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sert pour ainsi dire d'introduction et est par conséquent transcrit en premier lieu dans les manuscrits qui renferment l'un et l'autre ouvrage. Les Faits des Romains ont pour titre complet dans beaucoup de ms., dont quelques-uns sont au nombre des plus anciens: Li fait des Romains, compilé ensemble de Saluste, de Suétone et Lucain. A la suite de ce titre on en trouve souvent un second: Cis premiers livres est de Juille Cesar 2. Enfin, on rencontre aussi, mais plus rarement, comme titre unique, Le livre de César 3. Il semble que ce dernier titre soit le plus approprié des deux, puisque l'ouvrage ne traite guère que de César, mais nous verrons tout à l'heure que l'auteur avait, en commençant son œuvre, l'intention de poursuivre l'histoire romaine beaucoup au delà du point où il s'est arrêté.

Voici l'énumération sommaire, et certainement incomplète, des mss. où les Faits des Romains se rencontrent isolés, ou du moins sans l'adjonction de l'Histoire ancienne. D'autres exemplaires, précédés de l'Histoire ancienne, seront indiqués dans la seconde partie de ce mémoire.

ASHBURNHAM PLACE, Barrois, 111; xva siècle.

BRUXELLES, Bibl. roy., 9040; seconde moitié du xve siècle 4. 10168-72; écrit à Rome en 1293.

10212, fin du XIe siècle 5.

LONDRES, Musée brit., Old roy. 17. F. II; 14796.

20. C. I; xv siècle.

OXFORD, Bodleienne, Canonici misc. 450. Ecrit par Benedetto de Verone et achevé le 1er avril 13847.

PARIS, Arsenal, 5186 (anc. H. F. 107); xve siècle.

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1. Au pluriel, cas sujet; le ms. du Musée britannique 20 C, I, qui est du xve siècle, porte: « Cy commencent les fais des Romains, compilez ensemble... » Ailleurs Li fais ou Le fait au singulier.

2. Ashb., Barrois, 31 et 11; Bibl. nat. fr. 293, 1391; Ars. §186; Bruxelles, 10168-71; 9104-5, fol. 217; Vat., Christ. 893. A la fin de ce dernier ms. on lit: Ici termine Suetoines la vie et la geste Cesar. Ci fenist li premiers volumes des .xij. Cesars. » Il est assez probable que le ms. 1391 de la Bibl. nat. se terminait par le même explicit, mais les derniers feuillets ont été arrachés.

3. Ms. de Bruxelles, 10212. Musée brit. 17. F. II: « La grant hystoire Cesar. » De là le titre de Cesarianus, en italien Cesariano, que l'ouvrage paraît avoir reçu en Italie au xve siècle. Voir plus loin, p. 33.

4. Ms. qui a appartenu à Marguerite d'Autriche.

s. On lit au haut du premier feuillet, d'une écriture du dernier siècle : « De la Bibliothèque des Capucins de la Voulte.» Probablement La Voulte-surRhône, Ardèche.

6. Exécuté à Bruges pour Edouard IV.
7. Voy. mes Rapports, pp. 158-9 et 245.

PARIS, Bibl. nat., fr. 293; écriture italienne, xve siècle.

294; xve siècle.

295; XIVe siècle '.
726; XIVe siècle.

1390; abrégé; XVIe siècle.
1391; fin du XIe siècle.

1394; fin du XIIIe siècle.

20312 bis; seconde moitié du xve siècle 2.

23082; écriture italienne, commencement du

XIVe siècle.

23083; fin du XIIIe siècle 3.

23084; xve siècle.

ROME, VATICAN, Reg. 124; XVe siècle 4.

893; fin du XIII siècle.

SAINT-PETERSBOURG, Bibl. imp., Hist. 6 D. XIe siècle §.

VENISE, S. Marco, Cod. Gall. III; commencement du xiv° siècle 6.

Charles V ne pouvait manquer de donner place dans sa bibliothèque à une histoire de César traduite du latin. Aussi y a-t-il lieu de reconnaître notre compilation dans les articles ci-après de la librairie du Louvre 7: « 972, Les fais des Romains, en un volume appelé Suetoine.

974, Les fais et la vie Cesar et Suetoine et des Romains. — 983, » Julius Cesar, en prose, bien escript, en très grant volume. 984, » La vie et les fais de Cesar, en prose. » Aucun de ces exemplaires ne paraît s'être conservé. Il serait facile de relever dans les anciens inventaires des librairies du moyen âge d'autres mentions du même ouvrage.

1. Ce ms. offre cette particularité unique qu'il est suivi d'une table des matières très détaillée avec renvois aux feuillets.

2. Anc. Sorbonne 504, provient de Richelieu, et antérieurement du duc d'Arschot comme plusieurs autres mss. de Richelieu (Delisle, Cabinet des mss., II, 206, note 1). C'est un mss. exécuté dans les Flandres.

