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questré M. le préfet du département du Bas-Rhin; de Schaller, d'avoir fait arrêter et détenu M. le colonel Leboul; ét Vaudrey de s'être rendu l'auteur de ces faits en mettant à la disposition de ceux qui les ont commis une partie des soldats placés sous ses ordres;

» 40 Eléonore Brault, veuve Cordon, de s'être rendue complice du premier fait, en y provoquant par des machinations ou artifices coupables, et en assistant les auteurs dans les actes qui l'ont préparé ou facilité ;

» 5o Ladite Eléonore Brault et Frédéric de Bruc, d'avoir, par une intention d'agir, arrêtée et concertée entre plusieurs personnes, pris part au complot dont les attentats du 30 octobre ont été l'exécution;

» 6° Frédéric de Bruc, d'avoir fait au général Exelmans une proposition non agréée de prendre part audit complot;

» 7° Parquin, de Quérelles, de Gricourt, de Persigny et Lombard, d'avoir ledit jour porté publiquement un uniforme qui ne leur appartenait point;

» Crimes et délits connexes prévus par les art. 87, 88, 93, 341, 59, 60, 89 et 259 du Code pénal.

Les audiences, à partir du 6 jusqu'au 12 janvier, sont consacrées à l'audition des témoins; ils n'apprennent rien de nouveau sur les faits généraux. C'est pourquoi nous nous bornerons à rapporter la déposition du colonel Tallendier, l'un de ceux qui ont le plus énergiquement contribué à réprimer la conspiration du 30 octobre 1836.

Ce témoin, âgé de quarante-six ans, aujourd'hui colonel du 18° de ligne, était alors lieutenant-colonel du 46°, dans la caserne duquel le jeune Bona. parte et ses complices furent arrêtés; il s'exprime ainsi :

« J'ai connu le colonel Vaudrey à l'époque de l'événement qui m'amène ici. Je remplaçais mon beau-frère dans le commandement du régiment. Le 30, vers les six heures, M. d'Aigremont, capitaine-adjudant de place, vint me prévenir qu'un mouvement militaire avait lieu dans la ville, dans le but de proclamer un des membres de la famille de Napoléon. Surpris autant qu'il est possible de l'être, je dis au capitaine: Allez à la citadelle, que les troupes soient en armes et prêtes a marcher.

M. de Franqueville survint alors, et me répéta ce qu'on venait de m'apprendre. J'achevai de m'habiller, et je descendis. Je rencontrai dans la rue le capitaine Hormer; mais je ne pris pas la peine de l'écouter, et je continuai ma

course.

» J'arrivai à la caserne par la grille extérieure. Tout le côté droit de la caserne était occupé par les artilleurs du 4, le colonel, le prince et d'autres officiers à leur tête. Le côté gauche par des soldats du 46°. Quand ils m'aperçoivent : Voilà notre colonel! disent-ils; aussitôt l'hésitation cesse ou plutôt se change en rage. Je donne l'ordre d'arrêter le prince qui est devant eux. Ils se mettent en devoir d'exécuter cet ordre, mais ils étaient trop peu nombreux. En ce moment arriva fort à propos le major Salleix. Major, lui dis-je, réunissez le plus de monde que vous pourrez, faites battre la caisse. Les hommes descendirent peu à peu, alors ce furent des cris de rage, et je n'eus plus à exciter mes hommes, mais seulement à les contenir.

» On m'amena dans le même moment le commandant Parquin, sans chapeau, en habit de général : Vous ne devez pas porter les épaulettes de général! lui dis-je, Alors on lui arracha l'une de ses épaulettes, je lui arrachai l'autre et je donnai ordre qu'il fût conduit au corps-de-garde.

» On avait en même temps arrêté dans la cour les autres insurgés qui avaient formé le cortège du prince. Le prince lui-même venait d'être arrêté. Il ne restait plus que le colonel Vaudrey, et ce n'était pas le moins difficile, parce que ses canonniers le défendaient avec acharnement. On se jeta sur lui, et une lutte commença. En même temps le peuple qui était sur les remparts lançait des pierres sur nos hommes, et nous faisait beaucoup de mal. Alors, moi, dans un moment de rage, je m'écriai Je ne trouverai donc pas un paquet de cartouches sous ma main! Un officier qui était près de moi, me dit à l'oreille Colonel, j'en ai un paquet dans ma chambre.- Courez, courez le chercher! Les pierres continuaient à pleuvoir sur nous. Bientôt je pus faire charger les armes et fis tirer quelques coups de fusil sur les assaillants. Cette mesure fit un effet merveilleux, et bientôt tous s'enfuirent, à l'exception

d'un seul individu qui resta debout à la même place à nous harceler.

