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Art. 43. Est réputé déserteur et sera puni de la destitution :

délinquants, mais bien de pourvoir à certaines nécessités sociales.

« Pour ma part, je crois que les peines comminées par le code pénal ordinaire sont suffisantes pour prévenir les délits qui sont commis par les chefs à l'égard de leurs inférieurs.

J'ajoute de plus que si, dans le code de discipline militaire, il n'existait pas de peine pour punir les violences dont il s'agit, il faudrait l'y ajouter; mais nous avons à cet égard une garantie de répression suffisante, qui peut aller jusqu'à la nise au traitement de réforme et qui peut atteindre l'officier qui manque d'égards vis-à-vis de son inférieur. »

:

M. le lieutenant général RENARD, ministre de la guerre « Je demande d'ajouter un mot aux considérations que vient de présenter l'honorable ministre de la justice. J'aurai l'honneur de dire à l'honorable M. Rogier que l'on apporte la plus grande sollicitude dans l'armée à empêcher les sévices, outrages ou mauvais traitements de la part des supérieurs envers leurs inférieurs; ces fautes sont punies avec la plus grande rigueur.

Nous avons des peines qui sont graduées depuis quelques jours d'arrêt jusqu'à la destitution même. Dans notre règlement de discipline, qui est une loi de l'Etat, il y a un article ainsi conçu :

Se rend coupable de transgression contre la discipline

Quiconque, placé dans un grade supérieur, se permet des voies de fait ou des expressions injurieuses envers son subordonné ou qui lui inflige ou fait infliger une correction non convenable.

« Suivant la gravité des cas, les peines qui peuvent être infligées aux officiers sont : Les arrêts simples;

Les arrêts sans accès;

La prison militaire;

La prison militaire sans accès;

La réprimande du ministère de la guerre; La mise en non-activité;

La mise à la réforme;

La perte du grade.

« Voilà certainement des peines suffisamment sévères et qui, remarquez-le, sont indépendantes des peines comminées par le code ordinaire.

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De plus, l'art. 7 de la loi du 16 juin 1836, sur l'état et la position des officiers, porte que ceux-ci pourront être mis au traitement de réforme pour sévices graves envers leurs inférieurs.

« Vous voyez que la loi prévoit les inconvénients signalés par l'honorable M. Rogier; elle commine des peines contre les supérieurs qui abusent de leur position pour infliger ou faire infliger à leurs inférieurs des peines qu'ils ne méritent pas. » (Chambre des repr. Séance du 8 mars 1870. Ann. parl., p. 548.)

Cette question fut reprise et discutée à l'occasion de l'article 42 du code. Plusieurs membres prirent part à la discussion, qui eut pour résultat le renvoi à la commission de deux propositions dont on trouvera les termes dans le rapport qui suit, présenté, au nom de la commission, par l'honorable M. GUIllery.

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Séance du 11 mars 1870. Messieurs, l'honorable M. de Brouckere a demandé le renvoi à la commission de la question suivante :

« Y a-t-il lieu d'insérer dans le code pénal mi

litaire des dispositions spéciales contre le supérieur qui injurie ou maltraite son inférieur? »

M. Orts a présenté, de son côté, un amendement dont le but est d'infliger une aggravation de peine au supérieur qui se rend coupable envers un subordonné de l'un des délits prévus par les art. 398, 399, 400 et 401 du code pénal ordinaire. En voici le texte :

Les violences commises par un supérieur sur son inférieur, sans excuse ni circonstances atténuantes, seront punies du maximum de la peine prononcée par le code pénal commun.

Les considérations qui militent en faveur du système de l'amendement ont été développées dans la séance du 9 de ce mois. M. le ministre de la justice et M. le ministre de la guerre, de leur côté, l'ont combattu comme étant tout au moins inutile. La question était assez grave pour mériter un examen spécial.

Votre commission a entendu les membres qui avaient soutenu l'amendement de notre collègue, et a pesé mûrement les considérations qui avaient été produites de part et d'autre.

Il y a eu unanimité pour rendre hommage au sentiment d'équité qui avait dicté l'amendement. Nul n'a songé à contester que le premier devoir d'un chef est de respecter les fonctions dont il est investi, et de se montrer à l'égard de ses subordonnés-non-seulement observateur des lois, mais équitable et bienveillant.

