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petite Tartarie. La famine et la peste se réunirent au carnage pour les dévaster, et il fallut apporter, des contrées lointaines, tout ce qui étoit nécessaire à l'approvisionnement d'une foule d'hommes. Potemkin assiégea Oczackow au milieu des frimats les plus rigoureux; les habitans, pour diminuer l'atteinte du froid, avoient été forcés de se creuser des huttes souterraines; le général russe fit donner l'assaut, livra la ville, pendant trois jours, au pillage, et en fit passer la garnison et les habitans au fil de l'épée. Cette horrible exécution coùta la vie à 25,000 Turcs ; mais elle

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rine II de s'emparer de la Crimée, et de jeter les fondemens de la ville de Cherson. Elle fut fondée en 1778, sur les bords du Nieper, à dix lieues d'Oczackow; bientôt apres elle contenoit plus de 40,000 habitans et un superbe chantier pour la marine. Potemkin introduisit dans la Crimée plusieurs arbres fruitiers, et près de Soudak la distillation de l'eau de vie. On lui dut la grande manufacture de verrerie et de glace établie à Pétersbourg, et qui est devenue supérieure pour la grandeur et la beauté des ouvrages à celles de Venise et de Paris. Potemkin amateur des arts, notamment de la musique, se faisoit suivre par-procura à Potemkin un présent de tout par quatre-vingt musiciens. 100,000 roubles, le titre d'HotPossesseur de terres immenses man ou chef des Cosaques, et de plusieurs cassettes remplies un bâton de commandement garde pierres précieuses, et de bil-ni de diamans et entouré d'une lets de banque de toutes les na- branche de laurier. Les faveurs tions commerçantes de l'Europe, de l'impératrice ne se bornèrent ily réunit les riches dépouilles des pas là; au mois de mars 1791, princes Lubomietski et Sapieha, Potemkin revint à Pétersbourg en Podolie et en Lithuanie, le jouir de sa gloire. Sa souveraine gouvernement de la Tauride et lui prodigua les fetes, lui fit don le grade de grand amiral de la du palais de Tauride et d'un hamer Noire. Il manquoit à son am- bit brodé en diamans, estimé bition le cordon de l'ordre de 200,000 roubles. Potemkin étala St. George. Pour l'obtenir, il fal- alors le luxe le plus extrême. Chaloit avoir commandé une armée cun de ses repas coûtoit 8oo rouen chef et avoir remporté une bles; on y trouvoit les mets les victoire; Potemkin fit renouveler plus rares, et des cerises au cœur la guerre contre la Turquie en de l'hiver, de l'hiver, qu'on avoit payées 1787. Placé alors à la tête d'une un rouble la pièce. Il se renarmée de 150,000 hommes, ayant dit bientôt au congrès d'Yassi, sous ses ordres plusieurs autres qui devoit assurer la paix entre la corps d'armée commandés par Russie et la Turquie; mais il ne put des généraux de marque, revêtu s'occuper long-temps des négod'un pouvoir sans bornes, régis- ciations, ayant été attaqué de la sant despotiquement le départe-maladie qui y régnoit. Il avoit ment de la guerre, tout fit crain- auprès de lui Tinmann et Menat, dre un instant qu'il n'allât con- les deux plus célèbres médecins quérir des états pour s'en décla- de Pétersbourg, mais il dédaigna clarer lui-même le souverain. leurs conseils et ne voulut point Bientôt, de nombreux combats borner son intempérance excesinondèrent de sang les plaines sive. On dit qu'il mangeoit à son d'Oczackow, du Kuban et de la déjeûner une oie entière ou u

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enlever par la police et conduire en prison à Pétersbourg; mais il oublia la barbe et le marchand, qui languit six mois dans les fers Enfin sa liberté lui est rendue; il retourne malade à Moscow, y trouve sa femme morte de chagrin et sa maison ruinée. » M. de Ségur, ambassadeur de France à Pétersbourg, trace ainsi le portrait de Potemkin: « Cet homme fut l'un des plus extraordinaires de son siècle. Un hasard singulier le créa pour l'époque qui lui convenoit: il rassembloit dans sa personne les défauts et les avantages les plus opposés. Avare et magnifique, despote et populaire, dur et bienfaisant, orgueilleux et caressant, politique et confiant, libertin et superstitieux, audacieux et timide, ambitieux et indiseret, prodigue avec ses parens, ses maîtresses et ses favoris, il ne payoit souvent ni sa maison, ni ses créanciers. Rien n'égaloit l'ac tivité de son imagination, ni la paresse de son corps. Aucun danger n'effrayoit son courage; aucune difficulté ne le faisoit renoncer à ses projets; mais le succès le dégoûtoit de ce qu'il avoit

