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Mannire. Marga. Physeter. Platesia. Pontones. Rheda. Roccus. Sala. Sapo. Scara. Scepeno. Scuria. Wachte. Wanti. Waterganga. Werpire. Ensuite un exposé simple et précis de la révolution qui s'est opérée dans la langue de nos ancêtres, soit pendant la période Romaine, soit après la conquête de la Gaule par les Francs, nous fera connaître l'instabilité d'une langue vivante. La politique du peuple Romain était d'assujettir à parler sa langue les nations vaincues et réunies à l'Empire.

Ce fut depuis César et sous les premiers Empereurs, que la Gaule commença à connaître deux langues. Les professeurs Latins vinrent occuper dans les colléges de Chartres et d'Autun, les chaires que les Druides y avaient remplies jusqu'alors. La langue Latine devint la langue savante de la Gaule; mais la langue vulgaire ou Gauloise se soutint toujours. Les Romains même empruntèrent plusieurs mots de cette langue, tels que ceux de Rheda, Ambacti, Carrus, Sapo, Ganza, Braccæ, &c. Tacite (1) dit que les Gothins, peuple de Germanie, parlaient la langue Gauloise. Pline, en vingt endroits de son Histoire, distingue des termes de la langue Gauloise; et Suétone (2) cite le mot Bec, dans le même sens que nous le prenons encore, comme étant alors en usage à Toulouse. Quand la Gaule abandonna le culte du paganisme, le Latin déjà employé

(1) Tacitus de Agric. Vita, cap. 43, pag. 270, tom. II, in Collect. Script. Lat. veter. Gothinos Gallica.... lingua coarguit non esse Germanos.

(2) Suetonius in Vitellio, cap. 18, tom. II, pag. 934, edit. Leovard. 1715.

pour les sciences et les lettres, le fut encore pour les matières de Religion; mais il ne s'établit pas dans l'usage ordinaire, dont la langue Gauloise resta en possession. S. Irénée, Evêque de Lyon, qui fut martyrisé sous l'Empire de Sévère, écrivait à un de ses amis, en lui envoyant ses Livres contre les hérésies: Depuis que je vis parmi les Gaulois, j'ai été obligé d'apprendre leur langue. Une Prophétesse Gauloise parle en sa langue à l'Empereur Alexandre Sévère (1). Ulpien (2), dans le Digeste, décide qu'un fidéi-commis écrit non seulement en langue Latine ou Grecque, mais aussi en langue Punique et Gauloise, est valable. Ammien Marcellin (3), Ausone (4), Claudien (5) supposent la langue Gauloise encore subsistante. Les Francs, en entrant dans les Gaules, loin d'abolir la langue

(1) Elius Lampridius in Alexandro Severo, cap. 60, pag. 354, tom. II, in Collect. Script. Latin. Veter. Mulier Druias eunti (Alexandro) exclamavit Gallico sermone, Vadas, nec victoriam speres, nec militi tuo credas.

(2) Ulpianus, Leg. XI, pr. Dig. de Leg. III, affirmat, fidei commissa quocumque sermone relinqui posse, non solum Latina, vel Græca, sed etiam Punica, vel Gallicana.

(3) Ammianus Marcellinus, L. 15, pag. 427, tom. II, in Collect. Scriptor. Latin. Veter.

(4) Ausonius de Claris Urbibus, n. 14, Burdigala, pag. 123, tom. V, in Collect. Pisaurensi.

Salve urbis Genius, medico potabilis haustu,
Divona Celtarum lingua, fons addite Divis.

(5) Claudianus Epigram. de Mulabus Gallicis, pag. 526, tom. III, in Collect. Pisaurensi.

Miraris, si voce feras pacaverit Orpheus,

Cum pronas pecudes Gallica verba regant?

vulgaire du pays, y apportèrent la leur, qui était aussi la Germanique ou Tudesque, et ils empruntèrent eux-mêmes plusieurs nouveaux dialectes des Gaulois, comme les Pélasges avaient pris autrefois en partie la langue des Hellènes, et les Troyens celle des Aborigènes. C'est l'ordinaire que les colonies qui ne conservent plus de liaison avec leur patrie primitive, prennent le langage des peuples avec lesquels elles se confondent.

