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sainte table quelque partie de cet accomplissement? Il n'y a personne qui ne voie combien cette prétention seroit ridicule.

Est-ce donc qu'il n'y a plus aucune partie du mystère de JésusChrist, qui doive s'accomplir après sa mort? Quoi! ce qui avoit été prédit de sa résurrection ne devoit-il pas avoir sa fin, comme ce qui avoit été prédit de sa croix? Notre Pontife ne devoit-il pas entrer au ciel après son sacrifice, comme le pontife de la Loi entroit dans le sanctuaire après le sien? Et l'accomplissement de cette excellente figure, que saint Paul nous a si bien expliquée, ne regardoit-il pas la perfection du sacrifice de Jésus-Christ?

Il se faut donc bien garder d'entendre que toutes les prédictions, toutes les figures anciennes, en un mot tous les mystères de Jésus-Christ soient accomplis précisément par sa mort. Aussi les paroles de Notre-Seigneur ont-elles un autre objet; et lorsqu'un moment avant que de rendre l'ame il a dit : « Tout est consommé, c'est de même que s'il eût dit : Tout ce que j'avois à faire en cette vie mortelle est accompli, et il est temps que je

meure.

Il n'y a qu'à lire le saint Evangile pour y découvrir ce sens. Jésus sachant, dit l'Evangile, que toutes choses étoient accomplies, afin que l'Ecriture fût accomplie, dit : J'ai soif1. » Il vit qu'il falloit encore accomplir cette prédiction du Psalmiste: «< Ils m'ont présenté du fiel pour ma nourriture, et ils m'ont donné du vinaigre à boire dans ma soif?.» Après donc qu'on lui eut présenté ce breuvage amer, qui devoit être le dernier supplice de sa passion, et qu'il en eut goûté pour accomplir la prophétie, saint Jean remarque qu'il dit : « Tout est consommé, et qu'ayant baissé la tête, il rendit l'esprit 3. » C'est-à-dire manifestement qu'il avoit mis fin à tout ce qu'il devoit accomplir dans le cours de sa vie mortelle, et qu'il n'y avoit plus rien désormais qui dût l'empêcher de rendre à Dieu son ame sainte; ce qu'il fit en effet au même moment, comme saint Jean le rapporte : « Il dit : Tout est consommé; et ayant baissé la tête, il rendit l'esprit. >>

On voit donc que cette parole ne doit pas être restreinte en particulier aux figures qui représentent son sacrifice; mais qu'elle 1 Joan., XIX, 28. Psal. LXVIII, 22. — 3 Joan., XIX, 30.

s'étend aux autres choses qui regardent sa personne; et que l'intention de Notre-Seigneur n'est pas de nous dire qu'il accomplit tout par sa mort, mais plutôt de nous faire entendre que tout ce qu'il avoit à faire en ce monde étant accompli, il étoit temps qu'il mourût.

On voit par là un fils très-obéissant et très-fidèle à son Père, qui ayant considéré avec attention tout ce qu'il lui a prescrit pour cette vie dans les Ecritures, l'accomplit de point en point, et ne veut pas survivre un moment à l'entière exécution de ses volontés (a).

Que si toutefois on veut nécessairement que cette parole: << Tout est consommé, » regarde l'accomplissement des sacrifices anciens, nous n'empêcherons pas qu'on ne dise que Jésus-Christ y a mis fin par sa mort, et qu'il sera désormais la seule victime agréable à Dieu mais qu'on ne pense pas pour cela se servir de ce qu'il a accompli à la croix, pour détruire ce qu'il accomplit à la sainte table. Là il a voulu être immolé, ici il lui a plu d'être reçu d'une manière merveilleuse; là il accomplit l'immolation des victimes anciennes, ici il en accomplit la manducation.