jambon buvoit une quantité | énorme de vin et de liqueur de Dantzick, et dînoit ensuite avec la même voracité. Huit jours avant sa mort, le grand visír lui envoya un homme de confiance pour le prier de se relâcher sur quelques articles de ses propositions de paix, parce que s'il étoit dans la nécessité d'y souscrire, il craignoit de signer en même temps son arrêt de mort. Malgré cette considération, Potemkin le refusa. L'air d'Yassi lui paroissant insalubre, il voulut se rendre à Nicolaeff; mais à peine eut-il fait trois lieues qu'il se trouva plus mal. Il descendit de voiture sur le grand chemin, et mourut sous un arbre le 15 octobre 1791. Il fut aussitôt transporté à Cherson, où l'impératrice destina 100,000 roubles pour lui ériger un mausolée. Despote violent, impérieux, il eut du courage et de l'audace. «< Son ambition, dit Castera, fut inconstante et capricieuse. Il voulut quelque temps être duc de Courlande et roi de Pologne. Bientôt après, il trouva ces souverainetés trop subordonnées, et leur préféra l'espoir de chasser les Ottomans de l'Europe, pour fon-entrepris. I fatiguoit l'empire der un nouvel empire sur les débris du leur. Dès les premiers instans de sa faveur, il s'accoutuma à traiter arbitrairement tout ce qui l'entouroit. Vêtu d'une simple robe de chambre, les jambes nues et étendu sur un canapé, il recevoit les courtisans et les ministres étrangers sans daigner leur offrir de s'asseoir; et plus d'une fois il se permit de porter une main insolente sur les grands qui ne vouloient pas ramper devant lui. Il avoit quelquefois des bizarreries cruelles. Un honnête marchand de Moscow portoit une très-longue barbe. Pour la faire voir à une dame, Potemkin le fit

par le nombre de ses emplois et par l'étendue de sa puissance, et il étoit lui même fatigué du poids de son existence, envieux de tout ce qu'il ne faisoit pas et ennuyé de ce qu'il faisoit. Il ne savoit ni goûter le repos, ni jouir de ses occupations. Tout en lui étoit décousu; travail, plaisir caractere, maintien; il avoit l'air embarrassé dans toutes les sociétés, et sa présence gênoit tout le monde. Il traitoit avec humeur ceux qui le craignoient, et caressoit ceux qui l'abordoient familièrement. Il promettoit toujours, tenoit peu et n'oublioit jamais rien. Personne n'avoit

entre eux la gloire des succès et la sévérité des reproches. Elle ne donnera point à Potemkin le titre de grand homme, mais elle le citera comme un homme extraordinaire; et si l'on veut le peindre avec vérité, on pourra le représenter comme le véritable emblême, comme une image vi

ropéen, du Tartare et du Cosaque; la grossièreté du onzième siècle, et la corruption du dixhuitième; la superficie des arts et l'ignorance des cloîtres; l'extérieur de la civilisation et beaucoup de traces de barbarie. Ce portrait peut paroître gigantesque; mais ceux qui ont connu Potemkin en attesteront la vérité. Cet homme avoit de grands défauts; mais sans eux, peut

