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que nous voulons prouver. Les raisons démontrent ensuite, par une analyse rapide de nos moyens, la vérité des faits et des raisonnements qui nous servent d'appui. La confirmation de ces raisons les développe et les fortifie par de nouveaux arguments. Les ornements des preuves, quand ces preuves sont établies, leur donnent plus de grâce et d'éclat. La conclusion réunit en peu de mots les moyens épars de l'argumen

tation.

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XIX. Si nous voulons nous servir de ces cinq parties à la fois, nous traiterons l'argumentation de cette manière : << Pour démontrer, par exemple, qu'Ulysse a eu des motifs de tuer Ajax, vous direz qu'il voulait se défaire d'un ennemi implacable, dont il avait les plus fortes causes d'appréhender le ressentiment. Il voyait qu'il ne serait jamais en sûreté tant qu'Ajax vivrait; << et il espérait que, par ce meurtre, il assurerait son << repos, lui qui avait coutume, lorsqu'il ne pouvait perdre justement ses ennemis, de s'en délivrer par << des machinations criminelles : la mort indigne de Palamède en est un éclatant témoignage. Ainsi, d'un côté, la crainte du péril le portait à égorger << un homme qui pouvait le punir; et de l'autre, l'habitude du crime lui ôtait tout scrupule de commettre « un assassinat. Les hommes, en effet, ne se livrent « jamais sans motif aux fautes les plus légères; mais ils ne commettent surtout les plus énormes crimes que lorsqu'ils sont certains d'en profiter. Si tant de mortels entraînés par l'appât du gain, et un plus grand nombre encore, par l'ambition du pouvoir, « se sont rendus coupables; si plusieurs se sont déter

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fraude maxima 'commutarunt; ai mirum videbitur, istum a maleficio propter acerrimam for« midinem non temperasse? Virum fortissimum, << integerrimum, inimicitiarum persequentissi« mum, injuria lacessitum, exsuscitatum, «< homo timidus, nocens, conscius sui peccati, insidiosus, inimicum incolumem esse noluit : cui tandem hoc mirum videbitur? Nam quum « feras bestias videamus alacres et erectas vadere, « ut alteri bestia noceant; non est incredibile putandum, istius quoque animum ferum, crudelem, atque inhumanum, cupide ad inimici ⚫ perniciem profectum; præsertim quum in bestiis « nullam neque bonam neque malam rationem 3 videamus ; in isto plurimas et pessimas rationes << semper fuisse intelligamus. Si ergo pollicitus « sum, me daturum causam, qua inductus Ulysses << accesserit ad maleficium, et, si inimicitiarum <«< acerrimam rationem, et periculi metum inter<< cessisse demonstravi; non est dubium, quin « confiteatur causam maleficii fuisse. » Ergo absolutissima est argumentatio ea, quæ ex quinque partibus constat; sed ea non semper necesse est uti. Tum enim complexione supersedendum est, si res brevis est, ut facile memoria comprehendatur : tum exornatio prætermittenda est, si parum locuples ad amplificandum et exornandum res videtur esse. Sin et brevis erit argumentatio, et res tenuis, aut humilis; tum et exornatione et complexione supersedendum est. In omni argu

1 Commutaverunt. deamus.

2 Excitatum. 3 Esse vi

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« minés à des forfaits inouïs pour le plus faible intérêt, << s'étonnera-t-on que la plus vive terreur ait armé l'assassin? s'étonnera-t-on que l'homme le plus vaillant << et le plus intègre, le persécuteur le plus implacable « des méchants, outragé, irrité, prêt à demander ven<< geance, ait été égorgé par la main d'un lâche, d'un perfide, tremblant de sa faute, et si habile à tendre des piéges à la vertu? Puisque nous voyons les bêtes féroces si promptes et si disposées à nuire aux autres `animaux, doit-il paraître incroyable qu'un être farouche, cruel, inhumain, se soit précipité avec fureur sur un ennemi? Encore les animaux n'ontils aucune raison, bonne ou mauvaise, de se nuire; tandis que ce meurtrier, nous en sommes tous convaincus, avait les motifs les plus capables de faire impression sur un cœur tel que le sien. Si donc je << vous ai promis de vous indiquer la cause du meurtre << commis par Ulysse; si je vous ai démontré qu'il était animé par une haine violente et par la crainte du péril, les plus puissantes de toutes les rai<< sons, il n'est point douteux que l'adversaire n'avoue qu'il y a eu des raisons du crime. » On voit que l'argumentation la plus complète est celle qui renferme les cinq parties; mais elle n'est pas toujours nécessaire. En effet, la conclusion est inutile si l'affaire est courte et facile à comprendre. On néglige aussi les ornements quand le sujet ne paraît pas susceptible des richesses de l'amplification. Si l'argumentation a peu d'étendue, et l'affaire peu d'importance, il faut omettre et les ornements et la conclusion. Dans toute espèce d'argumentation, suivez, pour les deux der

