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ma voix; que la terre prête l'oreille aux paroles de ma bouche!» Dans ce silence de toute la nature, il parle d'abord au peuple avec une force inimitable, et, prévoyant ses infidélités, il lui en découvre l'horreur. Tout d'un coup il sort de luimême, comme trouvant tout discours humain 'au-dessous d'un sujet si grand : il rapporte ce que Dieu dit, et le fait parler avec tant de hauteur et tant de bonté, qu'on ne sait ce qu'il inspire le plus, ou la crainte et la confusion, ou l'amour et la confiance.

Tout le peuple apprit par cœur ce divin cantique, par ordre de Dieu et de Moïse (1). Ce grand homme après cela mourut content, comme un homme qui n'avait rien oublié pour conserver parmi les siens la mémoire des bienfaits et des préceptes de Dieu. Il laissa ses enfants au milieu de leurs citoyens, sans aucune distinction, et sans aucun établissement extraordinaire. Il a été admiré non-seulement de son peuple, mais encore de tous les peuples du monde; et aucun législa– teur n'a jamais eu un si grand nom parmi les hommes.

Tous les prophètes qui ont suivi dans l'ancienne loi, et tout ce qu'il y a eu d'écrivains sacrés, ont tenu à gloire d'être ses disciples. En effet, il parle en maître: on remarque dans ses écrits un caractère tout particulier, et je ne sais quoi d'original qu'on ne trouve en nul autre écrit : il a dans sa simplicité un sublime si majestueux, que rien ne le peut égaler; et si en entendant les autres prophètes on croit entendre des hommes inspirés de Dieu, c'est pour ainsi dire Dieu même en personne qu'on croit entendre dans la voix et dans les écrits de Moïse.

On tient qu'il a écrit le livre de Job. La sublimité des pensées et la majesté du style rendent cette histoire digne de Moïse. De peur que les Hébreux ne s'enorgueillissent, en s'attribuant à eux seuls la grâce de Dieu, il était bon de leur faire entendre qu'il avait eu ses élus, même dans la race d'Ésaü. Quelle doctrine était plus importante? et quel entretien plus utile pouvait donner Moïse au peuple affligé dans le

(1) DEUT. XXXI. 19, 22.

désert, que celui de la patience de Job, qui, livré entre les mains de Satan pour être excercé par toute sorte de peines, se voit privé de ses biens, de ses enfants, et de toute consolation sur la terre ; incontinent après frappé d'une horrible maladie, et agité au dedans par la tentation du blasphème et du désespoir; qui, néanmoins, en demeurant ferme, fait voir qu'une âme fidèle, soutenue du secours divin, au milieu des épreuves les plus effroyables, et malgré les plus noires pensées que l'esprit malin puisse suggérer, sait non-seulement conserver une confiance invincible, mais encore s'élever par ses propres maux à la plus haute contemplation, et reconnaître, dans les peines qu'elle endure, avec le néant de l'homme, le suprême empire de Dieu et sa sagesse infinie? Voilà ce qu'enseigne le livre de Job (1). Pour garder le caractère du temps, on voit la foi du saint homme couronnée par des prospérités temporelles; mais cependant le peuple de Dieu apprend à connaître quelle est la vertu des souffrances, et à goûter la grâce qui devait un jour être attachée à la croix.

Moïse l'avait goûtée, lorsqu'il préféra les souffrances et l'ignominie qu'il fallait subir avec son peuple, aux délices et à l'abondance de la maison du roi d'Égypte (2). Dès lors Dieu lui fit goûter les opprobres de Jésus-Christ (3). Il les goûta encore davantage dans sa fuite précipitée, et dans son exil de quarante ans. Mais il avala jusqu'au fond le calice de JésusChrist, lorsque, choisi pour sauver ce peuple, il lui en fallut supporter les révoltes continuelles, où sa vie était en péril (4). Il apprit ce qu'il en coûte à sauver les enfants de Dieu, et fit voir de loin ce qu'une plus haute délivrance devait un jour coûter au Sauveur du monde.

Ce grand homme n'eut pas même la consolation d'entrer dans la Terre promise: il la vit seulement du haut d'une montagne, et n'eut point de honte d'écrire qu'il en était exclu par une incrédulité (5) qui, toute légère qu'elle paraissait,

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(2) EXOD.

(1) JOB. XXIII. 15; xiv. 14, 15; xvI. 21. XIX. 25; etc. 91. 10, 11, 15.—(3) Heb. xi. 24, 25, 26.—(4) Num. XIV. 10.—(5) Ibid.

XX. 12.

mérita d'être châtiée si sévèrement dans un homme dont la grâce était si éminente. Moïse servit d'exemple à la sévère jalousie de Dieu, et au jugement qu'il excerce avec une si terrible exactitude sur ceux que ses dons obligent à une fidélité plus parfaite.

Mais un plus haut mystère nous est montré dans l'exclusion de Moïse. Ce sage législateur, qui ne fait par tant de merveilles que de conduire les enfants de Dieu dans le voisinage de leur terre, nous sert lui-même de preuve que sa loi ne mène rien à la perfection (1); et que, sans nous pouvoir donner l'accomplissement des promesses, elle nous les fait saluer de loin (2), ou nous conduit tout au plus comme à la porte de notre héritage. C'est un Josué, c'est un Jésus, car c'était le vrai nom de Josué, qui par ce nom et par son office représentait le Sauveur du monde; c'est cet homme si fort au-dessous de Moïse en toutes choses, et supérieur seulement par le nom qu'il porte; c'est lui, dis-je, qui doit introduire le peuple de Dieu dans la Terre sainte.

