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POÈME MORALISÉ

SUR

LES PROPRIÉTÉS DES CHOSES

Le manuscrit auquel nous empruntons les extraits publiés plus loin, est le ms. fr. 12483 de la Bibliothèque nationale de Paris (anc. supplément français 1132). Ce ms., écrit sur vélin, à 2 colonnes, a une justification de 225 millimètres de hauteur sur 148 millimètres de largeur 1, et compte, dans son état actuel, 266 feuillets; il en avait près du double, avant les nombreuses mutilations qu'il a subies au commencement, au milieu et à la fin; il faisait autrefois partie de la bibliothèque des Frères Prêcheurs de Poissy 2, et a été utilisé successivement par A. Jubinal, qui en a donné une analyse assez complète et y a puisé un grand nombre de pièces, par M. Paul Meyer 4, par L. Panniers, et dernièrement par M. K. Bartsch 6.

Ce ms., bien que renfermant les morceaux de poésie les plus divers,

1. Ce sont les dimensions prises de la première à la dernière ligne pour la hauteur, et de la première à la dernière lettre pour la largeur. Le ms. ayant été rogné très fortement et irrégulièrement, il serait sans intérêt de donner les dimensions du parchemin.

2. Voy. L. Delisle, Cabinet des manuscrits, t. II, p. 393.

3. Nouveau recueil de contes, dits, etc., t. II (1839); pour la description du ms., voyez t. II, p. 413-423.

4. Le Savetier Baillet, publié dans la Romania, t. III (1874), p. 103-106; cette pièce a été publiée de nouveau dans le Recueil de fabliaux, p. p. A. de Montaiglon et G. Raynaud, sous le titre que lui donne le ms.: du Prestre qui fu mis ou lardier.

5. Les Lapidaires français du moyen age (1882), p. 225-227.

6. Geistliche Umdichtung weltlicher Lieder dans la Zeitschrift für romanische Philologie, t. VIII (1884), p. 570-585. Voy. ci-dessus, p. 308.

forme un tout complet: il a été composé en l'honneur de la Vierge, au xive siècle. Le volume se divise en deux livres, et chaque livre en cinquante chapitres; telle était du moins la distribution primitive, car aujourd'hui il reste seulement du livre premier les chapitres 24 à 26, 28 à 38, 45 et so, et du livre second les chapitres 1 à 23, 25 à 35, 39, 41 et 42, 44 à 47: il manque donc quarante-trois chapitres, sur l'ensemble des cent chapitres des deux livres. Chaque chapitre est précédé d'une rubrique et d'un numéro d'ordre; puis vient la description, en vers de huit syllabes, d'un animal, d'une pierre, d'une plante, d'une chose quelconque. Le poète énonce plus ou moins longuement les propriétés de cette chose, dont il puise la connaissance dans divers auteurs; puis, reprenant une à une ces différentes propriétés, il les rapproche des qualités similaires de la Vierge, dont les vertus se trouvent ainsi symbolisées autant de fois. Cette première partie est suivie dans chaque chapitre d'un long conte dévot, consacré à un miracle de la Vierge, puis vient, pour terminer le chapitre, soit une chanson, soit un lai, soit un dit, presque toujours profane, que l'auteur soude au reste de la narration par une transition de sa façon. Ces dernières pièces ne sont pas l'œuvre du poète, mais sont par lui empruntées à des auteurs différents; c'est ainsi qu'on y retrouve des morceaux de Rutebeuf, du Reclus de Moliens, de Gautier de Coincy, etc.

Cette compilation a été certainement faite dans une intention d'édification religieuse, et ce devait être un livre de lectures pieuses. L'auteur était sans doute un clerc; sa dévotion grande et ses connaissances multiples le prouvent facilement. Il nous dit livre II, chap. xi, vers 7) qu'il a touché les reliques de saint Ouen; faut-il en conclure qu'il était Rouennais ou tout au moins Normand? On ne saurait l'affirmer, car les éléments d'information fournis par la langue et les rimes ne donnent aucune nouvelle preuve suffisante.

Notre auteur avait à sa disposition toute une bibliothèque scientifique et littéraire. Nous avons cité plus haut les noms de quelques-uns des poètes dont il a fait une adaptation car les pièces sont rarement reproduites sans changements); mais une analyse détaillée du ms. permettrait seule de se rendre bien compte de tous les emprunts faits à la littérature du xie et du xive siècle. Pour le moment, nous ne nous occuperons que d'une partie spéciale de l'œuvre du poète, c'est à savoir des quelques vers, placés en tête de chacune des divisions du ms., vers où l'auteur

1. M. Bordier a montré, dans son opuscule sur les Eglises et monastères de Paris (1856), que ce ms. ne peut être antérieur à 1325.

énonce les propriétés de différentes choses'; ce sont autant de chapitres d'un livre en vers, analogue au Speculum naturale de Vincent de Beauvais ou au de Proprietatibus rerum de Barthélemy de Glanvil, traduit plus tard en français par Jean Corbechon. A côté de la description scientifique de la chose, il y a toute une partie symbolique que l'auteur ne perd jamais de vue et qu'il rattache à la première le mieux qu'il peut. Dans tout cela, · il fait certainement œuvre originale, sinon pour le fond, du moins pour la forme.

