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892-915). C'est sous ce

prince, d'ailleurs si tolérant en général, que se manifeste authentiquement, pour la première fois (2), l'action du praefectus urbi dans

(1) V. Revue générale du droit, t. IX (1885), p. 444, et no de mars-avril et de juillet-août 1886, p. 146 et 337.

(2) Sous toutes réserves seulement ont été déjà signalés les Actes qui font comparaître devant un praefectus urbi saint Ignace d'Antioche, martyr de Trajan. Sous le même prince, les Actes d'un saint Onésime le disent victime de Tertullus, præfectus urbi; les Actes, fort suspects d'ailleurs, des saints Sulpitius et Servilianus les font décapiter par ordre du préfet de Rome, Anianus; quelques martyrologes enfin attribuent à un Aurélianus, praefectus (urbi?) la condamnation du pape saint Alexandre Ir. Mais cet Aurélianus n'était., paraît-il, qu'un officier militaire délégué à Rome par Trajan (Bolland., 3 mai, t. XIV, p. 374); cet Anianus est absolument inconnu (lid., 20 avril, t. XI, p. 774, t. XVI, p. 13), et si l'histoire accueille un Cornutus Tertullus, ami de Pline le Jeune (Epist. VII, 21 et 31), rien ne prouve que ce Tertullus, ou même un homonyme, ait géré, au temps voulu, la préfecture romaine (Iid., 16 février, t. V, pp. 859-60). En remontant enfin jusqu'à Néron, on lit bien dans la Passion de saint Pierre, vulgairement attribuée à saint Lin, son successeur, que le prince des apôtres aurait été mis en croix par un Agrippa, préfet de la ville. Cet Agrippa reparaît même encore dans les Actes de saint Pierre rédigés par un Marcellus, disciple de saint Pierre, et fils lui-même, dit-on, d'un autre préfet de Rome nommé Marcus. Mais les Actes authentiques de saint Pierre, que saint Lin, croit-on, avait écrits, sont depuis longtemps perdus, et le caractère apocryphe de ceux que nous possédons a été démontré par Baronius (Annal. eccl., a. 69, no 6; Martyr. rom., 29 juin) et par Bellarmin (De Scriptor. eccl. in Lino). V. Bolland., 29 juin, t. XXVII, p. 363. Enfin, au temps où l'on place communément le martyre du premier pape (67: = 821), ce n'était aucun Agrippa, mais bien T. Flavius Sabinus, frère aîné de Vespasien, qui occupait la préfecture. — Nul préfet authentique n'apparaît donc en persécuteur avant Q. L. Urbicus. N'y a-t-il néanmoins aucun fond de vérité dans tous ces témoignages qui accusent la préfecture? Gardien, contre tous novateurs, de l'ordre établi, le préfet des Césars

les persécutions contre le christianisme. Sur le déclin du règne, le martyr grec saint Ptolémée et ses compagnons furent envoyés à la mort par le préfet Q. Lollius Urbicus, et leur supplice inspira à saint Justin sa seconde apologie, qui s'ouvre par le récit de leur comparution devant le préfet (1).

Antonin mérita mieux son surnom et sa gloire par cette belle constitution qui, retirant enfin aux maîtres le droit de vie et de mort, restreignit jusqu'à leur droit de correction sur les esclaves. Elle ne put que rehausser les plus nobles fonctions du préfet, car c'est naturellement à ce surveillant du monde servile que durent recourir désormais soit les esclaves victimes de châtiments illégaux, soit sans doute aussi les maîtres qui réclamaient des condamnations capitales (2).

Il paraîtrait même que, dès Antonin, le préfet de Rome, en concurrence avec les consuls et le préteur spécial, exerçait une certaine juridiction en matière de fidéicommis (3).

Déjà aussi le service des distributions alimentaires (frumentationes) commençait d'être ramené sous la haute direction du préfet; témoin l'inscription d'un citoyen de Rome qui com(meatum) perc(epit) sub L. Urbico prae(fecto) urb(i). (4) » Déjà enfin le praefectus vigilum était

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païens ne confondit-il jamais parmi ses justiciables les premiers chrétiens? C'est une question que l'on n'oserait ici résoudre.