»Je courus au colonel qui se défendait toujours. Colonel, lui dis-je en lui mettant les mains sur le collet, rendezvous ou vous êtes mort. Non, je ne me rends pas, mes canonniers ne le souffriront pas.-Non, non, répétèrent les canonniers. Alors ils prirent une attitude menaçante; plusieurs canons de fusil se dirigerent sur moi. — Rendezvous, dis-je encore au colonel. - Non, je ne me rendrai pas. Alors une idée me vint, je fis faire silence autour de moi, et je dis à l'oreille du colonel : Vous ne pourriez échapper maintenant. On croit dans la ville que ce mouvement a été tenté en faveur de Charles X et l'on est furieux contre vous.- -Qu'il me crût ou ne me crût pas, le colonel se rendit alors, et me dit : Vous voyez que rien ne pourrait plus tenter la fidélité de vos soldats. Engagez-les à se retirer. Il se tourne ensuite vers ses canonniers et leur dit : Canonniers, retirez-vous !

»Je fis mettre le colonel dans la chambre de la femme d'un officier au 3e étage. Je fis ensuite une courte allocution aux soldats du 4°, qui sortirent en bon ordre de la caserne et en criant: Vive le roi! avec le plus grand enthousiasme. »

Cette déposition est accueillie avec des sentiments divers par l'auditoire.

M. Vaudrey. Le témoin m'a pris la main d'une manière amicale, mais ce n'est pas à ses menaces que j'ai cédé. J'étais entouré d'hommes armés, comme lui, et je pouvais me défendre.

M. Tallendier. J'affirme que, lors de la seconde lutte, j'ai saisi M. Vaudrey.

M. Vaudrey. — J'affirme qu'aucune main ne se posa sur ma poitrine.

M. Tallendier.— J'ai été moi-même tenu par quatre ou cinq canonniers. M. Vaudrey. Je n'ai pas été saisi au collet. M. Tallendier est le seul qui dise cela; il ne m'eût pas saisi impunément.

Le commandant Parquin. — Lorsque je me suis rendu, j'ai été conduit au quartier. Il est bien vrai que M. Tallendier m'a insulté ; il est très-vrai qu'il m'a arraché mes épaulettes; il a pu le faire impunément, j'étais son prisonpier.

Le colonel Tallendier. — Je ne puis répondre à cette provocation.

Me Thierriet. Ce n'est point une provocation.

Me Parquin, avec feu. C'est l'expression d'un sentiment naturel, vrai et légitime. (Vive agitation.)

La liste des témoins étant épuisée, M. le procureur-général Rossée prend la parole à l'audience du 12, et, dans un long réquisitoire, il soutient avec force l'accusation, tout en disculpant le jeune Louis Bonaparte. Il s'attache à démontrer que le roi avait le droit de lui faire grâce, et qu'il a pu user de ce droit sans que la culpabilité de ses complices fût en rien diminuée. Il ter mine en ces termes :

«Quelle est la position de Louis Bonaparte? Il a été banni de France par une de ces lois que la politique seule peut justifier. Louis Bonaparte n'a pas su comprendre cette nécessité; il s'est cru frappé injustement. Aigri par la douleur et le mécontentement, il a conspiré. Les intrigants auront cherché à exploiter le mécontentement de ce jeune homme ; une révolution amenant toujours des combinaisons nouvelles, les ambitieux auront saisi l'occasion qui s'offrait. Doué d'une imagination impressionnable, il a cru qu'il était appelé à succéder à son oncle.

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C'est ainsi qu'il voulait passer en Pologne, lorsque la chute de Varsovie arrêta ses pas. Il avait oublié que la tâche que Napoléon avait entreprise, il ne l'avait accomplie que par cette force qui est le génie? Qu'avait-il, lui? Rien que ses prétentions, rien que les sugges tions de son entourage. Il rencontre le capitaine Raindre, qu'il ne connais sait pas; il lui fait des ouvertures; il écrit au général Voirol, qu'il ne connaissait pas, et lui donne un rendezvous; au général Exelmans, qu'il ne connaissait pas, et lui demande aussi un rendez-vous n'est-il pas évident qu'il était fasciné par des gens intéressés à le tromper?