Par les victoires de ce grand homme, devant qui le Jourdain retourne en arrière, les murailles de Jéricho tombent d'ellesmêmes, et le soleil s'arrête au milieu du ciel; Dieu établit ses enfants dans la terre de Chanaan, dont il chasse par le même moyen des peuples abominables. Par la haine qu'il donnait pour eux à ses fidèles, il leur inspirait un extrême éloignement de leur impiété; et le châtiment qu'il en fit, par leur ministère, les remplit eux-mêmes de crainte pour la justice divine dont ils exécutaient les décrets. Une partie de ces peuples, que Josué chassa de leur terre, s'établirent en Afrique, où l'on trouva longtemps après, dans une inscription ancienne (3), le monument de leur fuite et des victoires de Josué. Après que ces victoires miraculeuses eurent mis les Israélites en possession de la plus grande partie de la terre promise à leurs pères, Josué, et Eléazar, souverain pontife, avec les chefs des douze tribus, leur en firent le partage, selon la

(1) HEB. VII. 19. — (2) Ibid. XI. 13: (3) Procop. de Bell. Vand.

lib. 11.

loi de Moïse (1), et assignèrent à la tribu de Juda le premier et le plus grand lot (2). Dès le temps de Moïse, elle s'était élevée au-dessus des autres en nombre, en courage et en dignité (3). Josué mourut, et le peuple continua la conquête de la Terre sainte. Dieu voulut que la tribu de Juda marchât à la tête, et déclara qu'il avait livré le pays entre ses mains (4). En effet, elle défit les Chananéens, et prit Jérusalem (5), qui devait être la cité sainte, et la capitale du peuple de Dieu. C'était l'ancienne Salem, où Melchisédech avait régné du temps d'Abraham; Melchisedech, ce roi de justice (car c'est ce que veut dire son nom), et en même temps roi de paix, puisque salem veut dire paix (6); qu'Abraham avait reconnu pour le plus grand pontife qui fût au monde : comme si Jérusalem eût été dès lors destinée à être une ville sainte, et le chef de la religion. Cette ville fut donnée d'abord aux enfants de Benjamin, qui, faibles et en petit nombre, ne purent chasser les Jébuséens, anciens habitants du pays, et demeurèrent parmi eux (7). Sous les juges, le peuple de Dieu est diversement traité, selon qu'il fait bien ou mal. Après la mort des vieillards qui avaient vu les miracles de la main de Dieu, la mémoire de ces grands ouvrages s'affaiblit, et la pente universelle du genre humain entraîne le peuple à l'idolâtrie. Autant de fois qu'il y tombe, il est puni; autant de fois qu'il se repent, il est délivré. La foi de la Providence, et la vérité des promesses et des menaces de Moïse, se confirment de plus en plus dans le cœur des vrais fidèles. Mais Dieu en préparait encore de plus grands exemples. Le peuple demanda au roi, et Dieu lui donna Saül, bientôt réprouvé pour ses péchés: il résolut enfin d'établir une famille royale, d'où le Messie sortirait, et il la choisit dans Juda. David, un jeune berger sorti de cette tribu, le dernier des enfants de Jessé, dont son père ni sa famille ne connaissait pas le mérite, mais que Dieu trouva selon son cœur, fut sacré par Samuel dans Bethléem, sa patrie (8).

XV.

(2) Jos. XIV,

(4) JUDIC.

(1) Jos. XIII, XIV et seq. NUM. xxvI. 53; xxxiv. 17. (3) NUM. 11. 3, 9. vii. 12; x. 14; J. PARAL. v. 2. (6) HEBR. VII. 2. (7) JUD. 1. 21.

. 1, 2. — (5) Ibid. 4, 8.

(8) I. REG. XVI.

CHAPITRE IV.

DAVID, SALOMON, LES ROIS ET LES PROPHÈTES.

Ici le peuple de Dieu prend une forme plus auguste. La royauté est affermie dans la maison de David. Cette maison commence par deux rois de caractère différent, mais admirables tous deux. David, belliqueux et conquérant, subjugue les ennemis du peuple de Dieu, dont il fait craindre les armes par tout l'Orient; et Salomon, renommé par sa sagesse au dedans et au dehors, rend ce peuple heureux par une paix profonde. Mais la suite de la religion nous demande ici quelques remarques particulières sur la vie de ces deux grands rois.

David régna d'abord sur Juda, puissant et victorieux, et ensuite il fut reconnu par tout Israël. Il prit sur les Jébuséens la forteresse de Sion, qui était la citadelle de Jérusalem. Maître de cette ville, il y établit par ordre de Dieu le siége de la royauté et celui de la religion. Sion fut sa demeure il bâtit autour, et la nomma la cité de David (1). Joab, fils de sa sœur (2), bâtit le reste de la ville, et Jérusalem prit une nouvelle forme. Ceux de Juda occupèrent tout le pays; et Benjamin, petit en nombre, y demeura mêlé avec eux.

L'arche d'alliance bâtie par Moïse, où Dieu reposait sur les chérubins, et où les deux tables du Décalogue étaient gardées, n'avait point de place fixe. David la mena en triomphe dans Sion (3), qu'il avait conquise par le tout-puissant secours de Dieu, afin que Dieu régnât dans Sion, et qu'il y fût reconnu comme le protecteur de David, de Jérusalem, et de tout le royaume. Mais le Tabernacle, où le peuple avait servi Dieu dans le désert, était encore à Gabaon (4); et c'était là que

(1) II. REG. v. 6, 7, 8, 9; I. PAR. xt. 6, 7, 8.—(2) I. PAR. II. 16.~~ (3) II. REG. VI, 18. (4) 1. PAR. XVI. 39; xxI. 29.

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