3. Anc. Sorbonne 236. Ce ms. a successivement appartenu, au xve siècle, à Jean Le Begue, greffier de la Chambre des Comptes (sur lequel voy. Delisle, Cabinet des mss., 1, 23; II, 340; Boislisle, Chambre des Comptes de Paris, p. XIV), et à Charles d'Anjou, comte de Mortain; voy. Delisle, Cabinet, II, 340 et I, 56. 4. Je dois la connaissance de ce ms. et du suivant à une obligeante communication de M. E. Langlois, de l'Ecole de Rome.

S. Je n'ai pas vu ce ms. Je le cite d'après le catalogue sommaire de G. Bertrand, Rev. des Soc. sav., 5, VI, 480.

6. Ms. provenant des Gonzague, n° 12 du catalogue de 1407 (Romania, IX, 507); un court extrait en a été donné par L. Banchi, I Fatti di Cesare, p. xxiij.

7. Je cite d'après l'édition de M. L. D elisle, Cabinet des manuscrits, t. III.

Cet ouvrage a été imprimé sous le titre de Lucan, Suetoine et Saluste en françois. On en possède deux éditions, de 1490 et 1500, dues l'une et l'autre à Antoine Vérard. Ces imprimés offrent un texte fort rajeuni, comme on pourra en juger par les morceaux transcrits en appendice. Il est précédé d'un avant-propos qui a été évidemmeut rédigé en vue de l'impression, car il ne se trouve dans aucun ms., et d'ailleurs il porte tout à fait le caractère de l'époque où fut faite la première édition.

Je vais maintenant donner au lecteur une idée de cet ouvrage, en me servant, pour les citations, de l'un des plus anciens mss., le n° 23083 du fonds français.

Le titre rapporté plus haut indique que l'ouvrage est une compilation faite d'après Salluste, Suétone et Lucain. Mais l'auteur a puisé à d'autres sources encore, dant l'une est les commentaires de César, avec la continuation due à Hirtius. Il a fait un certain effort pour combiner ces divers ouvrages, sans cependant aller jusqu'à fondre dans une narration personnelle les récits de ses auteurs. Nous verrons cependant qu'assez souvent il cherche à les compléter les uns par les autres, rapprochant et comparant les témoignages. Le plus ordinairement il traduit ou analyse d'assez près, mais il a une manière à lui de traduire : ses traductions ne ressemblent en rien à celles des translateurs en prose de son temps ou de l'époque postérieure, de Jean de Meung, de Jean du Vignay, de Bersuire, de Nicole Oresme, qui tous, avec plus ou moins d'intelligence, avec une science variable, mettent leur effort à transporter en français les idées de l'original avec toute l'exactitude que comportait la langue de leur temps. Notre compilateur vise bien plutôt à adapter les récits des historiens romains au goût de son époque. Oresme et Bersuire conservaient sous une forme légèrement francisée les termes latins qui n'avaient pas de correspondants dans leur langue et les expliquaient de leur mieux dans un petit vocabulaire joint à la traduction. L'auteur du Fait des Romains n'est pas scrupuleux en fait d'équivalents. Peu soucieux de ce que nous appelons la couleur locale, ou de ce qu'on pourrait appeler la couleur de l'époque, il n'hésite pas à employer des termes connus de tous, dussent-ils ne correspondre que très imparfaitement aux mots du texte. N'ayant aucune crainte de l'anachronisme, il n'hésite pas à introduire dans sa narration les Français. les Flamands, les Sesnes (Germani). Sous sa plume, les vestales deviennent des nonnes ou des abbesses. Lorsqu'il a à rendre le passage où Suétone (XIII) dit que César obtint la dignité de pontifex maximus, il dit sans broncher que César « fu evesques ». Ses

1. Voir le Manuel du Libraire de Brunet, sous LUCANUS.

guerriers, vêtus du haubert et du heaume, ont tout à fait l'allure de chevaliers du moyen âge; ses récits de bataille, pour être traduits de Lucain ou de César, semblent empruntés à un roman de chevalerie. Son œuvre n'a rien de commun avec l'érudition: c'est de l'histoire ancienne mise à la portée des gens du moyen âge. Elle n'en est pour nous que plus intéressante, et si quelque jour elle trouve un éditeur attentif à marquer pour chaque passage la correspondance avec les sources latines, on reconnaîtra que c'était un livre véritablement digne du grand succès qu'il a obtenu du XIIIe au XVIe siècle.

Je vais en transcrire quelques morceaux, et d'abord le prologue qui indique assez bien le but que se proposait le compilateur, et en même temps nous donne un curieux échantillon de l'art avec lequel il savait tourner aux idées de son temps les pensées d'un ancien. Nous examinerons chemin faisant quelques-unes des questions que soulève la composition de cet ouvrage.

Le prologue que je vais transcrire en entier est tiré de Salluste. Un lecteur du xve siècle l'avait remarqué, et a écrit dans la marge du manuscrit dont je me sers: « Ex prologo Salustii in Catilinario. » Mais notre compilateur s'est inspiré de son modèle comme l'auteur anonyme du poème provençal ou limousin de Boëce s'était inspiré du traité de la Consolation de la philosophie: on sent bien que c'est un homme du moyen âge qui parle '.