moins lu que lui, et peu de gens étoient plus instruits. Il avoit causé avec des hommes habiles dans toutes les professions, dans toutes les sciences, dans tous les arts. On ne sut jamais mieux pomper et s'approprier le savoir des autres. Il auroit étonné, dans une conversation, un littérateur, un artiste, un artisan et un théo-vante de l'empire de Russie. Il logien. Son instruction n'étoit étoit, en effet, colossal comme pas profonde; mais elle étoit fort lui, rassemblant dans son esprit étendue. Il n'approfondissoit rien, de la culture et des déserts. On mais il parloit bien de tout. L'i-y voyoit de l'Asiatique, de l'Eunégalité de son humeur répandoit une bizarrerie inconcevable dans ses désirs, dans sa conduite, dans sa manière de vivre. Tantôt il formoit le projet de devenir souverain; tantôt il montroit le desir de se faire évêque ou même simple moine; il bâtissoit un palais superbe, et vouloit le vendre avant qu'il fût achevé. Un jour il ne rêvoit qu'à la guerre et n'étoit entouré que d'officiers, de Tartares et de Cosaques ; le len-être, il n'eût dominé ni sa souvedemain, il ne songeoit qu'à la politique; il vouloit partager l'empire ottoman, et mettre en mouvement tous les cabinets de l'Europe. Dans d'autres temps, ne s'occupant que de la cour, paré d'habits magnifiques, couvert de cordons de toutes les puissances, étalant des diamans d'une grosseur et d'une blancheur infinies, il donnoit sans sujet de superbes fêtes. Comme on voit passer rapidement ces météores brillans, dont l'éclat étonne, mais n'a rien de solide, Potemkin commença tout, n'acheva rien, dérangea les finances, désorganisa l'armée, dépeupla son pays, et l'enrichit de nouveaux déserts. La célébrité de l'impératrice s'est accrue par ses conquêtes. L'admiration fut pour elle; la haine pour son ministre. La postérité partagera peut-être

raine ni son pays. Le hasard le fit précisément tel qu'il devoit être pour conserver si long-temps son pouvoir sur une femme aussi extraordinaire. » Le prince de Ligne a ainsi tracé le portrait de Potemkin. « Je vois un commandant d'armée qui a l'air paresseux, et qui travaille sans cesse ; qui n'a d'autre bureau que ses genoux, d'autre peigne que ses doigts; toujours couché, et ne dormant ni jour ni nuit, parce que son excès de zèle pour la souveraine l'agite, toujours, et qu'un coup de canon qu'il u'essuie pas l'inquiète, par l'idée qu'il coûte la vie à quelques-uns de ses soldats. Peureux pour les autres, brave pour lui; s'arrêtant sous le plus grand feu d'une batterie pour y donner ses ordres; cependant plus Ulysse qu'Achille; inquiet avant tous

sous une grande apparence de dureté, très doux, en vérité, dans le fond de son cœur; fantasque pour ses heures, ses repas, son repos et ses goûts; you

les dangers, gai quand il y est; triste dans les plaisirs; malheureux à force d'être heureux, blâsé sur tout, se dégoûtant aisément, morose, inconstant, philosophe profond, ministre habile, poli-lant tout avoir comme un enfant, tique sublime ou enfant de dix sachant se passer de tout comme ans; point vindicatif, demandant un grand homme; sobre avec pardon d'un chagrin qu'il a cau- l'air d'un gourmand; rongeant sé; réparant vîte une injustice; ses ongles, ou des pommes, ou croyant aimer Dieu; craignant des navets; grondant ou riant, le diable, qu'il s'imagine être contrefaisant ou jurant, polisencore plus grand et plus gros sonnant ou priant, chantant qu'un prince Potemkin; d'une ou méditant; appelant, renmain faisant des signes aux fem- voyant, rappelant vingt aidesmes qui lui plaisent, et de l'autre de-camp sans leur rien dire ; supdes sigues de croix; les bras en portant le chaud mieux que percrucifix au pied d'une figure de sonne, en ayant l'air de ne songer la Vierge, ou autour du cou qu'aux bains les plus recherchés ; d'albâtre de sa maîtresse; rece- se moquant du froid, et en ayant vant des bienfaits sans nombre l'air de ne pouvoir se passer de de sa grande souveraine, les dis- fourrures; toujours sans caleçons, tribuant tout de suite; acceptant en chemise, ou en uniforme brodé des terres de l'impératrice, les sur toutes les tailles; pieds nus lui rendant ou payant ce qu'elle ou en pantoufles à paillons brodoit sans le lui dire; vendant et dés, sans bonnet ni chapeau rachetant d'immenses domaines c'est ainsi que je l'ai vu une fois pour y faire une grande colon- aux coups de fusils, tantôt en nade et un jardin anglais, s'en mauvaise robe de chambre avec défaisant ensuite; jouant tou- une tunique superbe, avec ses jours ou ne jouant jamais; ai-trois plaques, ses rubans, et des mant mieux donner que payer' ses dettes; prodigieusement riche sans avoir le sou; se livrant à la méfiance ou à la bonhomie, à la jalousie ou à la reconnoissance, à l'humeur ou à la plaisanterie; prévenu aisément pour ou contre, revenant de même; parlant théo-tueux ou séduisant, quand il se logie à ses généraux, et guerre à ses archevêques; ne lisant jamais, mais sondant tous ceux à qui il parle, et les contredisant pour en savoir davantage; faisant la mine la plus sauvage ou la plus agréable; affectant les manières les plus repoussantes ou les plus attirantes; ayant enfin tour à tour l'air du plus fier satrape de l'Orient ou du courtisan le plus aimable de Louis XIV;