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Aussi faut-il à la fin reconnoître cette vérité. Nos adversaires ne peuvent nier qu'il ne faille manger notre victime; et ils croient avoir satisfait à cette obligation, en disant qu'ils la mangent par la foi. C'est leur seconde réponse où ils sont, s'il se peut, encore plus mal fondés que dans la première. Mais écoutons sur quoi ils s'appuient: « Bien loin, dit l'auteur de la Réponse, qu'il faille entendre littéralement tous les rapports » qui sont avec JésusChrist et les victimes anciennes, «nous savons que l'Apôtre oppose partout l'esprit de l'Evangile à la lettre de Moïse; » d'où il conclut qu'il faut que sous l'Evangile les chrétiens prennent tout spirituellement, » et ensuite, qu'ils se contentent d'une manducation spirituelle et par la foi 1.

Mais que ne poussent-ils leur principe dans toute la suite; et pourquoi ne disent-ils pas que Jésus-Christ devoit être immolé, 1 Anon., p. 183.

(a) Note marg. Faire voir la vérité constante des preuves par l'absurdité des réponses plutôt que de suivre les preuves dans toute leur étendue.

non par une mort effective, mais par une mort spirituelle et mystique 1? C'est sans doute que Notre-Seigneur nous a fait voir en mourant aussi réellement qu'il a fait, qu'en tournant tout au mystique et au spirituel on anéantit enfin ses conseils.

Pourquoi nos adversaires ne veulent-ils pas que sans préjudice du sens spirituel, qui accompagne partout les mystères de l'Evangile, il ait pu rendre la manducation de son corps aussi effective que sa mort?? Car il faut apprendre à distinguer l'essence des choses d'avec la manière dont elles sont accomplies. JésusChrist est mort aussi effectivement que les animaux qui ont été immolés en figure de son sacrifice : mais il n'a point été traîné par force à l'autel; c'est une victime obéissante qui va de son bon gré à la mort; il a rendu l'esprit volontairement, et sa mort est autant un effet de puissance que de foiblesse : ce qui ne peut convenir à aucune autre victime. Ainsi il nous donne à manger la chair de ce sacrifice d'une manière divine et surnaturelle, et infiniment différente de celle dont on mangeoit les victimes anciennes : mais, comme il a été dit dans l'Exposition, en relevant la manière et lui ôtant tout ce qu'elle a d'indigne d'un Dieu, il ne nous a rien ôté pour cela de la réalité ni de la substance.

Ainsi quand il a dit ces paroles : « Prenez, mangez; ceci est mon corps, » ce qu'il nous ordonne de prendre, ce qu'il nous présente pour le manger, c'est son propre corps; et son dessein a été de nous le donner non en figure, ni en vertu seulement, mais réellement et en substance. C'est l'intention de ses paroles, et la suite de ses conseils nous oblige à les entendre à la lettre. N'importe que le sens humain s'oppose à cette doctrine : car il faut, malgré ses oppositions, que l'ordre des desseins de Dieu demeure ferme. C'est cet ordre des conseils divins que Jésus-Christ veut nous faire voir en instituant l'Eucharistie; et que de même qu'il a choisi la croix pour y accomplir en lui-même l'immolation des victimes anciennes, il a aussi établi la sainte table pour en accomplir la manducation: si bien que malgré tous les raisonnemens humains la manducation de notre victime doit être aussi réelle à la sainte table, que son immolation a été réelle à la croix. 1 Anon., p. 184. - 2 Ibid. p. 186.

C'est ce qui oblige les catholiques à rejeter le sens figuré pour tourner tout au réel et à l'effectif. Et c'est aussi ce qui force les prétendus réformés à chercher ce réel autant qu'ils peuvent. Car c'est ici qu'on m'objecte «que je me méprends perpétuellement sur ce réel. La manducation, dit l'Anonyme, ou la participation du corps de Jésus-Christ est très-réelle 1. » On a vu plus amplement en un autre lieu combien fortement il s'explique sur cette réalité, et comme il se fâche contre moi quand je dis que notre doctrine mène au réel plus que la sienne : nous en parlerons encore ailleurs; mais il faut en attendant, qu'il nous avoue, que si nous avons réellement dans l'Eucharistie le corps de NotreSeigneur, son objet a été réellement dans ce mystère de nous le donner et ensuite que quand il a dit : « Ceci est mon corps,» il faut entendre: Ceci est mon corps réellement et non en figure, ni en vertu, mais en vérité et en substance.....