Chascuns hom a qui Diex a donnée reson et entendement se doit pener que il ne gast le tens en oiseuse 2, et que il ne vive comme beste qui est encline et

1. Pour la commodité du lecteur je transcris ici le début du De Catilinæ conjuratione« Omnis homines qui sese student præstare ceteris animalibus, summa ope niti decet ne vitam silentio transeant, veluti pecora, quæ natura prona atque ventri obedientia finxit. Sed nostra omnis vis in animo et corpore sita est: animi imperio, corporis servitio magis utimur alterum nobis cum deis, alterum cum beluis commune est. Quo mihi rectius videtur ingeni quam virium opibus gloriam quærere, et, quoniam vita ipsa qua fruimur brevis est, memoriam nostri quam maxume longam efficere. Nam divitiarum et formæ gloria fluxa atque fragilis est; virtus clara æternaque habetur. Sed diu magnum inter mortalis certamen fuit, vine corporis an virtute animi res militaris magis procederet. Nam et prius quam incipias consulto, et ubi consulueris mature facto opus est. Ita utrumque per se indigens alterum alterius auxilio eget. Igitur initio reges - nam in terris nomen imperi id primum fuit diversi pars ingenium, alii corpus exercebant: etiamtum vita hominum sine cupiditate agitabatur, sua cuique satis placebant. Postea vero quam in Asia Cyrus, in Græcia Lacedæmonii et Athenienses cœpere urbis atque nationes subigere, lubidinem dominandi causam belli habere, maxumam gloriam in maxumo imperio putare, tum demum periculo atque negotiis compertum est in bello plurumum ingenium

posse. D

2. Ms. oieuse.

obeïssant a son ventre tant seulement. La vertu et la force de l'ome est en l'ame et el cors ensemble. L'ame doit commander et le cors servir et obeïr. Car l'ame a en soi l'ymage et la semblance de Dieu, et li cors est plus communs a bestial foibleté. Et pour ice, qui veut aquerre gloire, il la doit plus covoitier par richesce de sens et d'enging que par richesce de force et d'avoir. La vie de l'ome est bries, més vertuz, resons et engins fet longue la memoire de l'ome après la mort, car la gloire de biauté et de richesce est frelle et tost trespassée. Granz estrivemens fu entre les enciens pour savoir conment chevalerie pooit estre essauciée, ou par force de cors ou par vertu ou par sens de cuer, car avant que l'en face la chose doit l'en conseil prendre; après le conseil doit suivre le fet. Ne vaut donques riens conseil sanz oeuvre, ne oeuvre sanz conseil. Pour ce aüsoient li un des enciens leur enging, li autre aüsoient leur force, que l'en s'aperceüst que sens et enging pooit mout profiter es batailles avoec la force, puis icele heure que li roi commencierent a esmouvoir guerres premierement pour achoison de leurs seingnories acroistre, car ainz que les guerres commençassent, li home estoient sanz covoitise, et souffisoit a chascun ce qu'il avoit. Lors [se] estudioit chascun[s] plus volentiers en son enging aüser en sens que en amonceler richesces, que nus hom n'a fors a prest. Ainsint le tesmoingne Cycero, qui dist: « Ce qui me puet estre tolu n'est pas moie chose. » Des ore mès n'entent nus fors a conquerre avoir. Li un aiment mieux peresce que travail et li autre plus! uxure que continence ne que droiture 2. Mout y a de ceux qui ne querent ne mès que mengier et boire et dormir et aeisier les cors; des ames ne leur chaut. Cil ne puent pas monter en grant pris, mès cil qui plus suivent reson et droiture que delit charnel, qui font les proueces ou qui les recordent et metent en escrit, cil font a loer; car el recort des oeuvres enciennes aprent l'en que l'en doit fere et que l'en doit lessier. Pour ce escrivons nous ci ileuques les gestes as Romains qui par leur sens et par leur proesces conquistrent maintes terres, car en leur fez puet l'en assez connoistre connoissance de bien fere et de mal eschiver; et commencerons nostre conte principalement a Julius Cesar, et le terminerons a Domicien, qui fu li douziemes empereres, si que nous [i] metrons mainte persone qui orent diverses dignetez a Rome au tens des .xij. emperors, dont Julius fu li premiers, et ainçois. [Et] pour mieux continuer nostre matere, nous toucherons tout avant quieux dignetez et quieux baillies il ot a Rome ainçois qu'il i eüst emperors.

Suit un chapitre intitulé: Coment les seignories de Rome furent ordenées de rois et de senateurs lonc tens, et aussitôt après (ms. 23083, fol. 2 l) vient le récit de la naissance de César d'après Suétone. On a vu par les dernières phrases du prologue que l'auteur se proposait d'écrire l'his

1. Ms. son. Ici et ailleurs je corrige d'après les autres ms.

2. Ici reparaît Salluste: Verum ubi pro labore desidia, pro continentia et æquitate lubido atque superbia invasere, fortuna simul cum moribus minmu

tatur. »

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