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<< un paon tient la patte droite en l'air; il pose l'autre au milieu d'une flamme ». Un beau dauphin s'approche du feu dont il se rit comme une salamandre. Guglielmo porte au poing un autour. Une nombreuse escorte à cheval et armée de lances l'accompagne. Le chevalier inconnu en heaume secret (coll' elmo secreto) vient le dernier.

Les portes sont closes.

On compte douze bannières.

Vingt et un chevaliers luttent un à un avec des chances diverses contre un pareil nombre de champions successifs : Bonifarte contre Pier Vespucci; Dionigi contre Giovanni Ubaldino; Laurent, qui est descendu de Falsamico pour monter sur Baiardo contre Borromei; Carlo da Forme contre Guglielmo de' Pazzi; Benedetto Salutati contre un des barons envoyés par Bernardino da Todi; Braccio de' Medici contre Laurent; Francesco contre Pieranton de' Pitti; Bracciolino contre Pier Pitti; Riccio contre l'autre baron envoyé par Bernardino; Silvestro Benci contre Ubaldino; Laurent (pour la troisième fois) contre Carlo da Forme; Benedetto contre Francesco de' Pazzi; Braccio contre Pier Pitti; Pier Vespucci contre Carlo da Forme; Riccio contre Bracciolino; Pierantonio contre Dionigi; Carlo Borromei contre Guglielmo de' Pazzi, dont le cheval Fellone « semble danser la ronde ».

Il soufle, et mord, et tire à l'étrier,
Tantôt fait le dragon, puis la girafe!

Braccio se mesure avec Carlo da Forme; Jacopo avec le terrible Guglielmo; Laurent avec Benedetto Salutati; Dionigi avec Borromei... Mais, dans ces luttes de couples, réglées par le programme, interviennent des mêlées secourus par des frères d'armes, les preux s'escriment dans une vaillante confusion où Laurent fait merveille.

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Il change deux fois de cheval.

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Dunque la giostra pareva confusa,

Chè dov'è moltitudin, sempre avviene;
Così tutte le cose al mondo s' usa,
E sempre chi fa tosto non fa bene.

Ma dirò quel che si potre' pur dire,
Chè molto santa cosa è l'obbedire1.

Ils semblent barons de Paris,
Tant la terre tremble.

Baron di Parigi!... Je flaire un peu l'hyperbole ! Ces combats inspirés par la lecture des Reali de France me semblent l'imitation adoucie, à armes courtoises, des tournois décrits par ces poèmes chevaleresques, et comme un avant-goût des carrousels si à la mode au dix-septième siècle, et qui furent la transformation dernière des rudes joutes du Moyen-Age. A la fin de la lutte, on voit Laurent jeté par terre avec son destrier

1. «Doncques la joute paraissait confuse, ce qui arrive partout où il y a multitude; il en advient pareillement dans toutes les choses du monde, et toujours qui fait vite ne fait pas bien..... Mais je dirai ce qui peut toutefois se dire, que moult sainte chose est l'obéir. >>

du heurt de celui de Francesco de' Pazzi. Au milieu de l'émotion générale, et avant qu'on ait relevé sans blessure le prince de la jeunesse florentine, le poète, digne frère de Luigi, place un épisode grotesque : une sorte de bouffon, Cino,

...

Vedendo LORENZO non si rizza,
Si pose a bocca un gran fiasco di vino,
E bevvel tutto quanto per la stizza;
Ma poi che vide, che 'l suo paladino
Era già dritto, e come un barbio guizza,
Ricominciò a suonar per festa il corno
Pur da gambassi molto chiaro il giorno.
A ogni giuoco Cino volea bere.

<< Voyant que Laurent ne se relève, il se pose à la bouche un grand flacon de vin et le boit tout de malerage; mais, après qu'il a vu que son paladin est déjà debout, et qu'il frétille comme un barbillon, il recommence à sonner joyeusement de la trompe et fête allègrement le jour par ses gambades (?). » A tout jeu, Cino voulait boire.

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>> Les jouteurs ôtèrent le heaume de leur tête et mirent fin à si longs labeurs; au JOUVENCEAU fut donné avec grande fête le premier honneur de Mars par le laurier : l'autre fut donné à Charles Borromée. Adoncques ils attribuèrent justement cela, le laurier à Laurent, la renommée à la Renommée, et du balcon toutes les dames descendirent.

» Et maintenant, ô mon Laurent, tu as mérité la guirlande de fleurettes nouvelles; maintenant a son cours la foi acceptée et donnée dans la maison de ton Braccio Martelli...

>> On marquera ton âge avec une pierre blanche : puisses-tu être heureux longtemps ! Nous toucherons si doucement notre luth qu'Eurydice sera ravie à Pluton. Nous te ferons ici divin,

et sacré dans le ciel, et nous t'élèverons une statue comme à Bélus.

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Émile, et vous, Marcellus, Scipion, et toi qui délivras le peuple esclave et affranchis le Capitole d'un joug si pesant, gardez sans envie dans Rome la gloire de vos triomphes. Car tu fus, O mon Laurent (Lauro), le principe de la gloire qui t'élève au sommet, qui apporte honneur, victoire et renommée à la haute et digne Maison des Médicis. »

Après ces carrousels, forme adoucie du tournoi chevaleresque, se placeraient, s'ils n'étaient pas mentionnés dans l'analyse de l'Orphée 1, les débuts de l'opéra moderne. N'oublions pas le feu d'artifice tiré en 1450 aux frais du grand Cosme par Bartolomeo Capolini, une des plus vieilles illustrations de la pyrotechnie.

1. Par POLITIEN; voy. page 17 et suiv.

CHAPITRE XXI.

TRIOMPHES ET CHANTS CARNAVALESQUES.

On s'est un peu étendu dans la description détaillée de ces spectacles et de ces fêtes. C'est que ce ne sont pas de simples réjouissances patriciennes ou populaires, mais comme la traduction animée d'un état particulier des esprits, dans une cité vivant d'une vie esthétique intense, à laquelle nul n'est étranger à aucun degré de l'échelle sociale. Satisfaire à ce besoin devient là, comme jadis à Athènes, une préoccupation des hommes d'État. Dans cette pensée sans doute, à l'instar du dramaturge grec, qui est en même temps le metteur en scène et le régisseur des interprètes de son œuvre, le Magnifique mène par la ville des chœurs de masques exécutant des chants Carnascialeschi. Il est le créateur du genre, l'inaugurateur de cette poésie folle et barbouillée de lie, comme la muse de Thespis, agreste et même un peu poissarde, ou parfois plus que grivoise.

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Noi abbiam con noi Baccelli,

Lunghi, e teneri da ghiotti;

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