour où l'empire musulman, dans sa décadence, cessa de tenir en mains les zémindars, qui s'empressèrent d'abuser de leurs pouvoirs, exigeant des impôts supplémentaires à leur profit personnel, sous un prétexte quelconque, leur propre mariage, naissance d'un de leurs enfants, élévation en dignité par de nouvelles récompenses et de nouveaux honneurs..., etc. En 1765, l'empereur Schah-Alem conféra à la Compagnie des Indes orientales la souveraineté effective des provinces du Bengale. Celle-ci créa d'abord des inspecteurs pour surveiller les fonctionnaires indigènes; mais elle ne tarda pas à les abolir (1769-1773). Les directeurs de la Compagnie, quoique désireux de maintenir l'ordre et la justice, craignaient d'effaroucher le peuple en lui laissant appréhender de nouveaux impôts si l'on étudiait trop à fond le mécanisme indigène. En 1786, lord Cornwallis fut envoyé comme gouverneur général, avec mission de préparer un settlement décennal qui allait devenir, en somme, définitif. Ce settlement, célèbre dans l'histoire du Bengale, fut annoncé par une proclamation en date du 22 mars 1793. Il regardait les zémindars comme les véritables propriétaires du sol, basait l'impôt sur l'état actuel des cultures, et déclarait cet impôt désormais invariable. La mesure était d'un désintéressement absurde, outre que

les zémindars n'y avaient aucun droit. Dix-huit ans plus tard, on constatait que la différence entre les sommes perçues par les zémindars et l'impôt versé au gouvernement avait triplé. Depuis lors, elle n'a fait que s'accentuer. Chose curieuse : on allait si loin dans la protection des zémindars qu'on leur défendait de passer des baux de plus de dix ans, de crainte que, par nonchalance ou imprévoyance, ils n'appauvrissent leur famille et fussent incapables de verser au Trésor les sommes qu'ils lui devaient. Cette dernière prohibition a été abolie; mais, dans tous les cas, la législation anglo-indienne de 1793 à 1799 et même au delà, a eu pour effet de livrer le cultivateur rayat, pieds et poings liés, aux mains des zémindars. - En 1859 seulement, on a commencé de remédier à cet ordre de choses qu'on déplorait depuis longtemps et qui provenait de ce qu'avec la meilleure volonté du monde on avait procédé suivant des principes abstraits, applicables peut-être en Occident, mais assurément étrangers à la nature et au caractère des Orientaux.

UN PROCÈS DE SORCELLERIE EN 1623, par M. Grassoreille (Revue bourbonnaise, juin 1886). En 1623, un sorcier fut condamné, par le présidial de Moulins en Bourbonnais, à être brûlé vif; c'était un menuisier accusé de se livrer à des pratiques de magie, déjà condamné, vingt ans auparavant, à faire amende honorable la corde au cou, ainsi qu'au bannissement de France pour cinq années, et qui, durant son exil, avait demandé aux sorciers d'Italie et d'Allemagne des renseignements inconnus. Les faits qui lui étaient reprochés étaient nombreux et graves exercice illégal de la médecine; guérison des malades au moyen d'un billet dont le texte lui avait été remis par un prêtre de Rouen, et de remèdes empiriques indiqués par un curé; réunion des époux séparés par la soustraction du maléfice; guérison des insensés; découverte de trésors; enlèvement du mal aux hommes pour le donner aux animaux. L'accusé, Pierre Michel, ne refusait pas de reconnaître que, souvent, il n'avait fait qu'exploiter la naïveté de ceux qui s'adressaient à lui; il reconnaissait avoir tiré parti de formules qu'il avait apprises dans les livres de magie; mais il ajoutait qu'il n'eût pu exécuter la moitié de ses exploits s'il n'avait eu en sa puissance un talisman fort puissant, c'est-à-dire une fiole contenant un démon qu'il satisfaisait par des sacrifices et par des sacrilèges; il n'hésita pas à divulguer les secrets de ses confrères. Michel fut condamné à être brûlé vif. Il en appela, mais le Parlement confirma la sentence. On ignore si la sentence fut exécutée. Quoi qu'il en soit, ce fut l'une des dernières condamnations à mort pour sorcellerie. Un ami de Michel, le sieur Saillant, qui fut poursuivi l'annnée suivante, s'en tira la vie sauve. Jh L.

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