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NOTES D'ÉTYMOLOGIE BRETONNE

(Suite).

40. DAMMOUCHEIN, MOUCHA; DAMMOUL;
DAM-, DEM-; DRAMOUILHEIN.

1. Le van. dammouchein chiffonner Châl., l'A., bouchonner le linge l'A., foupir l'A., Suppl., damouchein bouchonner, chiffonner Ch. ms, damouchein chiffonner Gr., d'où dammouchour m. pl. -cherion chiffonneur l'A., est comparé avec doute au gall. gwthio pousser, Gloss. 142, 143. Mais d'après ce qu'on a vu plus haut (no 35, § 3), la phonétique exigerait une finale -hiein; c'est pourquoi je rejette maintenant cette conjecture plus absolument encore que ne l'a fait M. Henry, Lexique 87.

2. Dameuhein, cité à cet endroit, n'est pas du bret. moyen, mais du van. moderne, présenté même avec un « peut-être » aux deux endroits où en parle Châl. ms, au lieu de ober dameuh réverbérer, réfléchir. Le mot dameuh réfraction, réverbération, répercussion de lumière, de vent ou de chaleur, retentissement (du son), est seul attesté dans le même ouvrage. Encore l'auteur, qui l'emploie à plusieurs reprises, a-t-il cherché inutilement à le vérifier dans l'usage, après avoir oublié son garant, qu'il avait négligé de noter (cf. Rev. Celt., XI, 361; Gloss. 142).

3. J'ai rapproché à tort de ces deux mots, Gloss. 143, le van. dramoüillein patiner Châl., -ouillein Ch. ms, -ouilheiñ id., -oüilhein chiffonner, -oüilleiñ bouchonner le linge dressé Gr., d'où drammouillour patineur (tâtonneur) l'A., en cornou.

drammouilla chiffonner selon Trd; et dammoul moite, un peu mouillé, un peu humide.

Pel. donne ce dernier comme van.; mais cette mention manque à l'article correspondant, dans Roussel ms, et l'on ne trouve pas le mot dans Châl., qui est la source de Pel. pour le bret. de Vannes. L'indication du dialecte est donc due à une erreur, venant sans doute de ce que les articles voisins sont vannetais.

4. Dammoul doit contenir la particule dem un peu, presque, à demi, que donne Roussel ms avec ces exemples: dem welet entrevoir, presque voir, voir à demi; dem-cas « presque haine. >> Pel. dit qu'il a appris dam, dem de Roussel, qui en donnait pour exemple dam-gas presque haine; dam-welet entrevoir. La variante dem-cas montre que l'adoucissement de l'initiale suivante n'est pas toujours si bien observée que dans les mots cités Gloss. 141, etc. (demwelet a ran j'entrevois, dem-gas presque haine, dem-brest, dem-brestik presque prêt, bientôt, sans retard Mil. ms, goude dem-brestik peu après, Combeau ibid., dem-gomz v. n. parler à demi-mots, faire allusion à, Trd, dem-vruzuna briser à demi, dem-zigeri ouvrir à moitié Moal 53, dem-zigor entr'ouvert 85, dem-velenn jaunâtre Gr.), cf. dem-christen à demi-chrétien Gr., dem-mezok un peu honteux Moal 296.

La seconde partie, -moul serait pour *moult(r) = moeltr humide, Gloss. 432.

5. Peut-être dammouchein est-il composé du même préfixe. Cf. v. franç. mouser froisser Gloss. 432, et moucha travailler avec la houe, en haut Léon, Moal?

6. Quant à dramouilhein, il n'est pas sûr qu'il vienne de dam-, comme je le croyais encore, Epenthèse des liquides 38. Il peut avoir le suffixe des mots comme le franç. barbouiller, etc., ibid. 35, et le radical du bret. moy. et mod. dram javelle, que nous allons étudier.

41. DRAM, ENDRAM', DRAMAN; DRAMOUR;
DRAMOUN; LANDRAMUS; LANDAR.

1. Le moy. bret. dram javelle est dans la langue moderne dramm pl. ou « javelle, trois ou quatre poignées de blé coupé, que l'on laisse sur la terre pour sécher avant que de les mettre en gerbes »; « il faut sept ou huit javelles » (dramm) « pour faire une gerbe » (ur valan) Gr.; dram pl. ou « poignée de ce que l'on coupe avec la faucille soit de bled soit d'herbe verte >> Rel ms, cf. Pel.

Une description de la moisson (ar medi) dans Mil. ms, en breton avec quelques gloses françaises, commence ainsi : « An ed a vez medet (trouc'het) a zrammou (pe a zournadou, ar c'hempenna eo) pe a strop (à tour de bras comme pour faucher l'herbe). Eun dramm ed a zo diou pe deir dournad ed enn-hi. » C'est-à-dire Le blé se moissonne (se coupe) par javelles (par poignées, c'est la meilleure façon), ou à tour de bras... Une javelle de blé en contient deux ou trois poignées.

:

On voit que Milin faisait dramm du fém., contrairement à Le Gon. et Trd. En petit Trég. on dit dram pl. o, fém.; en van. l'A. donne de même dram pl. eu f. javelle, paquet pour attacher en gerbes.

