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sont pas sans intérêt; elles nous permettent, par exemple, de compléter le v. 8, dont le second hémistiche manque dans l'édition de M. de Queux de Saint-Hilaire.

Soixante-trois ans plus tard, en 1488, la ballade de Deschamps fut retouchée et son énergique refrain dirigé, non plus contre l'Angleterre, mais contre la Bretagne. Sous cette forme nouvelle elle se trouve jointe à une édition du Testament de monseigneur Des Barres, capitaine des Bretons. Nous en reproduisons la première strophe :

J'ay tant crié avecques Symeon
Et lamenté avec Jheremie,

En esperant, que l'exaltacion

De Gaule en Grec sur la terre d'Albie
Voy aprocher, et que la prophecie
Béde, Merlin et Sebille ensuivant,
Et de l'abbé Jouachin proprement
Aient effe(r)ct, que l'asne au pié pourry
Destruiz sera et tout son tenement,

10 Tant qu'on dira: «Bretaigne si fut cy. »

Ballade XCIX.

Cette pièce qui commence ainsi :

Amez les bons, donnez aux souffraitteus,

et dont le refrain est :

Aristote au grant roy Alixandre,

a été imprimée avec trois autres ballades, à la fin du xv° siècle, sous le titre de La Doctrine des princes et des servans en court. Nous en connaissons trois éditions gothiques: une qui paraît sortir des presses de Pierre Alain et d'André Chauvin, à Angoulême, vers 14922; une édition qui porte la marque de Gaspard Philippe, imprimeur à Paris de 1500 à 1510, puis à Bordeaux, où il exerçait en 1519 et en 15203; enfin une édition s. 1. n. d. citée par M. Brunet +. Il manque un vers dans les imprimés à la première strophe de la ballade, lacune qui provient sans doute de plusieurs copies ou réimpressions successives.

1. Montaiglon, Recueil de Poésies françoises, VI, 114.

2. Catalogue des livres de feu M. le baron James de Rothschild, I, no 561. 3. Biblioth. nat., Y n. p., Rés. C'est l'édition reproduite par M. de Montaiglon dans son Recueil de Poésies françoises, IV, 31-35.

4. Manuel du Libraire, II, 783.

La seconde ballade du recueil, qui commence par :

et qui a pour

Tant de perilz sont a suir la court,

refrain:

D'avoir a court un pié hors et l'autre ens,

est également d'Eustache Deschamps '.

Ballade CXIII.

La ballade

Je doubte trop qu'il ne viengne chier temps,
Refr. Car nulz ne tent fors qu'a emplir son sac,

figure dans le Jardin de plaisance (éd. de Paris, Michel Le Noir, in-fol. goth., fol. ivj, vo; éd. de Lyon, Olivier Arnoullet, in-fol. goth., fol. 56, Vol.

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14.

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. . n'a creature née.

16. Selon raison? La loy est abolie.

24. Le faulx tresor du grain et de la blée.
26. Des povres, dont l'esprit vengence crie

Au ciel, a Dieu et a la seigneurie

Et a tous ceulx qui font celle folie.

32. Aussi tost meure ung homme qu'on dit flac.

Le texte imprimé a, de plus, passé des mots aux vers 11, 12, 21.

Ballade CCVIII.

Nous avons déjà dit que cette pièce est une de celles qui ont été imprimées sous le titre de Doctrine des princes et des servans en court.

Ballade CCXVII.

Cette pièce devait être encore populaire à la fin du xv siècle; Meschinot s'exerce du moins sur le même refrain. Voici le début des deux ballades.

8. Ed. Queux de Saint-Hilaire, II, 30, no cevi.

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Tandis que nous parlons d'Eustache Deschamps, nous remarquerons que deux ballades qui figurent dans le grand ms. de Paris et que M. de Queux de Saint-Hilaire n'a pas encore imprimées :

Dit il voir ? Par ma foy il ment

Quant les saiges gouverneront

(fol. 390)
(fol. 431)

se retrouvent à la fin d'un ms. du Romans des Deduiz ḍe Gace de La Buigne 2.

Enfin, nous profiterons de l'occasion pour signaler à l'éditeur de Deschamps une chanson, probablement peu connue, qui peut servir de commentaire à une des ballades du poète. Crapelet a depuis longtemps imprimé une ballade dont voici la première strophe :

Un ordre sçay de nouvel establie,

Dont maintes gens se doivent fort louer,

Et ou l'on doit boire jusqu'a la lie,

Tant qu'es hanaps ne doit rien demourer;

Et si doit on toudis du pot verser

Vins es vaisseaux, l'un l'autre requerir;

Les requerans y doivent obeir

Sans refuser, tout boire et sans escroe;
Ainsi se doit cest ordre maintenir,

Qui s'appelle l'ordre de la Baboue 3.

La confrérie de buveurs célébrée par Deschamps semble ne pas avoir disparu avec le xive siècle et s'être conservée, au moins jusqu'au siècle

1. Voy. aussi un ms. de la Biblioth. nat., fr. 2206, fol. 184.

2. Biblioth. nat., fr. 1619, fol. 99.

3. Cette ballade se trouve au fol. 241 du ms. de la Bibl. nat.

suivant, sous un nom un peu différent : l'ordre de saint Babouyn. On connaissait encore, au milieu du xvie siècle, une chanson composée sans doute par quelque membre de cette joyeuse association et qui commençait ainsi :

Nous sommes de l'ordre

De sainct Babouyn...