Ce n'est que par la patience, la douceur, par un dévouement qui ne se lasse pas devant les obstacles, que l'on peut former une armée et la maintenir dans un état moral aussi nécessaire à la discipline que l'obéissance et la subordination. Tempérer la rigueur d'un ordre par la manière de le donner, se faire aimer en se faisant respecter, tel est le devoir des chefs à tous les degrés de la hiérarchie militaire.

La seule question que nous ayons eu à examiner est celle de savoir si la législation actuelle était insuffisante pour assurer, dans l'armée, la stricte observation de ces principes.

Après discussion, votre commission a pensé que, tout en partageant les idées qui ont dicté l'amendement, elle ne pouvait cependant vous en proposer l'adoption.

Le règlement de discipline (art. 9) et la loi du 16 juin 1836 (art. 7) donnent des armes suffisantes pour réprimer des faits contraires aux devoirs des supérieurs envers les inférieurs. Dans les cas prévus par l'amendement, le juge chargé de prononcer usera de la latitude que lui donnent les art. 398 et suivants du code pénal ordinaire et infligera une peine proportionnée à la gravité du délit.

La qualité de supérieur chez le coupable constitue une de ces circonstances aggravante, telles qu'il s'en trouve dans beaucoup de faits criminels et qu'il est difficile de prévoir tous dans la loi. Enfin la loi du 16 juin 1836 sera bientôt revisée et la législature aura alors l'occasion d'examiner la question qui nous occupe.

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M. LE PRÉSIDENT: « La commission propose le rejet de l'article nouveau que M. Orts a proposé. Il est procédé au voté par assis et levé. La proposition n'est pas adoptée. (Ann. parl., (1) Les dispositions du projet qui concernen la

p. 575.)

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Tout officier qui, en temps de guerre, se sera absenté de son corps ou de sa résidence pendant plus de trois jours, ou qui sera sorti du royaume sans autorisation; Tout officier qui, en temps de paix, se sera absenté de son corps ou de sa résidence

désertion constituent une réforme importante. C'est en ce point que le code militaire de 1814 a peut-être le plus besoin d'être modifié. D'une part, ce code érige en délits des faits qui peuvent être suffisamment réprimés par une correction disciplinaire; de l'autre, il punit le délit de désertion, en temps de paix, de peines d'abord légères et qui vout en s'aggravant en raison des récidives multiples, comme s'il s'agissait d'habituer graduellement les déserteurs à la répression.

Ainsi, tout militaire qui s'éloigne de sa garnison à la distance de plus d'une lieue est réputé déserteur, s'il est arrêté. Lors même que l'arrestation aurait suivi immédiatement le départ, la loi veut qu'on le condamne à la privation de la cocarde (ce qui le force à recommencer son terme de service) et à la détention pour un temps indéterminé, mais que la jurisprudence a fixé entre quinze jours et six mois. Si le déserteur n'est pas arrêté, s'il échappe à toute poursuite et qu'il rentre volontairement dans l'espace de vingt-huit jours, on le punit disciplinairement, tout en le déclarant coupable de désertion, en vue de la récidive.

Lorsque, après cette première désertion, le même individu en commet une seconde, ce qui arrive habituellement, la loi le punit de trois ans de brouette, s'il est arrêté; de la détention et de la privation de la cocarde pour le plus long terme (un an), s'il n'est pas arrêté et qu'il rentre volontairement dans l'espace de vingt huit jours.

Enfin, lorsqu'il déserte pour la troisième fois, la loi prononce la peine de six ans de brouette. Mais les juges militaires appliquent rarement les peines de trois ans et de six ans de brouette, parce qu'elles sont exagérées lorsque la désertion consiste dans le fait de s'être éloigné de sa garnison à la distance de plus d'une lieue. Les circonstances atténuantes sont un moyen dont on se sert pour corriger les 'rigueurs de la loi.

Il s'ensuit que les peines appliquées aux déserteurs sont ordinairement légères et inefficaces; aussi les condamnations sont-elles fréquentes. Un grand nombre de militaires se font condamner deux et trois fois pour désertion; ils désertent jusqu'à ce qu'on les déclare déchus de l'état militaire, c'est-à-dire qu'ils ne cessent de déserter qu'en cessant de faire partie de l'armée. Le système est évidemment vicieux et a besoin d'être corrigé.