On remarquera dans la suite par quelles dégradations ou réformations s'est formée plus tard la langue Française actuelle. Les nouveaux conquérans des Gaules, venus du Nord, apprirent à parler la langue des Rómains; mais en la parlant ils la corrompirent: non seulement ils en dénaturèrent les sons par leur prononciation rude et contractée, mais encore ils introduisirent dans son lexique et dans sa grammaire les expressions et les tours de leurs propres idiomes. C'est alors que l'on a vu naître de cette monstrueuse alliance du Latin avec les divers dialectes de la langue du Nord, tous ces jargons informes, qui, devenus plus ou moins lentement une langue régulière, se sont rendus dans la suite illustres par tant de chefs-d'œuvre comparables à ceux de l'Antiquité. Toutefois ces grossiers jargons ne furent employés d'abord que dans les relations ordinaires de la vie. La langue Tudesque fut long-temps la langue de la Cour, et celle de Charlemagne. Un Latin Tudesque, si l'on peut s'exprimer ainsi, était la langue du Gouvernement et des Tribunaux où se jugeaient les affaires civiles et canoniques.

Mais pendant quelques siècles, on ne parla d'autre langue que la Romane et la Tudesque, et nous voyons qu'outre les différens dialectes qui s'étaient introduits dans la Monarchie, par le mélange de tous les peuples qui la composaient, il y avait toujours le Tudesque et le Roman, qui la partageaient principalement. Par un Canon du troisième Concile de Tours, en 813, un an avant la mort de Charlemagne, il est ordonné aux Evêques de choisir à l'avenir de certaines Homélies des Pères pour les réciter dans l'Eglise, et de les faire traduire en langue Romane - Rustique et en langue Tudesque ou Théotisque, afin que le peuple pût les entendre.

De même que les Celtes ont été appelés Gaulois par les anciens, de même leur langue a été nommée la langue Gauloise. Cependant, dans la suite, on donna quelquefois le nom de langue Gauloise à celle qui fut formée de la Latine altérée par la Gauloise; de sorte que souvent ce fut deux choses différentes de parler Celte et de parler Gaulois. C'est pour cela que Sulpice Sévère (1), Auteur du cinquième siècle, introduit une personne qui, dans un Dialogue, tient ce discours à une autre Ou parlez Celte, ou, si vous aimez mieux, parlez Gaulois, pourvu que vous me parliez de Martin.

On ne laissa pas cependant d'appeler aussi, dans la période

(1) Sulpicius Severus, Dialogo 1, n. 20, pag. 573 et 574, edit. Lugd. Bat. 1654. Dum cogito me hominem Gallum inter Aquitanos verba facturum, vereor ne offendat vestras nimium urbanas aures sermo rusticior. ... Tu vero, inquit, Posthumianus, vel Celtice, aut si mavis Gallice loquere, dummodo jam Martinum loquaris.

des Francs, langue Gauloise la Celtique ou Tudesque, comme nous le verrons plus bas, en citant l'ancien Biographe de S. Oyend (1) Cet Auteur du sixième siècle se sert du mot isarnodorum, qui, en langue Gauloise, dit-il, signifie porte de fer (en Flamand, yzeren-doore ou yzeren-deure).

Nous n'oublierons pas les Sermens célèbres de Charles-leChauve, Roi de France, et de Louis son frère, Roi de Germanie. Ces deux Princes ayant fait un traité d'alliance, en 842, le confirmèrent de part et d'autre par la Religion du serment, Charles-le-Chauve en langue Tudesque, et le Roi Louis en langue Romane. Nous rapporterons ces deux sermens mot à mot d'après Nithard (2), Ecrivain du neuvième siècle, avec l'explication puisée dans les Auteurs. L'Epinikion du Roi Louis, en langue Teutone, au sujet de la victoire remportée sur les Normands, en 883, et encore en usage au onzième siècle dans le Ponthieu et dans ses environs, prouve clairement que le Tudesque avait pris des racines profondes chez les habitans de la Gaule.

Nous jetterons un coup-d'oeil sur le Livre des Evangiles en langue Teutone d'Ottfride, Moine de Weissenbourg, au neuvième siècle; et sur l'Harmonie des quatre Evangélistes, attribuée à Tatien, disciple de S. Justin, et traduite en vieux Tudesque. Les Commentaires Teutons de la Règle de S. Be

(1) Voyez plus bas les Acta Sanct. Ord. S. Bened., tom. I, pag. 570. (2) Du Chesne, Historia Franc. Scriptor. Formula Fœderis Ludovici Germaniæ et Karoli Gallia Regum, etc. tom. II, pag. 381 et sequent.

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