Ce timbre était assez populaire pour être appliqué à un noël :

Nous sommes de l'ordre

Du corps Jesuchrist...

Voy. Les grans Noelz nouveaulx (Paris, Bonfons, s. d., in-8 goth.)', fol. 97 a.

Émile PICOT.

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Dans le volume XII (1883) de la Romania 2, j'ai montré quelles formes curieuses présente l'r du patois du Cotentin septentrional (Hague et Val de Saire et des Iles normandes; cette trémulante n'en offre pas de moins intéressantes, si elles sont en général différentes, dans le patois haut-normand du pays de Caux. Déjà, en 1839, M. Collen-Castaigne avait donné, en appendice à son Essai historique et statistique sur la ville de Bolbec, p. 2193, un « Vocabulaire de quelques mots Cauchois », dont presque tous ont s, z à la place de r médial; ainsi blécheuse, cuziositai, coutuzié, éleveuse (élevure), Maziâne (Marianne), ordeuse (ordure), pareuse (parure), raineuse (rainure), caucheuse (chaussure), à côté de bère (boire =*bibere), luire (lire legere), il est vrai.

=

Mais ce n'est pas la seule transformation que M. Collen-Castaigne donne de r; on trouve aussi dans son « Vocabulaire » le mot fèhe (fère, foire feria), où cette trémulante a fait place à h, c'est-à-dire sans doute à une aspiration qui se fait entendre avant de prononcer l'e muet final. Si le mot fèhe du vocabulaire est le seul qui présente le changement de r en h, cette aspiration apparaît dans un grand nombre de vocables de

1. Bibl. nat., Y 6088 (2), Rés.

2. Cf. la préface de mes Mélanges de phonétique normande, p. XXIII et sui vantes, où cette étude a été reprise et complétée.

3. Essai historique et statistique sur la ville de Bolbec par Collen-Castaigne, manufacturier, membre de la Société libre d'émulation de Rouen. Rouen, chez Nicétas Prideaux, 1839, in-8, p. 219-225.

la traduction ou imitation en patois cauchois faite par M. Collen-Castaigne de la fable des Animaux morts de la peste 1:

Un ma dont chacun s' désespéhe

Ma que l' bon Diu dans sa coléhe...

On la trouve déjà, on le voit, dans les deux derniers mots des deux premiers vers désespéhe, coléhe; je l'ai relevée encore dans les vocables prépahe, histouéhe (histoire), envihons, mouhi (mourir), péhisse, contrèhe (contraire), méhitai (mérité), à côté de z dans tirizent (tirèrent).

=

Cette double transformation de r en s (z) ou h n'est point particulière au patois de Bolbec; on la rencontre à l'extrémité orientale du pays de Caux dans les cantons de Bacqueville et de Fontaine-le-Dun, où elle m'a été signalée par M. Carrière, professeur à l'Ecole des langues orientales vivantes, et originaire de Luneray, village situé aux confins de ces deux cantons; mais elle n'est pas toujours la même que dans les environs de Bolbec; ainsi tandis que M. Carrière m'a donné les formes casié charrier carricare), cuziositai, coutuzié, Maziâne, mazié marier — maritare), maziâje (mariage), avec z, il m'a indiqué les formes cauchuhe, orduhe, rainuhe, avec h et non avec s (z), comme à Bolbec. Ce sont les formes en h que connaît seules d'ailleurs le patois de Bacqueville et de Fontaine-le-Dun, ainsi que celui de Bolbec, dans les mots colèhe, contrèhe, envihons, histouèhe, méhitai, prépahe, etc. M. Carrière m'a encore signalé cette transformation de r médial en aspiration dans les mots cuihe coquere), nuihe (nocere, suihe (sequere 2, ainsi que dans pihe pějor) et pèhe (*pira), à côté de péziè poirier).

J'ai supposé que M. Collen-Castaigne avait représenté par h une véritable aspiration et qu'il n'avait pas voulu indiquer par ce signe un hiatus, résultant de la chute pure et simple de r; c'est, au contraire, évi

1. Ibid., p. 225: « Les animaux malades de la peste, fable mise en vers cauchois. Aux deux vers ci-dessus, on peut joindre le suivant, où l'on trouve

no on:

La peste, c'est com' cha qu' no l'a toujour applaie.

On remarquera de plus l'orthographe ai(e) de la dernière syllable de applaie, orthographe à l'aide de laquelle M. C.-C. a voulu représenter l'e très ouvert de la finale de ce mot, è analogue à celui des patois du Cotentin.

2. Ces exemples très authentiques confirment ce que j'ai dit ailleurs cf. Melanges de phonétique normande, p. 48 et suivantes), que le groupe + c a donné ui dans le patois haut-normand, comme dans le francien, tandis qu'il s'est transformé en ieu, ie, etc., dans les patois bas-normands.

3. On voit par cet exemple que ja, comme ěc, donné i en hautnormand ainsi qu'en francien, tandis qu'il a donné ié, é en bas-normand. On a de même dix (děce), six (sex). Cf. Mélanges de phonétique normande, p. 55 et

suivantes.

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