(1) Sur L. Urbicus, v. Capitol. (Anton. Pius, 5), Apulée (Apol. pr.), Valois (sur Eusèbe, XVII, 4) et Pagi (ad a. CLXII); sur saint Ptolémée, les Bolland. (19 octobre, t. LVI, p. 386 et suiv.), Borghési a péremptoirement reporté sous Antonin la préfecture d'Urbicus, que plusieurs voulaient placer sous Marc-Aurèle et Vérus; cette magistrature a dû commencer vers l'a. 152 (= 905) et ne finir qu'un peu avant le règne (Borghési, t. V, p. 419 et s., VIII, 545 et s.; IX, 298 et s.). Démonstration qui tranche du même coup la controverse analogue sur la date du martyre de saint Ptolémée; il eut lieu, en effet, čл Oùpбínov, dit saint Justin, sub Urbicio praefecto, ajoutent les Actes latins, donc sur la fin d'Antonin le Pieux. L'opinion adverse en est réduite à supposer, sans autre preuve que le besoin de sa cause, qu'Urbicus aurait pu revenir à la préfecture sous Marc-Aurèle et Vérus. Mais deux arguments achèvent de la réfuter: 1o la dame romaine convertie par saint Ptolémée adresse sa requête à l'empereur et non aux empereurs; 2o l'un des martyrs parle du pieux empereur et du philosophe fils de César; voilà bien Antonin le Pieux et Marc-Aurèle, son fils adoptif; dans l'opinion contraire, il faudrait appliquer à Marc-Aurèle le titre de pieux, que les monuments ne lui donnent jamais de son vivant (Eckel, Doct. numm., VII, 74), et à Lucius Vérus le titre vraiment dérisoire pour lui de philosophe (saint Justin, 2; De Apol. 1 et 2).

(2) Gaïus, I, 53; Ulp. L. 1, 8, D., de off. praef. urb. (I, 12); L. 24, 3, D., De pign. act. (XIII, 7). Il devait dès lors en être de même pour l'exercice de la patria potestas (Marcian., L. 5, D., De leg. Pomp. de parric. (XLVIII, 9).

(3) Le rescrit d'Antonin à Salvius (C. 1, C. Just. ut in posses leg. VI, 54), paraît bien adressé à Salvius Julianus, préfet à la fin du règne (Borghési, IX, 305).

(4) C.I.L., VI, 10707; Borghesi, V, 419. Dès lors sans doute, ou bientôt du moins, le préfet de l'annone dut renvoyer à celui de la ville les causes les plus graves de son ressort.

subordonné au praefectus urbi (1). A la double juridiction, criminelle et même civile, venaient s'adjoindre ainsi les plus hautes fonctions administratives.

Règne de Marc-Aurèle et de L. Vérus (a. 164-169-915-923). C'est avec le meilleur des Antonins que commence la grande période de la préfecture. Sur un point sans doute elle semblerait alors reculer les juridici d'Italie, établis par les divi fratres, lui enlèvent l'appel des questions d'éligibilité au décurionat (2); mais cet allègement n'est point un signe de décadence; jamais, au contraire, la préfecture n'avait ni montré tant d'activité ni reçu tant d'accroissements. Sous l'empereur philosophe, comme sous son pieux prédécesseur, les préfets continuent la poursuite du christianisme, et ils font alors d'illustres victimes. C'est le grand jurisconsulte Salvius Julianus qui condame sainte Félicité, huit fois martyre avec ses sept enfants (3). C'est le philosophe stoïcien Rusticus qui prononce la mort du philosophe chrétien saint Justin (4). Mais trop de victimes attestent désormais

(1) La preuve en est qu'Antonin le Pieux adresse à Erucius Clarus, préfet de Rome en 146, comme au chef hiérarchique, un rescrit concernant l'office du praefectus vigilum (Ulp., L. 3, 2, D., De off. praef. vig., I, 15).

(2) Déjà ravie au préfet par les consulares d'Hadrien, mais après leur disparition momentanément reconquise, cette juridiction électorale lui fut à jamais enlevée par les juridici de Marc-Aurèle. On saisit au vif ces péripéties dans la cause célèbre du concordiensis Voluminus Serenus. Son appel, porté d'abord sous Antonin devant le préfet L. Urbicus, était resté sans solution; il dut être transféré sous Marc-Aurèle par-devant le premier juridicus de la Transpadane, Arrius Antoninus (Fronto, ad amic., I1, 7).