>> 11 cherche les complices sans les trouver! Etait-il complice celui qui, joignant la félonie à la trahison, pousse son régiment à l'oubli de tous ses devoirs? Etait il complice, ce commandant Parquin qui suit partout le prince, et lutte partout avec lui? Etait-il complice, ce Laity qui usurpe le comman

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dement de son bataillon? Etaient-ils complices, ceux qui se présentèrent devant la Finkmatt! Et quand on se rappelle que ces accusés sont Français, l'indignation le dispute à la douleur. Jamais la justice n'a eu à frapper un acte plus coupable.

»Si le prince a été coupable, les accusés ne l'ont pas été moins. S'il s'était évadé, s'il était mort, il n'en faudrait pas moins juger les autres accusés; ainsi vous n'avez pas à vous occuper d'un acte de clémence sur lequel d'ailleurs il n'y a qu'une voix. S'il s'agissait d'une bande de malfaiteurs, acquitteriez-vous parce que le chef serait absent?

Nous parlera-t-on d'entraînement? L'entraînement ne peut servir de justification, car c'est toujours à un entraî nement que cède le criminel! Veut-on parler d'une fascination morale? Mais d'abord le prince était-il un héros ? Comment concevoir qu'un jeune homme, qui n'avait que son nom, ait pu produire une fascination? Non, il n'y a pas eu d'abord de spontanéité, il y a eu préméditation.

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Un acquittement serait un crime, nous n'hésitons pas à le dire. Si l'impunité était acquise au coupable. les magistrats n'auraient plus qu'à voiler le temple de la loi, et les bons citoyens devraient se résoudre à toutes les calamités.»

Au commencement de l'audience du 44, M. Gérard, procureur du roi à Strasbourg, se lève, et au nom de l'accusation prononce un réquisitoire contre les accusés Vaudrey, Laity et Parquin. Ensuite, M. Karl, substitut, soutient l'accusation contre MM. de Gricourt, de Quérelles et de Bruc.

Me Ferdinand Barrot, prenant ensuite la parole pour le colonel Vaudrey, commence par examiner à quel titre le chef du complot, le prince Louis a été soustrait à la justice, et traite d'illégale l'ordonnance qui lui a fait ouvrir les portes de la prison où sont restés ses complices.

Le défenseur entreprend ensuite le récit de la vie du colonel, qu'il dépeint comme un des plus zélés à organiser l'insurrection à Strasbourg, en 1830. Arrivant au reproche fait à son client d'avoir trahi son serment, Me Barrot s'exprime ainsi sur le serment politique :

« Nous sommes fâchés de n'avoir pas plus d'éloges à faire au serment politique. Le serment politique est tombé dans le domaine des transactions humaines. Tant de gens sont si habitués à en prêter qu'on n'en a pu faire le texte d'une raison morale. (On rit.) Si un homme n'avait jamais prêté qu'un serment, je lui permettrais de venir insulter le colonel Vaudrey. »

En résumé, l'avocat tire son principal moyen de défense de l'enlèvement du prince Louis Bonaparte, qui, s'il était présent, déclarerait, que lui seul est responsable, et qu'il a trompé les accusés pour les entraîner dans sa tentative.

Les autres défenseurs, entendus dans les audiences du 15, du 16 et du 17, insistent aussi plus ou moins sur ce moyen.

Dans cette même audience du 17, M. Devaux, avocat-général, prend la parole pour répliquer.

