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» mon cœur et non pas dans le tien. Voilà ce qui » a déterminé le suffrage du peuple; et quand les » parens des morts, chargés du triste soin de leur sépulture, ont donné le festin des funérailles, » c'est encore chez moi qu'ils l'ont donné, chez moi qu'ils regardaient comme tenant de plus près » que personne à ceux dont nous pleurions la perte. » Ils leur étaient liés de plus près par le sang, mais » personne ne l'était davantage par les sentimens » de citoyen; personne, dans la perte commune, » n'avait eu à pleurer plus que moi. »

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Rollin observe avec raison, que la seule chose qui puisse nous blesser dans cette immortelle harangue, ainsi que dans celle d'Eschine, c'est la profusion d'injures personnelles que dans plus d'un endroit se permettent les deux concurrens. Mais il est juste d'observer aussi qu'elles étaient autorisées par les mœurs républicaines, moins délicates sur ce point que les nôtres, et que par conséquent ni l'un ni l'autre n'a manqué au précepte de l'art, qui défend de violer les convenances reçues. Deux citoyens ennemis, deux orateurs rivaux s'attaquaient l'un l'autre sur tous les points, sur la naissance, sur l'éducation, sur la fortune, sur les mœurs, et cette recherche entraînait des détails qui ne sont pas toujours bien nobles nous, vu la différence des tems et du langage,

Cours de littér. Tome II.

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mais qui alors avaient leur effet. On les retrouve aussi dans Cicéron quand il parle contre Antoine, contre Pison, contre Vatinius, qui de leur côté ne l'épargnaient pas davantage. Quand ces injures n'étaient que des mensonges, elles ne compromettaient que celui qui les avait proférées; et quand elles étaient fondées, on pensait qu'un homme libre avait droit de tout dire. Il faut bien pardonner aux citoyens de Rome et d'Athenes, d'avoir cru qu'un honnête homme pouvait sans honte entendre les invectives d'un calomniateur. D'ailleurs, ce n'était pas tout-à-fait sans risque qu'il était permis d'accuser et d'invectiver : dans Athenes, l'accusateur devait avoir au moins la cinquieme partie des suffrages, sinon il était condamné au bannissement. C'est ce qui arriva à Eschine : il se retira dans l'île de Rhodes, où il ouvrit une école de rhétorique. Sa premiere leçon fut la lecture des deux harangues qui avaient causé sa condamnation. Je ne conçois pas, je l'avoue, comment il eut le courage de lire à ses disciples celle de Démosthene. On peut sans crime être moins éloquent qu'un autre; mais comment avouer, sans rougir, qu'on a été si évidemment convaincu d'être un calomniateur et un mauvais citoyen?

Pour Démosthene, un historien dont l'autorité à cet égard a été justement contestée, d'après le

silence de tous les autres, prétend que cette fermeté si long-tems inébranlable, ce désintéressement si soutenu, se démentit une fois; qu'après s'être élevé contre Alexandre avec la même force qu'il avait déployée contre Philippe, il se laissa enfin corrompre, et feignit d'être malade pour ne pas monter à la tribune; que cette indigne faiblesse l'obligea de se retirer d'Athenes; mais on peut douter de la faute, et il est sûr que sa mort fut honorable et courageuse. Revenu dans Athenes après celle d'Alexandre, il ne cessa de parler contre la tyrannie des Macédoniens, jusqu'à ce qu'Antipater leur roi eût obtenu, la force en main, qu'on lui livrât tous les orateurs qui s'étaient déclarés ses ennemis. Démosthene prit la fuite; mais se voyant près d'être arrêté par ceux qui le poursuivaient, il eut recours au poison qu'il portait toujours avec lui. On a remarqué que Cicéron et lui eurent une fin également tragique, et périrent victimes de la patrie, après avoir vécu ses défenseurs,

Note sur le troisieme chapitre.

On lit dans le nouveau Dictionnaire historique, à l'article de Démosthene, et à propos de cet éloge funebre qu'il prononça, qu'Eschine ne manqua pas de relever cette inconsé quence. On peut voir par la réponse victorieuse de Démosthene, que j'ai traduite dans ce chapitre, ce qu'il faut penser de cette

500 prétendue inconséquence, qui eût été celle des Athéniens tout autant que la sienne. Il est bien étrange de citer un reproche injuste sans dire un mot de la réfutation, surtout quand elle est péremptoire, et c'est venir bien tard pour se ranger du côté des détracteurs d'un grand-homme et d'un excellent citoyen. On cite encore (et toujours sans réponse) la déclamation d'Eschine, qui invoque les peres et les meres de ceux qui avaient péri à Chéronée, contre les honneurs qu'on voulait rendre à Démosthene, que l'on pouvait regarder comme leur assassin; comme si l'orateur citoyen, qui conseille une guerre légitime et nécessaire, était l'assassin de ceux qui succombent glorieusement dans la cause de la liberté contre la tyrannie. Il n'est permis de rapporter de semblables reproches que pour faire voir tout ce qu'ils ont d'odieux et d'absurde. L'auteur de l'article appelle ces clameurs de la haine, des désagrémens. Non, ce sont des attaques mal-adroites qui amenent le triomphe de l'accusé ce sont des titres de gloire.

COURS DE LITTÉRATURE.

:

Dans ce même Dictionnaire, à l'article Eschine, il est dit que les deux harangues pour la Couronne pourraient s'appeler des chefs-d'œuvre, si elles n'étaient encore plus chargées d'injures que de traits d'éloquence. C'est encore un jugement injuste et erroné de toute maniere. D'abord, il ne fallait pas mettre sur la même ligne le discours d'Eschine et celui de Démosthene quoique le premier ait des beautés réelles, il ne peut pas soutenir la comparaison avec l'autre, qui est en son genre un morceau unique et achevé. Ensuite il n'est nullement vrai que les injures, autorisées par la nature des controverses judiciaires et par la liberté républicaine, détruisent dans ces sortes d'ouvrages le mérite de l'éloquence, et qu'un défaut qui n'en est guere un que pour nous, l'emporte sur tant de beautés.

FIN DU TOME SECOND.

TABLE DES MATIERES

DU TO ME II.

CHAPITRE VI. De la Comédie ancienne.
SECTION 1. De la Comédie grecque.. Page 1
SECTION II. De la Comédie latine........53
CHAP. VII. De la Poésie lyrique chez les Anciens.
SECTION 1. Des Lyriques grecs.

SECTION II. D'Horace....

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.87

..107

CHAP. VIII. De la Poésie pastorale et de la Fable

chez les Anciens.

SECTION IT. Pastorales..

SECTION II. De la Fable....

121

127

CHAP. IX. De la Satyre ancienne.

SECTION 1re. Parallele d'Horace et de Juvénal.

..131

SECTION II. De Perse et de Pétrone......172
SECTION III. De l'Épigramme et de l'Inscrip-

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CHAP. X. De l'Élégie et de la Poésie érotique

chez les Anciens.

Catulle...

Ovide...

189

.191

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