Il faut que le délit de désertion soit composé d'éléments plus sérieux et que les peines soient plus sévères. En France, la moindre peine applicable à la désertion, en temps de paix, est de deux ans à cinq ans d'emprisonnement. En cas de recidive, le minimum de cette peine est de trois années. Mais il faut, pour constituer le délit de désertion, une absence de six jours au moins; et si le soldat n'a pas six mois de service, il n'est considéré comme déserteur qu'après un mois d'absence. Le délai est de quinze jours pour tout militaire en congé ou en permission qui ne rentre pas au jour

fixé.

Ce n'est pas à dire qu'il soit permis au soldat français d'abandonner son corps et de se promener ou de vagabonder impunément pendant six jours, quinze jours ou un mois; mais son éloignement du corps ou le peu d'empressement qu'il met à y

rentrer sont punis de peines disciplinaires. Ces faits ne sont qualifiés délits de désertion que lorsqu'ils ont acquis un certain degré de gravité, et alors il est juste de les punir sévèrement.

Ce système est celui qui a été adopté dans le projet, sauf quelques modifications, comme on le verra ci-après. (Exposé des motifs.)

DE LA PROVOCATION A LA DÉSERTION.

Les articles 66 et 67 du code pénal ordinaire sont applicables à ceux qui auront provoqué à la désertion et à ceux qui s'en seront rendus complices; il faut donc, pour que la provocation et la complicité soient punissables, qu'elles réunissent les conditions exigées par les articles précités. (Rapp. de M. d'Anethan.)

Cela résulte en effet de la discussion suivante qui a eu lieu à la chambre des représentants :

« Suivant la législation existante, la provocation à la désertion, par un individu qui n'appartient pas à l'armée, est sévèrement punie. Or, je crois que, si nous votons purement et simplement les divers articles du chapitre VI, la provocation à la désertion de la part d'un bourgeois continuera à étre sévèrement punie, tandis que cette provocation émanant d'un militaire ne sera plus punie.

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Quand la provocation à la désertion est faite par une personne étrangère à l'armée, dans l'hypothèse de l'art. 115 du code pénal, et quand celte provocation a pour résultat de procurer des soldats à l'armée ennemie, le coupable encourt la peine de la détention perpétuelle. D'autre part, suivant la loi du 12 décembre 1817, la simple provocation à la désertion en temps de paix entraîne, pour le bourgeois, un emprisonnement de trois mois à un an. Voilà les peines encourues par les individus qui n'appartiennent pas à l'armée.

« De son côté, le code pénal militaire de 1814, dans ses art. 112 et suivants, punit sévèrement la provocation à la désertion faite par des individus appartenant à l'armée. On y prévoit la provocation à la désertion en temps de paix, la provocation à la désertion en temps de guerre, la provocation à la désertion en présence de l'ennemi. Or, au chapitre VI que nous discutons, on ne rencontre rien de pareil.

<< Il est vrai qu'à la fin de ce chapitre, se trouve un article portant que les dispositions du premier livre du code pénal ordinaire seront applicables aux matières militaires. Je me suis, en conséquence, demandé si, en vertu de ce premier livre, on pourrait punir un militaire provoquant un autre militaire à la désertion. Or, je suis arrivé à une solution négative.

« L'art. 66 du code pénal ordinaire s'occupe d'une provocation en vertu de laquelle on peut devenir coauteur d'un crime ou d'un délit; mais cet article exige ce que les jurisconsultes appellent une provocation caractérisée, c'est-à-dire une provocation par dons, promesses, menaces, machinations ou artifices coupables. La simple provocation n'y est pas prévue. J'appelle provocation simple une provocation sans dons, sans promesses ni menaces, un simple engagement à la désertion, en un mot ce que les criminalistes désignent par les termes : consilium nudum.

«Vient ensuite la complicité. Il est évident qu'un soldat qui se rendra complice d'une désertion à

pendant plus de quinze jours, ou qui, étant sorti du royaume sans autorisation, sera demeuré absent pendant plus de huit jours (1).

l'aide d'un des moyens prévus à l'art. 67 du code pénal ordinaire; qui, par exemple, fournira de l'argent, donnera des instructions, prêtera des vêtements, ou fournira d'autres moyens, deviendra incontestablement punissable.

