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coupées. Les œuvres des hommes ont péri malgré l'enfer qui les soutenait; l'œuvre de Dieu a subsisté : l'Église a triomphé de l'idolâtrie et de toutes les erreurs.

CHAPITRE XXVII.

RÉFLEXION GÉNÉRALE SUR LA SUITE DE LA RELIGION, ET SUR LE RAPPORT QU'IL Y A ENTRE LES LIVRES DE L'ÉCRITURE.

Cette Église toujours attaquée, et jamais vaincue, est un miracle perpétuel, et un témoignage éclatant de l'immutabilité des conseils de Dieu. Au milieu de l'agitation des choses humaines, elle se soutient toujours avec une force invincible; en sorte que, par une suite non interrompue depuis près de dix-sept cents ans, nous la voyons remonter jusqu'à JésusChrist, dans lequel elle a recueilli la succession de l'ancien peuple, et se trouve réunie aux prophètes et aux patriarches.

Ainsi tant de miracles étonnants, que les anciens Hébreux ont vus de leurs yeux, servent encore aujourd'hui à confirmer notre foi, Dieu, qui les a faits pour rendre témoignage à son unité et à sa toute-puissance, que pouvait-il faire de plus authentique pour en conserver la mémoire, que de laisser entre les mains de tout un grand peuple les actes qui les attestent rédigés par l'ordre des temps? C'est ce que nous avons encore dans les livres de l'ancien Testament, c'est-à-dire dans les livres les plus anciens qui soient au monde; dans les livres qui sont les seuls de l'antiquité où la connaissance du vrai Dieu soit enseignée, et son service ordonné; dans les livres que le peuple juif a toujours si religieusement gardés, et dont il est encore aujourd'hui l'inviolable porteur par toute la terre. Après cela, faut-il croire les fables extravagantes des auteurs profanes sur l'origine d'un peuple si noble et si ancien? Nous avons déjà remarqué (1) que l'histoire de sa naissance et de

(1) Époque VIII, an de Rome 305.

son empire finit où commence l'histoire grecque; en sorte qu'il n'y a rien à espérer de ce côté-là pour éclaircir les affaires des Hébreux. Il est certain que les Juifs et leur religion ne furent guère connus des Grecs qu'après que leurs livres sacrés eurent été traduits en cette langue, et qu'ils furent eux-mêmes répandus dans les villes grecques, c'est-à-dire deux à trois cents ans avant Jésus-Christ. L'ignorance de la Divinité était alors si profonde parmi les Gentils, que leurs plus habiles écrivains ne pouvaient pas même comprendre quel Dieu adoraient les Juifs. Les plus équitables leur donnaient pour Dieu les nues et le ciel, parce qu'ils y levaient souvent les yeux, comme au lieu où se déclarait le plus hautement la toute-puissance de Dieu, et où il avait établi son trône. Au reste, la religion judaïque était si singulière et si opposée à toutes les autres; les lois, les sabbats, les fêtes et toutes les mœurs de ce peuple étaient si particulières, qu'ils s'attirerent bientôt la jalousie et la haine de ceux parmi lesquels ils vivaient. On les regardait comme une nation qui condamnait toutes les autres. La défense qui leur était faite de communiquer avec les Gentils en tant de choses, les rendait aussi odieux qu'ils paraissaient méprisables. L'union qu'on voyait entre eux, la relation qu'ils entretenaient tous si soigneusement avec le chef de leur religion, c'est-à-dire Jérusalem, son temple et ses pontifes, et les dons qu'ils y envoyaient de toutes parts, les rendaient suspects; ce qui, joint à l'ancienne haine des Égyptiens contre ce peuple si maltraité de leurs rois et délivré par tant de prodiges de leur tyrannie, fit inventer des contes inouïs sur son origine, que chacun cherchait à sa fantaisie, aussi bien que les interprétations de leurs cérémonies, qui étaient si particulières, et qui paraissaient si bizarres lorsqu'on n'en connaissait pas le fond et les sources. La Grèce, comme on sait, était ingénieuse à se tromper et à s'amuser agréablement elle-même ; et de tout cela sont venues les fables que l'on trouve dans Justin, dans Tacite, dans Diodore de Sicile, et dans les autres de pareille date qui ont paru curieux. dans les affaires des Juifs, quoiqu'il soit plus clair que le jour qu'ils écrivaient sur des bruits confus, après une longue suite de siècles interposés, sans connaître leurs lois, leur religion,

leur philosophie; sans avoir entendu leurs livres, et peut-être sans les avoir seulement ouverts.

Cependant, malgré l'ignorance et la calomnie, il demeurera pour constant que le peuple juif est le seul qui ait connu, dès son origine, le Dieu créateur du ciel et de la terre; le seul par conséquent qui devait être le dépositaire des secrets divins. Il les a aussi conservés avec une religion qui n'a point d'exemple. Les livres que les Égyptiens et les autres peuples appelaient divins sont perdus il y a longtemps, et à peine nous en reste-t-il quelque mémoire confuse dans les histoires anciennes. Les livres sacrés des Romains, où Numa, auteur de leur religion, en avait écrit les mystères, ont péri par les mains des Romains mêmes, et le sénat les fit brûler comme tendants à renverser la religion (1). Ces mêmes Romains ont à la fin laissé périr les livres sibyllins, si longtemps révérés parmi eux comme prophétiques, et où ils voulaient qu'on crût qu'ils trouvaient les décrets des dieux immortels sur leur empire, sans pourtant en avoir jamais montré au public, je ne dis pas un seul volume, mais un seul oracle. Les Juifs ont été les seuls dont les Écritures sacrées ont été d'autant plus en vénération, qu'elles ont été plus connues. De tous les peuples anciens, ils sont le seul qui ait conservé les monuments primitifs de sa religion, quoiqu'ils fussent pleins des témoignages de leur infidélité et de celle de leurs ancêtres. Et aujourd'hui encore ce même peuple reste sur la terre pour porter à toutes les nations où il a été dispersé, avec la suite de la religion, les miracles et les prédictions qui la rendent inébranlable.