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II.

I. La doctrine de l'Eglise catholique sur l'Eucharistie, plus intelligible et plus simple que la doctrine des prétendus réformés. Celle-ci s'accorde avec la raison et les sens, celle-là avec l'Ecriture sainte et les grands principes de la religion. Embarras des hérétiques,

Si on veut porter un jugement droit des choses qui ont été dites sur le sujet de l'Eucharistie, on doit dire que notre doctrine et celle des prétendus réformés ont chacune leurs difficultés. C'est pourquoi s'ils ont peine à entendre nos sentimens, nous n'en avons pas moins à concevoir leur doctrine. Mais on a pu remarquer qu'il y a cette différence entre eux et nous, que comme ils n'ont aucun embarras à accorder leur doctrine avec la raison et les sens, nous n'en avons aucun à accorder la nôtre avec l'Ecriture sainte et avec les grands principes de la religion: tellement que la difficulté qui accompagne notre doctrine vient des raisonnemens humains, au lieu que celle qui est attachée à leurs sentimens vient de l'Ecriture sainte et des grandes maximes du christianisme.

Nous ne nous étonnons en aucune sorte des difficultés qui 1 Anon., p. 185.

naissent des sens, parce que les autres mystères de la religion. nous ont accoutumés à captiver notre entendement sous l'obéissance de la foi, et que d'ailleurs nous voyons que la doctrine des hérétiques a toujours été la plus plausible à examiner les choses selon les principes du raisonnement naturel. C'est pourquoi nous méprisons tout à fait les difficultés qui naissent de ces principes, et nous ne nous attachons qu'à entendre l'Ecriture sainte.

De là suit une autre chose qui nous donne encore un grand avantage; c'est que n'ayant qu'un seul objet, qui est d'entendre cette Ecriture, nos principes sont suivis et nous nous expliquons sans embarras pendant que les prétendus réformés, qui veulent nécessairement concilier la raison humaine avec l'Ecriture, sont contraints de dire des choses contradictoires et se jettent dans des ambiguïtés inexplicables. C'est ce que nous avons déjà fait voir, lorsque nous avons traité des équivoques dont on a embarrassé cette matière. Mais comme nous étions alors plus occupés à faire voir que l'Eglise parloit nettement qu'à montrer les contradictions et les embarras de la doctrine de ses adversaires, il faut tâcher maintenant de les découvrir à fond.

Et afin qu'on entende mieux mon dessein, quand je parlerai d'évidence, on voit bien après les choses que j'ai déjà dites, que je ne prétends pas que notre doctrine soit plus claire aux sens et à la raison que la leur. Au contraire s'ils comptent pour quelque chose de s'y accommoder plus que nous, nous avons déjà déclaré que nous ne leur disputons pas cet avantage. Mais je veux dire que, quelque haute et impénétrable à l'esprit humain que soit la doctrine que nous professons, nous faisons entendre en termes précis ce que nous croyons; au lieu que nos adversaires, dont la doctrine est si facile pour la raison et pour les sens, l'expliquent d'une manière si enveloppée qu'il n'est pas possible de se former une idée suivie de leurs sentimens.

Si je me sers en ce lieu, comme je l'ai fait dans l'Exposition, de l'exemple des anciens hérétiques, que les prétendus réformés détestent, aussi bien que nous, je les conjure de ne pas croire que j'aie dessein de leur faire injure ou de rendre leur foi suspecte: mais certes il me doit être permis de leur faire voir com

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