Mais le provocateur ne sera plus punissable, s'il provoque à la désertion sans dons, sans promesses, sans menaces, sans fourniture d'aide ou d'assistance. Et qu'on ne dise pas que le cas ne peut pas se présenter; un soldat mal disposé pour l'armée peut très-bien engager ses camarades à déserter, en dehors des hypothèses spéciales prévues aux art. 66 et 67 que je viens de citer,

« Je voudrais donc savoir si le projet du gouvernement fournit un moyen de punir la simple provocation? Dans la négative, je proposerai peut-être un amendement pour combler cette la

cune. »>

M. BARA, ministre de la justice : « Le gouvernement n'a pas proposé un article pour la provocation, parce qu'il a cru que le code pénal ordinaire (art. 66 et 67) donne le moyen de punir le provocateur, soit comme coauteur, soit comme complice.

«En dehors des cas prévus par ces articles, il ne reste qu'un seul fait non puni, c'est celui du soldat qui dirait à un autre soldat : Je vous engage à déserter.

<«< Eh bien, est-là une provocation à la désertion? Il faut plus qu'un simple consilium, il faut un acte quelconque qui constitue une provocation; mais un individu qui, en causant, dira: Je vous engage à déserter, ne peut évidemment pas être considéré comme provocateur, et si cela existait sous l'ancien code, je crois que nous devrions modifier un pareil régime.

« Remarquez qu'il s'agit d'une simple conversation privée et non pas de paroles prononcées en public. Car celui qui, dans un discours public, aura provoqué à la désertion, sera puni conformément à l'art. 66 du code pénal ordinaire; mais parce que, dans une conversation, un soldat aurait dit à un autre : Désertez, il devrait être condamné comme déserteur! Ce n'est pas admissible. Nous devons rester dans les principes du code pénal ordinaire. Il n'y a pas de raison d'être plus sévère pour la désertion que pour tous les autres délits.

«En principe, celui qui donne un simple conseil n'est pas considéré comme coauteur ou complice. >>

M. THONISSEN : « Messieurs, il faut que le gouvernement et la chambre sachent bien que la doctrine de l'honorable ministre de la justice est repoussée par tous les codes militaires de l'Eu

rope.

« Voici ce que dit à cet égard le code pénal militaire de 1814:

« Art. 112. Tout militaire qui en engage un autre à déserter à l'ennemi sera puni par la corde. «Voilà la provocation simple qui devient un crime capital!

« L'art. 116 dit, de son côté :

« Tout militaire qui, en temps de paix, en provoque un autre à déserter, sera puni de trois à six ans de brouette.

«Voulez-vous savoir comment le code français punit le même fait?

<< Son art. 242 porte: Tout militaire qui provoque ou favorise la désertion est puni de la peine encourue par le déserteur lui-même.

« Ainsi donc aujourd'hui, dans le code encore en vigueur chez nous, comme dans le code français (et j'affirme qu'il en est de même pour les autres codes étrangers), la provocation simple à la désertion est rudement châtiée.

<< Pour l'armée belge seule, on pourra pratiquer impunément des manoeuvres tendantes à provoquer la désertion. Il suffira que l'on évite les caractères de la complicité. Si le gouvernement est décidé à s'arrêter à un pareil système, je n'ajouterai plus rien, et je ne présenterai pas d'amendement; mais je dis que ce système est dangereux au point de vue des intérêts mili

taires. »

M. BARA, ministre de la justice : « L'honorable membre se trompe. Il ne nous dit pas ce que, dans les législations étrangères et dans le code belge actuel, on entend par provocation.

« Je lui ai demandé s'il entendait punir la simple conversation, le fait d'un homme disant à un autre Si j'étais à votre place, je déserterais. Je lui ai dit que tous les autres cas tombaient sous l'application du code pénal ordinaire.

« Je viens de lire l'article. Ceux qui, par dons, promesses, menaces, abus d'autorité ou de pouvoir, machinations ou artifices coupables, auront provoqué directement un individu à déserter, sont punis comme auteurs du délit, etc., etc.

<< Par conséquent, l'honorable membre a tort de dire que lorsqu'il y a des manoeuvres pour engager quelqu'un à déserter, celui qui en aura usé ne sera pas puni.

« Mais ce que veut punir l'honorable membre, ce qu'il prétend être puni par le code actuel et par les législations étrangères, c'est le fait de celui qui dit à un militaire Désertez. Je suis persuadé qu'il n'y a pas un seul arrêt de conseil de guerre dans ce sens. »

:

M. THONISSEN: « Certainement. >>

M. BARA, ministre de la justice : « Comment! parce que, dans une conversation, un soldat aura dit à un autre : Désertez, il sera condamné comme provocateur à la désertion? Cela n'est pas possible; c'est aller au delà de la pensée de l'honorable membre.