:

diamans gros comme le pouce autour du portrait de l'impératrice; ces diamans sembloient placés là pour attirer les boulets : courbé, pelotonné quand il est chez lui, et grand, le nez en l'air; fier, beau, noble majes

montre à son armée, tel qu'Agamennon au milieu des rois de la Grèce. Quelle est donc sa magie? Du génie, et puis du génie, et encore du génie; de l'esprit naturel, une mémoire excellente; de l'élévation dans l'ame, de la malice sans méchanceté, de la ruse sans astuce; un heureux mélange de caprice dont les bons momens, quand ils arrivent, lui attirent les coeurs; une grande

les publier. Il mourut en 1734; âgé de 87 ans.

† POTER (Paul), peintre, né à Enchuysen en 1625, mort à Amsterdam en 1654, a excellé dans le paysage. On admire surtout l'art avec lequel il a rendu les divers effets que peut faire sur la campagne l'ardeur et l'éclat d'un soleil vif et brillant. Ses

générosité; de la grace et de la justesse dans ses récompenses; beaucoup de tact, le talent de deviner ce qu'il ne sait pas, et une grande connoissance des hommes. » Ce fut principalement à la protection de Potemkin que les jesuites dûrent leur établissement dans la Russie blanche. Un d'eux, le père Azevedo, lui en témoigna sa reconnoissance, au nom de sa compagnie, en lui dé-sites ne sont pas des plus riches, diant un poème latin, intitulé: n'ayant exécuté que les vues de Heroum libri IV, ad heroas epis-la Hollande, qui sont plates et tole, Louvain (Venise), 1789, Voici les vers qui commencent ce poème :

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très-peu variées. Son talent n'é-
toit point pour la figure; aussi
n'en peignoit-il guère plus de
deux, encore avoit-il soin de les
cacher en partie. Pour les ani-
maux, on ne peut les rendre avec
plus de vérité
ce maître; mais
que
il s'est borné d'ordinaire à ceux
qu'il pouvoit observer dans les
prairies de son voisinage. Une
princesse de Salm lui ayant de-
mandé un tableau pour le dessus
de cheminée de l'un de ses plus
beaux appartemens, Poter n'ima-
gina rien de plus agréable que la
représentation d'un paysage dans
lequel il plaça, pour toute figure,
une vache qui pissoit; certain
courtisan, favori de cette dame,
la dissuada de le prendre, et l'ar-
tiste remporta son ouvrage. Ce
contre-temps fit la réputation de
l'ouvrage; tous les cabinets de
Flandres les plus curieux le
sédèrent successivement, et il fut
pos-
vendu deux mille florins à Jacob
Vanhock. Ses mœurs douces lui
firent supporter avec patience
l'humeur et les écarts de sa fem-

+ POTENGER (Jean), né à Winchester en 1647, se livra avec succes à l'étude du droit, et acquit, ensuite de son beau-père, qui étoit chancelier de l'échiquier, une place de finance qu'il conserva jusqu'à sa mort. Il se fit remarquer par son attachement à la religion anglicane et à son légitime souverain. On a de lui un poème contenant des Réflexions sur la mort, 1691; la Vie d'Agri-me, qui étoit galante. Un jour, cola, d'après Tacite, et quelques l'ayant trouvée avec l'un de ses pièces; mais la plus grande par- amans, i les enveloppa tous tie de ses ouvrages, qui consistent deux d'un réseau, à l'exemple en pièces de poésie, en épîtres, de Vulcain, les lia avec de fortes en discours en prose et en vers cordes, et les fit voir, ainsi barn'a été connue que de ses amis,ricadés, aux autres amans, qui qui l'ont inutilement pressé de se retirèrent furieux. Pour lui

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