Me Parquin répond en ces termes au nom de tous les accusés :

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Messieurs, j'étais venu défendre mon frère, mon cœur ne m'avait pas trop mal inspiré ; j'avais trouvé des accents qui vont à l'âme, et vous avez écouté ma voix avec une indulgente bonté. Mais voilà que le vœu de mes obligeants confrères de Strasbourg et de Paris me charge de reprendre la parole au nom de tous. Cet honneur insigne n'a semblé dangereux en même temps que je l'apprécie comme je dois le faire. Que mon zèle supplée au temps qui m'était nécessaire pour apprêter de nouveau, pour aiguiser mes armes. Que par la seule force de mon droit je reste victorienx de ce nouveau combat. Par la seule force de mon droit! personne ne se méprendra sur le sens de mes expressions. On nous a reproché de vouloir à tout prix trouver les accusés innocents: non, Messieurs, telle n'a pas été notre prétention; leur faute, nous la blâmons aussi sévèrement que qui que ce puisse être, mais la question n'est pas là. Si une haute pensée n'avait voulu que le principal coupable ne relevât, après sa capture, que de la générosité royale, si le prince Louis avait été assis sur ces bancs, parmi les autres accusés, notre rôle se fût réduit à peu de chose. Les faits sont patents, et nous n'aurions à dire que quelques pa

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Me Parquin se demande si M. l'avocat-général a bien déterminé le droit de grâce, et il répond négativement.

Au reste, continue-t-il, s'il y avait eu grâce, les lettres de grâce doivent exister; où sont-elles? La cour de Colmar les a-t-elle entérinées? Non; il y a plus, les lettres de grâce sont toujours contresignées par le garde-des-sceaux qui appose sa signature après celle du roi. Où est cette signature? Le général Voirol s'est transporté à la prison porteur d'une lettre du ministre de la guerre; le préfet s'est transporté à la prison avec une lettre du ministre de l'intérieur ; voilà bien deux lettres de ministres étrangers à l'administration de la justice. On ne rencontre nulle part la présence du garde-des-sceaux. Me Parquin s'élève avec force contre la manière dont on a traité le prince absent. Comment n'a-t-il pas répugné au ministère public de prononcer la moindre parole qui pût retentir au dehors de cette enceinte et affliger le prince audelà des mers? Si la presse recueillait les paroles malveillantes de l'accusation, le prince ne pourrait-il pas dire: Qu'estce qu'un gouvernement semblable? Il refuse de m'entendre, il refuse de me laisser asseoir au banc des accusés et

présenter ma justification, et lorsque j'ai dû m'expatrier, on me frappe, on me déchire. »

Me Parquin donne lecture de quel. ques lignes d'une lettre du prince, commencée à Paris le 11 novembre et close le 15 à Lorient.

. Malgré mon désir de rester avec mes compagnons d'infortunes et de par. tager leur sort, le roi, dans sa clémence, a ordonné que je fusse transporté en Amérique. J'apprécie comme je dois la bonté du roi, mais je regrette bien vivement de ne pouvoir comparaître à la barre des tribunaux pour expliquer les démarches à la suite desquelles j'ai entraîner mes amis à leur perte.

» Certes nous sommes tous coupables, mais le plus coupable c'est moi. »

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C'est ainsi que s'exprime ce jeune homme qu'on traitait d'ingrat et d'e goïste. Il est reconnaissant des bontes du roi. Le jury restera-t-il en arrière de cette générosité ? »

Me Parquin suppose que le jury alsacien aurait bien pu, par reconnaissance pour Napoleon, absoudre son neveu. Dans ce cas aurait-il osé condamner les complices?

« Je ne tarderai pas, dit le défenseur en terminant, je ne tarderai pas à quit ter le beau pays d'Alsace. Bientôt je serai de retour à Paris. Je rentrerai dans la capitale le cœur plein de recon. naissance du tendre intérêt que l'on m'a témoigné dans ce pays. J'ai rencontré des hommes de tous rangs, de toutes nuances, de toutes opinions; partout on a compris ma position, partout j'ai recueilli les plus précieux suffrages. Mon cœur reconnaissant ne les oubliera jamais. Prenez votre part de cette reconnaissance; faites qu'il ne se mêle pas de poignants regrets à ce bonheur.

» Et toi, ma vénérable mère, qui a quatre-vingt-deux ans, a retrouvé des jours sans repos et des nuits sans sommeil; toi qui accuses le ciel de ne t'avoir pas enlevée plus tôt à la terre, toi dont les mains suppliantes redemandent un fils, je t'entends, je te vois... tu m'appelles... Parquin.. Qu'as-tu fait de ton frère ?... Ah! ma bonne, ma vénérable mère, sèche tes pleurs... ton fils! un jury d'Alsace te le rendra.

Tout l'auditoire est en larmes, et c'est d'une voie émue que le président lui-même ordonne la traduction de cette réplique éloquente.

