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tieuse, qui ne soupçonne point le mal ', qu'il dépouille la passion de sa secte, et qu'il nous considère des mêmes yeux desquels il a regardé nos pieux ancètres ; il trouvera sans difficulté que nous sommes encore ici avec eux.

Je m'engage de lui prouver très-évidemment qu'il faut être ignorant de l'antiquité pour croire que la créance que nous professons, touchant la justification du pécheur et le mérite des bonnes œuvres, ait commencé au concile de Trente. La section. suivante lui fera connoître par des témoignages certains, que la doctrine que nous prêchons nous a été enseignée par l'ancienne Eglise, et par ceux des Pères dont l'autorité lui doit être la plus vénérable.

En attendant que je m'acquitte de cette promesse, je le prie d'écouter des auteurs qui ne doivent pas lui être suspects. Ce sont les historiens ecclésiastiques de la Réformation prétendue, qui parlent ainsi de la doctrine du treizième siècle dans la préface de leur treizième centurie: « En ce siècle, disent-ils, cette doctrine évangélique étoit éteinte, que les hommes sont justifiés devant Dieu par la seule foi sans les œuvres. La doctrine des faux prophètes régnoit publiquement, que les bonnes œuvres sont méritoires du salut 2. » Que le ministre remarque en ce lieu que tout ce qu'il reprend en notre créance, ses frères l'ont attribué au treizième siècle. Il ne seroit pas malaisé de montrer que Luther et Calvin et les autres ont parlé de la même sorte des siècles qui les ont précédés; et ainsi c'est en vain que le catéchiste s'efforce à mettre de la différence entre nos ancêtres et nous, puisque ses plus grands docteurs reconnoissent qu'ils avoient les mêmes sentimens que nous professons.

Mais le ministre est d'un autre avis; ses pères disent que dès le xme siècle, la doctrine de la justification étoit pervertie, et par conséquent selon leur principe la confiance en Jésus-Christ ruinée. Au contraire, «< en tous ces siècles, dit le catéchiste, et jusqu'à la fin du xv, non-seulement il étoit permis aux chrétiens de mourir en la confiance d'être sauvés par les seuls mérites de Jésus-Christ, mais même ils y étoient expressément adressés ; » et parlant de la 11 Cor., XIII, 4, 5.— Magdeburg, Hist. eccles., Cent. XIII, in præfat.- 3 P. 92.

Sincère

VI session de Trente, il assure que « la justification par la foi jusqu'alors avoit été conservée pour le salut des mourans1. » Ainsi nos adversaires sont partagés en deux opinions différentes.

Donc ou ces illustres réformateurs ont fait tort à l'innocence de nos ancêtres, ou le ministre lui-même s'abuse quand il attribue aux Pères de Trente l'établissement de notre doctrine touchant la justification des pécheurs et le mérite des bonnes œuvres.

Que s'il veut soutenir ce qu'il a prêché, s'il dit que ce sont ses prédécesseurs qui ont mal pris la pensée des siècles passés, si une imprudente préoccupation les a emportés si loin hors des bornes d'une modération raisonnable; ne doit-il pas avoir une juste crainte que sa vue n'ait été troublée par le même esprit qui les aveugloit, et qu'en déguisant la foi de la sainte Eglise, il ne nous fasse la même injustice qu'il croit que ses premiers maîtres ont faite à nos pères?

Certes quelque estime qu'il ait de notre créance, nous protesprotesta- tons devant Dieu et devant les hommes, que nous espérons uni

tion que

toute quement au Sauveur; que c'est notre seul pacificateur, le seul pérance qui réconcilie le ciel et la terre, le seul qui purge nos consciences

notre es

est en

Jésus

gratuitement par son sang : que quelque bien que nous puissions Christ. faire en ce monde, eussions-nous toutes les vertus qui sont répandues dans tous les ordres des prédestinés, nous ne serons jamais agréés du Père, si nous ne lui sommes présentés au nom de son Fils, si lui-même ne nous présente, si nous ne paroissons revêtus de lui. C'est là notre foi, c'est notre doctrine, nous voulons vivre et mourir en cette espérance.