(3) Bolland. (10 juillet, t. XXX, p. 1 et s.); Ruinart, Acta sincera, p. 21. Grâce à Marini, à Borghési, à M. de Rossi (Bullet. d'arch. christ., a. 1863, p. 90 et s.), l'obscur et suspect préfet Publius, connu seulement jusqu'alors par la passio de la sainte, est indubitablement redevenu le grand jurisconsulte Salvius Julianus. L'épigraphie lui a restitué en effet son prénom de Publius (Orelli-Henzen, 4359), et rien d'étonnant, si, dans des Actes tirés du grec, l'on a suivi l'usage des Grecs qui désignaient les Romains par leur praenomen seulement. Il faut donc expulser des fastes ce faux Publius que Corsini (p. 78) accueillait encore comme un prédécesseur de Salvius Julianus, par un dédoublement de ce grand homme. Mais il faut insérer au rang des préfets le vrai Publius, le juge de sainte Félicité. Leçon qui devrait nous apprendre à ne pas toujours condamner sans appel tous les préfets des Acta martyrum restés encore dans l'ombre de l'histoire. La date du martyre, que Ruinart plaçait en 150 (= 904), Tillemont en 164 (= 918), Baronius en 175 (= 929), et que M. Aubé (Hist. des persécut. de l'Eglise, I, 443 et s.) reculerait volontiers jusqu'en 211 (= 965), a été fixée par Borghési (IX, 306) et M. de Rossi (loc. cit.) entre 162 et 165 (916-919).

(4) Bolland. (13 avril, t. XI, p. 105 et s.). La mort du saint doit se placer très probablement en 165 (= 918) (Chronic. Pasc., Olymp., 236; ap. Migne, Patrol. grec., t. XCII, col. 629). On ne peut même pas être tenté, comme M. Renan (L'Eglise chrét., p. 492), de la reculer jusque sous Antonin le Pieux, puisque Rusticus ne fut préfet que sous Marc-Aurèle.

cette juridiction persécutrice pour qu'on s'attarde à en multiplier les preuves.

Déjà encore, sous ce double règne, la préfecture avait saisi la direction du service des poids et mesures; nombre de pondera publica, retrouvés sur divers points de l'Empire, sont contrôlés EX AVCT(oritate) | Quinti) IVN(i) RVSTICI | PRAEF (ecti) VRB(i) (1). Les divi fratres ne cessaient enfin d'agrandir, au civil comme au criminel, la juridiction de leur vicaire urbain. Au criminel, il connaîtra de l'accusation extraordinaire instituée par eux au cas des instrumenta prodita »; c'est la trahison du dépositaire livrant à l'adversaire ou à un étranger les titres confiés à sa foi (2). Au civil, les empereurs collègues, autorisant, conniventibus oculis, l'esclave à racheter sa liberté de son pécule, chargent leur préfet de contraindre au besoin le maître à exécuter le pacte libérateur (3).

Règne de Marc-Aurèle (a. 161-180913-934). — Marc-Aurèle, resté seul sur le trône, continua de surveiller l'esclavage. Le maître qui croit son foyer outragé par des amours serviles ne pourra plus se venger lui seul de son esclave qu'il soupçonne ; il devra, comme pour un homme libre, intenter régulièrement contre lui une accusation en adultère devant le praefectus urbi (4). C'est encore à ce magistrat que les curatores regionum ac viarum renverront, s'il échet, les publicains coupables d'exactions douanières (5). C'est lui sans doute aussi qui dès lors connaîtra du crimen expilatae hereditatis organisé par Marc-Aurèle (6).

Cependant la juridiction civile grandissait encore. Dès Marc-Aurèle,

(1) Spon, Miscell. erud. ant., p. 303; Orelli-Henzen, 4345; C. I. L., II, 4962, 2; V, 8119, 1; IX, 6088, 1; X, 8068, 5; de Longpérier, Bullet. arch. de l'Athenaeum français, sept. 1855; Bullet. della comm. arch. com. di Roma, a 1882, p. 171. C'est bien le Rusticus de Marc-Aurèle et non l'homonyme du quatrième siècle (a. 344-45 = 1098-99). Le nom de Junius et l'absence du titre V(ir) C(larissimus), toujours mentionné au bas-empire, les distinguent sûrement (Borghési, V, 57; Noël Des Vergers, Essai sur Marc-Aurèle, p. 54).

(2) Ulp., L. 8, D., De extraord. crim. (XLVIII, 11); Paul, L. 3, §§ 8 et 9, D., De poenis (XLVIII, 19).

(3) Marcian, L. 5, pr., D., De manumiss. (XL, I).