« Les art. 66 et 67 du code pénal sont applicables au délit de désertion comme aux autres délits, et ils serviront à réprimer les faits qui constituent réellement une provocation à la désertion. >> (Séance du 10 mars 1870. Ann. parl., p. 568.)

(1) L'art. 37 (43 du code) est destiné à remplacer les dispositions de la loi du 16 juin 1836 sur la perte du grade, qui prévoient l'absence illégale des officiers. Aux termes de l'art. 1er de cette loi, les officiers de tous grades, en activité, en disponibilité, en non-activité ou au traitement de réforme, peuvent être privés de leur grade et de leur traitement pour absence illégale de leur corps ou de leur résidence pendant quinze jours, ou pour résidence hors du royaume, sans autorisation, après cinq jours d'absence. Lorsqu'un de ces faits est imputé à un officier, on le traduit devant un conseil d'enquête, qui est chargé de vérifier le fait et de le constater, s'il y a lieu, par un verdict affirmatif; après quoi, le gouvernement prononce

guerre,

trois

Art. 44. La même peine pourra être infligée à tout officier en congé ou en permisde sion qui ne sera pas rentré à son corps ou à sa résidence, en temps jours, en temps de paix, quinze jours après l'expiration de son congé ou de sa permission, ou après avoir reçu un ordre de rappel (1).

soit la perte ou la suspension du grade, soit la mise au traitement de réforme.

Cette législation est imitée d'une loi française du 19 mai 1834. Elle a le double inconvénient de ne faire aucune distinction entre le temps de paix et le temps de guerre, et puis de jeter du doute sur l'existence ou l'abrogation des articles du code pénal militaire qui ont prévu la désertion des officiers. En effet, un arrêt de la cour de cassation de France a décidé que, malgré la loi du 19 mai 1834, l'article 1er du titre II de la loi du 21 brumaire an v n'avait pas cessé d'être en vigueur et qu'il devait être appliqué à l'officier à l'égard duquel il était constaté en fait qu'il avait déserté de l'armée ou d'une place de première ligne sur la frontière menacée ou exposée.

Depuis la publication du nouveau code de justice militaire, on continue, en France, de considérer les deux législations comme coexistantes. La nouvelle loi le dit expressément dans son article 223, ainsi conçu :

Est puni de six mois à un an d'emprisonnement, tout officier absent de son corps ou de son poste sans autorisation, depuis plus de six jours, ou qui ne s'y présente pas quinze jours après l'expiration de son congé ou de sa permission, sans préjudice de l'application, s'il a licu, des dispositions de l'article 1er de la loi du 19 mai 1834 sur l'état des officiers.

L'officier français peut donc être jugé et condamné deux fois pour le même fait. Après avoir été condamné à six mois ou un an d'emprisonnement par un conseil de guerre, il peut être envoyé devant un conseil d'enquête, dont le verdict aura pour effet de le priver de son grade. On s'est gardé, dans le projet belge, d'imiter cette complication. Lorsque deux législations prévoient des faits identiques, la plus ancienne doit céder la place à la nouvelle. Il est urgent d'ailleurs d'effacer les dernières traces de cette procédure exceptionnelle des conseils d'enquête, qui a donné lieu à tant de difficultés. Le législateur doit appeler les choses par leur nom : l'absence illégale d'un officier est une désertion, comme l'absence illégale d'un soldat, et la perte du grade, pour un officier, est une destitution, comme pour tout autre militaire.

Ceite peine, prononcée seule et sans emprisonnement, est moins sévère que celle du code français, qui est de six mois à un an d'emprisonnement, sans préjudice de la perte du grade; elle est moins sévère que celle de notre code pénal militaire actuellement en vigueur, qui punit l'officier coupable de désertion, en temps de paix, de cassation avec infamie, en temps de guerre, de la peine de mort. (Exposé des motifs.)

Chambre des réprésentants. Séance du 10 mai 1870:

M. HAYEZ : « Je demande la permission de présenter une observation sur l'art. 37.

Le dernier paragraphe de cet article punit tout officier qui, en temps de paix, se sera absenté de son corps ou de sa résidence pendant plus de quinze jours, ou qui, étant sorti du royaume sans

autorisation, sera demeuré absent pendant plus de huit jours.