Quand Jésus-Christ est venu, et qu'envoyé par son Père pour accomplir les promesses de la Loi, il a confirmé sa mission et celle de ses disciples par des miracles nouveaux, ils ont été écrits avec la même exactitude. Les actes en ont été publiés à toute la terre, les circonstances des temps, des personnes et des lieux ont rendu l'examen facile à quiconque a

(1) TIT. LIV. lib. XL, c. 29. VARR. lib. de Cultu Deor. apud Auc. de Civ. Dei, lib. VII, c. XXXIV; t. vII, col. 187.

été soigneux de son salut. Le monde s'est informé, le monde a cru; et, si peu qu'on ait considéré les anciens monuments de l'Église, on avouera que jamais affaire n'a été jugée avec plus de réflexion et de connaissance.

Mais dans le rapport qu'ont ensemble les livres des deux Testaments, il y a une différence à considérer : c'est que les livres de l'ancien peuple ont été composés en divers temps. Autres sont les temps de Moïse; autres ceux de Josué et des Juges, autres ceux des Rois: autres ceux où le peuple a été tiré d'Égypte, et où il a reçu la Loi; autre ceux où il a conquis la terre promise; autres ceux où il y a été rétabli par des miracles visibles. Pour convaincre l'incrédulité d'un peuple attaché au sens, Dieu a pris une longue étendue de siècles durant lesquels il a distribué ses miracles et ses prophètes, afin de renouveler souvent les témoignages sensibles par lesquels il attestait ses vérités saintes. Dans le nouveau Testament il a suivi une autre conduite. Il ne veut plus rien révéler de nouveau à son Église après Jésus-Christ. En lui est la perfection et la plénitude; et tous les livres divins qui ont été composés dans la nouvelle alliance l'ont été au temps des apôtres.

C'est-à-dire que le témoignage de Jésus-Christ, et de ceux que Jésus-Christ même a daigné choisir pour témoins de sa résurrection, a suffi à l'Église chrétienne. Tout ce qui est venu depuis l'a édifiée; mais elle n'a regardé comme purement inspiré de Dieu que ce que les apôtres ont écrit, ou ce qu'ils ont confirmé par leur autorité.

Mais, dans cette différence qui se trouve entre les livres des deux Testaments, Dieu a toujours gardé cet ordre admirable de faire écrire les choses dans le temps qu'elles étaient arrivées, ou que la mémoire en était récente. Ainsi ceux qui les savaient les ont écrites; ceux qui les savaient ont reçu les livres qui en rendaient témoignage les uns et les autres les ont laissés à leurs descendants comme un héritage précieux; et la pieuse postérité les a conservés.

C'est ainsi que s'est formé le corps des Écritures saintes tant de l'ancien que du nouveau Testament: Écritures qu'on a regardées, dès leur origine, comme véritables en tout,

comme données de Dieu même, et qu'on a aussi conservées avec tant de religion, qu'on n'a pas cru pouvoir sans impiété y altérer une seule lettre.

C'est ainsi qu'elles sont venues jusqu'à nous, toujours saintes, toujours sacrées, toujours inviolables; conservées les unes par la tradition constante du peuple juif, et les autres par la tradition du peuple chrétien, d'autant plus certaine qu'elle a été confirmée par le sang et par le martyre tant de ceux qui ont écrit ces livres divins, que de ceux qui les ont reçus.

Saint Augustin et les autres Pères demandent sur la foi de qui nous attribuons les livres profanes à des temps et à des auteurs certains (1). Chacun répond aussitôt que les livres sont distingués par les différents rapports qu'ils ont aux lois, aux coutumes, aux histoires d'un certain temps, par le style même qui porte imprimé le caractère des âges et des auteurs particuliers; plus que tout cela, par la foi publique et par une tradition constante. Toutes ces choses concourent à établir les livres divins, à en distinguer les temps, à en marquer les auteurs; et plus il y a eu de religion à les conserver dans leur entier, plus la tradition qui nous les conserve est incontestable (2).

Aussi a-t-elle toujours été reconnue, non-seulement par les orthodoxes, mais encore par les hérétiques, et même par les infidèles. Moïse a toujours passé dans tout l'Orient, et ensuite dans tout l'univers, pour le législateur des Juifs, et pour l'auteur des livres qu'ils lui attribuent. Les Samaritains, qui les ont reçus des dix tribus séparées, les ont conservés aussi religieusement que les Juifs leur tradition et leur histoire est constante, et il ne faut que repasser sur quelques endroits de la première partie (3) pour en voir toute la suite.

(1) AUG. cont. Faust. lib. x1, c. 2; xxxII. 21; xxxIII. 6; t. VIII, col. 218, 462 et seq. — (2) IREN. adv. Hæres. lib. III, cap. 1. 2, p. 173, etc. TERTUL. adv. Marc. lib. 1v, c. 1. 4, 5. AUG. de Utilit. cred. cap. III, XVII, n. 5, 35; tom. VIII, col. 48, 68. Cont: Faust. Manichæum, lib. XXII, cap. 79; XXVIII. 4; XXXII, XXXIII; ibid. col. 409, 439 et seq. Cont. adv. Leg. et Proph. lib. 1, c. xx, n. 39, etc. ibid. col. 570.(3) Voyez ci-dessus, Ire part. Époques VII, VIII, IX; an du monde 3000, et de Rome 218, 305, 604, 624, etc.

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