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* Exemple déjà cité, I, 11, 17, et cité encore, de Inv., I, 8, 49, etc. Les rhéteurs grecs mettent souvent en scène Ulysse, Ajax, et tous les héros d'Homère.

mentatione de duabus partibus postremis, hæc, quam exposui, ratio est habenda. Ergo amplissima est argumentatio quinquepartita; brevissima est tripartita; mediocris, sublata aut exornatione aut complexione, quadripartita.

XX. Duo genera sunt vitiosarum argumentationum : unum, quod ab adversario reprehendi potest, idque pertinet ad causam; alterum, quod tametsi nugatorium est, tamen non indiget 'reprehensioni. Quæ sint, quæ reprehensione confutari conveniat, quæ tacite contemni atque vitari sine reprehensione, nisi exempla subjecero, intelligere dilucide 3 non poteris. Hæc cognitio vitiosarum argumentationum duplicem utilitatem afferet : nam et vitare in argumentatione vitium admonebit, et ab aliis non vitatum commode reprehendere docebit. Quoniam igitur ostendimus, perfectam et plenam argumentationem ex quinque partibus constare, in unaquaque parte argumentationis quæ vitia vitanda sint, consideremus ut et ipsi ab his vitiis recedere, et adversariorum argumentationes hac præceptione in omnibus partibus tentare, et ab aliqua parte labefactare possimus.

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Expositio vitiosa est, quum ab aliqua aut a majore parte ad omnes id confertur, quod non necessario est omnibus attributum; ut si quis hoc modo exponat : « Omnes, qui in paupertate sunt, « malunt maleficio parare divitias, quam officio « paupertatem tueri. Si quis hoc modo exposuerit argumentationem, ut non curet quærere,

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Reprehensione. — 2 Si exempla. 3 Abest non

4 Sunt.

nières parties, cette règle générale. Il en résulte que l'argumentation la plus longue a cinq parties, que la plus courte en a trois, et la moyenne quatre, puisqu'on en retranche ou les ornements ou la conclusion.

XX, Il y a deux espèces d'argumentations défecineuses: l'une que l'adversaire peut réfuter avec avantage, et qui appartient à la cause; l'autre, que l'on reconnaît pour légère et futile, mais qu'il importe peu de relever. Sans quelques exemples, vous ne distingueriez pas assez clairement les preuves qu'il est nécessaire de détruire, et celles qu'on dédaigne et qu'on laisse passer en silence. La connaissance des preuves défectueuses présente une double utilité; en nous prémunissant contre les erreurs qu'il faut éviter dans l'argumentation, cette étude nous offre aussi le moyen de tirer avantage de la maladresse des autres. Comme nous avons démontré que l'argumentation pleine et entière a cinq parties, voyons, dans chacune de ces parties, contre quels défauts nous devons être en garde, afin que nous puissions les éviter nous-mêmes, et soumettre à l'épreuve de ces règles toutes les parties des argumentations de nos adversaires, pour en trouver quelqu'une qu'il nous soit facile d'atténuer.

L'exposition est vicieuse, lorsqu'on attribue à tous ce qui ne convient pas à tous, et qu'on établit des propositions générales sur des vérités partielles, comme dans cette phrase : « Tous ceux qui sont dans la pauvreté aiment mieux acquérir des richesses par des moyens criminels, que de supporter honorablement la pauvreté. » Si quelqu'un raisonne de cette manière, sans songer comment il prouvera ce qu'il avance et confirmera ses preuves, on le réfute sans

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