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tion toute la clarté désirable. Ce sont: 1° les sociétés géographiques nationales et étrangères, foyers où se concentrent et s'élaborent les lumières isolément recueillies, et qui concourent directement à l'avancement de la géographie; 2o les institutions spéciales qui, sous les noms de dépôts de la guerre ou de la marine, de bureaux géographiques ou hydrographiques, etc., effectuent les grands relèvemens géodésiques et nautiques, 5° les corporations académiques, sociétés des missions, sociétés asiatiques, etc., qui, sans avoir pour but direct les progrès de la science, lui rendent souvent d'éminens services; 4° les établissemens industriels qui s'occupent sur une grande échelle de la confection des cartes, atlas, etc.; 5o enfin les travaux individuels, qui luttent parfois d'importance avec ceux des corps scientifiques, et ont généralement sur eux l'avantage de cette popularité qui s'attache à des formes plus mondaines et plus attrayantes.

Nous allons examiner ces divers élémens.

Sociétés géographiques de Paris, Londres, Berlin et Bombay.

La Société de géographie de Paris a précédé toutes celles qui se sont établies dans ces dernières années en Angleterre, en Allemagne, et jusque dans l'Inde. C'est elle qui leur a servi de modèle, qui, la première, a donné l'impulsion à ces jeunes rivales destinées peut-être à la surpasser dans la carrière qu'elle a ouverte.

Les corps savans produisent rarement des travaux collectifs; leur but spécial est d'encourager les efforts individuels, d'amasser des matériaux, de les coordonner, et de les mettre à la portée de tous. La Société de géographie de Paris a consacré à l'accomplissement de cette œuvre tous les moyens dont elle a pu disposer, et l'on pourrait peut-être lui reprocher plutôt un peu de prodigalité dans la distribution de ses prix, qué le défaut contraire. Néanmoins, si toutes les lacunes qu'elle provoquait à remplir n'ont point été comblées, quelques-unes des questions de ses programmes annuels ont reçu une solution satisfaisante. Sans rappeler un à un les nombreux et estimables travaux qu'elle a eu occasion de couronner, nous citerons du moins les principaux, auxquels demeurent attachés les noms de Bruguières, de Pacho et de Caillié.

L'Orographie de l'Europe, du premier, est un véritable monument de géographie physique, où la description du septuple système des reliefs européens est basée sur plus de sept mille quotes de hauteurs absolues, scrupuleusement vérifiées, avec l'indication des mesures locales, des sources qui les ont fournies, des méthodes employées pour les obte

nir, etc., vaste travail où des coupes et des profils nombreux représentent à l'œil, dans un ordre lumineux, chaque système de montagnes, avec ses groupes secondaires, ses rameaux, ses points culminans, etc.

Pacho, dans son exploration du pays de Barqah (en suivant une route qui cotoie la mer depuis Alexandrie jusqu'à El-Agedâbiah, se dirige ensuite sur Aougelah, pousse une reconnaissance à l'ouest jusqu'à Maradeh, et revient vers l'Egypte par Mogabérah et Syouah), a laissé bien loin derrière lui les aperçus superficiels de Della Cella, les notices incomplètes du père Pacifique et de Cervelli, et les fragmens épistolaires de Horne

mann.

Il serait superflu d'insister sur l'importance du voyage de Caillié à TenBokto ue, de rappeler cette volonté ardente, cette ténacité inébranlable qui a conduit un jeune homme sans fortune, sans protecteurs, au terme d'une expédition dans laquelle tant de martyrs de la science ont succombé. Jetez seulement les yeux sur une carte, et vous verrez qu'entre le point de départ et celui d'arrivée de cet immense itinéraire presque tout était inconnu.

Non contente de distribuer des récompenses aux voyageurs et aux géographes qui accomplissent des découvertes désignées d'avance par elle, la Société de géographie décerne chaque année un prix à la découverte la plus importante exécutée dans cet intervalle, et des prix secondaires aux travaux d'un moindre intérêt, quel que soit le théâtre de l'exploration. C'est ainsi que pour 1828 la veuve de Gordon Laing, mort au désert près de Ten-Boktoue, a été appelée à partager ce prix annuel avec Caillié; que, pour l'année précédente, le capitaine Franklin l'avait obtenu à raison de son exploration des côtes arctiques américaines entrevues par Hearne et Mackenzie; qu'à défaut de découvertes effectuées en 1829, le capitaine de frégate Graah, de la marine danoise, reçut une médaille pour son relèvement de la côte orientale du Groënland; qu'enfin, l'année d'après, ce prix fut accordé à l'auteur d'un voyage au Congo et dans l'Afrique équinoxiale.