Le dictionnaire ms de Brézal, dont je dois la connaissance à une très obligeante communication de M. F. Vallée, donne au plur. drammou et drimmier; sur quoi M. l'abbé Caer, recteur de Gouezec, a noté que drammou est du haut Léon; et la Breuriez Vreiz de Quimper, société de séminaristes qui travaillent leur langue avec un zèle éclairé, remarque qu'on dit en bas Léon dremmen. Cf. Rev. Celt., VIII, 524; Gloss. 195. Châl. ms traduit javelle par « dram ou endram'. »

2. Ce composé est d'ordinaire un verbe endramm, van. endramm, indramm engerber, lier les javelles sèches, et les mettre en gerbes Gr.; endram « enjaveller, mettre en javelle »,

endram, endrami « mettre blé en gerbes » Re1 ms, cf. Pel.; van. indram, ind[r]amein javeller Châl., indram', indramein engerber, indram' javeller Ch. ms; indramm enjaveler, engerber, indrammein engerber l'A.

Châl. ms donne aussi le simple dramein javeller; on dit de même en pet. Trég. draman. C'est sans doute ce verbe qui se trouve dans me dramfe anout je te renverserais (comme une poignée d'épis), à Langoat, Rev. Celt., IV, 152; le van. dramouilhein chiffonner peut en être une sorte de diminutif.

Dram répond à l'irl. dream m. touffe de foin ou de paille, et au grec Spάyua poignée, gerbe.

3. Le bret. a un autre mot dram, qui vient du v. franç. dragme, drame f. drachme, gros, huitième partie de l'once. Grég. traduit «< dragme, monnoïe des Grecs »> par dram pl. ou, et «< dragme, terme de Medecins » par dram pl. ou, van. ëu; l'A. donne, pour la première acception, dragme m.; il a aussi dram f. pl. eu, drammeu médecine, médicament; de même Châl. dram dose, médecine. Voir Rev. Celt., XV, 357. Le dérivé dramour m. pl. -merion apothicaire l'A., drammour droguiste l'A. Sup. est le v. franç. drameur charlatan. L'A. a encore dramereah f. action de médicamenter.

4. Je ne sais s'il faut comparer à dram javelle dramoun << un coup de vent aussi fort que rapide, il court en rond,... tourbillon » Mil. ms.

5. Cela est probable pour le pet. tréc. dramm f. lambine, femme lente, Rev. Celt., IV, 152.

6. Landramus encombrant, difficile à porter, en pet. Trég., doit être un mélange de ce dernier avec le radical du franç. lendore, v. franç. landreux, qui a donné par ailleurs en breton :

landar paresseux, fainéant, làche, lent Rems, Pel., « dans les Provinces voisines de Bretagne on dit Lander presque au même sens » Pel.; landar, lander adj. paresseux, en Cornou., Trd; Mil. ms ajoute : « et landore »;

landrea tarder en route, casaner Rel ms, landrei tarder

Gr. selon Pel.; landréa, landréi v. n. agir avec lenteur, avec paresse, tarder Gon. (Trd fait de ce mot un verbe van. landrea, landreat); van. landrenn' languir Ch. ms;

landreant musard Maun., landreand pl. ed valétudinaire, languissant; fainéant, traînard, landreant pl. ed, landread pl. ed, « grand lâche, landort à tout ce qu'il fait », ez landread lâchement, lentement Gr.; landreant, landreat « paresseux, fainéant. C'est un homme qui tarde dans les chemins. Landreeur » Rel ms, cf. Pel.; landréant, landréat adj. et s. m. pl. -ñted paresseux, lent, fainéant Gon.; landreantt paresseux, -ndéss paresseuse l'A.; landreantiz fainéantise Gr., landréantiz f. Gon. (landreantiz m. en Vannes selon Trd); landrus languissant, landrenus id., (vie) de fainéantise Ch. ms; landreinnage paresse l'A. Voir le suiv.

42. LANDOURC'HEN; FILLOURC'HEN.

1. Il faut rattacher, je crois, à la famille de landar le mot landourc'hen, c'est une injure atroce à une femme, fille, etc. Rel ms cf. Pel., landourc'hen f. femme de mauvaise vie Gon., landourc'henn femme sale, femme de mauvaise vie Trd. En petit Tréguier eul landourc'hen, ou eul landourc'hen a blac'h ne signifie que «< femme de grande taille, indolente, et, par suite, négligée dans sa mise ». Les deux compositions avec tourc'h admises par Pel. et par M. Henry n'ont aucune vraisemblance.

La terminaison du fr. lendore a été accommodée ici au suffixe dépréciatif -ourc'h, cf. Rev. Celt., XVI, 234, 235; Gloss. 367.

2. Cette finale se trouve encore dans fillourc'hen f. « une femme sale, malpropre, paresseuse et se croyant bien; vaniteuse -louz, lorc'huz ha didalvez; loudouren, stlabezen » Mil. ms. Le mot est ainsi écrit deux fois, sans note sur la prononciation. Il est probable que l' est mouillé.

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