Pourquoi

une croix

rans se

tradition

C'est pourquoi en consolant les malades, après leur avoir adon donne ministré les saints sacremens, la pieuse tradition de l'Eglise oraux mou- donne qu'on leur mette la croix à la main comme leur sauvelon la garde assurée. Cette sainte cérémonie leur enseigne à se mettre à de l'E- couvert sous la croix contre les terribles jugemens de Dieu justeglise. ment irrité contre nous. Là une conscience effrayée par la multitude de ses péchés respire en la passion du Sauveur. Comme on voit un homme à demi noyé qui se prend de toute sa force à une branche qu'on lui tend de dessus le rivage: ainsi on avertit le vrai

1 P. 108.

tion de

catholi

que aux

agoni

sans pour

appuyer

fiance en

Christ.

'chrétien qu'il tienne fortement ce bois salutaire, de peur que ses iniquités ne l'abîment. Donc en embrassant la croix du Sauveur, que voulons-nous dire autre chose, sinon que battus des flots et de la tempête, menacés d'un naufrage certain par le débris iné- · vitable de notre vaisseau, nous nous jetons avec Jésus-Christ sur cette planche mystérieuse, sur laquelle nous croyons arriver au port de la bienheureuse immortalité. C'est ce que signifie cette croix que nous présentons à nos frères agonisans: et afin de leur relever le courage, nous animons la cérémonie par cette pieuse exhortation : « Mon ami, après que Dieu vous a fait la grace de Exhortarecevoir tous vos sacremens, qui est tout ce que peut désirer le l'Eglise vrai chrétien prêt à partir de ce monde, il ne reste plus qu'à vous résigner du tout entre les bras de sa bonté et miséricorde, sans plus penser à autre chose qu'à la mort et passion de notre Sauveur et Rédempteur Jésus-Christ, de laquelle je vous présente la figure leur conet remembrance, suivant la sainte et louable coutume de notre JésusMère l'Eglise, afin qu'en voyant ce vénérable signal, il vous souvienne de ce qu'il a souffert en l'arbre de la croix pour vous, et de la charité immense qu'il vous a portée jusqu'à l'effusion de la dernière goutte de son très-précieux sang : élevez donc les yeux de l'esprit et méditez ici votre Sauveur, ayant le chef abaissé pour vous baiser, les bras tendus pour vous embrasser, le corps et les membres du tout ensanglantés pour vous racheter et sauver; priez-le en toute humilité et d'ardente affection que son sang ne soit en vain épandu pour vous, et qu'il lui plaise, par le mérite de sa douloureuse mort et passion, vous octroyer pardon de toutes vos fautes, et finalement recevoir votre ame entre ses mains, quand il lui plaira la retirer de ce monde. Ainsi soit-il1. >> C'est ainsi qu'en la dernière agonie, l'Eglise par sa charité maternelle excite les enfans de Dieu et les siens. Elle veut qu'ils appliquent toute leur pensée à Jésus-Christ, à sa mort et à ses souffrances. Pour rassurer leur ame étonnée, elle leur représente ce Jésus-Christ se donnant à eux, se sacrifiant, s'épuisant pour eux: c'est de là qu'elle leur ordonne de tout espérer et en cette vie et

1 Agende de Metz, par feu Monseigneur l'Evêque de Madaure, en l'an 1631,

TOM. XIII.

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Que l'Eglise ca

exige des

mourans

cette sa

confes

n'espè

qu'en

Christ.

:

en l'autre et on ose lui reprocher qu'elle ne laisse pas mourir ses enfans en cette confiance chrétienne en Jésus-Christ seul; quelle injustice! quelle calomnie!