« Or, d'après la loi du 16 juin 1836 sur la perte des grades, il suffit d'une absence de cinq jours hors du royaume pour encourir la peine prescrite. Je demande s'il n'est pas nécessaire de mettre ces deux dispositions d'accord. >>

M. BARA, ministre de la justice : « La loi de 1836 est une loi de discipline. »>

M. HAYEZ : « Je le veux bien, mais ce n'en est pas moins une loi, et une loi qui fonctionne. »

M. BARA, ministre de la justice : « La loi de 1856 a un tout autre but que celle-ci. La loi de 1836 peut faire écarter un officier de l'armée, tandis que le nouveau code le considère comme déserteur et le punit de la destitution. L'officier qui, aux termes de la loi de 1836, sera traduit devant un conseil d'enquête, en cas d'absence, pourra être puni conformément à l'art. 37 du nouveau code. »

M. GUILLERY, rapporteur : « Il résulte de l'exposé des motifs de l'article 37 (43) que cet article remplace l'art. 1er de la loi de 1856. »

M. LELIEVRE « Dans le système de l'honorable M. Guillery, je pense qu'il conviendrait d'inscrire dans la loi un article abrogeant la loi de 1836 en ce qui concerne l'objet du débat. Sans cela, il pourra s'élever des doutes sérieux sur la question soulevée.

«En effet, on pourra très-bien soutenir, avec M. le ministre de la justice, que l'art. 37 n'est pas incompatible avec la loi antérieure et n'est pas même contraire à celle-ci. Il est donc nécessaire de prévenir tout doute à cet égard par une disposition contenant l'abrogation formelle de la partie de la loi de 1836 qu'on entend remplacer par l'ar

ticle 37. >>

M. le lieutenant général RENARD, ministre de la guerre « Messieurs, après le vote du nouveau code pénal militaire, la loi de 1836 devra être revisée; il y a des dispositions de cette loi qui ont été introduites dans le nouveau code; d'autres doivent être modifiées. J'ai déjà annoncé à la commission et à la chambre quelles étaient les intentions du gouvernement à cet égard.

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Personne ne demandant plus la parole, l'article 37 reste définitivement adopté.

(1) L'article 38 du projet (44 du code) remplace les articles 122, 159 et 160 du code pénal militaire de 1814. On s'est servi de l'expression pourra être infligée, afin de laisser au juge la faculté d'apprécier les circonstances qui ont empêché l'inculpé de rentrer à son corps ou à sa résidence au jour fixé par sa permission ou son congé. (Exposé des motifs.)

Cet article, ainsi que les deux suivants, semblent prévoir des faits purement matériels, l'absence, le retard.

Mais, comme le fait remarquer l'Exposé des motifs (voir la note suivante), les circonstances exclusives de la culpabilité doivent être prises en considération par le juge. Ainsi, la force majeure qui a retenu en route un soldat ne peut en faire un déserteur malgré lui. (Rapport de M. Guillery.)

Art. 45. Est réputé déserteur (1):

Tout sous-officier, caporal, brigadier ou soldat qui se sera absenté de son corps ou de son détachement, sans y être autorisé, pendant plus de trois jours, en temps de guerre, pendant plus de huit jours, en temps de paix ;

Tout sous officier, caporal, brigadier ou soldat qui, voyageant isolément, ne sera pas arrivé à destination, en temps de guerre, trois jours, en temps de paix, huit jours après celui qui lui aura été fixé;

Tout sous-officier, caporal, brigadier ou soldat en permission ou en congé qui ne sera pas rentré à son corps, en temps de guerre, trois jours, en temps de paix, quinze jours après l'expiration de son congé ou de sa permission, ou après l'époque fixée par un ordre de rappel;

(1) Art. 39 (45 du code). Cet article a pour objet de définir la désertion des sous-efficiers, des caporaux ou brigadiers et des soldats, soit en temps de guerre, soit en temps de paix. Le délit de déserter peut se commettre de trois manières différentes 1o en s'absentant de son corps ou de son détachement; 2o en ne se rendant pas à sa destination au jour fixé; 30 en omettant de rentrer à son corps après l'expiration d'un congé ou d'une permission. Dans chacune de ces hypothèses, le projet fixe un délai après lequel la désertion est considérée comme consommée. Il y a alors présomption légale de culpabilité. Ces délais sont plus courts en temps de guerre qu'en temps de paix ; ils sont tels, dans tous les cas, qu'ils doivent nécessairement avoir pour effet de diminuer considérablement le nombre d'infractions qualifiées délits de désertion par la loi.