(4) Ulp., L. 5, D., De accus. et inscript. (XLVIII, 2); L, 1, § 5, D., De off. praef. urb. (I, 12).

(5) Capitol (Marc. Ant., 11). Il s'agit des curatores viarum qui d'ordinaire joignaient à leur charge la préfecture alimentaire de la regio voisine. Marc-Aurèle les autorisa soit à punir eux-mêmes les exacteurs, soit à les renvoyer devant le préfet, sans doute dans les causes majeures.

(6) La juridiction du préfet, quoique attestée seulement par un rescrit de Sept.Sévère (Marc, L. 3, D., exp. hered., XLVII, 19), doit remonter à Marc-Aurèle, créateur de ce crimen extraordinarium.

on voit le praefectus urbi délégué pour juger les appels contre les décisions du préteur (4).

Tant de progrès dans tous les sens font de l'époque des divi fratres l'une des plus remarquables pour l'histoire de la préfecture. Les préfets prennent place désormais dans la consilium Caesaris (2); leur dignité impose tellement que les plaideurs, par une erreur singulière, croient pouvoir en appeler à eux d'un judex donné par les consuls, et l'on excuse cette méprise en considérant le préfet comme l'égal du consul lui-même (3).

Règne de Septime-Sévère (a. 193-211947-965). Au début enfin du troisième siècle, l'empereur qui décima la curie et fonda le despotisme militaire voulut enlever au sénat et aux quaestiones ce qui leur restait de juridiction pénale pour en enrichir ses préfets. L'épitre de Septime-Sévère à Fabius Cilo transféra définitivement au préfet de la ville la connaissance de tous les crimes et délits, mais seulement dans un rayon de cent milles; le reste de l'Italie demeurait sous le jus gladii du préfet prétorien (4). Du coup disparaissait l'antique justice du sénat (5), et aussi les quaestiones perpetuae, ce vieux jury populaire qui avait entendu Cicéron (6). Un simple officier de police, par sa rivalité envahissante, était parvenu à les supplanter. Toutes

(1) Au moins déjà en certains cas, Scaevola, qui écrivait son Digeste sous ce prince, nous rapporte un procès sur compte de tutelle jugement en première instance par le judex tutelae; appel devant le competens judex; appel sur appel devant l'empereur (L. 122, 3 5, D., De verb. oblig. (XLV, 1). Or, le judex tutelae, depuis Marc-Aurèle, c'était le praetor tutelaris (Capitol, Marc. Anton., 18); donc le competens judex (ce magistrat intermédiaire à qui l'on peut en appeler du préteur, et de qui l'on n'en peut appeler qu'au prince), c'est forcément le praefectus urbi. (2) Ce que le biographe dit de Marc-Aurèle ( 11), «habuit secum praefectus quorum et auctoritate et periculo jura dictavit » s'applique aux préfets de la ville comme à ceux du prétoire (Saumaise, loc. cit.).

(3) Ulp., L. 1, 3, D., De appell. (XLIX, 1).

(4) Ulp., L. 1, § 4, D., De off. praef. urb. (I, 12). L. Fabius Cilo fut préfet, et probablement à deux reprises, sous Sept.-Sévère, entre 203 et 211 (= 957-965), avec une interruption. Echappé aux fureurs de Caracalla (Dion., LXXVII, 4), il reçut de Macrin un palais superbe (Victor, Epit., XX). Voir pour son cursus honorum C. I. L., VI, 1408-1410, C. I. G., 5896; et sur sa vie : Otto Meinhold, « De L. F. Cilone... » Monasterii, 1867. L'épitre de Sévère à ce préfet, qui est comme la charte constitutive de la préfecture, fut un monument considérable, fréquemment cité au Digeste (Ulp., L. 1, pr., De off. praef. urb. (I, 12); L. 8, 3 5, De poenis (XLVIII, 19), L. 6, 8 1 et L. 14, 22, De interd. et releg. (XLVIII, 21). Walter en fixe la date en 205 (= 959) (Hist. du dr. crim., no 837).

(5) D'après M. Duruy (Hist. des Romains, t. VI, p. 303), ce serait Marc-Aurèle qui aurait enlevé au sénat sa juridiction criminelle pour en doter le préfet. C'est seulement Sept.-Sévère, et le sénat garda même quelques restes de juridiction : il continua de juger sur renvoi de l'empereur (Dion, LXXI, 16).

(6) Déjà auparavant, le préfet avait enlevé aux quaestiones les condamnations

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