Ce voyage a fait trop de bruit, a donné lieu à trop grand scandale pour que nous n'en parlions point ici avec quelque détail. Il nous suffira, pour poser en ses véritables termes la question scientifique à laquelle on a cru intéressée la dignité de la Société de géographie, de rapporter simplement les faits.

Le 17 mars 1826, un voyageur près de partir pour l'Amérique du sud fut inscrit au nombre des membres souscripteurs de la Société. Le 1er décembre de la même année, il rendait compte de son arrivée à BuenosAy res, qu'il croyait alors avoir visité huit ans auparavant; il annonçait

l'hommage prochain d'une carte géographique du pays faite à son premier voyage, et qu'il s'occupait de corriger avec l'aide du docteur don Bartoloméo Muñoz. Depuis, il a complètement oublié ce premier voyage fait en 1848, et il croit aujourd'hui que lorsqu'il s'embarqua pour BuenosAyres, en 1826, cette ville était, de toutes les cités importantes de l'Amérique du sud, la seule qu'il ne connût point encore. Le 1er juin 1830, le même voyageur écrivait de Rio-Janeiro qu'il venait de visiter le royaume d'Angola et les pays inconnus qui sont au-delà, jusque chez les Miluas et chez le souverain Muéné-Hai. Ce voyageur était M. Douville.

Arrivé à Paris, M. Douville adressa à la Société, le 15 juillet 1834, un aperçu de son itinéraire dans le centre de l'Afrique. Le 25 novembre suivant, il lut, en séance solennelle, une esquisse des peuples nègres au sud de l'équateur, et fut alors compris dans l'élection générale des membres de la commission centrale.

A cette époque, il fit un voyage à Londres, présenta à la Société géographique anglaise une notice analogue à celles qui avaient été si bien accueillies à Paris, et, sur la proposition de M. John Barrow, il fat proclamé, séance tenante, membre honoraire de cette société, qui souscrivit en même temps, pour deux cents exemplaires, à la relation qu'il se proposait de publier.

La Société de Paris alla plus loin encore: au mois de mars suivant, elle donna à M. Douville une place dans son bureau, et lui décerna sa médaille annuelle. L'authenticité du voyage au Congo paraissait en effet d'autant moins douteuse, que l'auteur montrait en masse tout ce qu'il rapportait de cartes, de dessins, de journaux, et annonçait l'intention de livrer au consciencieux Brué tous les élémens nécessaires pour la construction de la carte dont il n'avait fait qu'ébaucher de grossiers croquis, et de soumettre également à la révision de M. Eyriès la relation manuscrite de son voyage. Nous-même nous avions fait un inventaire rapide de tous ses papiers, et nous l'avions publié dans le cahier du 15 février 1832 de la Revue des Deux Mondes.

Cependant des doutes percèrent bientôt, non sur la réalité d'un voyage dont tous les matériaux avaient passé sous nos yeux, mais sur la valeur intrinsèque de ceux-ci; et quand la relation du voyageur eut paru, ces doutes grandirent tout à coup, à l'inspection d'une table de positions géonomiques insérée au troisième volume avec des annotations inapplicables à plusieurs des observations indiquées. De là des questions et des réponses, des objections et des répliques qui aggravèrent singulièrement l'opinion défavorable que s'étaient graduellement formée les géographes positifs, de la capacité du voyageur pour la détermination des positions

géographiques. Un fait dominait et domine encore toute la question: des observations astronomiques nombreuses avaient été faites; elles étaient consignées avec leurs calculs dans le journal manuscrit du voyage; mais il s'élevait à leur égard ce sévère dilemme : ou elles étaient l'ouvrage de M. Douville, et alors il ne fallait guère compter sur l'exactitude des résultats; ou elles étaient bonnes et bien calculées, et alors il ne pouvait en être l'auteur (4). En vain d'officieuses instances pressaient le voyageur de couper court à toutes ces incertitudes, en publiant incontinent ses observations originales. Brué lui-même n'avait pu en obtenir la communication pour des vérifications nécessaires à la construction de la carte, et avait été obligé de déclarer qu'il en était simplement le rédacteur. Sur ces entrefaites, le Foreign Quarterly Review de Londres révéla au public les objections qui s'étaient présentées à l'esprit des hommes spéciaux d'Angleterre, comme elles avaient déjà frappé ceux de France et d'Allemagne. La seule réponse qui eût pu être efficace, quoique dès-lors même elle eût peut-être été tardive, ne fut point faite.