Elle ne se contente pas de les exhorter, elle leur fait professer tholique cette foi; et l'Agende dont nous usons ordonne aux curés d'exifidèles ger des agonisans cette même confession, qui selon le catéchiste a sauvé nos pères en l'an 1543. «Ne croyez-vous pas fermement lutaire que Notre-Seigneur Jésus-Christ a voulu mourir pour vous, et qu'autrement que par sa mort et passion vous ne pouvez être sauvé 1?» On leur fait la même interrogation en leur donnant le rent rien saint sacrement de l'Eucharistie : « Voici, leur dit-on, le vrai Jésus- Agneau de Dieu, qui efface les péchés du monde. Voici votre Sauveur, vrai Dieu et vrai homme, au nom duquel il faut que nous soyons tous sauvés, et sans lequel il ne faut espérer aucun salut, ni en ce monde ni en l'autre. Le croyez-vous ainsi2?» En quoi donc différons-nous de nos pères? Et quelle est l'obstination de nos adversaires, quelle aigreur, quelle animosité les aveugle et les irrite injustement contre nous? Nous leur prêchons, nous leur crions de toutes nos forces, que nous n'espérons rien que par Jésus-Christ, que nous espérons tout par Jésus-Christ : et ils s'opiniâtrent à publier que nous sommes capitalement opposés à cette créance!

C'est ici que le catéchiste répond «qu'il semble que cette demande ne soit ajoutée que par manière d'acquit ou comme par mégarde. » O foiblesse extrême de notre adversaire! Car la charité chrétienne m'empêche d'user d'une censure plus rigoureuse. Recourir à des réponses si vaines, est-ce pas se sentir vaincu et ne l'oser dire? Mais demandons-lui pourquoi il lui semble que ceci est ajouté par mégarde. « C'est, dit-il, parce que cette demande est omise en celles que l'on fait aux Allemands. » Et pourquoi ne dites-vous pas bien plutôt que c'est par mégarde qu'elle y est omise? Quelle personne de sens rassis ne jugera pas que l'on omet par inadvertance, et que l'on ajoute par jugement? Toutefois il vous plaît de dire que ce qu'on ajoute c'est par mégarde, et que ce qu'on oublie c'est par choix. Mais venons à une réponse 1 Agende de Metz, de l'an 1631, p. 70.2 P. 59. — 3 P. 113.

plus décisive. Il est faux que l'Eglise catholique n'exige pas des Allemands la même créance qu'elle fait professer aux Français. Elle sait que l'Evangile ne reconnoît point la différence des nations, si ce n'est pour les assembler en Notre-Seigneur, et pour en faire un même peuple béni par la grace de la nouvelle alliance. Ecoutez comme le pasteur catholique parle aux Allemands en l'Agende dont nous usons, et en laquelle vous nous reprochez que cette pieuse interrogation a été omise. Voici ce que leur dit le curé en leur administrant le saint Viatique.

tion aux

mands, dans l'A

gende de

M. de Ma

daure.

« Il faut croire fermement que vous devez être sauvé par la Exhortacroix et par le sang précieux de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et Allenon point par vos propres mérites qui sont trop petits pour cela1.» Et après « Regardez votre Rédempteur vrai Dieu et vrai homme, au nom duquel seulement nous serons sauvés, et sans lequel il n'y a point de salut à espérer ni en ce monde ni en l'autre. » Que reste-t-il à dire pour vous satisfaire? Est-ce encore par mégarde que nos évêques mettent cette belle exhortation en la bouche des curés d'Allemagne ? C'est bien se défier de sa cause que de vouloir la fortifier par des observations si peu digérées et par des faussetés si visibles.

CHAPITRE VII.

Conclusion et sommaire de tout ce discours.

Eveillez-vous donc, nos chers frères, reconnoissez enfin que l'on vous abuse, et que l'on vous déguise notre doctrine afin de vous la rendre odieuse. Mais admirez que votre ministre dans le temps qu'il déclame le plus contre nous, est tellement pressé en sa conscience par la force toute-puissante de la vérité, qu'il vous montre lui-même dans notre Eglise la sûreté infaillible de votre salut; vous en êtes bien peu soigneux, si vous ne considérez attentivement une vérité de cette importance. Elle vous paroîtra évidente, si vous pesez sérieusement en vous-mêmes les raisons que je vous ai proposées, et que je vous représenterai en peu de paroles pour vous en rafraîchir la mémoire.

1 P. 61.

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