Pour constituer le délit de désertion, l'absence illégale doit avoir duré pendant plus de trois jours, en temps de guerre, et pendant plus de huit jours, en temps de paix. Ces délais sont beaucoup plus longs que ceux de notre code pénal militaire actuel, mais ils sont exclusifs du bénéfice attaché au retour volontaire. On ne pourra plus, comme sous la législation actuelle, condamner à la peine de la désertion un militaire qui, s'étant éloigné de sa garnison à la distance de plus d'une lieue, s'y est laissé surprendre le même jour par la gendarmerie; mais, d'autre part, l'impunité ne sera plus garantie à celui qui, étant demeuré absent pendant vingt-huit jours, a eu la chance de n'être pas arrêté et de pouvoir rentrer volontairement. Cette espèce de prime accordée aux déserteurs assez adroits pour échapper aux poursuites de la police est supprimée.

On remarquera peut-être que, dans l'article précédent, il est parlé de l'officier qui s'absente de son corps ou de sa résidence; tandis que dans celui-ci on dit : « qui s'absente de son corps ou de son détachement, » Bien qu'elles soient différentes, ces expressions ont le même sens. On ne peut pas parler de résidence dans une disposition où il ne s'agit que de sous-officiers et de soldats. La disposition correspondante du code de justice militaire français est conçue dans les mêmes termes. Victor Foucher dit à ce sujet : « L'article, en se servant de ces expressions: « qui s'absente de son corps « ou de son détachement sans autorisation, »> a entendu leur donner un sens démonstratif et non limitatif. C'est ainsi que dans l'art. 233, qui prévoit l'absence de l'officier, le législateur ajoute les mots: ou poste. Toutes ces formules ont le même objet, et la loi comprend l'absence du militaire de tout lieu où il se trouve soumis à la loi militaire

et à sa discipline. » C'est par ce motif que, même sous la législation antérieure, la jurisprudence décidait que l'évasion des lieux de détention soumis au régime militaire constitue le fait de désertion, si l'absence illégale dépassait le délai de grâce.

:

Le projet accorde également un délai, de trois jours en temps de guerre, de huit jours en temps de paix, au militaire qui, voyageant isolément, n'est pas arrivé à sa destination au jour fixé. Il est sous entendu que s'il en avait été empêché par accident ou force majeure, la loi serait inapplicable, car il n'y a point de délit sans culpabilité (lisez sans intention criminelle). Sous l'empire de la législation actuelle et de la jurisprudence qu'elle a fait naître, le militaire qui voyage avec une feuille de route est déserteur dès qu'il s'écarte de sa route, s'il est arrêté; mais s'il n'est pas arrêté, il a les vingt-huit jours de grâce dont nous avons déjà parlé. Il serait assez difficile de justifier cette distinction. On reconnaîtra sans doute qu'il vaut mieux accorder quelque latitude aux militaires qui se trouvent dans ce cas et fixer un délai à l'expiration duquel celui qui est en retard, l'emansor, sera réputé déserteur. Au reste, ce délai ne présente aucun inconvénient, car il n'autorise pas le militaire voyageant isolément à se promener dans le pays pendant le temps de sa durée; s'il n'arrive pas à sa destination à jour fixe, il sera puni disciplinairement.

Dans le § 3 de l'art. 39 du projet (45 du code), il s'agit de militaires en congé ou permission. La loi leur accorde, pour rentrer sans être réputés déserteurs, des délais plus longs encore qu'aux militaires qui voyagent isolément, mais toujours sans préjudice des punitions disciplinaires réservées à ceux qui, sans avoir outre-passé ces délais, ont cependant commis la faute de ne pas rentrer au jour fixé par leur permission ou congé.

Le mot permission est employé ici dans le même sens que dans le nouveau code de justice militaire français. Voici comment s'exprime à cet égard le commentateur de ce code, Victor Foucher : « Le congé ou la permission sont des termes consacrés par les règlements militaires; seulement par le mot permission, il ne faut pas entendre l'autorisation que donne un chef de s'absenter d'un ou de plusieurs exercices ou de découcher, mais celle dont l'effet est de ne plus considérer l'homme comme présent au corps... On ne saurait argumenter devant un conseil de guerre d'une permission qui maintiendrait l'homme sur les contrôles du corps comme présent, mais seulement d'une permission qui emporte mutation. >> (Exposé des motifs.)

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