Nous publierons les descriptions des cinquante-sept2 choses, données par le manuscrit; en voici d'abord la liste:

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1. C'est l'auteur lui-même qui désigne par le nom de choses, les animaux, les plantes, aussi bien que les objets inanimés (liv. II, chap. XVIII, v. 3). On lit aussi au fol. 96 du ms., en tête de la table du second livre : « Ce sont li nons des chozes contenues ou secont livre ».

2. Nous avons vu plus haut que chacun des deux livres avait primitivement cinquante chapitres, et que dans l'ensemble il en manquait quarante-trois : il en reste donc cinquante-sept.

3. Nous ne pouvons rétablir ici entre crochets, comme nous l'avons fait plus loin pour le second livre, les titres des chapitres manquant, car la table du premier livre a disparu avec les premiers feuillets du ms.

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En parcourant cette liste, on voit que les choses décrites par le poète se divisent en quatre catégories: animaux, plantes, pierres et autres choses; nous passerons en revue chacune de ces catégories.

1° BESTIAIRE. Nous avons dit que la particularité de notre bestiaire rimé était que l'auteur s'attachait à comparer les qualités de certains animaux à celles de la Vierge'. Les animaux dont il parle sont les suivants: la panthère, l'hirondelle, la cigogne, la brebis, la baleine, la calandre, la salamandre, l'abeille, le cygne, le rossignol, le pigeon ou coulon, la tortue, le chameau, le faucon, en tout quatorze animaux 2.

Si nous comparons notre texte, d'une part avec les autres bestiaires rimés (Philippe de Thaun 3, Guillaume le Normand 4, Ger

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fol. 231 a

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fol. 236 c

fol. 241 C

fol. 251 c

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fol. 255 d

fol. 266 b

fol. 264 a

1. Les bestiaires sont ordinairement composés dans un but d'édification religieuse; seul le bestiaire de Richard de Fournival est absolument profane.

2. Si le ms. était complet, on en retrouverait certainement d'autres; la table du second livre nous permet déjà d'ajouter l'éléphant, le castor, l'anet où canard. 3. The Bestiary of Philippe de Thaun, p. p. Th. Wright dans Popular Treatises on science written during the Middle ages (London, 1841), p. 74-131. Il a paru depuis dans l'Anglia (Zeitschrift für englische Philologie), t. VII (1884), p. 420-468, un travail de M. Fr. Mann sur le Physiologus de Ph. de Th. et ses sources: l'auteur ne connaît pas tous les mss. de cet ouvrage.

4. Le Bestiaire divin de Guillaume, clerc de Normandie, p. p. C. Hippeau (Caen, 1852).

vaise'), et d'autre part avec les textes latins du Physiologus2 et les textes français en prose (Pierre le Picard, Richard de Fournival 3), nous constaterons qu'il n'y a que fort peu de rapprochements à faire, et que notre auteur a le plus souvent imité, directement et sans intermédiaire, Pline et Isidore de Séville. Il faut cependant remarquer que dans quelques passages, il a dû se servir des mêmes sources que Richard de Fournival, avec lequel il a des développements communs. Nous voyons de plus apparaître dans ce bestiaire des animaux, comme la brebis, la tortue, le chameau, le faucon, qui ne figurent pas ailleurs.

Dans l'énumération détaillée qui suit, nous renvoyons, quand il y a lieu, aux Mélanges d'archéologie du P. Cahier et aux éditions, citées précédemment en note, de Philippe de Thaun, de Guillaume le Normand, de Gervaise et de Richard de Fournival.

Panthère.

Mél. d'arch. III, 235 (deux textes latins, un texte français en prose 4); Phil. de Th., p. 82; Guill. le Norm., p. 256; Gerv., vers 139; Rich. de Fourn., p. 24 et 71. Tous les bestiaires, sauf le nôtre, reproduisent le Physiologus. Voyez Pline, Hist. nat., VIII, 23 et Isidore, Etym., XII, 11, 8.

Hirondelle. Mél. d'arch., II, 145 (un texte fr. en prose); Rich. de Fourn., p. 28, 34 et 78. Notre texte n'a pas de rapports avec le texte en prose ni avec celui de Richard de Fournival. C'est Pline (Hist. nat., XI, 79 qui, après Dioscoride, parle des deux pierres qu'on trouve dans le corps de l'hirondelle: « In ventre hirundinum pullis lapilli candido aut rubenti colore, qui chelidonii vocantur, magicis narrati artibus, << reperiuntur. >> Voy. Isidore Etym., XII, vii, 70).

Cigogne.

Philippe de Thaun confond l'ibis avec la cigogne:
Ibex d'oisel [est] nun que cigonie apelum;

mais la confusion s'arrête au nom, et la description de l'ibis donnée par les textes des Mél. d'archéologie II, 201), par Philippe de Thaun p. 120, par Guillaume le Normand p. 228 et par Gervaise (vers 1177, n'est

1. Le Bestiaire de Gervaise, p. p. M. P. Meyer, dans la Romania, t. I (1872), P. 420-443.

2. Les textes latins du Physiologus, de même que le texte français de Pierre le Picard, ont été publiés par le P. Cahier dans les tomes II, II et IV de ses Mélanges d'archéologie (1851-1856).

3. Le Bestiaire d'amour, par Richard de Fournival, p. p C. Hippeau (1860). 4. Nous ne mentionnons pas le bestiaire rimé, reproduit par le P. Cahier ; ce n'est autre chose que le texte de Guillaume le Normand, auquel nous ren. voyons d'autre part.

5. Ed. Lemaire.

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