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ct il est impossible que cela ne soit pas. » Mais il a encore plus de tort d'avoir employé huit pages de discours, et les autorités de saint Augustin et de saint Thomas pour le prouver; car, qui doute de cette vérité? Certainement je n'en ai jamais douté; mais ce que dit M. Arnauld fera croire que j'en doute, et peut-être que cela lui suffit. Plût à Dieu que je me trompe dans la pensée que sa critique fait naître dans mon esprit !

CHAPITRE XVI.

Réponse au quatorzième chapitre.

I. Ce chapitre 44 de M. Arnauld contient plus de vingt pages, et il en faudrait du moins une centaine pour éclaircir toutes ses brouilleries. Il semble, à l'entendre parler, qu'il n'ait vu que le blanc et le noir dans ce qu'il critique : tantôt il m'attribue des impertinences, que dis-je, des impertinences? des hérésies et des impiétés, et tantôt il expose mes sentiments véritables et il les combat par des discours qui ne les regardent nullement; en un mot, il confond si bien toutes choses, qu'il est beaucoup plus facile d'éclaircir le fond de la question que de donner de la suite et du sens à ses paroles.

II. Ce qu'il attaque principalement, c'est qu'on voit les objets matériels par l'étendue intelligible. D'abord il fait semblant d'être effrayé de cette pensée; et ensuite il dit, qu'il ne peut comprendre ce que j'entends par cette étendue intelligible. Et ainsi, par le trouble et l'embarras qu'il fait paraître, il trouble et embarrasse l'esprit de son lecteur, qui souvent entre naturellement et machinalement dans les dispositions des auteurs qui ont de la réputation.

III. « Je ne sais, dit-il page 129, que vous dire d'un tel discours; j'en suis effrayé. Car je trouve qu'il renferme tant de brouilleries et de contradictions, que toute ma peine sera d'en démêler les équivoques, et d'en découvrir les paralogismes. (Il devait plutôt dire, que toute sa peine sera de le remplir d'équivoques, et d'y trouver des paralogismes.) Et plus bas, page 135. « De bonne foi, je ne saurais deviner

ce qu'il a voulu que nous entendissions par cette étendue intelligible infinie, dans laquelle il prétend maintenant (je l'ai toujours prétendu ) que nous voyons toutes choses (oui, toutes les choses matérielles); car, continue-t-il, il en dit des choses si contradictoires, qu'il me serait aussi difficile de m'en former une notion distincte sur ce qu'il en dit, que de comprendre une montagne sans vallée. C'est une créature, et ce n'est pas une créature : elle est en Dieu et elle n'est pas en Dieu : elle est divisible, et elle n'est pas divisible: elle n'est pas seulement éminemment en Dieu, mais elle y est formellement; et elle n'y est qu'éminemment, et non pas formellement. C'est une créature, puisque c'est l'étendue que Dieu a faite et c'est l'étendue que Dieu a faite, : puisqu'il prouve par là que Dieu la connaît. » Dieu, dit-il, renferme en lui-même une étendue intelligible infinie. Car Dieu connaît l'étendue, puisqu'il l'a faite; et il ne peut la connaitre qu'en lui-même. « Et ce n'est pas une créature, puisque si cela était, en voyant les choses dans cette étendue intelligible infinie, nous ne les verrions que dans une créature, et son dessein est que nous les voyons en Dieu. Et par là il faut qu'elle soit Dieu, etc. »

RÉPONSE. IV. Y a-t-il, Monsieur, du sens dans ces paroles de M. Arnauld? Entend-il mon sentiment? ou s'il l'entend, est-il sincère? Mais pour le tirer de son embarras, et dissiper le trouble qu'il jette daus l'esprit de son lecteur, je lui demande :

Dieu ne connaît-il pas l'étendue qu'il a faite, avant que de l'avoir faite? Ce serait une impiété que de le nier. Dieu a donc en lui-même l'idée de l'étendue; or, c'est cette idée de l'étendue, c'est ce qu'il y a en Dieu qui représente l'étendue, ainsi que je me suis expliqué dans la Recherche de la Vérité : c'est cela que j'appelle ici et dans les Éclaircissements qu'il cite, étendue intelligible. M. Arnauld me rend-il justice, de prétendre qu'ayant dit dans un premier volume, qu'on voyait les corps dans ce qu'il y a en Dieu qui les représente, j'ai

changé de sentiment, à cause que je parle autrement dans le troisième, qui contient les Éclaircissements, et que je dis dans le passage qu'il cite, qu'on les voit dans l'étendue intelligible? N'est-il pas visible que c'est la même pensée? Mais est-ce une chose aussi difficile « de se former une notion distincte de cette étendue intelligible, que de comprendre une montagne sans vallée ? »

V. « Cette étendue intelligible, dit M. Arnauld, est une créature, et n'est pas une créature. C'est une créature, puisque c'est l'étendue que Dieu a faite. >>

RÉPONSE. Qui est l'impie qui a dit cette impiété? je lui dis anathème. Mais cet impie c'est moi-même; «< puisque, dit M. Arnauld, je prouve par là que Dieu connaît les créatures. » Oui, Dieu connaît dans son Verbe les créatures: mais son Verbe lui est consubstantiel. Dieu voit les corps dans l'étendue intelligible mais les corps ne sont point l'idée dans laquelle Dieu les voit. Leur être est bien différent de la nature immuable, ou de l'archétype sur lequel Dieu les a formés. M. Arnauld ne sait-il pas que l'essence de Dieu, en tant qu'elle est participable par les créatures, est l'idée éternelle dans laquelle Dieu les voit? Mais c'est peut-être qu'il suppose, que Dieu voit les créatures en elles-mêmes, et autrement que par ses divines idées, et par la connaissance qu'il a de ses volontés qui leur donnent l'être ? ce qui est une impiété, comme le dit saint Augustin dans le passage mème qu'il rapporte, hoc opinari sacrilegium est. Au reste, afin que l'embarras de M. Arnauld ne soit point une feinte, il faut bien qu'il ait sur cela un autre sentiment que moi. Qu'on tâche donc de s'en éclaircir, en lisant son livre depuis la page 129 jusqu'à 435.