L'audience est levée à deux heures et renvoyée au lendemain pour le rè sumé et le prononcé de l'arrêt.

Le 48, les forces militaires sont doublées dans la cour du palais.

A neuf heures et demie l'audience est ouverte.

M. le président. Les accusés ontils quelque chose à ajouter pour leur défense?

Les accusés s'inclinent.

M. le président annonce que les débats sont terminés, et en présente le résumé. Un grand nombre de personnes quittent la salle.

Après la traduction, M. le président donne lecture des questions que les jurés auront à résoudre.

Ces questions sont au nombre de vingt-quatre, dont six relatives au colonel Vaudrey.

Au moment où les jurés entrent dans la salle des délibérations, quelques personnes de la tribune publique crient Acquittez! acquittez!

M. le président. Qu'on fasse sortir les interrupteurs!

Me Parquin, se levant et se tournant vers cette tribune: Mais vous nuisez à la cause des accusés plus que vous ne la servez.

Me Thierriet. Nous protestons contre ces cris de toute notre âme. La salle est un instant agitée par cet incident. On blâme énergiquement cette démonstration indécente.

Au bout de vingt-deux minutes de délibération, le jury rentre en séance.

M. le président déclare qu'il fera arrêter tous ceux qui manifesteront leur approbation ou leur improbation.

Le chef du jury. M. Vaiss, lit la déclaration suivante :

Sur mon bonneur et ma conscience, devant Dieu et devant les hommes, sur toutes les questions, la réponse du jury est: Non, les accusés ne sont pas coupables.

Aussitôt un grand mouvement de satisfaction se manifeste dans toutes les parties de la salle. Les accusés sont amenés, et l'aspect des physionomies riantes leur apprend d'avance la décision des jurés. Madame Gordon est fort tremblante, bien qu'on lui ait annoncé sur le champ son acquittement.

Les accusés se contiennent cependant; mais à peine le greffier a-t-il prononcé le verdict, qu'ils embrassent leurs défenseurs avec effusion. Malgré la défense du président, ce cri résonne avec force dans la salle: Vive le jury! vive le jury d'Alsace !

Les mêmes transports recommencent dans la cour extérieure du palais de justice. On entoure les jurés, on les félicite, et ils n'échappent qu'avec peine à ces chaleureuses démonstrations.

La foule se porte alors dans la rue du Fil, contigue au palais, et sur laquelle donne la porte de la prison; les accusés, pour se soustraire à ces manifestations, montent en voiture; mais ils sont suivis par le peuple, qui les saluc des acclamations les plus vives.

Le bruit courait au palais que le verdict avait été rendu à la majorité de huit voix contre quatre.

19. Paris. Théâtre-Francais, Première représentation de LA CAMARADE➡ RIE, OU LA COURTE ÉCHELLE, comédie en cinqactes et en prose, par M. Scribe.

Un fort joli vaudeville, le Charlatanisme, que M. Scribe fit jouer au Gymnase, il y a une dixaine d'années, contenait en germe la grande comédie en cinq actes qu'il vient de donner au Théâtre Français. Cette fois, M. Scribe met en scène une coterie d'intrigants et d'égoïstes qui s'encensent et se vantent mutuellement à qui mieux mieux, et dont l'occupation est en ce moment de porter à la députation un sot protégé par la femme d'un pair de France. D'un autre côté, un jeune homme d'un vrai mérite, mais modeste, et qui s'effarouche à l'idée de la moindre intrigue, vise aussi à se faire nommer député, et y parvient sans autre appui que l'affection de deux jeunes femmes, aprés diverses péripéties fort amusantes. Voila le fond du sujet. Plusieurs personnages, bien que forcés, et touchant parfois à la caricature, ont souvent déridé le public: tels sont un pair de France qui tombe malade dès que s'ou vre un proces politique ou qu'il s'agit de quelque discussion compromettante; un médecin qui fait des députés pour se faire nommer professeur de la Faculté ; le fils d'un marchand de bois enrichi qui se fait une réputation comme avocat, en se faisant l'amphitryon des camarades; un certain comte qui s'égale tout simplement à Montesquieu, et vise à l'académie des sciences morales et politiques; enfin la femme du pair de France, qui a véritablement le génie de l'intrigue, et forme la cheville ouvrière de la pièce. Le succès n'a

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