La Société de géographie jugea alors que sa dignité était intéressée à l'éclaircissement de la question d'authenticité du voyage; et, sur la demande de ceux-là mêmes qui avaient proposé sa première sentence, elle somma le voyageur, présent aux discussions, de produire devant elle ses observations originales. Après quarante jours d'une vaine attente, la commission centrale déclara, d'une voix presque unanime, qu'en l'absence des justifications qu'elle avait provoquées, elle était forcée de rester dans le doute sur la véracité des résultats publiés.

Pour conclusion, une expédition dans l'Afrique équatoriale a été réellement exécutée, et quelques révélations que nous réserve l'avenir sur sa date réelle et sur son véritable auteur, les résultats que nous en connaissons, tout incomplets et tout altérés qu'ils soient, n'en constituent pas moins une acquisition importante pour la science (2).

(1) Un écrit périodique allemand, organe des impressions parisiennes, s'exprimait assez crûment à cet égard dès cette époque : « Ou bien il s'est peut-être trouvé dans sa suite quelqu'un qui entendait la partie des observations astronomiques (conjecture qui se trouve en quelque sorte justifiée par les paroles de M. Douville lorsqu'il dit que la mort ne tarda pas à le priver du secours des personnes qui étaient en état de l'aider); ou bien toute l'histoire des observations astronomiques n'est qu'une fiction, et les positions géonomiques sont déduites de la construction purement graphique des itinéraires. » Annalen der erd-wo elkerund staten-kunde. Berlin, 30 juin 1832.

(2) La Revue ne conteste aucun des faits avancés par l'auteur de ce travail; toute

cellanées, dont la première est un fragment géographique écrit en latin, et intitulé Mirabilia descripta per fratrem Jordanum, ordinis prædicatorum, oriundum de Severaco, in India majore episcopum Columbensem. Le manuscrit original, en caractères gothiques sur parchemin, appartient à la riche collection de M. Walckenaer, et paraît antérieur au XVe siècle. Quant à la date des voyages du frère Jourdain de Severac, on peut conjecturalement la rapporter au XIIIe siècle. Son récit contient une description sommaire de la Grèce, l'Arménie, la Perse, l'Arabie, l'Inde et la Tartarie. Ce fragment seul est imprimé en ce moment; il doit être suivi d'une relation espagnole du voyage à l'île d'Amat (Taïti) et aux iles adjacentes, fait en 4774 par un capitaine de paquebot, de conserve avec la frégate el Aguila, commandée par le capitaine don Domingo de Bonechea, le découvreur de ces îles.

Le Bulletin mensuel de la Société de géographie est une publication moins importante que la précédente; uniquement destinée, dans le principe, à constater les opérations de la commission centrale, elle fut rendue bientôt plus intéressante par l'insertion des nouvelles et des documens géographiques de toute espèce obtenus par correspondance ou communiqués dans les séances ordinaires, et classés sous différens titres afin de les coordonner; malheureusement le plan qui avait été adopté pour l'amélioration de ce recueil n'a jamais été qu'imparfaitement rempli, quelques parties ont été négligées, puis oubliées complètement, de sorte que le Bulletin n'est plus qu'une espèce d'album ouvert à des mélanges géographiques, au lieu de constituer, comme il nous semble que cela devrait être, un véritable mémorial où les géographes trouveraient chaque mois un relevé complet de toutes les découvertes et de toutes les publications qui intéressent la science. Vingt volumes de ce recueil ont été déjà publiés, el constituent une première série qui se termine avec l'année 4855. Ils sont trop connus pour que nous ayons à détailler ici les matériaux qu'ils renferment. L'espace d'ailleurs nous est limité, et nous devons le réserver aux travaux des sociétés étrangères; sur lesquelles nous allons maintenant jeter un coup d'œil.

L'Angleterre a surtout le droit de réclamer, sous ce rapport, notre attention et nos éloges. La célèbre Association africaine, formée à la fin du siècle dernier dans le but d'explorer l'Afrique, dont l'intérieur semblait obstinément fermé à nos investigations, a glorieusement ouvert et entrepris de parcourir une carrière périlleuse, où se pressent les noms de Mungo-Park, de Hornemann, de Brown, de Clapperton, de Lander et de tant d'autres, qui, pour la plupart, ont augmenté la liste déjà si nombreuse des martyrs de la science. Cette association est aujourd'hui fondue

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