VI. Mais Dieu est-il cette étendue intelligible? oui certainement car tout ce qui est en Dieu, est Dieu même. Cette étendue intelligible est sagesse, est puissance, est infiniment parfaite non selon qu'elle est représentative des corps, non solon que nous la voyons, non en tant qu'idée éternelle des

créatures, mais selon la substance que nous ne voyons pas en elle-même. Car tout ce qui est en Dieu, est Dieu tout entier, pour parler ainsi. Sa substance n'est point divisible: et quoiqu'il y ait dans l'étendue intelligible des parties intelligibles, des figures intelligibles, et toutes les vérités géométriques, Dieu est un être simple, indivisible, immuable; Dieu ne renferme qu'éminemment les corps qu'il a créés, mais il renferme dans la simplicité de sa substance infiniment infinie, les idées de toutes choses réellement, substantiellement, divinement.

VII. « On voudrait bien, dit M. Arnauld page 143, que ce ne fût qu'éminemment que je misse en Dieu l'étendue intelligible; car cela pourrait ne rien marquer qui fût indigne de Dieu. » Quoi! fera-t-il croire aux lecteurs, que je pense que l'étendue intelligible est une créature, afin de leur persuader ensuite, que j'ai cru que les créatures n'étaient pas seulement en Dieu éminemment, mais formellement? A quel dessein brouiller ainsi toutes choses? Ne pourrais-je pas lui dire sur cela, et sur tant d'autres ou malignités, ou méprises, une partie de ce qu'il reproche à M. Mallet? « On voudrait bien, dit-il, que ce ne fût qu'éminemment, etc. » Que cette parole est équitable et charitable ! je l'en remercie. Voilà comment il faut traiter ses amis. Il faut excuser leurs impiétés, ce ne sont que des méprises. Mais pourquoi prouvet-il si au long que ce n'est point éminemment, mais formellement, que j'ai cru que l'étendue intelligible était en Dieu, après avoir parlé de cette étendue comme de quelque chose tout à fait indigne de Dieu ? c'est assurément, qu'il faut préférer l'amour de la vérité à une honnêteté pernicieuse à ses amis. Jugez, Monsieur, de la conduite de M. Árnauld. Excusez son esprit, ou son cœur. Appelez cela par le nom qu'il vous plaira. Mais s'il vous a troublé sur mon sujet, rassurez-vous, et n'abandonnez pas la vérité, quoiqu'il la tourne en ridicule, et la représente comme un fantôme qui ne doit faire peur qu'aux esprits faibles.

CHAPITRE XVII.

Réponse au quinzième chapitre.

I. Voici comme débute M. Arnauld dans son chapitre 15: «On vient de voir, dit-il, dans le chapitre précédent, que rien n'est plus inintelligible que cette étendue intelligible infinie, que cet auteur a inventée pour nous donner moyen de voir les choses en Dieu; s'étant persuadé sur de faux principes, que nous ne pouvons voir autrement aucun des objets qui sont hors de nous. Mais ce qui n'est pas moins étrange, est qu'il ait si mal rencontré dans ce prétendu moyen de voir les choses en Dieu, qu'en lui accordant tout ce qu'il suppose, il est impossible que cette étendue intelligible infinie, dans laquelle il prétend que nous devons voir toutes choses, nous soit un moyen d'en voir aucune de toutes celles que nous ne connaîtrions pas, et que nous voudrions connaître.

« Je commence, continue-t-il, par les nombres; car il les met entre les trois choses que nous ne voyons qu'en Dieu, parce que nous les voyons par lumière, et par une idée claire. Je voudrais bien savoir quel est le nombre, qui, étant divisé par 28, il reste 5; par 19, il reste 6; et par 45, il reste 7. C'est-à-dire que je voudrais bien savoir le nombre de la période julienne qui a ces trois caractères, cinq du cycle solaire, six du nombre d'or, et sept de l'indiction. A quoi, je vous prie, me pourrait servir, pour connaître ce nombre, l'étendue intelligible infinie unie à mon âme? Me dira-t-on que tous les nombres y sont? etc. » Il prouve ensuite qu'on ne peut pas rencontrer ce nombre dans l'étendue intelligible; ce qui ne lui est pas fort difficile, comme vous pouvez juger. Et après s'être un peu diverti par le ridicule de cette pensée, il revient et dit : « Mais peut-être aussi que cette étendue intelligible n'est que pour les corps? etc. »

RÉPONSE. — II. Sur quoi, Monsieur, je vous demande s'il est seulement vraisemblable que M. Arnauld ait lu ce qu'il critique, dans le dessein de l'entendre et d'éclaircir la vérité?

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